Mais, avant de nous lancer dans cette entreprise, clarifions les termes et le cadre.



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Le topos : un hypertexte, un système de gestion de bases de données relationnel ou un objet singulier? Extrait du mémoire de master Heuristique du Récit Variable et du Topos Université Paris 8 2006 Carole Lipsyc Une heuristique implique une découverte. Affirmer qu il existe une «heuristique du topos et du récit variable» signifie par conséquent que ces deux objets documentaires sont si ce n est nouveaux du moins singuliers. Le topos et le récit variable sontils différents de l objet documentaire de référence : l hypertexte? Et si oui, de quelle manière? La comparaison ne doit d ailleurs pas se limiter à l hypertexte car un topos, fonctionnant avec une base de données et avec des liens, doit également être confronté aux Systèmes de Gestions de Bases de Données Relationnels (SGBDR). Pour mener cette comparaison, nous nous appuierons, d une part, sur les différents éléments constitutifs du topos et du récit variable que nous avons pu définir et, d autre part, sur les éléments constitutifs de l hypertexte et des bases de données gérées par système relationnel (BDR). Mais, avant de nous lancer dans cette entreprise, clarifions les termes et le cadre. En effet, comme le souligne Jean Clément, l hypertexte, «néologisme forgé par Nelson», «souffre aujourd hui d une trop grande polysémie»1 : document électronique interactif composé de «blocs» et de «liens», structure réticulaire exportable sur d autres supports, information globale et universelle réunissant toutes les connaissances dans un docuverse, «hypertexte neuronal» de notre esprit, ou «hypertexte énergétique d inscription sur la matière»2, etc. L hypertexte a littéralement dilaté la notion de «texte» jusqu à l hyper, jusqu à l excès, occasionnant une déformation qui surpasse même celle du texte considéré comme un «tissu polysémiotique», une déformation tautologique. Retour en force du mythe unificateur où, non seulement tous les signes et tous les régimes sémiotiques fusionnent dans le codage numérique, mais où chaque grain de réel et de matière devient information pour se fondre dans l unicité d une hypertextualité noosphérique. L hypertexte remplace l omniscience et le réseau hypertextuel remplace la communion. Nous faisons ainsi face à un horizon totalisant dans lequel il est impossible et inutile de mener une comparaison : «l hypertexte au sens large» avale tout type de savoir et de document, et en premier lieu les documents régis par une structure réticulaire, comme le topos. 1 CLEMENT Jean, (1995). Du texte à l'hypertexte : vers une épistémologie de la discursivité hypertextuelle. In Hypertextes et hypermédia : Réalisations, Outils, Méthodes. Paris : Hermès. Disponible sur : http://hypermedia.univ-paris8.fr/jean/articles/discursivite.htm 2 BALTZ Claude (2003). In-Formation. Hypertextes et hypermédias. Créer du sens à l ère numérique. H 2 PTM 03. Sous la coordination de J-P. Balpe, I. Saleh, D. Lepage, F. Papy. p. 363-377. Paris : Lavoisier

Il est donc nécessaire pour mener à bien notre tentative de comparaison entre l hypertexte (HT), le topos (θ) et les bases de données gérées par système relationnel (BDR) de circonscrire la vision de l hypertexte au champ de la gestion du contenu. Nous partirons donc des trois définitions suivantes : TOPOS : un ensemble d éléments (les tesselles), formant un concept unifié d idées et de données, géré par informatique, circonscrit par son argument, structuré et modélisé à priori, possédant une architecture multi-réticulaire, apte à l actualisation variable, interactive ou ergodique, multi-supports. HYPERTEXTE : un ensemble non structuré à priori d éléments (les nœuds), reliés les aux autres, formant un concept unifié d idées et de données, géré par informatique, en vue d une actualisation sur un écran. 3 BDR : un ensemble de données, géré par informatique, modélisé et structuré à priori pour produire de l information et pour éliminer les redondances par mise en relation des tables. En réunissant les différentes caractéristiques relatives à ces trois systèmes, nous pouvons aboutir aux tableaux comparatifs suivants : COMMUN AUX TROIS OBJETS INFORMATIONNELS Dispositif informatique (1) interactif (2) de X X X stockage (3), de gestion (4) et d accès (5) à l information non linéaire (6) et discontinue (7) en vue d actualisations variables (8) Technologie intellectuelle (9) X X X Intègre le discours réflexif (10) X X X Le «document construit» n existe pas en tant que tel avant l actualisation/réalisation 4 (11) X X X 3 D après J. Clément (1995) et T.H. Nelson cité dans l article. Cette définition affine celle donnée dans l introduction de la deuxième partie (II.2, «La notion de modèle»). Elle élargit l hypertexte du web à l électronique en général, le précise comme concept unifié et introduit le principe métonymique. 4 Cf. une première approche de la virtualité définie en II.5 en opposition aux documents arborescents.

