Le nouveau régime de financement des soins



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Transcription:

Le nouveau régime de financement des soins Dossier préparé par: Béatrice Despland Mars 2011 Avertissement: Le contenu des «dossiers du mois» de l ARTIAS n engage que leurs auteur-es 6 1 ARTIAS - Rue des Pêcheurs 8-1400 Yverdon-les-Bains - Tél. 024 557 20 66 - Fax 024 557 20 67 - info@artias.ch - CCP 10-2156-5 - www.artias.ch - www.guidesocial.ch

R E S U M E Le 1er janvier 2011, une révision partielle de la loi fédérale sur l assurance-maladie (LAMal) est entrée en vigueur. Elle a pour objet un nouveau mode de financement des soins dispensés à domicile et en EMS. Les nouvelles dispositions de la LAMal, et les révisions partielles concernant la LAVS et la LPC (prestations complémentaires) permettent-elles de régler la question de la prise en charge de la dépendance de manière satisfaisante? La réponse est, à tout le moins, nuancée. En tout état de cause, le nouveau régime de financement des soins marque un tournant vers une accentuation de la responsabilité individuelle en matière de soins de longue durée, particulièrement à l âge avancé. R I A S S U N T O Il 1 gennaio 2011 una revisione parziale della leg ge federale sull assicurazione malattia (LAMal) è entrata in vigore. Ha quale oggetto un nuovo modo di finanziamento delle cure erogate a domicilio e in casa per anziani. Le nuove disposizioni della LAMal e le revisioni parziali della LAVS e della LPC (prestazioni complementari) permettono di regolare in modo soddisfacente la questione della presa a carico della dipendenza? La risposta è quanto meno sfumata. In ogni caso, il nuovo regime di finanziamento delle cure segna una svolta verso un accentuazione della responsabilità individuale nell ambito delle cure di lunga durata, in particolare ad età avanzata. 2 Le dossier du mois de l ARTIAS, mars 2011 2

Le 1 er janvier 2011, une révision partielle de la loi fédérale sur l assurance-maladie (LAMal) est entrée en vigueur. Elle a pour objet un nouveau mode de financement des soins dispensés à domicile et en EMS. Adoptée le 13 juin 2008, la nouvelle loi est brève. La première partie porte sur l introduction, dans la loi fédérale sur l assurance-vieillesse et survivants (LAVS), d une allocation pour impotent de degré faible (217 francs par mois) qui est versée aux personnes vivant à domicile, à l exclusion des personnes vivant en EMS. Dans son Message du 16 février 2005 accompagnant le projet de révision, le Conseil fédéral a considéré que la limitation aux seules situations de soins à domicile tendait à inciter les personnes dépendantes «à éviter aussi longtemps que possible de recourir aux infrastructures de soins de type hospitalier» 1. La deuxième partie de la révision concerne la loi fédérale sur les prestations complémentaires (LPC). Plus précisément, elle contient de nouvelles règles permettant d établir le revenu déterminant lorsqu un conjoint séjourne en EMS ou à l hôpital et que l autre conjoint vit dans le logement qu ils possèdent tous les deux. Le nouveau montant non imputable (300'000 francs) permet ainsi aux personnes nécessitant des soins et qui ont un revenu modeste de ne pas devoir se départir de leur maison ou de leur appartement au moment de l entrée dans une structure de soins. C est dans la troisième partie que figurent quatre articles consacrés à la révision de la LAMal. Leur contenu mérite un approfondissement et suscite quelques remarques critiques: 1. Participation financière des assureurs-maladie Intitulé «soins en cas de maladie», le nouvel article 25a LAMal retient, en plus des soins ambulatoires (à domicile et en EMS), les soins dispensés dans des structures de soins de jour ou de nuit (al. 1). L alinéa 4 de cette disposition introduit l élément essentiel de la révision: la «contribution» de l assurance obligatoire aux soins. Un mot qui représente un désengagement partiel de l assurance-maladie et un report de charges sur la personne assurée, bénéficiaire de soins. Un regard sur le passé (même récent) permet de rendre compte de la solution entérinée dans le nouveau texte de loi fédérale. Si le principe de la prise en charge des traitements dus à une maladie aiguë n a jamais été contesté, il n en a pas été de même en ce qui concerne les soins «à la personne». Dans son Message du 16 février 2005, le Conseil fédéral a rappelé que, en regard de son but, «l assurance-maladie ne devrait prendre en charge que les prestations liées à la maladie, mais pas les soins liés à la vieillesse» 2. Afin d éviter un surcroît des charges liées à la vieillesse dans le cadre de l assurance-maladie, il conviendrait donc de redéfinir les champs d application des branches d assurances sociales, notamment en opérant une distinction claire entre les «soins de traitement» et les «soins de base» destinés à 1 Message relatif à la loi fédérale sur le nouveau régime de financement des soins, FF 2005 p. 1957 et 1958. 2 Message, op.cit., p. 1944. 6 3 Le dossier du mois de l ARTIAS, mars 2011 3

