Les Antédiluviens et les Modernes. Louis TREBUCHET Académie Maçonnique 17 Mars 2012



Documents pareils
GEORGES-HENRI LUQUET ET LA FRANC-MAÇONNERIE.

La franc-maçonnerie. Troisième tirage 2011

ADRESSES PHYSIQUES DES BUREAUX MARINE CENTRES D INFORMATION ET DE RECRUTEMENT DES FORCES ARMEES (CIRFA)

1 planche Cour du Roi, pour poser les cartes Audience. 5 pions Château, pour indiquer votre emplacement autour de la Cour

Il n est ordinairement attribué

FONDS CHARLES COURNAULT ( )

vos contacts CREDIT FONCIER IMMOBILIER

Les Éditions du patrimoine présentent La tenture de l Apocalypse d Angers Collection «Sensitinéraires»

Le répertoire de l Opéra de Paris ( ) Analyse et interprétation

Juin 2006 Obtention des deux concours de l enseignement : CAPES d anglais (64 ème ) et agrégation d anglais.

Manuscrits du Moyen Age

LA PLUS BELLE FAÇON DE RÉUSSIR VOS ÉVÉNEMENTS

VILLE DE NOUMEA ---- N 2007/68 SECRETARIAT GENERAL ---- SERVICE DES FINANCES ---- AS NOTE EXPLICATIVE DE SYNTHESE ----

- 2 AQ - BANQUE LABORDE. ORIGINE : Don du Marquis de LABORDE, achat 2 AQ 26 à 29

5-9. L enveloppe. Objectif Ecrire une adresse sur une enveloppe. L enveloppe 5-9. Le dispositif de techniques de recherche d emploi 1

TROUSSE D INSTRUCTIONS SUR LA SOUS-LOCATION

10. Peter F. DRUCKER (1909- )

Petits déballages entre amis : plutôt bien emballé!

Le management au Ministère de la Défense

Session pilote COLLOQUE DE CLOTURE

1. L'été le plus chaud que la France ait connu ces cinquante dernières années.

Les marchés de l immobilier à l international. Évolutions, structures et performances

ANNEXE A L ARRETE DSP N 2014/004

INOUBLIABLE ECOSSE ET ILE DE SKYE AVEC LE CLOS DU C.H.U DE BORDEAUX. Du 01 au 08 Juin 2014

Homophones grammaticaux de catégories différentes. ce se

Mme la mairesse Caroline St-Hilaire, présidente M. Albert Beaudry M. Éric Beaulieu Mme Lorraine Guay Boivin Mme Sylvie Parent

CLASSE : : : ; : : : : LA LIBERTE GUIDANT LE PEUPLE EUGENE DELACROIX

Tête féminine, dîte "Tête Warren". Marbre de Paros Museum of Fine Arts, Boston. Boston

EXTRAIT DU REGISTRE DES DELIBERATIONS DU CONSEIL SEANCE DU 20 FEVRIER au 5 Cité de la Traverse - Salle de la Traverse - Poitiers

EXTRAIT DU REGISTRE DES DELIBERATIONS DU CONSEIL COMMUNAUTAIRE. Marie-France LE COZ, Marcel JAMBOU, Anne Marie QUÉNÉHERVÉ BAYE : CLOHARS-CARNOËT :

Ambassador s Activities

Pierre TREMBLAY et Ozanne ACHON

Le 8 mai Bonjour,

Introduction 1. Bibliographie 317 Remerciements 323 Index Pearson Education France Investisseurs de légende Glen Arnold

Introduction : Chapitre XII Les débuts du judaïsme

L Organisation mondiale du commerce...

