«Le stress au travail» 2010



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Transcription:

«Le stress au travail» 2010

Sarah Hibo Service Etudes du Secrétariat National des FPS 2010 02/515.17.67 sarah.hibo@mutsoc.be Editrice responsable: Dominique Plasman, Place Saint Jean, 1-1000 Bruxelles 2

Table des matières I. La réaction de stress, deux dimensions... 4 1. Conception physiologique... 4 2. Conception psychosociale... 6 II. Le stress au travail, éléments de définitions... 7 III. Facteurs de stress au travail... 7 IV. Cadre législatif... 8 V. Comment lutter contre le stress au travail?... 9 Conclusion... 11 Editrice responsable: Dominique Plasman, Place Saint Jean, 1-1000 Bruxelles 3

Le stress est un problème de santé de plus en plus préoccupant dans le monde du travail. Selon la dernière enquête européenne sur les conditions de travail (2005), c est la deuxième cause de problème de santé au travail. 21% des travailleurs belges se disent touchés par le stress 1 et en 2002, l Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail estimait à plus de 20 milliards d euros les dépenses engendrées par le temps perdu et les frais médicaux liés au stress 2. A l heure actuelle, les contraintes de productivité et d innovation que s imposent les entreprises pour accroitre leur compétitivité semblent être à l origine de la pression constante sur les travailleurs. Le stress est présent dans toutes les catégories professionnelles. Employés, ouvriers, cadres, managers, etc. Personne n est épargné, même si la façon dont le stress s exprime peut varier d un poste à l autre (conséquences psychologiques, accidents et maladies professionnelles). Le docteur Patrick Légeron fait remarquer que les sources de stress au travail se trouvent dans tous les aspects de la vie professionnelle et ont de plus en plus souvent une origine psychologique plutôt que physique. 3 Dans cette analyse, nous tenterons de décrire ce qu est le stress, tant au niveau physiologique que psychologique. Nous donnerons quelques éléments de définition du stress au travail, nous identifierons les principaux enjeux qu il recouvre et les facteurs qui influencent ce stress. Nous nous pencherons ensuite sur le cadre législatif en matière de lutte contre le stress au travail pour terminer par un point plus concret consacré à la lutte contre ce stress. I. La réaction de stress, deux dimensions 1. Conception physiologique 4 La réaction de stress trouve son origine dans le Syndrome général d adaptation. Le professeur Philippe Corten le décrit comme un mécanisme destiné à nous faire réagir face à un environnement dangereux. «Il s agit d un mécanisme nerveux c est le cerveau qui le 1 21% des travailleurs ont répondu «oui, le stress affecte ma santé» à la question «Votre travail affecte-t-il votre santé ou pas?» 2 SPF Emploi, Travail et Concertation sociale, Série stratégie SOBANE, Gestion des risques professionnels, Aspects psychosociaux, 2008, p. 46. 3 http://www.stimulus-conseil.com/entreprise_nos_domaines.html, page consultée le 10/12/09 4 P. Corten, Stress et stress pathologique, cours de psychopathologie du travail, Chapitre 1, ULB, http://homepages.ulb.ac.be/~phcorten/cliniquestress/documentsstress/doc1.htm, page consultée le 10/12/09 Editrice responsable: Dominique Plasman, Place Saint Jean, 1-1000 Bruxelles 4

