Stigmatisation. Psychologie sociale en 23 fiches, S.Berjot et G. Delelis, Dunod



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CONCEPTION ET MISE EN PAGE : PAUL MILAN 27 juin 2013 à 17:12 Stigmatisation Introduction «Imaginez-vous un soir sortant de discothèque, marchant pour rentrer chez vous. Il est 2 heures du matin et vous devez passer sous un pont. Il fait noir, le tunnel est mal éclairé et vous apercevez quelqu un au loin qui marche vers vous. Cet individu est sur le point de vous croiser : c est un skinhead. Que faites-vous? Vous changez de trottoir ou vous faites demi-tour. Dans tous les cas, il y a de fortes chances que vous ayez peur. Pourquoi? Parce que vous avez utilisé un stéréotype, c est-à-dire une image à propos d un groupe social. Dans ce cas précis, le stéréotype que vous avez des skinheads vous indique que ces personnes sont en général des gens violents, agressifs et imprévisibles. Votre réaction est donc de vous en éloigner et, dans ce cas précis, vous avez peut-être bien raison. Si vous aviez croisé, non pas un skinhead, mais une vieille dame avec un cabas, vous n auriez sûrement pas réagi de la même façon. Auriez-vous eu raison?». Psychologie sociale en 23 fiches, S.Berjot et G. Delelis, Dunod 1 Définitions Une représentation est une construction mentale d un objet, de la réalité perçue. Le terme "social" renvoie au groupe social, c est-à-dire à l idée du groupe restreint ou sous-groupe structuré autour de motivations et d attentes spécifiques. Un groupe n est pas une collection d individus disjoints. Les représentations sociales sont des constructions mentales de la réalité. Toute personne construit ses représentations qui lui permettent de lire, d appréhender et d interpréter, le réel. La plupart du temps, les représentations sociales témoignent d une perception réductrice ou restrictive de la réalité. Elles sont souvent associées à des préjugés, des stéreotypes ou des jugements de valeur qui circulent dans l opinion. Les rumeurs transmettent des informations non vérifiables directement et progressivement déformées. Elles traduisent et répondent à un climat de peur individuelle ou sociale. Les stéréotypes, résultant de facteurs multiples, traduisent la tendance à accentuer les ressemblances perçues entre individus appartenant au même groupe. Leur usage risque de conduire à la discrimination. La discrimination traduit la présence de préjugés et de stéréotypes négatifs Stéréotype : idée ou image populaire et caricaturale que l on se fait d une personne ou d un groupe, en se basant sur une simplification abusive de traits de caractère réels ou supposés. A l origine, c est-à-dire depuis la fin du XVIII e siècle, le terme stéréotype est réservé aux imprimeurs et désigne un coulage dans une empreinte servant à la création d un cliché typographique. En 1922, Lippman emprunte cette notion et par analogie, s en sert pour décrire les images dans notre tête. Ces images sont OLIVIER MOREAU 1 ÉCONOMIE PREMIÈRE ES

1 DÉFINITIONS conçues comme des croyances rigides et stables concernant les groupes sociaux et servant à filtrer afin d en faciliter le traitement. Les stéréotypes sont généralement partagés en ce sens qu ils sont véhiculés et entretenus par l environnement social (famille, amis, médias...). Lippman, journalite américain, dégage plusieurs caractéristiques des stéréotypes : Ce sont des idées consensuelles, c est-à-dire, socialement partagées. Ils sont rigides, c est-à-dire, qu ils résistent à la preuve du contraire. Ce sont des généralisations excessives. Ils sont faux ou mal fondés. Les stéréotypes peuvent être positifs (les Noirs sont bons au basket) ou négatifs (les femmes conduisent mal), mais la plupart servent d une façon ou d une autre à affirmer une supériorité face à une personne ou un groupe concernés. Ils ignorent le caractère unique de tout être humain en l assimilant sans nuances à un groupe donné. Ils sont sensibles à l évolution des rapports entre les groupes. C est le cas, par exemple, pour les groupes qui ont été en conflit avec les Américains : L Allemand