«satisfaire les besoins humains fondamentaux» 3. Les premiers devraient être intégralement remboursés par l assurance-maladie, alors que les deuxièmes ne donneraient lieu qu à une participation aux frais. En dépit des arguments avancés par le Conseil fédéral à l appui de son projet, le Parlement a rejeté l idée d une telle distinction. En revanche, il a retenu le principe d une seule contribution aux soins, quel que soit le type de prestations concernées (soins de traitement ou soins de base). L importance de la participation financière est déterminée par deux principes figurant dans la loi fédérale: d une part le Conseil fédéral est tenu de définir les tarifs en fonction du degré de dépendance (art. 25a al. 4 LAMal) et d autre part, les coûts non pris en charge par l assurance-maladie ne peuvent être répercutés sur la personne assurée qu à hauteur de 20% au plus de la contribution maximale fixée par le Conseil fédéral (art. 25a al. 5 LAMal). Quant à la part non couverte par les assureurs-maladie (coûts résiduels), elle doit être assumée par les cantons. Faisant usage de sa compétence, le Conseil fédéral a déterminé les montants applicables. Pour les soins dispensés à domicile, il a ainsi fixé, à l article 7a OPAS, des montants variables en fonction des interventions effectuées: - 79.80 francs pour les évaluations et les conseils; - 65.40 francs pour les examens et traitements; - 54.60 francs pour les soins de base. Le remboursement s effectue par unité de temps de 5 minutes, un minimum de 10 minutes étant requis (art. 7a al. 2 OPAS). Pour les soins dispensés en EMS, le Conseil fédéral a retenu, par jour, des montants progressifs en fonction du temps. Le minimum est fixé à 9 francs jusqu à 20 minutes de soins requis et le maximum à 108 francs pour des soins requis portant sur plus de 220 minutes. Fixée en pourcentage de ces montants, la participation financière des assurés peut s élever, au maximum et par année, à: - 15.95 francs par jour pour des soins dispensés à domicile, soit CHF 5 821.75; - 21.60 francs par jour pour les soins dispensés en EMS, soit CHF 7'884.-. Les cantons peuvent cependant renoncer totalement ou partiellement à la facturation de ces frais aux assurés concernés, notamment pour les soins à domicile ainsi que le recommandent la Conférence suisse des directrices et des directeurs cantonaux de la santé (CDS) et l Association suisse des services d aide et de soins à domicile (ASSASD) 4. 3 Message, op.cit., p. 1913. 4 Association suisse des services d aide et de soins à domicile, La mise en œuvre du nouveau régime de financement des soins: comparaisons entre les recommandations de la CDS et celles de l Association suisse des services d aide et de soins à domicile, du 12 novembre 2009, p. 6. http://upload.sitesystem.ch/b2dbb48b7e/0cdc636b60/35723e6b45.pdf 4 Le dossier du mois de l ARTIAS, mars 2011 4