CONCILIATEURS DE FRANCE Fédération des Associations de Conciliateurs de Justice (Associations de Cour d Appel)

Direction générale Personnes handicapées Au service du citoyen! Carte de stationnement pour personnes handicapées

EXTRAIT DU REGISTRE DES DELIBERATIONS DU CONSEIL MUNICIPAL

Questionnaires sur les étapes du développement

EXTRAIT DU REGISTRE DES DELIBERATIONS DU CONSEIL MUNICIPAL

DE MÉMÉ À JEAN-NOËL GUÉRINI

Maître Eventail, Les mains qui fleurissent

MASTER DROIT DES AFFAIRES APPLIQUÉ AU MONDE DE LA SANTÉ FACULTÉ DE DROIT DE SAINT-ÉTIENNE

Accord économique de consultation mutuelle (Paris, 20 mars 1945)

EXTRAIT DU REGISTRE DES DELIBERATIONS. de la COMMUNAUTE DE COMMUNES du PAYS DE SAINT AUBIN DU CORMIER SEANCE DU 11 JUIN 2015

FORMANT QUORUM SOUS LA PRÉSIDENCE DE MONSIEUR MARC ROY, MAIRE. Monsieur André Morin, directeur général, Madame Lucie Coallier, greffière.

Référence du texte : AD 06 7B897 Sénéchaussée. Procédure criminelle, meurtre sur grand chemin : procès-verbal d'accord et exposition des faits.

ERIC FRECHON. La cuisine pour un vélo, cela semble bien surprenant. Et pourtant, c est bien pour cela qu Eric Frechon est arrivé aux fourneaux.

Programme de formation

Réseau CAI Bpifrance L EQUIPE DES CHARGES D AFFAIRES INTERNATIONAUX UBIFRANCE

LA FRANCE, TERRE DE PROJETS D ENVERGURE POUR LE GROUPE IMMOBILER

LA BANQUE NATIONALE DE SERBIE EXPRIME SES REMERCIEMENTS À LA BANQUE DE FRANCE POUR LES COPIES DE DOCUMENTS D ARCHIVES

par Michel Prévost Archiviste en chef de l'université d'ottawa

PRÉFACE. représenter le roi ou la nation? Préface

Pourquoi le Canada a besoin de services bancaires postaux

CONSEIL MUNICIPAL DU 10 JUIN 2013

Une religion, deux Eglises

1750 : INAUGURATION DU MUSÉE DU LUXEMBOURG, PREMIER MUSÉE OUVERT AU PUBLIC

I. FAIR-PLAY, D OÙ VIENS-TU? QUI ES-TU?

La stabilité des prix : pourquoi est-elle importante pour vous? Brochure d information destinée aux élèves

Les Canadiens continuent de négliger des moyens simples de régler leurs dettes personnelles plus rapidement

MEMOIRE POUR UNE HABILITATION A DIRIGER DES RECHERCHES

S inscrire à l ISFEC pour devenir professeur des collèges et lycées Les concours les formations l alternance l accord collégial

La liberté guidant le peuple sur les barricades

Désignation de candidats pour l élection au sein de l Organe de contrôle de gestion commun

Richard Abibon. «Le sujet reçoit de l Autre son propre message sous une forme inversée»

LES MASTERS 2 DANS LE DOMAINE DES STAPS EN FRANCE 2012/2013 NORD-PAS-DE-CALAIS. Université Lille 2

Rotary International. District 1720 DOSSIER DE PRÉSENTATION

re:inventez vos événements professionnels Une expérience unique du business

PREMIÈRE SUR LE MARCHÉ DU CRÉDIT RENOUVELABLE DOSSIER DE PRESSE. Cetelem obtient une attestation de Vigeo

Bologne à l EPFL. Réforme de Bologne Implications pour l EPFL. Prof. Dominique Bonvin, Doyen Bachelor-Master

COMPTE RENDU DU CONSEIL MUNICIPAL

PROGRAMME DES COURS DE LICENCE

FICHE ENSEIGNEMENT SUPERIEUR IRLANDE

La vie de cour au château de Versailles avant la Révolution Française (1789)

Centre d etudes. strategiques de l Afrique. E t a b l i r d e s p a r t e n a r i a t s p o u r l a v e n i r d e l A f r i q u e

