La tâche complexe, un enjeu de l'enseignement des mathématiques



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La tâche complexe, un enjeu de l'enseignement des mathématiques Frédéric Barôme page 1 La tâche complexe, un enjeu de l'enseignement des mathématiques Enseigner en accord avec l'activité scientifique Pratiquer une activité scientifique ne peut se borner à exécuter une succession de tâches simples. Cela consiste essentiellement à chercher, raisonner, argumenter, conjecturer, diversifier les outils, convaincre... actions demandant toutes de l'autonomie. Pour donner du sens aux mathématiques enseignées et cultiver chez les élèves le goût de faire des mathématiques, les programmes recommandent d utiliser une situation-problème, ou tâche complexe pour introduire certaines notions nouvelles et/ou pour réinvestir des connaissances et capacités acquises. Pour favoriser la mise en œuvre de l autonomie de l élève, les programmes se sont fixés trois grands objectifs : instaurer l activité de raisonnement qui est l essence même des mathématiques et qui contribue à la formation scientifique du futur citoyen ; développer des automatismes (travail sur des tâches simples au travers des exercices d'application) qui favorisent l autonomie et l initiative des élèves dans la résolution de problèmes ; permettre à tous les élèves d acquérir la maîtrise du calcul réfléchi, inséparable du sens des nombres et des opérations. Pour cela, la pratique pédagogique quotidienne conduit à mettre en oeuvre des activités très diversifiées de recherche et de production : résolution de problèmes, travaux d'investigation ; individuels, en petits groupes, de manière collaborative (ateliers tournants ou non, en mosaïque) ; productions écrites (narrations de recherche, schémas ) ou orales (exposés, interrogations individuelles, débat argumenté ). La résolution de problèmes doit constituer le vecteur principal de l évaluation, aussi bien pour l évaluation de l acquisition du programme que pour celle du socle commun : il n est pas possible de gérer, dans chaque classe et pour chaque élève deux systèmes d évaluation, un pour le programme et l autre pour le socle. Il est donc indispensable que les outils d évaluation actuellement utilisés (devoirs de contrôle, évaluation diagnostique, travaux pratiques, travaux à la maison, utilisation des TICE, ou TUIC) soient repensés de manière à permettre de mesurer à la fois la maîtrise du programme et l acquisition des aptitudes du socle commun. Qu'est-ce qu'une tâche complexe Une tâche complexe, ou tâche-problème, est une tâche mettant en œuvre une combinaison de plusieurs procédures simples, automatisées, connues. Elle nécessite l élaboration par l élève d une stratégie personnelle et non pas d'une stratégie experte automatisée et attendue. Elle mobilise des ressources internes (culture, capacités, connaissances, vécu ) et externes (aides méthodologiques, protocoles, fiches techniques, ressources documentaires ). Dans l'idéal, la tâche-problème doit être : COMPLEXE Ressources de natures différentes = savoir + savoir-faire + savoir-être Ressources d origines différentes = savoirs acquis internes + externes (livres, internet, experts,...). FINALISÉE Vers l action, dans un but concret (éventuellement fictif). INTERACTIVE Interaction avec le milieu OUVERTE La démarche comme le produit attendu n'est pas définie, car plusieurs solutions coexistent. INÉDITE Même pour des tâches relevant d une même famille, le contenu change, de manière à ne pas permettre la simple répétition d un acquis. En outre, elle : tient compte des motivations de l élève (proche de son vécu, de son questionnement) ; installe une compétence nouvelle ; permet différents niveaux de performance ; permet à l élève d être au centre de son propre apprentissage.