2. Conditions fixées pour le remboursement des prestations Pour l ensemble des prestations remboursées par les assureurs-maladie, la loi fédérale retient trois principes cumulatifs: les prestations dispensées doivent être efficaces, appropriées, économiques (art. 32 LAMal). Ces principes concernent également les soins. Par ailleurs, les personnes et organismes habilités à pratiquer à charge de la LAMal sont d une part les infirmiers et infirmières (art. 49 OAMal), les organisations de soins et d aide à domicile (art. 51 OAMal) ainsi que les EMS (art. 39 LAMal). Les structures de soins de jour ou de nuit ne figuraient pas dans le projet du Conseil fédéral. Introduites au cours des travaux parlementaires, ces structures ne font donc l objet d aucune définition ni d aucun commentaire de la part du Conseil fédéral dans le commentaire qu il a transmis aux Chambres. 3. Soins aigus et de transition La période de prise en charge qui fait immédiatement suite à une hospitalisation fait l objet d une réglementation spécifique (art. 25a al.2 LAMal) qui a suscité de nombreuses interrogations et conduit à quelques interprétations erronées. La particularité ne tient ni à la nature des soins dispensés ni aux professionnels et organismes concernés. Elle tient au mode de financement. En d autres termes, et pour autant que ces soins soient prescrits par un médecin de l hôpital où a séjourné l assuré, les soins dispensés à domicile ou en EMS durant les deux semaines qui suivent la sortie de l établissement hospitalier sont pris en charge conformément à la réglementation du financement hospitalier (art. 49a LAMal). Le canton est donc tenu de financer les prestations à concurrence de 55% et les assureurs-maladie à hauteur de 45%. L assuré bénéficie alors de la protection tarifaire propre au système du financement hospitalier. Concrètement, pour cette période de deux semaines, il ne peut être tenu de payer d autres frais que, le cas échéant, la franchise et la participation de 10% (art. 64 al. 2 LAMal; art. 103 OAMal). Passé ce délai, les prestations sont prises en charge selon le mode évoqué précédemment. L assuré peut donc être tenu, en fonction de son canton de domicile, de payer une partie des soins qu il reçoit. La difficulté d interprétation de cette nouvelle disposition légale tient notamment au fait que les «soins aigus et de transition» pourraient se confondre avec d autres soins dispensés dans une période analogue, par exemple la période passée, en milieu hospitalier, dans l attente d un lit en EMS ou encore la période de réadaptation qui fait suite à une hospitalisation, voire la période de convalescence. Les soins aigus et de transition doivent cependant être clairement distingués de ces situations. La Conférence des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS) a élaboré une série de critères permettant d opérer une distinction claire entre les différentes situations: «1 Des soins aigus et de transition conformément à l art. 25a al. 2 LAMal peuvent être prescrits par des médecins d hôpitaux si les conditions suivantes sont remplies de manière cumulative: 5 Le dossier du mois de l ARTIAS, mars 2011 5

