Article. «Que vaut notre architecture? Inventaire et évaluation» François Rémillard. Liberté, vol. 29, n 5, (173) 1987, p. 100-103.



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Article «Que vaut notre architecture? Inventaire et évaluation» François Rémillard Liberté, vol. 29, n 5, (173) 1987, p. 100-103. Pour citer cet article, utiliser l'information suivante : http://id.erudit.org/iderudit/31191ac Note : les règles d'écriture des références bibliographiques peuvent varier selon les différents domaines du savoir. Ce document est protégé par la loi sur le droit d'auteur. L'utilisation des services d'érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d'utilisation que vous pouvez consulter à l'uri https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l'université de Montréal, l'université Laval et l'université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. Érudit offre des services d'édition numérique de documents scientifiques depuis 1998. Pour communiquer avec les responsables d'érudit : info@erudit.org Document téléchargé le 10 February 2016 07:02

100 FRANÇOIS REMILLARD Que vaut notre architecture? Inventaire et évaluation La controverse autour de l'agrandissement du musée des Beaux-Arts de Montréal, rue Sherbrooke, a fait ressortir un fait important. Nous n'avons pas à Montréal de bases solides pour évaluer l'intérêt architectural d'un bâtiment. Dans le cas qui nous intéresse, il s'agissait de décider si oui ou non l'ancienne conciergerie New Sherbrooke, qui se trouve sur le site convoité par le musée, possède une valeur architecturale certaine. Une réponse claire aurait permis de décider rapidement du sort du bâtiment que certains voulaient voir disparaître et que d'autres voulaient conserver à tout prix. Bien sûr, les premiers déclarent que c'est un bâtiment médiocre, alors que les seconds y voient à divers degrés un élément qui mérite d'être préservé. La décision de conserver ou de démolir fut doublement difficile à prendre puisque les avis exprimés lors des consultations publiques sur le sujet l'ont été par des partisans intéressés, de l'une ou l'autre option. Cet exemple, comme bien d'autres, nous amène à nous poser les questions suivantes. Que vaut notre architecture? Quelle valeur architecturale a le bâtiment X? L'inventaire architectural complet d'un territoire donné, selon des critères standardisés, apparaît comme le meilleur outil pour éliminer la confusion quant à la valeur architecturale des bâtiments ou des ensembles de bâtiments. Pour être efficace toutefois, cette compilation de données doit être suivie d'une étape de comparaisons et de pointage. En comparant, selon des critères précis mais ouverts, toutes les constructions d'un quartier ou d'une ville, il est plus facile de juger de l'importance de celles-ci que lorsque l'on a pour champ d'évaluation les seules propriétés d'un promoteur.

101 Cet inventaire peut éventuellement être assorti de mesures de protection réparties en paliers selon les pointages obtenus. De plus, on peut conclure au dossier de chaque bâtiment ayant un pointage suffisant, une liste d'améliorations qu'il serait intéressant de faire lors d'une rénovation éventuelle, cette liste devant servir à la municipalité lorsqu'elle sera appellee à émettre un permis de rénovation. Nombreux sont les citoyens des villes du Québec, et de Montréal en particulier, qui croient à tort que les bâtiments classés ou reconnus par le Ministère des Affaires culturelles ou par les municipalités sont les seuls à avoir une grande valeur architecturale et qu'ils ont été classés à la suite d'un processus semblable à celui exposé ci-haut. En réalité, la plupart des bâtiments classés l'ont été à la suite de pressions sur les gouvernements. Ces pressions sont survenues au moment où une menace de démolition imminente, accompagnée d'un battage publicitaire important, soulevaient de grosses vagues. Il y a bien eu les classements rattachés à l'exaltation nationaliste, mais ceux-ci se concentrent surtout en milieu rural, dans certaines régions comme la vallée du Richelieu ou l'île d'orléans. Donc, si un bâtiment n'a pas déjà été menacé de démolition ou si aucun groupe de préservation du patrimoine n'a eu l'occasion d'alerter l'opinion publique à temps, ou encore si ce bâtiment est de construction trop récente, il y a fort peu de chance qu'il ait été classé. Somme toute, il n'y a pas le dixième de nos bâtiments ayant une grande valeur architecturale qui soient identifiés comme tels. Mais il ne faut pas s'arrêter là. Pour connaître la valeur de notre architecture, nous devons aussi examiner les bâtiments que l'on construit présentement ou que l'on prévoit ériger au cours des prochaines années. Il faut voir si nos exigences sont suffisantes. Il est important de développer notre sens critique et comparer nos projets avec ceux des autres villes, des autres régions. Il faut s'assurer de la qualité des projets afin d'éviter les erreurs passées. Le développement fulgurant que connaît le centre-ville de Montréal présentement nous permet de faire école. Le promeneur du dimanche, autant que l'homme ou la femme d'affaires qui, du haut de sa tour, a une vue imprenable sur les chantiers, peuvent,

102 s'ils sont correctement initiés par les médias, apprendre à distinguer l'ivraie du bon grain. Déjà, les commentaires fusent au sujet des grillages de ventilation de la Maison des Coopérants, derrière la cathédrale Christ-Church. Cet élément, en plus de ne pas respecter le projet original, donne l'impression d'un gros climatiseur d'inspiration néo-gothique, installé au fond de la vénérable église anglicane de 1857. La Place Montréal Trust n'est pas en reste avec sa «boîte à souliers» posée sur la portion sud du complexe. Dans ce cas, toutefois, les opinions sont partagées entre les admirateurs de la tour du projet et ceux pour qui la base de l'ensemble est un fiasco total. D'autres projets, par contre, inspirent des commentaires plus favorables. Le Centre Eaton, qui doit bientôt remplacer Les Terrasses, le Centre canadien d'architecture, sur le boulevard Dorchester, et Le Windsor, dans l'ancien hôtel du même nom, sont de ceux-là. Au Québec, la qualité architecturale semble avoir échappé à la collectivité. Encore aujourd'hui, elle dépend essentiellement du bon vouloir et des goûts personnels du promoteur et de son architecte. La mise sur pied de comités municipaux de révision des projets, de même que la diffusion d'informations pertinentes dans les journaux et à la télévision, qu'elles soient objectives ou subjectives, figurent parmi les moyens à prendre pour mieux jauger et contrôler la valeur de notre architecture.

(Place Montréal Trust ) 103