déclenche, autonome nous ne le commandons pas volontairement et massif nous ne pouvons pas le moduler.» 5 Au niveau physiologique, l organisme déclenche une réaction du système nerveux 6 qui nous prépare à réagir (augmentation du rythme cardiaque, tension, accélération de la respiration ). Une fois que l individu a réussi à écarter le danger s en suit une réaction de détente, déclenchée par une autre partie du système nerveux 7 (ralentissement du rythme cardiaque, de la tension, de la respiration ). Ce syndrome général d adaptation décrit la réaction de stress «de base», ce qu on pourrait appeler le «stress positif». 8 C est à cette réaction que se limite le stress quand on peut répondre à la situation soit par la fuite, soit en attaquant. Mais lorsque l on parle de stress au travail, nous faisons le plus souvent référence au «mauvais stress» et au stress chronique. Le «mauvais stress» apparait lorsque nous ne pouvons ni fuir ni réagir face à l élément menaçant. Dans ce cas, l organisme doit mobiliser plus longtemps le système orthosympathique pour se préparer à réagir au stress mais cela n est pas possible indéfiniment. Pour permettre au corps de résister, dans la durée, à l épreuve stressante, les deux réactions physiologiques se combinent. A la réaction d alerte, permettant de réagir au stress, s ajoute la réaction de détente qui atténue l effet de la situation stressante. Si cela permet au corps de calmer les choses, à long terme l organisme gère difficilement la juxtaposition des deux phénomènes. Cette réaction, appelée syndrome d inhibition, est très énergivore car elle puisse dans les ressources de l organisme et «consume l individu de l intérieur». S en suivent des problèmes liés à la production de cholestérol (hypertension ) qui entrainent, à terme, ulcère, maladie cardiovasculaire, hémorragie cérébrale, suicide, accident de voiture, fatigue psychologique etc. En somme, une situation de stress que nous ne pouvons pas résoudre rapidement et qui engendre une superposition des réactions d alerte et de détente est une réaction normale et adaptée de notre organisme et n est pas automatiquement problématique. Ce n est que lorsque nous sommes en présence de «stress chronique», récurrent, qui maintient constamment l organisme en surrégime, que les effets sont délétères. 5 Idem. 6 Système orthosympathique. 7 Système parasympathique. 8 Ce terme est cependant à considérer avec prudence car il implique souvent des dérives au sein des entreprises qui auraient tendance à estimer trop souvent que le stress est un moteur dans le travail et à ne pas mettre en place de prévention pour le réduire. Editrice responsable: Dominique Plasman, Place Saint Jean, 1-1000 Bruxelles 5

2. Conception psychosociale 9 Comme nous l avons développé dans le point précédent, la réaction de stress est liée aux mécanismes d adaptation physiologiques face à une modification de l environnement. C est la situation d incertitude qui est à la base de la réaction de stress. La dimension physiologique ne suffit cependant pas, à elle seule, à expliquer la réaction de stress. Elle ne peut se comprendre qu en tenant compte des spécificités individuelles et du système dans lequel s inscrit l individu. Selon P. Corten, à coté de cette réaction d adaptation physiologique se trouvent une série de «facteurs médiateurs» qui, selon les individus, vont favoriser ou modérer la réaction de stress. Parmi ces facteurs, les stresseurs, éléments «perturbateurs» de l environnement (variables organisationnelles et interpersonnelles), sont les stimuli à une éventuelle réaction de stress. 10 Les caractéristiques propres à l individu telles que sa situation sociale, familiale, l éducation qu il a reçue, sa personnalité, ses capacités vont, quant à elles, encourager ou non la réaction de stress. Les souffrances physiques engendrées par le stress vont progressivement détruire l individu de l intérieur et peuvent être la source d une importante souffrance mentale. Ces répercutions mentales auront tendance à contaminer la vie familiale et sociale de l individu. Le stress pourrait, par exemple, engendrer de la fatigue, des insomnies, de l irritabilité, de la dépression etc., qui pourraient altérer les relations de la personne stressée avec son entourage. Au niveau individuel, P. Corten a développé un «modèle de qualité de vie» qui serait régulateur de la souffrance mentale et permettrait d expliquer la capacité à faire face ou non au stress. Il synthétise ce modèle de cette façon : «la vie est de qualité quand la vie fait sens», c'est-à-dire, quand elle a une direction (aspirations en adéquation avec la personnalité de la personne et son vécu), qu elle est significative (qu elle adhère à des valeurs, une conscience ) et qu elle procure et sollicite suffisamment de plaisir. Pour diminuer leur souffrance mentale et, en conséquence, leur taux de stress, les individus tenteraient continuellement d améliorer leur qualité de vie en adaptant leur comportement et en modifiant leur état de conscience (consommation de produits «euphorisants» ou activités sociales). 9 P. Corten, Stress et stress pathologique, cours de psychopathologie du travail, Chapitre 2, ULB, http://homepages.ulb.ac.be/~phcorten/cliniquestress/documentsstress/doc1.htm, page consultée le 10/12/09 10 Kets de Vries M., 1979, Turcotte P., 1982 cité in P. Corten. Editrice responsable: Dominique Plasman, Place Saint Jean, 1-1000 Bruxelles 6