EXTRAIT DU REGISTRE DES DECISIONS DU BUREAU

Estimation, 2 e édition

Tapori France ATD Quart Monde /5

Structure et lignes de conduite

COMMUNIQUÉ L ORDRE DES INGÉNIEURS FORESTIERS DU QUÉBEC DÉCERNE SES DISTINCTIONS POUR L ANNÉE 2008

CAP TERTIAIRE/INDUSTRIEL

A propos de Géraldine Werner, fondatrice de BarreShape

Document de travail. Business Corporations Act Securities Transfer Act

CINEMA FRANCAIS SUR LPB

OFFICE NATIONAL DE L ÉNERGIE. DEMANDE DE PERMIS D EXPORTATION D ÉLECTRICITÉ Hydro-Québec

L ORGANISATION DU GROUPE CREDIT AGRICOLE S.A. AU SERVICE DE SON PLAN DE DEVELOPPEMENT

PROTOCOLE RELATIF À L ARRANGEMENT DE MADRID CONCERNANT L ENREGISTREMENT INTERNATIONAL DES MARQUES

Loi organique relative à la Haute Cour

Proclamation establishing three different time zones in Nunavut, for the purposes of the definition of standard time in the Interpretation Act

A R R E T E N Accordant la médaille d honneur agricole à l occasion de la promotion du 14 juillet 2015

De l Abbaye Notre-Dame-aux-Nonnains à la Préfecture de l Aube

GESTION DES ARCHIVES

SÉANCE ORDINAIRE DU 3 FÉVRIER 2014

Retraite du Service public! Préfon-Retraite : la retraite complémentaire du service public

El Tres de Mayo, GOYA

Exporter l'église nationale dans le royaume voisin pour ne faire plus qu'un

URBAN PRESTIGIMMO. SCPI Malraux. Présentation en. points clés

Transcription:

Les Antédiluviens et les Modernes Louis TREBUCHET Académie Maçonnique 17 Mars 2012 0

Le thème qui m a été proposé pour cette intervention, Anciens et Modernes, m a semblé suffisamment imprécis pour que je le traite à ma façon. L opposition Grande Loge de Londres et Grande Loge des Anciens a été traitée maintes fois, par plus savant que moi, et je voudrais citer en particulier le petit livre, aussi concis que précis, publié par Cécile Revauger en 1999, dans le cadre de la collection encyclopédie maçonnique, et intitulé La querelle des «anciens» et des «modernes». Je n y reviendrais donc pas, mais je vais plutôt m intéresser à toute la franc-maçonnerie traditionnelle qui existe avant et autour de la Grande Loge de Londres, dans laquelle elle ne se reconnait pas, et qui, nous le verrons, semble connaître un certain troisième degré avant la Grande Loge de Londres, puis le Royal Arch voire même des degrés écossais bien avant la naissance de la Grande Loge des Anciens. C est pourquoi j intitulerai plutôt cette planche les Antédiluviens et les Modernes, du nom dont se sont quelquefois affublés ces anciens maçons dans des publications satiriques. Leon Hyneman prend la liberté d écrire en 1877 : «Le mouvement de 1717 ne fut pas un "renouveau", comme le dit Anderson [] Son histoire est écrite cinq ans après la Révolution et la formation de la nouvelle Grande Loge, mais pas un mot de cet évènement important, ni référence ni allusion à un simple incident, une circonstance, en relation avec elle, le sujet n a pas de place dans sa publication. Les quatre loges qui se rencontrèrent avec "quelques anciens frères" à la Taverne du Pommier étaient-elles sans connexion ou relation avec d autres organisations maçonniques? Quelle est l origine de ces quatre loges? Leurs membres doivent bien avoir été faits maçons sous quelque autorité? Il doit bien y avoir eu une organisation antérieure sous l autorité de laquelle ils furent reçus et admis dans la fraternité? Qui étaient ces "anciens frères"? Sous quelle bannière ont-ils été faits maçons? 1» C est bien ce que nous allons rechercher maintenant. La franc-maçonnerie non-opérative avant 1717 En ce qui concerne l une des quatre loges fondatrices, l oie et le grill, sur la place de Saint Paul, nous disposons d un indice : John Aubrey signale dans un mémorandum rajouté sur son manuscrit de l Histoire naturelle du Wiltshire : «Ce jour, le 18 mai 1691, lundi qui suit les rogations, il y a une grande convention à l église St Paul de la fraternité des maçons adoptés, où Sir Christopher Wren doit être adopté frère, avec Sir Henry Goodrie, de la Tour, et divers autres 2» ce qui outre l acceptation de Sir Christopher Wren semble témoigner de l existence dès 1691 d une loge à St Paul. D ailleurs la loge The goose and the Gridiron, devenue la loge Antiquity a toujours revendiqué que Wren avait été un des Maîtres de la loge, et affiche encore dans ses locaux un tableau censé le représenter. La divulgation de 1730 Masonry Dissected de Prichard donnera la date de 1691 non seulement pour la création de The goose and the Gridiron, mais aussi pour le début de la francmaçonnerie non opérative 3. Roger Dachez indique que la salle de la taverne l Oie et le Grill dans laquelle se tint la Grande Loge de Londres à la St Jean d été 1717 pouvait réunir au maximum une vingtaine de personnes 4, mais nous trouverons en dehors de Londres, et bien avant 1717, un bien plus grand nombre de francs-maçons non-opératifs, voire symboliques, si non spéculatifs. 1 Freemasonry in England from 1567 to 1813 Leon Hyneman 1877 2 (*)1691 Aubrey 3 (*)1730 Masonry Dissected 4 L invention de la franc-maçonnerie Roger Dachez 2008 p.160 1