page 4 du vade-mecum Compétence 3 de 2010 page 25 du vade-mecum Mathématiques de 2009 Complexe ne veut pas dire compliqué La tâche complexe, un enjeu de l'enseignement des mathématiques Frédéric Barôme page 2 La notion de tâche complexe fait partie intégrante de celle de compétence, comme le rappelle le préambule du socle commun : «Maîtriser le socle commun, c est être capable de mobiliser ses acquis dans des tâches et des situations complexes, à l école puis dans la vie». Les situations choisies dans ce cadre doivent permettre à tout élève de s engager avec ses acquis du moment et donc, ne reposer que sur des consignes simples, n exiger que des connaissances solidement acquises. Il est important que les consignes de recherche et de production soient à la fois suffisamment ouvertes et précises pour permettre à l élève ou au groupe de s organiser pour développer sa propre démarche de résolution. Pour gérer la double exigence du programme et du socle commun et faire cohabiter harmonieusement tous les objectifs de formation visés, il est essentiel de veiller à ce que ce type de problème offre une véritable activité mathématique à tout élève, sans oublier celui qui n accèdera peut-être pas à la modélisation ou à la stratégie experte visée et qui aura mis en place une «procédure artisanale». Démarches expertes et empiriques Ainsi, une situation algébrique pourra être traitée par essais et erreurs (les problèmes à programmes de calculs s'y prêtent très bien), des grandeurs géométriques pourront être représentées par un graphique à une échelle pratique. On se retrouvera donc à valoriser des approches empiriques : l'enseignant de mathématiques devra alors accepter que faire des mathématiques, c'est parfois tâtonner (et, avouons-le, c'est vrai à plus haut niveau...), puis faire prendre conscience aux élèves des limites. Par exemple, un élève peut trouver le centre d'un cercle de manière fort correcte en piquant quelques fois dans la bonne zone, ou en pliant le disque en quatre. Un cercle tronqué, un cercle de grande taille sur le tableau suffisent à justifier une méthode experte. Un exemple extrait du vade-mecum Cet exemple met en œuvre la capacité «Calculer la longueur d un côté d un triangle rectangle à partir de celles des deux autres (théorème de Pythagore)», souvent évaluée comme tâche simple, et bénéficiant d'une procédure experte et automatisée. Cette tâche simple se voit ici plus ou moins cachée par une situation concrète, dans laquelle le formatage des figures mathématiques est oublié, l'angle droit n'étant pas codé ni renseigné par quelques horizontalité et verticalité. Mais la complexité de cet exemple vient principalement du fait que l'outil Pythagore n'est pas le but en soi : l'obtention de la hauteur de l'escalier n'est qu'une des étapes du problème. On peut étudier son respect des règles de la tâche-problème : complexe par la diversité des ressources mathématiques (mais peu de savoir-être mis en œuvre) ; finalisée vers un but concret fictif ; interactive avec les normes du monde du travail ; peu ouverte car peu de démarches conviennent (on peut néanmoins envisager un dessin à l'échelle) ; inédite, vraisemblablement. Aides à la démarche Des aides doivent être prévues pour les élèves qui ont besoin d être accompagnés pour réaliser la tâche complexe. Les aides proposées sont de différents types : aide à la démarche de résolution ; apport de savoir-faire, par exemple sous la forme d'une procédure de réalisation ; apport de connaissances nécessaires à la résolution.

La tâche complexe, un enjeu de l'enseignement des mathématiques Frédéric Barôme page 3 Il n'y a pas de hiérarchie entre ces types d'aide. Les aides ne sont pas destinées à donner des réponses mais à guider les élèves. Elles permettent de respecter le rythme d acquisition de chaque élève. Elles doivent être mises à disposition de l'élève en fonction des difficultés qu'il rencontre, seulement quand il en a besoin et dans l'ordre qui lui convient. Pour les élèves ayant utilisé une aide, on n évalue pas les connaissances et les capacités correspondant à l aide, mais on évalue positivement toutes celles qu'ils ont mises en œuvre sans aide. Exemple de l'escalier vu précédemment : aides à la démarche de résolution : - Quelle dimension te faudrait-il pour calculer la hauteur d'une seule marche? - Que peux-tu dire du sol et du mur? apport de connaissances : - Énoncé du théorème de Pythagore. apport de savoir-faire : - Exemple de calcul de longueur avec le théorème de Pythagore. Pédagogie différenciée La distribution des aides à la démarche marque donc une différenciation de la pédagogie dans le groupe classe. C'est la gestion de l'hétérogénéité. On peut également la pratiquer par l'utilisation de paramètres didactiques : le même problème peut être posé en utilisant des nombres entiers, des nombres décimaux ou