est travailleur au début des années 1930, pour ne plus l être ensuite et le redevenir dans les années 1960 ; le Japonais est beaucoup plus rusé avant la guerre qu après. Parmi les stéréotypes les plus fréquents, on peut mentionner les stéréotypes : Sexuels. Axés sur l activité sexuelle, les organes sexuels, les pratiques sexuelles. Sexistes. Axés sur l appartenance au genre féminin et masculin. Les femmes ne savent pas conduire, les hommes sont machos. Physiques : les gros sont joviaux, les brunes ont sale caractère. Nationaux et raciaux. Les Corses sont fainéants, les Russes sont portés sur la bouteille, les femmes occidentales sont dépravées. Professionnels. Les garagistes sont des voleurs, les policiers sont des pourris, les coiffeurs sont homosexuels, les fonctionnaires sont des "glandeurs". L usage du stéréotype revient à économiser la réflexion, car il est basé sur des a priori. Ainsi l image que le stéréotype donne du sujet tient de la réputation de ce dernier et non de faits avérés et prouvés. Le stéréotype relève souvent d une prise de position simpliste et très conventionnelle qui repose sur des "on dit". Ceux qui véhiculent les stéréotypes partent souvent du principe qu "il n y a pas de fumée sans feu" ; autrement dit qu un stéréotype correspond nécessairement en tout ou partie à la réalité. Ce mode de raisonnement permet à la fois de faire l économie d un discours argumenté et de critiquer ce que l on ne connaît pas. Un préjugé désigne une attitude négative à l égard d un groupe auquel nous n appartenons pas. Un préjugé comporte une composante cognitive (un stéréotype attribuant des caractéristiques négatives aux membres du groupe), une composante affective (des sentiments défavorables) et une composante comportementale (des comportements discriminatoires). Les préjugés présupposent obligatoirement l existence de stéréotypes. Cependant on peut avoir des stéréotypes qui ne se traduisent pas en préjugés. Un stéréotype est composé de connaissances générales concernant les attributs de la catégorie, ses comportements, ses caractéristiques physiques, des traits de personnalité. Lorsque nous pensons aux personnes âgées, des éléments viennent à l esprit. Une personne âgée se déplace lentement et avec difficulté, elle est ridée, rabougrie, a des cheveux blancs ou est chauve, elle a des problèmes de mémoire, est pingre et ronchon. Le terme de discrimination correspond à un comportement négatif non justifiable produit à l encontre des membres d un groupe donné. C est donc un passage à OLIVIER MOREAU 2 ÉCONOMIE PREMIÈRE ES

2 EXPLICATIONS l acte. Si la discrimination se nourrit de préjugés, elle n en résulte pas automatiquement. Les normes, les valeurs, notre contrôle personnel nous permettent de ne pas agir systématiquement sur la base de nos préjugés dans toutes les situations. Stéréotypes = croyances. Les blondes sont idiotes. Préjugés = attitudes à l égard d un groupe social donné. Ne pas aimer les extra terrestres sans pour autant les connaître. Discrimination = comportement. Ne pas embaucher quelqu un parce qu il a plus de 50 ans. 2 Explications Certaines sont intra-individuelles, d autres intergroupes ou idéologiques. A Intra-individuelles Certains auteurs ont cherché à déterminer si des différences en termes de personnalité pouvaient expliquer le recours plus ou moins fréquent aux préjugés et aux stéréotypes. Ces derniers seraient des symptômes de conflits psychiques internes à l individu. Ainsi, selon la théorie de la personnalité autoritaire (Theodor Adorno, 1903-1969), les personnes ayant reçu dans leur enfance une éducation stricte et sévère projettent l hostilité qu ils ressentent à l égard de leurs parents sur des groupes jugés indésirables qui jouent alors le rôle de boucs émissaires. Ce type d éducation induirait à la fois une idéalisation de l autorité sous toutes ses formes (l Etat, le père de famille, le chef d entreprise...) et en même temps une ambivalence profonde contre cette autorité, révolte inconsciente contre l autorité qui sera détournée contre des groupes plus faibles. Juif