Le 2 Juillet 1688, un certain John Jones, est le Terrae Filius, chargé de faire la harangue des étudiants pour la fête de l université de Dublin. C est dans son discours qu apparait la première mention en Irlande de franc-maçonnerie nonopérative : «une société de francs-maçons, gentilshommes, opératifs, &c, qui se lieront par le serment de ne jamais révéler leur puissant non-secret, et d aider tous les frères qu ils rencontreront dans la détresse, à l exemple de la fraternité des francs-maçons de Trinity College 5» Les premières minutes d une Grande Loge Provinciale en Irlande remontent à la St Jean d hiver 1726 à Munster 6, mais la Grande Loge d Irlande est antérieure à 1725 puisqu on rapporte l élection d un nouveau Grand Maître cette année-là 7. Cette franc-maçonnerie connaitra le mot et les signes des maîtres au plus tard en 1711. En effet un manuscrit de la collection Sir Thomas Molyneux du Trinity College 8, qui porte la date de 1711, indique «Serrez le maître par la colonne vertébrale, mettez votre genou entre les siens et dites Matchpin. Serrez le compagnon de métier à la phalange et aux jointures et dites Jachquin. Serrez l apprenti entré aux jointures et dites boaz, ou c est creux». En ce qui concerne la France, il est possible que les deux premières loges soient deux loges arrivées à Saint Germain en Laye en 1689 dans les bagages, si je puis dire, des régiments de la garde de Jacques II, La Parfaite Egalité, loge du Régiment de la Garde Irlandaise du Colonel Lord William Dorrington qui débarque à Brest le 9 Octobre 1689 9, et La Bonne Foi loge du Régiment écossais du Colonel Dillon, mais les éléments décisifs de preuve manquent. Le 24 Octobre 1776 la loge La Parfaite Egalité, dont le régiment est alors aux ordres du Colonel Comte de Walsh-Serrant et stationne à Bapaume, demande au Grand Orient de France une régularisation de sa constitution. Le 13 mars 1777 le Grand Orient admet que ses constitutions primitives datent du 26 mars 1688, époque où le régiment se battait pour Jacques II Stuart en Irlande, et qu elles ont été renouvelées par la Grande Loge de France le 9 octobre 1772 10, mais nous ne sommes pas en possession des documents sur lesquels la Grande Loge de France se base en 1772. En tout cas on parle de franc-maçonnerie en France dès le tout début du XVIIIème siècle : Les freimaçons, vaudeville sur un air anglais est saisi en 1705 chez le libraire Huchet, qui a semble-t-il des liens avec les jacobites 11. A York, la maçonnerie opérative est ancienne et solidement établie. Le manuscrit York ms n 4, un ancien devoir, est signé en 1693 par Mark Kypling et contient le nom des cinq autres membres de la loge, dont le surveillant, Mr Isaac Brent, Lodge Ward. 12, et des réunions des «Anciennes et honorables assemblées des Maçons libres et acceptés» sont attestées à York de 1712 à 1725 13. Le plus ancien parchemin de minutes de la loge d York retrace des assemblées en mars 1712, juin, août, décembre 1713, durant lesquelles furent à chaque fois reçus maçons plusieurs 5 Masonic reprints and Historical revelations including original notes and additions Henry Sadler & W.J. Chetwode Crawley 1898 page XX 6 History of the Grand Lodge of Free and Accepted Masons of Ireland John Heron Lepper and Philip Crossle 1925 page 64 7 Dublin weekly journal Num XIII Samedi 26 juin 1725 8 The early masonic catechisms Douglas Knoop, G.P. Jones & Douglas Hamer 1975 p.69 9 La Franc-maçonnerie en France Tome 1 Gustave Bord 1910 p.491 10 Loges et Chapitres de la Grande Loge et du Grand Orient de France Loges de Province Alain Le Bihan edition 1990 p.329 11 Réseaux maçonniques et mondains au Siècle des Lumières André Kervella 2008 p.14 12 The history of freemasonry Robert Freke Gould Vol I Chap II Edition 1882 page 68 13 The history of freemasonry Robert Freke Gould Vol III Chap XVIII Edition 1885 page 401 2

