REPUBLIQUE FRANÇAISE CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES du NORD-PAS-DE-CALAIS Troisième section Commune de Liévin (Département du Pas-de-Calais) Article L. 1612-15 du code général des collectivités territoriales n 2006-0449 DECISION LA CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES DU NORD - PAS-de-CALAIS ; Vu le code des juridictions financières, notamment ses articles L. 211-7, L. 232-1,L. 242-1, L. 242-2, R. 232-1 et R. 242-1 à R. 242-3 ; Vu le code général des collectivités territoriales et notamment ses articles L. 1612-15 et l 1612-17, R. 1612-32 à R 1612-38 Vu les lois et règlements relatifs aux budgets des collectivités territoriales et des établissements publics locaux ; Vu la lettre du 14 juin 2006, enregistrée le 19 juin 2006 au greffe de la chambre régionale des comptes du Nord - Pas-de-Calais, par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a saisi la juridiction, en application de l article L. 1612-15 du code général des collectivités territoriales, en vue de l inscription d office de crédits nécessaires au paiement d une dépense d un montant de 45 374.71 correspondant au reversement d un acompte d une subvention accordée par l Etat, en raison de l absence de réalisation de l opération subventionnée dans les délais réglementaires ; Vu la lettre du 21 juin 2006, par laquelle la présidente de la chambre régionale des comptes du Nord - Pas-de-Calais a informé le maire de Liévin de la saisine susvisée et de la possibilité qu il avait de présenter ses observations conformément à l article R. 242-1 du code des juridictions financières, soit par écrit, soit oralement dans les conditions prévues à l article L. 242-2 dudit code ; Vu les documents transmis à la chambre et annexés à la saisine ; Vu les éléments recueillis le 23 juin 2006 lors d une visite sur place ; Vu le courrier du maire de Liévin adressé à la chambre le 28 juin 2006 ; - 1 -
Ensemble les pièces à l appui ; Vu les conclusions du commissaire du gouvernement ; Après avoir entendu M. Bertrand Beauviche, magistrat, en son rapport ; DECIDE : I - SUR LA RECEVABILITE Considérant qu aux termes de l article L. 1612-15, deuxième alinéa, du code général des collectivités territoriales : «La Chambre régionale des comptes saisie, soit par le représentant de l Etat dans le département, soit par le comptable public concerné, soit par toute personne y ayant intérêt, constate qu une dépense obligatoire n a pas été inscrite au budget ou l a été pour une somme insuffisante. Elle opère cette constatation dans le délai d un mois à partir de sa saisine et adresse une mise en demeure à la collectivité territoriale concernée» ; Considérant que dans cette affaire, le préfet du Pas-de-Calais, a qualité pour agir et que sa saisine est motivée, chiffrée et appuyée des justifications utiles au sens de l article R. 1612-32 du CGCT ; Considérant, dans ces conditions, que la saisine du préfet du Pas-de-Calais peut être déclarée recevable ; II - SUR LE CARACTERE OBLIGATOIRE DE LA DEPENSE A - Sur la définition légale de la dépense obligatoire : Considérant qu aux termes de l article L. 1612-15, premier alinéa, du code général des collectivités territoriales «Ne sont obligatoires pour les collectivités territoriales que les dépenses nécessaires à l acquittement des dettes exigibles et les dépenses pour lesquelles la loi l a expressément décidé» ; Considérant, au cas d espèce, que le préfet du Pas-de-Calais demande le reversement d un acompte de subvention d investissement de l Etat pour la couverture d un terrain de football en gazon synthétique, d un montant de 45 374,71, accordée en 1998 sur la base d un justificatif de réalisation de travaux infondé, qu il estime être une dette exigible de la commune de Liévin ; Considérant cependant qu une dette revêt un caractère exigible si elle est certaine, liquide, non sérieusement contestée et échue ; - 2 -
B - Sur le caractère certain de la dette de la commune de Liévin : Considérant que par lettre en date du 16 octobre 1997, la ville de Liévin a sollicité le concours financier de l Etat «pour la couverture d un terrain de football en gazon synthétique ; qu à la suite de cette demande, une subvention de 500 000 F (76 224.51 ) - application d un taux de 21 % sur une dépense subventionnable de 2 380 644 F (362 926,84 )- a été attribuée à ladite collectivité par arrêté du Ministre de la jeunesse et des sports, en date du 27 novembre 1997 (transmis à la commune le 8 janvier 1998) étant précisé, à l article 2 de cet arrêté «que la subvention sera annulée de plein droit et automatiquement si le commencement des travaux n est pas intervenu dans un délai de 2 ans à compter de la date de notification du présent arrêté. La collectivité bénéficiaire de la subvention est tenue d informer le préfet du département de la date de commencement des travaux» Considérant que dans un premier temps, un acompte de subvention d investissement de 45 374,71 a été réglé par les services de l Etat, par mandat en date du 6 juin 1998 à la commune de Liévin après que le maire de Liévin ait établi un certificat en date du 12 février 1998 «certifiant que les travaux de couverture d un terrain de football en gazon synthétique étaient réalisés à 60 %» ; que dans un deuxième temps, l ordre de service écrit du marché de travaux et le procès verbal de réception des travaux ont permis de constater que ce certificat était fondé sur des éléments erronés dès lors que les travaux, objet de la subvention sus évoquée, ont été réalisés entre le 27 octobre 2000 et le 7 septembre 2001 ; Considérant qu il résulte de ce qui précède, en application des dispositions rappelées ci-dessus de l article 2 de l arrêté attributif de subvention du 27 novembre 1997, qu à cette date la subvention était annulée de plein droit, dès lors que le point de départ de la période