Syndrome d apnées du sommeil et risques cardiométaboliques La chirurgie bariatrique est-elle aussi efficace sur le SAOS que sur le diabète? Expert - E. FRIJA-ORVOEN (Paris) Animateur - H. PEGLIASCO (Marseille) ATELIER I
Syndrome d apnées du sommeil et risques cardiométaboliques J ai actuellement, ou j ai eu au cours des trois dernières années, une affiliation ou des intérêts financiers ou intérêts de tout ordre avec les sociétés commerciales suivantes en lien avec la santé. Société Vitalaire DÉCLARATION DE LIENS D INTÉRÊT
L obésité un problème de santé publique
Répartition de la population adulte par niveau d IMC en 2009 Pas de surpoids 53,6% Surpoids 31,9 % Obésité 14,5 % 53,0% 31,9% Obésité modérée 13,4 % Obésité massive 3,6% 10,6% 2,8% 1,1% Moins de 18,5 18,5 à 24,9 25,0 à 29,9 30,0 à 34,9 35,0 à 39,9 40,0 ou plus Obésité et surpoids : 46,4 %
Obésité - mortalité Taux de mortalité 300 250 200 150 100 50 Risque faible Risque modéré Risque élevé 0 15 20 25 30 35 40 Indice de masse corporelle (kg/m²) d'après Bray (1985)
Complications somatiques de l obésité n Complications cardiovasculaires : HTA, insuffisance coronaire, AVC n Complications respiratoires : SAS, SOH, asthme n Cancers n Complications métaboliques : diabète, dyslipidémie, atteinte hépatique (NASH) Conditionnent les risques à court et moyen terme
Complications somatiques de l obésité n Atteintes ostéoarticulaires et cutanées n Retentissement psychologique et social impactent la qualité de vie et le pronostic fonctionnel
Prise en charge de l obésité n Nutritionnelle : toujours indispensable, souvent décevante sur le long terme, insuffisante en cas d obésité sévère n Médicamenteuse : peu de médicaments disponibles, faibles pertes de poids, stabilité du poids difficile à obtenir n Chirurgicale : désormais partie intégrante de la prise en charge
Données 2011 (Buchwald,obes surg 2013) n Enquête de la fédération internationale pour la chirurgie de l obésité et des maladies métaboliques n 50 nations ou groupes nationaux interrogés n 340 768 interventions réalisés, stable par rapport à 2008 vs 146 203 en 2003
Données 2011 n France : 27 648 (3 ème rang après USA-Canada et Brésil) n Types d interventions : - gastrectomie en manchon : 10781 - anneaux gastriques ajustables: 6574 - court-circuit gastrojéjunal : 5307
Les choix techniques les plus fréquents n Roux-en-Y gastric bypass : la plus pratiquée sur le plan mondial (46,6%) n Anneaux gastriques ajustables: nette diminution (17,8%) n Sleeve gastrectomy ou gastrectomie en manchon: (27,8%) n Diversion biliopancréatique : reste plus rare (2,2/%)
Evolution des choix techniques 2003 2008 2011 RYGB 65,1 49 46,6 AGB 24,4 42,3 17,8 Sleeve gastrectomy 0 5,3 27,89 BPD/DS 6,1 4,9 2,1
Objectifs des interventions n Induire une restriction de la capacité gastrique : anneaux gastriques ajustables et gastrectomie partielle en manchon n Induire en plus une malabsorption : court-circuit gastrique selon technique en Y de Roux et diversion biliopancréatique
Techniques restrictives Gastrectomie en manchon (sleeve Gastrectomie) Création d une poche gastrique de 15-20 ml Boitier sous cutané Réversible Ablation de la majorité de l estomac irréversible
Court-circuit gastrique (bypass) irréversible
Diversion biliopancréatique n irréversible
Complications n Anneaux gastriques : dilatation de la poche avec ou sans glissement de l anneau, dilatation de l œsophage,retournement (ou infection) du boitier, rupture de la tubulure, carence martiale quasi constante chez les femmes réglées,en folates, rarement en protéines n Gastrectomie en manchon : Précoces : sténose gastrique (5%) et fistule gastrique (5 à 10% des cas), tardives : RGO
Complications des BPG n Chirurgicales: n Désunion de la ligne d agrafes n Sténose ou ulcère de la bouche anastomotique gastro-jéjunale n Médicales: n Carences nutritionnelles: Fer, B9, protéines, B12, troubles des phanères n Diarrhées et dumping syndrome
Qui opérer n n n n n IMC 40 kg/m 2 ou 35 kg/m 2 avec au moins une comorbidité susceptible d être améliorée après la chirurgie En deuxième intention, après échec d un traitement médical, nutritionnel, diététique et psychothérapeutique bien conduit pendant 6 à 12 mois En l absence de perte de poids suffisante ou en l absence de maintien de la perte de poids Chez des patients bien informés, ayant bénéficié d une évaluation multidisciplinaire, acceptant un suivi prolongé Avec un risque opératoire acceptable HAS Mai 2009!