gentilshommes. Le président de 1711 à 1713 puis de 1720 à 1723 fut Sir Walter Hawksworth, Chevalier et Baronet, dont un portrait orne encore la loge de York 14. On peut lire parmi ces minutes, celle-ci, proche de la naissance de la Grande Loge de Londres : «A la loge de St Jean, à la Noël 1716, dans la maison de M. James Boreham, située à Stonegate, York, au cours de la loge générale tenue par l Honorable Société et Compagnie des Francs-maçons de la cité de York, John Turner, Esq, prêta serment et fut admis dans ladite Honorable Société et Fraternité des Francs-maçons. Signé Charles Fairfax, Esq, Président adjoint 15». Une lettre de 1778 du Grand Secrétaire de la Grande Loge de York retrace tous les Grands Maîtres de York de 1705 à 1734 16. Mais c est en Ecosse que nous trouverons la franc-maçonnerie non-opérative la plus nombreuse, travaillant symboliquement, et connaissant elle aussi le mot de maître bien avant 1717. Plus de cent non-opératifs identifiés seront reçus dans les loges écossaises entre 1685, l accession au trône de Jacques II Stuart, et 1717. Six loges écossaises de cette époque sont même constituées en majorité, voire fondées, par des non-opératifs. Dunblane est une petite loge de 13 non-opératifs, membres de la gentry et tous fervents jacobites qui seront relativement assidus, mais ne se préoccuperont guère du métier 17 jusqu à 1716, après l échec de la rébellion Jacobite de 1715, date à laquelle ils laisseront la prédominance aux opératifs 18. A la Saint Jean d hiver 1695, 13 maîtres «de la loge d Hamilton s établissent en une corporation» 19 et s obligent à obéir à toutes décisions ou ordonnances des maîtres de la Société pour le gouvernement et l unité de la loge. La loge de ce tout petit bourg regroupera entre 1690 et 1715 une bonne quinzaine de non opératifs régulièrement présents. C est la première mention d une structure regroupant les maîtres non-opératifs au sein d une loge. Lorsqu un document écossais, le manuscrit Sloane 3329 révèlera l existence vers 1700 du mot de maître, de la griffe et des cinq points de la maîtrise en Ecosse, c est peut-être ici, à Hamilton, qu il faudra en chercher l origine. Les deux loges de non-opératifs des comtés des Borders, Kelso et Haughfoot, seront, elles, composées quasi exclusivement de whigs, opposés au papiste Stuart. Elles regrouperont à elles deux une vingtaine de non opératifs, et travailleront suivant le rituel en deux degrés du manuscrit des archives d Edimbourg de 1696 20. La loge d Aberdeen, dont le père du pasteur Anderson, vitrier de son état, fut secrétaire et deux fois Vénérable, recevra comme maçons 31 non-opératifs entre 1679 et 1698, pour la plupart des gentilshommes 21. La loge de Dumfries, petit port de la côte ouest face à l Irlande, a ceci de particulier qu elle est créée à l arrivée dans le bourg d un bourgmestre catholique, nommé par Jacques II Stuart, et revendique de faire des maçons «en raison de leurs bonnes qualifications de chrétienté 22»,maçons parmi lesquels on notera Francis 14 History of freemasonry in York W. J. Hughan 1871 reprint 2010 p.16 15 History of freemasonry in York W. J. Hughan 1871 reprint 2010 p.56 16 The history of freemasonry Robert Freke Gould Vol III Chap XVIII Edition 1885 page 408 17 Les origines de la Franc-maçonnerie Le siècle écossais David STEVENSON p.283 18 History of the lodge of Edinburgh (Mary s Chapel) N 1 David Murray Lyon 1873 p.416 et suiv. 19 The first freemasons Scotland s early lodges and their members David Stevenson 1988 p.83 20 History of freemasonry in the province of Roxburgh, Peebles, and Selkirkshire Fred Vernon 1893 p. 83 et suiv. P. 281 et suiv. 21 Notes on the early history and records of the Lodge Aberdeen I ter A. L. Miller 1919 22 History of the old lodge of Dumfries James Smith 1892 p.14 3