COMMUN TOPOS /HYPERTEXTE Constitue un métadocument, une entité conceptuelle (1) X X Facultatif-non structurel Génération d un espace (2) en reconfiguration X X Non par l action de l usager (3) Technologie énonciative (4) X X Non Instrument de complexification : croissance X X Non par liaisons (5) Instrument de simplification intuitive : X X Non mouvement et sérendipité (6) Réseaux sémantiques souterrains (7) X X Non S actualise en nœuds (8) X X Non Technologie énonciative = technologie dont l objectif est la production d une énonciation quel que soit le régime sémiotique (texte, discours, multimédia, audiovisuel etc.) COMMUN TOPOS/BDR Instrument de facilitation d extraction de X Non X l information (1) Structuration préalable (2) X Non X Procédures de structuration à partir des X Non X applications (3)et des usages (4) Modélisation préalable (5) X Non X Procédure de modélisation à partir des X Non X attributs (6) et des catégories (7) Structuration = définition des attributs Modélisation = définition des structures, relations et fonctions en vue de la constitution et de l évolution de l information TOPOS SEULEMENT Maillage structurel (1) X Non Non Actualisations multi-supports (2) X Facultatif Facultatif Procédure de structuration à partir d un X Non Non argument (3) et de dispositios (4) Procédure de modélisation à partir d un X Non Non argument (5), de dispositios (6), d un maillage structurel (7), de réseaux sémantiques souterrains (8) Multi-réticulaire (9) X Facultatif Non Formalisation (10) X Non Non Croît et se réalise en rézodunes (11) X Non Non Formalisation = recherche d invariants permettant l expansion

HYPERTEXTE SEULEMENT Hyperliens avec ancre : métonymie (1) Facultatif X Facultatif Tient par ses Nœuds (2) Non X Non BDR SEULEMENT Instrument de formatage des données (1) Non : une Non X donnée appartient ou n appartient pas au θ Procédure de structuration à partir d une hiérarchisation et de mots-clés (2) Non Non X 41 caractéristiques ont donc été définies au total parmi lesquelles : - 11 sont communes aux trois objets, - 8 sont communes seulement au topos et à l Hypertexte, - 7 sont communes seulement au topos et aux BDR, - aucune ne sont uniquement communes à l Hypertexte et aux BDR, - 11 sont exclusives du topos, - 2 sont exclusives de l Hypertexte, - 2 sont exclusives des BDR. Toutefois, il importe de souligner que le nombre ne fait pas la qualité : toutes les caractéristiques ne possèdent pas la même capacité différentielle. Il est surtout intéressant de noter les traits véritablement distinctifs : l hypertexte semble se distinguer par son absence de structuration et de modélisation à priori et par sa constitution métonymique en nœuds et ancres ; les bases de données gérées par système relationnel présentent la particularité d avoir pour objectif unique la facilitation et la simplification de l accès à l information. Elles cherchent donc à hiérarchiser, uniformiser et catégoriser par mots-clés. Elles ne constituent pas une technologie énonciative ; le topos se singularise par son maillage structurel, sa vocation à s actualiser sur tous les supports, son architecture résolument multiréticulaire et ses modes non hiérarchique ni formateurs de modélisation et de structuration.

Ces différences se répercutent dans les processus de virtualisation de chacun de ces trois objets. Nous avons vu, en effet, que le topos possédait trois faces : le document virtuel, le document actuel et le document réel. Qu en est-il de l hypertexte des bases de données gérées par système relationnel? Suivent-ils le même déploiement tripartite? Ou bien faut-il imputer cette modalité de réalisation du virtuel aux caractéristiques qui singularisent le topos? Pour nous aider dans notre réflexion, nous pourrions assimiler le processus d actualisation/réalisation d un document virtuel, au processus qui transforme une donnée brute en information. Nous pourrions en déduire les équivalences suivantes : Document virtuel = matière documentaire brute + puissance de production d information due au traitement assigné à la matière documentaire Document actuel = matière documentaire sélectionnée et mise en forme en attente d interprétation informationnelle Document réel = information produite par interprétation Document virtuel Matière brute traitée et structurée pour des requêtes Document actuel Niveau 1 de requête extraction en dispositio Topos Oui Oui préparation par dispositios Hypertexte Non : pas de matière Oui l hypertexte est une brute structurée au dispositio préalable BDR Oui Non : les BDR ont pour objectif de simplifier et de faciliter la production de l information, pas de la soumettre à interprétation Document réel Niveau 2 de requête production de l information par interactivité Réalisation par le choix de l usager Oui Oui