II. Le stress au travail, éléments de définitions Une équipe de chercheurs de l ULB a réalisé une synthèse des recherches sur le stress au travail. 11 Selon ce rapport, les définitions du stress au travail répertoriées dans la littérature scientifique ont en commun la référence à une interaction entre l individu et son environnement de travail. 12 Certaines définitions mettent aussi en avant la distinction, que nous avons faite cidessus, entre les variables de la situation vécue par l individu et la réaction de stress proprement dite, c'est-à-dire, comment les différentes variables en présence vont conduire ou non à une réaction de stress. Dans d autres définitions, on retrouve le caractère subjectif de l interprétation par l individu d une situation comme source de stress. Plus récemment, l Agence européenne pour la Sécurité et la Santé au travail donnait cette définition du stress au travail : «le stress est ressenti lorsqu'un déséquilibre est perçu entre ce qui est exigé de la personne et les ressources dont elle dispose pour répondre à ces exigences. Bien que le stress soit perçu psychologiquement, il peut également porter atteinte à la santé physique» 13. Au niveau belge, le stress est défini dans la Convention Collective de Travail du 30 mars 1999 14 comme : «( ) l état perçu comme négatif par un groupe de travailleurs, qui s accompagne de plaintes ou dysfonctionnements au niveau physique, psychique et/ou social et qui est la conséquence du fait que des travailleurs ne sont pas en mesure de répondre aux exigences et attentes qui leur sont posées par leur situation de travail» 15. III. Facteurs de stress au travail Plusieurs facteurs sont à l origine du stress au travail et agissent en faveur d une augmentation ou d une réduction de la réaction de stress. Nous pouvons identifier deux types de facteurs : les facteurs environnementaux et les facteurs individuels. 11 Lecomte N., Patesson R., Synthèse des recherches sur le stress au travail, ULB- CREATIC, http://www.ulb.ac.be/soco/creatic/theorie.html, page consultée le 8/12/09. 12 Idem. 13 http://osha.europa.eu/fr/topics/stress/index_html/definitions_and_causes, page consultée le 14/12/09. 14 Cette définition est inspirée de la définition du stress donnée par l OMS. 15 Convention Collective de Travail n 72 du 30 mars 1999 concernant la gestion de la prévention du stress occasionné par le travail, p.1. Editrice responsable: Dominique Plasman, Place Saint Jean, 1-1000 Bruxelles 7