Maxwell of Tinwald, membre de la «gentry papiste et jacobite» qui manifestera en faveur du prétendant Jacques III Stuart le 29 mai 1714 à Lochmaben 23. Les diverses minutes de ces loges montrent qu elles ne fonctionnent pas du tout comme des loges opératives. L usage y est d opérer le même jour la réception comme apprenti entré et le passage à compagnon de métier, ce qui est totalement contraire aux usages des loges opératives. Au cours d une tenue de Dunblane quatre gentilshommes furent reçus apprentis puis passés compagnons après avoir été interrogés entretemps sur des connaissances qui, dans ces conditions, ne peuvent être techniques, mais bien symboliques 24. Dumfries n 4 25, manuscrit découvert dans les archives de la loge de Dumfries, qui date des environs de 1700 et semble avoir été beaucoup utilisé, est un des deux anciens devoirs à s adresser non plus au vrai maçon, mais au franc-maçon, mot qu il utilisera plusieurs fois. Plusieurs nouveautés importantes s y trouvent. C est la première fois que l assemblée des maçons est prévue à la Saint Jean d été au lieu de la Saint Jean d Hiver. C est la première fois qu on parle délibérément à celui qui «entre dans l association pour agrandir ou satisfaire sa curiosité», c est la première fois qu on cite des éléments de rituel tels que l entrée la corde au cou, ou le genou droit dénudé en terre pour le serment. On y parle du Mot, mais aussi de la symbolique : «d abord qu il apprenne ses questions par cœur, puis ses symboles, et ensuite on fera comme la loge le juge convenable» Et en effet il semble que «les trois piliers» que sont l équerre, le compas et la Bible y soient déjà vécus symboliquement : la maçonnerie est «un travail d équerre» et le maçon doit user de «l ordre du compas». Le manuscrit Sloane 3329 26, proche du Dumfries et daté de la même époque, vers 1700, révèle déjà le signe pénal du premier degré et la batterie du premier degré en trois coups par deux et un, la marche de l apprenti, et surtout la poignée de main du compagnon ainsi que la griffe du maître qui se révèlent être exactement celles que nous connaissons aujourd hui. Il décrit «le mot des maîtres, et c est Mahabyn qui est toujours divisé en deux mots, et se tenant debout, rapprochés, poitrine contre poitrine, l intérieur de leurs chevilles droites joints, la griffe des maîtres de leurs mains droites et le bout des doigts de leurs mains gauches tenant serré le creux de la colonne vertébrale de l autre, et ils se tiennent dans cette posture pendant qu ils se murmurent à l oreille l un Maha, l autre Byn». Nous sommes aux alentours de 1700 et le troisième degré ne sera réellement en usage dans toutes les loges des Modernes que cinquante ans plus tard. La réalité de 1717 Nous constatons donc ici, à tout le moins en Ecosse, en Irlande et en Angleterre, l existence d une franc-maçonnerie traditionnelle non-opérative, peutêtre pas encore spéculative mais déjà symbolique, plusieurs décennies avant 1717. Et pourtant le pasteur Anderson n en parle jamais, même pas dans ses constitutions de 1738 qui décrivent avec complaisance les évènements de 1717. Pourquoi? C est que notre pasteur n est pas aussi neutre qu on le présente, bien au contraire! 23 The History of the late Rebellion raised against His Majesty King George by the Friends of the Popish Pretender Rev. Peter Rae Edinburgh 1718 p.49 24 History of the lodge of Edinburgh (Mary s Chapel) N 1 David Murray Lyon 1873 p.416 25 The early masonic catechisms Douglas Knoop, G.P. Jones & Douglas Hamer 1975 p.50 26 The early masonic catechisms Douglas Knoop, G.P. Jones & Douglas Hamer 1975 p.45 4