L hypertexte opère un glissement de la virtualité d une position. Il provoque la fusion du virtuel et de l actuel. Les bases de données gérées par système relationnel opèrent un glissement de l actualisation d une position. Elles provoquent la fusion de l actuel et du réel. Seul le topos déploie la réalisation du virtuel en trois moments. Modalités de virtualité différentes qui redéfinissent la problématique soulevée par Jean Clément dans son article sur Fiction interactive et modernité : «Le fait d envisager l œuvre littéraire dans une perspective topologique pose la question de son existence même : ou bien il (le texte) n existe pleinement en tant que texte que lorsqu il est actualisé par le parcours particulier qu en fait un lecteur donné, à un moment donné, ou bien il faut considérer qu il peut exister aussi sur un mode virtuel et qu il se définit par la somme de ses lectures potentielles». Affirmation qui s applique à la virtualité de l hypertexte. Mais, ramenée à la virtualité du topos, il faudrait la transformer de la façon suivante : «Le fait d envisager l œuvre littéraire dans une perspective topologique pose la question de son existence même : ou bien il (le texte) n existe pleinement en tant que texte que lorsqu il est réalisé par le parcours particulier qu en fait un lecteur donné, à un moment donné, ou bien il existe en tant que dispositio ergodique et interactive actualisée par un éditeur, ou bien il faut considérer qu il peut exister aussi sur un mode virtuel et qu il se définit par la somme de ses dispositios potentielles et de ses lectures potentielles». En revanche, cette affirmation ne peut pas être déclinée pour les bases de données gérées par système relationnel car, nous l avons vu, ces dernières ne s inscrivent pas dans une perspective topologique : l usager n y circule pas au travers de liens et n y circulant pas, il ne génère pas d espace. Les modalités virtuelles de chacun de ces trois objets informationnelles dépendent donc de leurs caractéristiques singulière, caractéristiques elles-mêmes liées à leurs objectifs. En effet, une base de données gérée par système relationnel est généralement résolument orientée action, communication ou management. Elle est tournée vers l efficacité et la simplification. L hypertexte, lui, a pour objectif de mettre en relation l information, de lui permettre de s étendre dans sa nature associative et globale. Quant au topos, il a été créé pour palier l extrême simplification orientée usage d une part, et à l uniformisation orientée processus d autre part. En effet, il faudrait ajouter trois points cruciaux au cahier des charges qui a généré le topos. Trois points qui ne sont pas issus des ur-texts mais de lectures sur l hypertexte :

«Il n y a pas, il n a jamais eu nulle part aucun peuple sans récit. Le récit est pour nous ce qui dénoue la complexité du monde et la remet en ordre.» Clément (2000) «Il n est pas certain que l hypertexte littéraire, genre à peine émergeant, ne s y dissolve pas au profit d une fiction hypermédia en gestation et qui pourrait bien figurer le nouveau paradigme de l œuvre totale dont nombre d écrivains n on cessé de rêver.» Clément (1994) «l hypertexte, en effet, est d abord apparu comme une tentative de déconstruction du texte.» Clément (La question du lien) Ces trois points mettaient en exergue les points faibles de l hypertexte littéraire et ouvraient des perspectives de création. Le récit variable a été conçu pour pallier à ces trois points : pour réintroduire le récit au travers de l argument, pour offrir au texte une solution informatique qui le préserve et le mette en valeur, pour préserver le texte dans de nouvelles structures et non pas pour le déconstruire. L heuristique du récit variable et du topos a donc veillé dès sa genèse à singulariser fondamentalement le topos de l hypertexte. Cette heuristique est loin d être achevée puisqu il s agit désormais, comme nous avons pu le voir au travers de ce mémoire : de puiser dans les sources classiques de la rhétorique et des arts de la mémoire, des structures invariantes qui permettront de créer des bibliothèques d attributs et de dispositios ; d affiner la définition des situations en œuvre dans la création de topos pour améliorer l instrument topos et la méthodologie de construction des topoï ; d explorer les problématiques philosophique de la génération de l espace par le parcours de l usager, d une part, et des processus d actualisation/réalisation d autre part ; de pousser plus en avant les questions épistémologiques et éthiques (voir métaphysiques) liées à la définition du texte, de l hypertexte et du topos : matérialité/immatérialité ; configuration hypertextualisante du savoir humain horizontal (à une époque donnée) et vertical (au travers de l histoire). Ces horizons de travail et de recherche viendront sans nul doute stimuler l écriture littéraire, la création d événements et le développement informatique. Une méthodologie de recherche qui continuera de s appuyer sur la création artistique, et une création artistique qui ne pourra se développer qu en parallèle à la recherche : heurisitique créative ou création heuristique. Les deux propositions se complètent dans la poursuite d un même et unique but : écrire. Ecrire des textes.