des nombres fractionnaires. La difficulté intrinsèque du problème n'en sera pas changée, mais les différences dans les techniques opératoires rencontrées permettra de maintenir le groupe classe dans le même projet. Classiquement, on peut demande aux plus rapides de se confronter à des questions «défi». On peut également différencier le niveau de rédaction attendu. Tâches complexes et tâches automatisées La tâche complexe ne remplace pas les exercices d'application directe... Les apprentissages passent aussi par des tâches simples, automatisées, d'ordre procédural. Et si les programmes plaident pour des situations-problèmes donnant le goût des mathématiques, nous connaissons tous de nombreux élèves qui aiment les situations techniques et abstraites, et s'y sentent rassurés. Ces automatismes, nécessaires à la résolution de problèmes, s acquièrent par la pratique d exercices référés à des tâches simples : calculs isolés, récitation de résultats mémorisés, construction de figures de base, Ce sont les exigibles de la colonne centrale des programmes.... et inversement! La tâche complexe peut être proposée à n importe quel moment du processus d apprentissage. Proposée en début d'apprentissage, elle constitue un atout important pour les élèves car elle leur permet : d acquérir des compétences mobilisables dans la vie quotidienne ; de prendre davantage d'initiatives ; de relever un défi motivant ; de pouvoir bénéficier d'aides ciblées pour l accomplir. Gestion des tâches automatisées Lorsque les exercices d'application directe se sont révélés inefficaces pour maîtriser une technique, il est illusoire de penser «faire rentrer» celle-ci par une répétition de ces mêmes exercices. La réussite «à force de» se traduit par une acquisition éphémère. Adopter une pédagogie du détour est souvent beaucoup plus efficace : revenir souvent et par petites touches sur un entraînement ; aider les élèves à prendre conscience que c est parce qu ils maîtrisent mal telle ou telle technique qu ils sont freinés à un moment donné dans telle résolution de problème ; autoriser et interdire l'usage de la calculatrice à bon escient : l'autoriser peut permettre de centrer l'élève sur son problème, l'interdire peut obliger la réactivation de techniques opératoires. L organisation en spirale de la progression était déjà recommandée dans les programmes mais l apparition du socle commun en renforce notablement les avantages : elle permet de gérer la priorité à donner aux aptitudes du socle sur celles du programme qui sont hors socle : le premier épisode de travail sur un thème donné peut viser en priorité les aptitudes du socle et réserver pour la suite les autres objectifs fixés par le programme sur ce thème ;

La tâche complexe, un enjeu de l'enseignement des mathématiques Frédéric Barôme page 4 elle permet de multiples réinvestissements sur différents thèmes, favorisant l entretien et la consolidation dans la durée des aptitudes acquises ; elle permet aussi de multiplier et de renouveler au fil du temps les occasions d évaluation d aptitudes que certains élèves mettent plus de temps que d autres à construire. L' évaluation par compétence : explicite et positive On parle généralement d'évaluation par compétences, et c'est bien le titre du LPC, mais en l'occurrence, nous parlerons aussi d'évaluation de capacités, composantes des items, des domaines et des compétences (voir la terminologie utilisée dans le LPC). L'acquisition d'une capacité, c'est sa maîtrise technique et sa mobilisation hors contexte. Par définition, évaluer le socle commun, c'est évaluer le degré d'acquisition des capacités et compétences et non débusquer les erreurs commises pour enlever des points selon la gravité de ces erreurs. L'entrée par les aptitudes dans les programmes de mathématiques ne participe pas encore assez de la culture commune. Quelques principes généraux : l'évaluation de la maîtrise d une capacité ne peut pas se limiter à la seule vérification de son fonctionnement dans des exercices techniques ; prendre en compte la stabilité de la réponse : ce n'est qu'au bout de plusieurs évaluations positives espacées dans le temps qu'on considèrera la capacité acquise ; prendre en compte la variété du contexte : ce n'est qu'en pouvant la mobiliser, la réinvestir dans des situations variées, abstraites, concrètes, associée à d'autres capacités mathématiques, associée à des capacités d'autres matières, dans des situations où leur usage n est pas explicitement sollicité dans la question posée, qu'on considèrera la capacité acquise. Il ne s agit plus seulement pour l élève de connaître le théorème de Pythagore, ni même de l'appliquer correctement, mais de penser à l utiliser, ce qui présuppose que l élève prenne l habitude d analyser une situation concrète avec des outils mathématiques. Revoir la place de la note Les élèves qui obtiennent