allemand réfugié aux États-Unis, il voulait comprendre les motifs psychologiques qui poussent une partie de la population à adhérer à des thèses racistes et fascistes. Les personnalités autoritaires ont tendance à considérer les groupes ethniques avec des préjugés racistes, ont des opinions fermes et une pensée rigide. B Interindividuelles (approche socio-culturelle) L éducation parentale et scolaire est la source de nombreux phénomènes discriminatoires. Il est frappant de constater que les jeunes enfants n ont pas d a priori envers les autres enfants. Peu importent les différences, qu il s agisse de la couleur de la peau ou... Cet état de fait change de manière très précoce puisque dés l âge de 3-4 ans, les enfants ont conscience des différences ethniques et dés 5-6 ans, ils disposent d une connaissance des stéréotypes raciaux. C est également vers 3-4 ans que les enfants acquièrent les connaissances des stéréotypes relatifs aux rôles sexués. De la même façcon que nous apprenons les normes de notre société et ses valeurs, nous apprenons aussi les préjugés et les stéréotypes. C Intergroupes Une première source des stéréotypes, mais aussi des préjugés et de discriminations peut être trouvée dans les événements passés dans l histoire. Ceci concerne OLIVIER MOREAU 3 ÉCONOMIE PREMIÈRE ES

3 LES EFFETS DES STÉRÉOTYPES ET DES PRÉJUGÉS à la fois l histoire des Nations (rivalité France/Angleterre ; méfiance persistante des Français envers les Allemands...), mais aussi dans l histoire personnelle des individus (rencontres avec les membres des autres groupes...). Les chercheurs font l hypothèse que les stéréotypes résultent de conflits d intérêts et de la compétition qui en découle. Cependant le seul sentiment d appartenir à une catégorie suffit à créer une différenciation en faveur du groupe d appartenance. Deux théories renvoient aux explications intergroupes : la théorie du bouc émissaire et la théorie des conflits réels. La théorie du bouc émissaire : toute frustration entraîne des réactions agressives envers les personnes qui en sont responsables. Mais lorsque les frustrations s accumulent et que l agression ne peut être exprimée vers sa source, alors un bouc émissaire peut devenir la cible des préjugés, des réactions hostiles et de l agression. Cette théorie permet, par exemple, d expliquer pourquoi en période de crise économique, on observe en général une résurgence des préjugés et de la discrimination à l égard des travailleurs immigrés. Les frustrations sont de nature subjective et se produisent dans la mesure où un but fortement désiré ne peut être atteint et où la privation est mal vécue : les individus sont frustrés de ne pas obtenir ce à quoi ils pensent avoir légitimement droit. C est sur la base de ce constat que la théorie frustration/agression a été formulée (je réclame à mon employeur une augmentation qu il me refuse et donc...). La théorie des conflits réels : C est la compétition pour l acquisition ou le contrôle des ressources naturelles et/ou économiques rares qui serait à l origine des conflits intergroupes. En règle générale, le conflit intergroupe conduit à une augmentation de la cohésion intragroupe et de la différenciation intergroupes. Le conflit intergroupe favorise les actes agressifs et la discrimination. D Idéologiques Dans toute société, on retrouve l idée d une hiérarchie entre les groupes sociaux. Les groupes dominants développeraient des idéologies afin de légitimer les inégalités et de maintenir leur statut. Ces idéologies sont nommées " mythes légitimisateurs ".Il existe des mythes qui accentuent la hiérarchie sociale (racisme, sexisme, nationalisme...) et des mythes qui atténuent cette même hiérarchie sociale (universalisme, multiculturalisme, socialisme...). 3 Les effets des stéréotypes et des préjugés Ils permettent de simplifier et d organiser la réalité sociale. Ils ont une triple fonction : explicative : il a fait cela parce que c est un... anticipatrice : il va me voler parce que... justificatrice : je ne lui fais pas confiance parce que... A Les effets envers autrui La discrimination se manifeste à différents degrés et sous différentes formes, allant du comportement non verbal (regard biaisé, maintien de distance, évitement) OLIVIER MOREAU 4 ÉCONOMIE PREMIÈRE ES