Les variables liées à l environnement de travail (au contexte) sont : l organisation du travail, les relations de travail (clarté dans la hiérarchie, exigences, agressivité, mauvaise communication, conflits ) la nature des tâches (complexité, monotonie, répétitivité, variabilité, technicité, rapidité ), la charge de travail, l environnement physique (lumière, bruit, chaleur, position de travail, espace ), l environnement socio-économique de l entreprise (pression liées à la situation de concurrence, à la productivité, à l innovation ). C est un changement affectant l un de ces facteurs (ou plusieurs facteurs en même temps) qui va engendrer la modification de l environnement et générer la réaction de stress. La capacité à faire face au stress varie donc d un individu à l autre. Les variables qui interviennent dans cette capacité individuelle sont : la personnalité, l état de santé, les besoins (buts, aspirations ), l éducation, les valeurs. Ce sont ces variables qui vont permettre à l individu de gérer plus ou moins bien la réaction de stress. En effet, c est notre état mental qui détermine notre perception du stress. Chaque individu se construit sa propre intelligibilité du monde en fonction de ce qui fait sens pour lui. Elle est influencée par l éducation qu il a reçue, son origine sociale, culturelle, économique, son caractère Cette appréhension du monde varie donc d une personne à l autre et dote chacun d une capacité variable et inégale à décoder et à faire face au stress. Il est cependant possible d identifier des configurations qui sont plus propices au stress (aigu et chronique). Selon Josiane De Ridder (2007) les personnes occupant des postes avec d importantes exigences professionnelles et ayant une autonomie limitée sont les plus vulnérables au stress, de même que celles qui ont un travail peu valorisant avec peu de capacité de décision. 16 IV. Cadre législatif 17 En Belgique, la réglementation en matière de stress au travail trouve sa source dans le droit européen. Il semblerait que l Union européenne soit la pionnière dans cette matière puisqu on ne trouve pas de réglementation belge en matière de bien-être au travail antérieure à la réglementation européenne. 16 De Ridder J., Le stress. Nécessaire mais pas fatal, Service Promotion de la Santé, Union nationale des Mutualités socialistes, 2007, p. 9. 17 SPF Emploi, Travail et Concertation sociale, Série stratégie SOBANE, Gestion des risques professionnels, Aspects psychosociaux, Fiche 2 : Cadre réglementaire du stress au travail, 2008, pp. 42-45. Editrice responsable: Dominique Plasman, Place Saint Jean, 1-1000 Bruxelles 8

La directive cadre 89/391/CEE du Conseil de l Europe, du 12 juin 1989, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail n aborde pas la problématique du stress au travail telle quelle mais met déjà à l ordre du jour les questions de bien-être au travail, de gestion des risques et de prévention. En 2004, les partenaires sociaux européens signent l'accord-cadre concernant le stress au travail qui constitue une avancée significative par rapport à la directive de 1989. Cet accord-cadre demande aux entreprises de prendre en compte le stress au travail dans la démarche de prévention des risques professionnels, il donne un cadre à la gestion du stress, il intègre la participation des employeurs et des travailleurs. En Belgique, la loi du 4 août 1996 relative au bien-être des travailleurs lors de l exécution de leur travail est la transposition dans le contexte belge de la directive cadre de 1989. Le législateur belge intègre explicitement la charge psychosociale dans la problématique du bien-être au travail. La Convention collective de travail CCT n 72 du 30 mars 1999 concernant la gestion de la prévention du stress occasionné par le travail, conclue au Conseil national du Travail et rendue obligatoire par l'ar du 21 juin 1999 (Moniteur Belge du 9 juillet 1999) règle les obligations de l'employeur en matière de prévention du stress lié au travail. Cette CCT reprend concrètement chacun des principes de la loi du 4 août 1996 liée à la question de la charge psychosociale du stress au travail. V. Comment lutter contre le stress au travail? Il n existe aucun médicament spécifique contre le stress. 18 Dans le monde du travail, la lutte et la prévention du stress se font à trois niveaux : au niveau de l organisation et de l environnement de travail, au niveau du management et au niveau de l individu lui-même. Du point de vue organisationnel, il faut repenser l'organisation du travail. Cela signifie que, d une part, il est nécessaire de prendre en compte tous les facteurs environnementaux comme, par exemple, un poste de travail agréable, bien éclairé, réduire au maximum les désagréments liés au bruit etc. D autre part, il faut aussi analyser l adéquation entre la charge de travail et les délais, le débit etc. 18 De Ridder J., Le stress. Nécessaire mais pas fatal, Service Promotion de la Santé, Union nationale des Mutualités socialistes, 2007, p. 11. Editrice responsable: Dominique Plasman, Place Saint Jean, 1-1000 Bruxelles 9