très souvent des notes basses finissent par se décourager, voire par déconstruire leur implication dans leur travail. Par exemple, un élève peut être capable de conduire un bon raisonnement et rencontrer une difficulté sur la réalisation technique ou, ce qui est très fréquent, rendre une mise en forme écrite de son raisonnement défectueuse. Pour autant, s ils ne mènent pas à bien les tâches données en évaluation du programme, ces élèves peuvent tout de même faire preuve de certaines compétences au sein même de ce travail. Ce que les notes permettent difficilement de mettre en évidence, ne donnant aucune information sur la maîtrise ou la non-maîtrise d une compétence. Il est bon de rappeler également le problème récurrent que posent à chaque enseignant les deux élèves qui ont eu 10/20 : celui qui a tout fait, mais avec la moitié des réalisations fausses, celui qui a tout fait juste, mais qui n'en a fait que la moitié. Évaluer les compétences acquises par ces deux élèves amènera à des constats bien différents... Explicitation La description et l'explicitation des attendus du LPC devront être faites en classe. Afin de rendre objective l évaluation de chaque capacité : la formulation des consignes doit permettre à l'élève de reconnaître ce qu'on attend de lui et/ou de s'auto-évaluer ; les critères d'évaluation, invariables pour une capacité donnée, définissent les qualités de la production attendue, et sont explicités. Exemple d'explicitation des critères Il convient tout d'abord de distinguer les domaines de la Compétence 3. Les domaines P3.C3.D3. et P3.C3.D4. concernent clairement les sciences expérimentales. Le domaine P3.C3.D2. concerne essentiellement les mathématiques. Quant au domaine P3.C3.D1. (Pratiquer une démarche scientifique et technologique, résoudre des problèmes), il concerne toutes les matières scientifiques. Considérons à évaluer la capacité «Extraire d un document, d un fait observé, les informations utiles.», en vue de renseigner l'item 1 (S'informer : rechercher, extraire et organiser l information utile).

La tâche complexe, un enjeu de l'enseignement des mathématiques Frédéric Barôme page 5 Il conviendra d'expliciter clairement et simplement les critères engagés dans son évaluation : Pour... Extraire d un document, d un fait observé, les informations utiles. tu dois - prendre en compte des informations ayant un rapport avec le sujet ; - ne pas être hors sujet ; - ne rien oublier ; - ne pas faire d'erreur de lecture ou de déformation de donnée. Cela pourra prendre la forme d'une fiche en annexe du cours réunissant ces capacités. Cette annexe pourra être autorisée lors du travail de l'élève, en prenant bien en compte le temps qui pourrait être perdu à sa mauvaise utilisation. Évidemment, il conviendra de ne pas expliciter des critères qui pourraient donner une indication simplifiant la tâche complexe! Dans l'exemple de l'escalier, il serait peu pertinent d'annoncer qu'on va évaluer l'utilisation du théorème de Pythagore... Indicateurs de réussite Lors de son traitement d'une tâche-problème, chaque élève va alors, dans le cadre de sa démarche personnelle de résolution et selon l ordre qui lui convient, mettre en oeuvre un certain nombre de capacités de la compétence 3. Pour mettre en oeuvre efficacement les ces critères d'évaluation (transversaux ou mathématiques), il est souvent utile de les décliner en indicateurs, signes observables ou mesurables, propres à chaque situation. Exemple de l'escalier vu précédemment : Capacités Proposer une méthode, un calcul, un algorithme, une procédure Indicateurs Tu as su proposer de calculer la hauteur de chaque marche à partir de la hauteur totale de l escalier, pour savoir si l' escalier est aux normes,. Utiliser les propriétés d une figure et les théorèmes de géométrie Tu as su reconnaître une configuration de Pythagore. Tu as su l appliquer correctement pour calculer la hauteur de l escalier. Mais, l évaluation des réussites au travers de solutions incomplètes ou partiellement erronées n est en effet possible que si l élève a osé garder trace de ses essais, de ses idées, de sa recherche. Trop d élèves n écrivent rien : ils préfèrent ne rien écrire plutôt que d écrire des choses fausses. D où la nécessité en formation de libérer leur inventivité et de valoriser leurs écrits intermédiaires, quitte à porter explicitement sur le texte du contrôle, par exemple : «Si tu ne trouves pas la solution, tu peux écrire les idées que tu as eues quand tu as cherché : si tes idées sont pertinentes, tu peux ainsi obtenir une partie des points.» Cela sous-entend une lecture inhabituelle des écrits imparfaits : l'enseignant-évaluateur ne cherche plus les erreurs mais doit extraire les éléments positifs d évaluation de certaines capacités du socle commun, puis les expliciter à l'élève en les référant aux indicateurs de réussite.