4 COMMENT LUTTER CONTRE...? à la mise à l écart ou à l exclusion, en passant par les insultes, voire les atteintes physiques à la personne. Il est difficile de mesurer la discrimination. En effet faire preuve de discrimination constitue une conduite qui est socialement non désirable et est en France réprimée par la loi du 16 novembre 2001. De ce fait, la mesure de comportements discriminatoires nécessite l utilisation de mesures indirectes, ou tout au moins, que la personne ne soit pas consciente que son comportement fait l objet d une évaluation (procédures dites de testing reconnues désormais par les tribunaux). Testing est un anglicisme visant à désigner un moyen d investigation. Le testing désigne une pratique surtout utilisée par les associations anti-racistes telles que S.O.S Racisme pour mettre en évidence une discrimination. Les préjugés ne se traduisent pas toujours en actes discriminatoires. Le lien attitude/comportement dépend de la force des convictions personnelles, du contexte... L une des fonctions du stéréotype est de nous aider à comprendre notre environnement et de pouvoir rapidement formuler des prédictions. Sur la base des stéréotypes, des attentes associées à des catégories de personnes dans un contexte identique aboutissent à des jugements très différents. Ceci explique pourquoi un groupe de jeunes flânant dans le rayon des spiritueux d un supermarché en examinant les bouteilles de près sera probablement sujet à la suspicion du service de sécurité de l établissement. Pourtant, le même comportement paraîtra normal pour un même groupe composé de personnes âgées. Dans le premier cas, l attente stéréotypique sera celle d une tentative de vol, dans le second, il s agira davantage de l expression d une expertise œnologique. Les stéréotypes guident les processus attentionnels : on cherche chez autrui ce que l on s attent à y trouver. B Les effets sur soi Quelles sont les conséquences personnelles liées au fait de se savoir appartenir à un groupe envers lequel il existe de forts stéréotypes et préjugés? Que se passet-il lorsque l on est victime de discriminations? Le fait d être stigmatisé a un impact sur le plan émotionnel et sur l estime de soi. Les préjugés et la discrimination constituent une atteinte de l identité sociale, qui, ainsi dévalorisée, peut aboutir à une diminution de l estime de soi. Les personnes victimes de discrimination présentent un sentiment d injustice, des affects (états affectifs en psychologie) négatifs (honte, tristesse), plus de stress et d anxiété. Dans certains cas, les membres des groupes stéréotypés vont eux-mêmes se conformer, de manière non consciente, aux attentes stéréotypées qu autrui entretient à leur égard. On parle alors de prophéties autoréalisatrices. 4 Comment lutter contre...? Une "haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l égalité" (Halde, devenue DDD Défenseur des droits) a été instituée par la loi du 30 décembre 2004. Le code pénal prévoit l aggravation des peines pour certains actes délictueux, comme des violences physiques, lorsque le mobile est raciste ou homophobe. La loi du 3 février 2003 punit plus sévèrement une agression raciste ; celle du 18 mars une agression homophobe. OLIVIER MOREAU 5 ÉCONOMIE PREMIÈRE ES

4 COMMENT LUTTER CONTRE...? Le partage plus équitable des ressources dans la société constituerait la mesure la plus efficace pour atténuer les conflits entre les différents groupes sociaux, les préjugés. Cependant le simple fait de catégoriser notre environnement social en " nous/eux " suffirait à déclencher des préjugés. L hypothèse du contact intergroupe : le contact nous permet de mieux connaître et comprendre les autres. Les campagnes éducatives à l initiative du gouvernement ou d ONG considèrent que la méconnaissance ou l ignorance de l autre est à l origine des préjugés. OLIVIER MOREAU 6 ÉCONOMIE PREMIÈRE ES