Au niveau du management, il est impératif de prendre en compte la dimension humaine. Les travailleurs ne sont pas des pions que l on déplace au gré des contrats conclus par l entreprise. Et l entreprise n est pas seulement une question de stratégie. Il faut, par exemple, avertir les travailleurs suffisamment à temps lors de changements, valoriser le travail effectué par le personnel et ne pas pointer que les aspects négatifs du travail, donner de l autonomie, un sens au travail etc. Au niveau de l entreprise (niveau management, organisation et environnement de travail), il existe de nombreuses méthodes d analyse des risques. Certaines sont limitées à l analyse d un seul facteur de risque tandis que d autres analysent ces risques de façon plus globale. C est le cas de la stratégie SOBANE prônée par les pouvoir fédéraux belges. Elle permet aux entreprises (même aux plus petites) d analyser leur gestion des risques au travail de façon autonome et consiste surtout en une démarche participative avec les travailleurs. Cette stratégie a pour particularité d agir sur les principales sources de stress y compris sur l aspect psychosocial le plus générateur de stress à long terme-, qui est plus délicat à aborder et donc souvent laissé pour compte dans les entreprises. 19 Le troisième niveau de prévention du stress au travail est celui de l individu. Chacun doit apprendre à gérer individuellement son stress. C est le niveau le plus subjectif car les efforts seront plus ou moins importants en fonction de la situation personnelle du travailleur. A un niveau de stress déjà important, certains médicaments peuvent agir sur quelques symptômes du stress comme par exemple l angoisse et les insomnies mais ils entrainent parfois une dépendance. Avant de recourir à ces solutions, il est nécessaire d agir plus en profondeur et de traiter les causes du stress. La mutualité socialiste a réédité, en 2007, un guide donnant quelques bases pour la gestion du stress 20. Selon l auteure, l individu doit prendre conscience de ce qui est source de stress pour luimême ce qui lui évitera d être surpris par certaines situations et d être facilement submergé par le stress. Il faut «repérer les croyances et les pensées qui favorisent le stress chronique» 21, se détendre, se mettre des limites et accepter qu elles soient différentes de celles des autres (ne pas vouloir tout assumer et accepter qu on ne peut pas tout assumer, demander à être déchargé d une part des tâches qui génèrent du stress ). Se sentir bien dans son corps est aussi un élément essentiel pour pouvoir gérer son stress. Ce bien-être passe par une alimentation équilibrée, un bon sommeil (se réveiller avec la sensation 19 Pour plus de détails, cf. www.sobane.be. 20 De Ridder J., Le stress. Nécessaire mais pas fatal, Service Promotion de la Santé, Union nationale des Mutualités socialistes, 2007. 21 Idem, p. 14. Editrice responsable: Dominique Plasman, Place Saint Jean, 1-1000 Bruxelles 10

d être reposé, avoir un rythme de sommeil régulier), une activité physique régulière, la pratique de la relaxation. 22 Outre les bienfaits pour la santé en général, pratiquer un sport est reconnu comme un excellent moyen de canaliser le stress. De plus, il est possible de se faire aider par un professionnel dans sa démarche de gestion du stress (psychologue, kinésithérapeute, sophrologue ). Conclusion Comme nous l avons vu, le stress est une réaction de survie, saine et courante qui fait partie de la vie. Ce n est que lorsque ce stress devient chronique et que l individu ne parvient pas trouver rapidement une réponse adéquate qu il est néfaste pour la santé. La capacité à faire face à ce stress varie en fonction des individus et de la situation. Certaines situations de travail, certains comportements sont plus propices au développement du stress chronique. La Belgique dispose d un cadre législatif qui incite les entreprises à prendre en considération le stress au travail et à développer les moyens nécessaires pour lutter contre ce stress. Plusieurs outils sont à disposition des entreprises pour les aider dans cette démarche. Puisque le stress est surtout une question subjective d appréhension de la réalité par un individu, la gestion du stress doit aussi se faire au niveau individuel. Il est recommandé d agir sur les causes du stress, de prendre soin de soi et de pratiquer une activité sportive plutôt que d espérer gérer son stress uniquement au moyen de médicaments. 22 Idem, p. 17. Editrice responsable: Dominique Plasman, Place Saint Jean, 1-1000 Bruxelles 11