a. Les problèmes de santé aigus sont connus et stabilisés. Des prestations diagnostiques et thérapeutiques dans un hôpital de soins aigus ne sont plus nécessaires. b. La patiente ou le patient a besoin provisoirement d un encadrement professionnel qualifié, en particulier par du personnel soignant. c. Un séjour dans une clinique de réadaptation n est pas indiqué. d. Un séjour dans une unité de gériatrie d un hôpital n est pas indiqué. e. Les soins aigus et de transition ont pour objectif l augmentation de la compétence de prendre soin de soi-même de sorte que la patiente ou le patient puisse de nouveau exploiter dans son environnement habituel les aptitudes et possibilités disponibles avant le séjour hospitalier. f. Un plan de soins avec les mesures en vue d atteindre les objectifs conformes à la let. est établi. 2 Dans la mesure où un encadrement ou un traitement médical, thérapeutique ou psychosocial sont également nécessaires, ceux-ci peuvent être fournis à titre de prestations individuelles en ambulatoire ou en EMS. Ils ne sont pas partie intégrante des sois aigus et de transition» 5. Les soins aigus et de transition sont en principe dispensés à domicile ou dans l EMS où était accueilli l assuré avant son hospitalisation. Le canton peut donner un mandat de prestations à une organisation d aide et de soins à domicile disposant d un service de nuit, à un EMS ou à des infirmiers et infirmières indépendant/es 6. Ces soins font l objet de tarifs spécifiques arrêtés dans les conventions passées entre assureurs et les fournisseurs de prestations (art. 25a al. 2 LAMal). 4. Dispositions transitoires Les tarifs et conventions tarifaires valables à l entrée en vigueur de la révision partielle de la LAMal doivent être alignés dans un délai de trois ans sur les contributions aux soins fixées par le Conseil fédéral. Il revient aux cantons de régler l adaptation (al. 2). Les nouvelles dispositions de la LAMal, et les révisions partielles concernant la LAVS et la LPC permettent-elles de régler la question de la prise en charge de la dépendance de manière satisfaisante? La réponse est, à tout le moins, nuancée. Le nouveau régime maintient la comparaison possible entre soins à domicile et soins dispensés en EMS sous l angle de l économicité. Bien qu étant arrêtés au niveau fédéral, les tarifs ne répondent pas aux mêmes critères selon qu ils concernent les soins à domicile ou les soins en EMS. Permettant aux assureurs de limiter leur prise en charge des soins à domicile lorsque les coûts sont 5 ASSASD, op.cit., p. 1. 6 ASSASD, op.cit., p. 2. 6 Le dossier du mois de l ARTIAS, mars 2011 6

sensiblement plus élevés que les soins en EMS, les principes dégagés par la jurisprudence devraient garder toute leur pertinence dans le nouveau régime. En ce qui concerne la lancinante question de la coordination entre les allocations pour impotents (AI/AVS) et les soins (LAMal), le nouveau régime devrait exclure la prise en considération des allocations pour impotents lorsqu il s agit de déterminer la part des coûts reportée sur les personnes bénéficiaires de soins. A l occasion de la révision des ordonnances fédérales (OAMal, OPAS), l Office fédéral de la santé publique (OFSP) a adopté la position suivante: «Dans la notion "d'assurances sociales" sont comprises essentiellement les prestations de l'assurance obligatoire des soins. Lors des débats parlementaires il n'a, dans ce contexte, jamais été question des prestations complémentaires et elles n'entrent pas dans cette notion. En ce qui concerne les allocations pour impotents, qui, potentiellement, pourraient être incluses, il n'y avait pas, dans le cadre des discussions parlementaires, de consensus quant à leur prise en compte. Du fait que les allocations pour impotents ne représentent pas une prestation en espèces destinée à des fins spécifiques, on peut en déduire que celles-ci n'entrent pas non plus dans la notion "d'assurances sociales"» 7. Dans son Message accompagnant le projet de révision, le Conseil fédéral avait lui aussi considéré, en se fondant sur la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA) et la doctrine, que: «les prestations de soins de base payées par l assurance-maladie obligatoire peuvent être cumulées avec les prestations (de type assistance) couvertes par l allocation pour impotent» 8. Est-ce que ces positions claires permettront de régler quelques problèmes, notamment le fait que les assurés sont tenus de verser l allocation pour impotent à l EMS qui les accueille? Seule une évaluation ultérieure des pratiques permettra d apporter une réponse à cette interrogation. Il en va de même des délicats problèmes liés à la planification que doivent effectuer les cantons et l obligation de ces derniers d intervenir pour un séjour «hors canton» 9. A l issue de ce bref tour d horizon, que pouvons-nous retenir du nouveau régime de financement des soins? Peut-être, et avant tout, le fait qu il marque un tournant vers une accentuation de la responsabilité individuelle en matière de soins de longue durée, particulièrement à l âge avancé. Il convient de rappeler, à ce propos, que cette orientation n est pas entièrement nouvelle. Déposée le 15 juin 2006, une motion intitulée «Pilier 3c destiné à financer les soins des personnes âgées» 10 a clairement énoncé les enjeux. E. Forster-Vannini demandait alors au Conseil fédéral d étudier l introduction d une nouvelle forme d épargne bénéficiant d un allégement 7 OFSP, Ordonnance du 27 juin 1995 sur l assurance-maladie (OAMal), Modifications prévues pour le 1 er août 2009 (autres modifications) et pour le 1 er juillet 2010 (financement des soins). Commentaire et teneur des modifications, Berne, le 10 juin 2009, p. 3; Voir également: CDS, Recommandations pour la mise en œuvre du nouveau régime de financement des soins, 22.10.2009, p. 3, note 2. 8 Message, op.cit., p. 1928 et 1929. 9 CDS, Recommandations pour la mise en œuvre du nouveau régime de financement des soins, 22.10.2009, p. 4, note 5. 10 Motion Forster-Vannini: «Pilier 3c destiné à financer les soins des personnes âgées» (06.3274). 7 Le dossier du mois de l ARTIAS, mars 2011 7