de validité de deux ans à retenir est le 8 janvier 1998 ; Considérant que la validité de la subvention pouvait être prorogée avant son terme sur demande de la commune ; que cette demande n est intervenue qu en septembre 2000, soit en dehors du délai imparti pour y procéder ; Considérant compte tenu de ce qui précède que le règlement de l acompte de 45 374,71 constitue un règlement effectué à tort et qu il appartient à l Etat d en demander le reversement ; Qu en conséquence le caractère certain de la dette est établi ; C - Sur le caractère liquide de la dette : Considérant que pour être liquide, la dette doit pouvoir être calculée sans difficulté en fonction d éléments parfaitement identifiés ; Considérant que l arrêté attributif du 27 novembre 1997, la demande d acompte du 12 février 1998 et le mandat de versement de l acompte du 6 juin 1998, permettent de s assurer du caractère liquide de la dette ; - 3 -
Considérant que l acompte a été sollicité à hauteur de 60 % du montant global de la subvention, fixé à 500 000 F (76 224,51 ) par l arrêté attributif du 27 novembre 1997, qu au regard de la quote-part sollicitée, le mandat de versement de l acompte a été établi à 300 000 F (45 734,71 ) ; Considérant que la conversion des francs en euros a été réalisée selon le cours réglementaire de 6,55957 F pour un euro ; Qu en conséquence la liquidité de la dette est démontrée ; D - Sur la contestation de la dette : Considérant que le maire de Liévin a formulé dans ses observations en réponse à la saisine deux éléments de contestation, exprimant d une part la volonté de la commune de faire jouer la prescription quadriennale des créances publiques fixées par la loi n 68-1250 du 31/12/1968 et considérant d autre part que la responsabilité de l erreur était partagée entre les services de sa commune et ceux de l Etat, dès lors que ces derniers, lors du versement de l acompte, n ont pas effectué les vérifications de conformité qui s imposaient ; Considérant qu en application des dispositions de la loi 68-1250 du 31 décembre 1968 modifiée, relative à la prescription des créances sur l Etat, les départements, les communes et les établissements publics, en matière de dépenses «sont prescrites, au profit de l Etat, des départements et des communes toutes créances qui n ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis» ; que ce délai ne court pas contre celui qui peut être légitiment regardé comme ignorant la créance ; Considérant qu en l espèce, le délai de prescription n a pu être décompté qu à partir du 1 er janvier 2001, suite à la demande de la commune en septembre 2000, de proroger la validité de l arrêté attributif de la subvention du fait d un retard dans la réalisation de l opération ; Considérant que suite à cette demande, les services de l Etat, ont alors pu légitimement se rendre compte du caractère erroné du versement de l acompte attribué en mars 1998 ; qu après avoir sollicité des renseignements complémentaires auprès de la commune, à deux reprises au cours de l année 2002, un titre de reversement a été émis le 17 avril 2003, interrompant le délai de prescription avant son terme de 4 ans ; Considérant que les dispositions de l article 25 du décret du 10 mars 1972 portant réforme du régime des subventions d investissement accordées par l Etat, précisent que «les vérifications liées au règlement des acomptes sont effectuées gratuitement par les services de l Etat, elles peuvent être effectuées par les services techniques de la collectivité locale» ; qu aux termes de l article 2 de l arrêté attributif de la subvention en date du 27 novembre 1997 «le mandatement sera fait par le préfet sur simple demande au fur et à mesure de l avancement des travaux et dans la limite des crédits de paiement» ; - 4 -
Considérant qu il résulte de ce qui précède que les services de l Etat, au stade du versement de l acompte, n étaient pas tenus de vérifier les justificatifs de dépenses et la matérialité des réalisations fondant la demande de règlement ; Considérant dans ces conditions que la dette ne peut être considérée comme étant sérieusement contestée dans son principe et dans son montant par la commune de Liévin ; III - SUR L ABSENCE OU L INSUFFISANCE DES CREDITS INSCRITS AU BUDGET DE LA COMMUNE DE LIEVIN Considérant que les crédits nécessaires au règlement de cette dépense obligatoire ne sont pas inscrits au chapitre 13 article 1311 en dépenses de la section d investissement du budget pour l exercice 2006 ; Qu il y a donc lieu de mettre la commune de Liévin en demeure d inscrire à son budget 2006 les crédits nécessaires au paiement de cette dépense ; PAR CES MOTIFS, DECLARE recevable la saisine du préfet du Pas-de-Calais au titre de l article L. 1612-15 du code des collectivités territoriales ; CONSTATE que la somme de 45 734,71 dont l inscription au budget de la commune de Liévin est demandée par le préfet du Pas-de-Calais, constitue une dette exigible et présente donc le caractère d une dépense obligatoire ; MET en demeure la commune de Liévin d inscrire à son budget 2006, au chapitre 13 article 1311 en dépenses de la section d investissement, les crédits nécessaires à l acquittement de la somme de 45 734,71 ; DIT que la présente décision sera notifiée au préfet du Pas-de-Calais, au maire de la commune de Liévin et au chef de poste de la trésorerie de Liévin. - 5 -
Délibéré par la troisième section de la Chambre, à Arras, le 11 juillet 2006. Etaient présents : M. André Lanxade, président de séance, M. Patrick Minne, magistrat et M. Bertrand Beauviche, magistrat-rapporteur. Le magistrat-rapporteur Le président de séance Bertrand Beauviche André Lanxade Pour la Présidente empêchée Le président de section Paul Hernu La présente décision peut être attaquée devant le tribunal administratif dans le délai de deux mois à compter de sa notification. - 6 -