Contre-indications n Affections psychiatriques sévères ou non stabilisés n TCA graves (boulimie) n Alcoolisme et toxicomanies n Obésité de cause curable (endocrinienne ) n Contre-indications à l anesthésie générale
Le bilan avant chirurgie (recommandations HAS 2009) n Recherche systématique et prise en charge des comorbidités : SAS et autres pathologies respiratoires, HTA, diabète, atteinte hépatique, tabagisme n Evaluation du comportement alimentaire n Education thérapeutique au plan de la diététique et activité physique
Le bilan avant chirurgie (recommandations HAS 2009) n Evaluation psychologique et/ou psychiatrique, de la qualité du soutien sociofamilial n Recherche de carences vitaminiques préexistantes n Capacité de mastication et état dentaire n Endoscopie oesogastroduodénale, rechercher une infection par Helicobacter Pylori
Evaluation préopératoire n Sujet bien informé, motivé n Sélectionné après évaluation par une équipe multidisciplinaire: n Médicale n Chirurgicale: risques opératoires acceptables n Diététique: dépistage des TCA, capacité à mastiquer n Psychiatrique: dépistage des troubles psy, vécu de l obésité
Chirurgie bariatrique : modalités de réalisation n Anneaux, sleeve gastrectomy : laparoscopie n Court-circuit gastrique : soit laparotomie, soit laporoscopie n Une majorité d interventions se fait par laparoscopie n Mortalité : 0,5 à 1,5%
Résultats
Résultats moyens sur le poids Anneaux gastriques : - 20 à 50 kg à 1 an postopératoire : 20 à 30 % du poids initial soit 50 % de l excès de poids initial BPG : - 50 à 70 kg à 1 an postopératoire: 35 à 45 % du poids initial soit 70 % de l excès de poids initial Sleeve gastrectomie 60% de l excès de poids initial (Shi,revue 2010)
Traitement chirurgical de l obésité n 2 méta-analyses : Buchwald (JAMA 2004), Maggard ( Ann of inter med 2005) 147 études sur la chirurgie (1103 articles sur le traitement de l obésité, 22 094 sujets concernés) La chirurgie est plus efficace que le traitement non chirurgical pour contrôler le poids pour les obésités classe III et les comorbidités, en particulier diabète, HTA, dyslipidémies.
O Brien 2006 IMC kg/m2 basal 6 m 12 m 18 m 24 m chirurgie 33.7 28.9 27.0 26.7 26.4 diététique 33.5 28.7 29.9 30.9 31.5 p 0.71 0.73 <0.001 <0.001 <0.001 Étude randomisée, 40 patients/groupe
O Brien, 2006
Effet sur les comorbidités Technique Anneau gastrique By-pass Effet + sur diabète 56,7% 80,3% Effet + sur hyperlipidémie 59% 97% Effet + sur l HTA 43% 68% Données extraites des métaanalyses de Buchwald
Etude SOS n Essai multicentrique suédois non randomisé comparatif entre le tt traditionnel et la chirurgie gastrique (anneau ajustable, Mason, BPG) n Plus de 1500 sujets obèses inclus dans chaque groupe à partir de 1987 n IMC 34 chez les hommes n IMC 38 chez les femmes n Résultats à 15 ans
Effets sur la mortalité : étude SOS Sjöstrom, International Journal of Obesity, 2008;32:S93-S97
Etude SOS n Efficacité sur le diabète : disparition du diabète dans plus de 80% des cas et diminution de l incidence du diabète chez les sujets opérés vs les sujets contrôles (5 fois moins risque à 5 ans) n Efficacité sur l HTA dans 65% des cas n Efficacité sur les dyslipidémies
Diabète et chirurgie bariatrique n Guérison du diabète 56 à 100% selon les études n Meilleurs résultats sont obtenus : - si diabète plus récent : 95% guérison si diabète < 2 ans vs 54% si > à 5ans - Chirurgie avec malabsorption plus efficace - Effet sur diabète dès les premiers jours après intervention
Autres effets de la perte de poids après chirurgie bariatrique
Evolution des symptômes n Dixon (2001): 132 sujets questionnaire sur la qualité du sommeil rempli avant et 1 an après l intervention amélioration symptômes cliniques n Rasheid (2003) à 6 mois en post-opératoire, amélioration de l Epworth : 12±0.1 6±1 n Pannain( 2010) revue sur sommeil et chirurgie bariatrique, 4 études :amélioration de l efficacité( 1 étude), des stades de sommeil lent profond (2 etudes), REM (3 études)
Perte de poids et comorbidité respiratoire n Dixon, 1999, 32 patients, 24,4 % asthme, amélioration après intervention score 44,5 à 14,3 Asthme amélioré chez 71% patients n Reddy (obes surg 2011),13 057 patients dont 18,6% traités pour asthme - À un an postopératoire: 39% n ont plus de traitement - Si traitement, moins de CT inhalés et de bronchodilatateurs