fiscal en vue de financer les soins reçus à domicile ou en EMS. A l appui de sa motion, E. Forster-Vannini relevait notamment: «Le système actuel n'encourage aucunement une personne retraitée à épargner dans ce but 11, puisqu'elle ne bénéficiera pas d'un meilleur service dans un établissement médico-social qu'une personne qui aura dépensé son avoir selon son bon plaisir et dont les soins seront pris en charge par les assurances sociales et les pouvoirs publics. Dans ce contexte, il importe de créer un système d'incitation afin que les personnes retraitées s'intéressent davantage à se constituer un avoir individuel destiné aux soins. Chacun devrait ainsi avoir la possibilité d'effectuer durant une certaine période de sa vie (p. ex. à partir de 58 ans jusqu'à un maximum de 80 ans) des versements fiscalement privilégiés sur un compte de prévoyance du pilier 3c qui pourra servir, le cas échéant, à couvrir des frais de soins. Cet avoir d'épargne sera plafonné (à 200 000 francs, p. ex.). Les déductions fiscales autorisées pourront être définies par analogie avec celles qui existent actuellement en faveur du pilier 3a. Dans la mesure où cette "assurance de soins privée" constituée par accumulation de capital reposera sur une base purement volontaire, les personnes en situation économique difficile ne seront pas indûment mises à contribution (contrairement à ce qui se passerait avec l'introduction d'une prime spéciale pour frais de soins dans le cadre de l'assurance-maladie)». Cette motion n a pas recueilli l approbation des deux Chambres (seul le Conseil des Etats l a acceptée le 19 septembre 2006). Il n en demeure pas moins que le débat n est certainement pas clos et que le nouveau régime de financement des soins ne permettra vraisemblablement pas de régler la question de la dépendance à long terme. Après avoir passé en revue les régimes de quelques pays proches de la Suisse et analysé les tendances générales sur la base d un rapport de l OCDE 12, le Conseil fédéral a relevé qu en Suisse, «l introduction d une assurance de soins a souvent été débattue et rejetée» 13, notamment lors des discussions concernant l initiative parlementaire Tschopp (1992) et à l occasion d un rapport présenté en réponse à un postulat de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national sur la prise en charge des prestations de soins et d encadrement social en cas de besoins en soins (1999). Pour l heure, les discussions ont été cantonnées au niveau parlementaire. Nul doute que les enjeux liés à la dépendance imposeront un jour des débats plus larges, des véritables débats de société. 11 Financement des soins liés au grand âge. 12 Message, op.cit., p. 1933, note 34; p. 1934 et 1935. 13 Message, op.cit., p. 1951. 8 Le dossier du mois de l ARTIAS, mars 2011 8