Maniscalco respiratoty medicine 2008 Comparaison sujets obèses un an après intervention bariatrique vs obèses non opérées
Effet sur la fonction respiratoire 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 avant après CVF VEMS VRE CRF CPT PaO2 PaCO2 Effet de la perte de poids après chirurgie bariatrique chez 26 obèses( tiré de Surg JH 1986)
De Souza 2010
Wei, J of Obesity, 2012
Tolérance à l effort avant après p CVF 101 % 111,3% 0,004 Distance parcourue test marche 6mn (m) 475,7 626,3 < 0,0001 FC repos b/mn 97 85 0,02 FC fin du test marche b/mn 141,8 114 <0,0001 Score dyspnée basal (Borg) 0,57 0,10 0,003 Score dyspnée fin test (Borg) 3,27 0,47 <0,0001 15 obèses, sans maladie cardiorespiratoire IMC : 42,1 kg/m2 avant, 31,9 kg/m2 après anneau gastrique Maniscalco, Obsesity Surgery 2006
Chirurgie bariatrique, perte de poids et SAOS
Karasson (2000) : diagnostic sur notion apnées constatées par l entourage Pas d enregistrement Amélioration signes cliniques de SAS
Grunstein,, sleep 2007
Métaanalyse Greenburg, 2009
Métaanalyse Greenburg, 2009
Revue générale Sarkhosh Obes surg 2013 Nombre sujets 5430 4095 543 246 % F 69 74 64 75 Age 45,3 ± 8,5 41,8 ± 6,9 39,4 ± 4,2 40,7± 4,3 IMC préop 51,6 ± 8,3 46,1 ± 5,2 47,7 ± 7,9 50,5 ± 4,9 SAOS % 39,9 28,7 24 18,3 Type chirurgie Durée suivi mois Amélioration ou guérison % RYGB LAGB LSG BDP 29 34,4 24,7 19 79 77 86 99
Perte de poids et PPC n Dixon(2005) : 92 % patients (n=23) sous PPC avant chirurgie, 24 % après perte de poids n Simard (2004) :arrêt PPC 86 % patients (25/29) n Guardiano (2003) : 8 sujets réévalués à 2 ans arrêt de la PPC chez 4 sujets
Lettieri JCSM 2008 ; 333-338
Lettieri JCSM 2008 ; 333-338
Et la diététique (Dixon, 2012)? n Comparaison des effets de la chirurgie bariatrique (anneau)et de la prise en charge conventionnelle de 60 patients obèses récemment diagnostiqués SAOS (étude randomisée) n IMC entre 35 et 55 kg/m2 n Evaluation à 2 ans
Effets à long terme de la chirurgie bariatrique
Maintien du poids à long terme
Effet à long terme sur le poids n Etudes de suivi montrent une perte maximale à 2 ans n Suivie d un rebond généralement modéré n Stabilisation à partir de 5 à 7 ans après la chirurgie
Stabilité du poids et chirurgie n Certaines techniques permettent une meilleure stabilité après la perte de poids : bypass et sleeve gastrectomy n Mécanismes de cette stabilité restent à élucider en particulier en terme de modifications hormonales induites par la chirurgie: rôle de la ghréline par exemple?
Chirurgie et marqueurs biologiques n Augmentation de l adiponectine plus marquée avec by-pass, corrélée avec la diminution de l IMC n Diminution de l insuline circulante, corrélée à la diminution de l IMC n Diminution de la résistance à l insuline n Ghreline : résultats discordants
Stabilité du poids et chirurgie n Certains facteurs prédictifs de risque de reprise de poids sont : les compulsions alimentaires la consommation d alcool la sensation de mauvaise qualité de vie avant l intervention (Odom, 2010)
Le suivi (recommandations HAS 2009) n Doit être assuré toute la vie n Rythme recommandé : 4 consultations la première année puis 1 ou 2/an n Rechercher systématiquement les signes cliniques de carences vitaminiques ou nutritionnelles + bilan biologique selon type intervention n Adapter le traitement des comorbidités n Chirurgie réparatrice : après délai de 12 à 18 mois n Grossesse envisageable seulement après délai 12-18 mois
Conclusion n La chirurgie bariatrique connait un essor important, sans doute en partie du fait de l amélioration des techniques chirurgicales et de la possibilité d interventions sous coelioscopie n L efficacité sur le poids et les comorbidités est incontestable n on observe plus souvent une amélioration qu une guérison complète du SAS
Conclusion n Un contrôle de l IAH est indispensable avant toute interruption de PPC n L amélioration, même partielle, permet parfois de modifier le traitement de fond n Le suivi prolongé est nécessaire afin de maintenir le bénéfice à long terme