L étude de deux sermons du Révérend Anderson, de 1712 et 1715, est révélatrice. Nous découvrons dans le sermon de 1712 27 un pasteur très engagé, aussi bien en religion qu en politique, qui n hésite pas à invoquer la destruction de Jérusalem par les armées de Nabuchodonosor dans sa lutte acharnée contre les Papistes et les Jacobites, et pour la future succession de la Reine Anne par le très protestant George de Hanovre. Et son sermon de 1715 28 renvoie au passé la question «qui assassina le roi Charles 1 er Stuart?», mort qu il justifierait presque par ses «nombreuses et haineuses provocations commises envers le Peuple de Grande Bretagne», pour la remplacer par la question nouvelle «quel Parti est le plus Loyal au ROI GEORGE?» Jean Théophile Désaguliers, l animateur des premières années de la Grande Loge de Londres, Grand Maître en 1719, orateur lors de l installation du duc de Montagu en 1721, député Grand Maître en 1722 et 1723 29, n est pas d une opinion différente et en outre il est bien placé à la cour du nouveau roi, George de Hanovre. Appointé en 1714 comme chapelain de l église St Laurent à Little Stanmore 30 par le futur duc de Chandos, payeur-général des armées, il obtient aussi une rente du Lord High Chancelier, William Cooper 31. Le ton du récit de 1717 par James Anderson dans ses constitutions de 1738 est assez clair. Il commence ainsi : «Le roi George 1 er entra à Londres de la manière la plus magnifique le 20 septembre 1714. Après que la rébellion fut réprimée en 1716, les quelques loges de Londres 32» Le premier Grand Maître noble de la Grande Loge de Londres, en 1721, James 2 ème duc de Montagu, sera un whig convaincu qui lèvera spécialement un régiment de cavalerie pour s opposer à la tentative du prince Charles Edward Stuart en 1745 33. Tout cela ressemble fort à la reprise en main par le pouvoir whig d une fraternité où les whigs sont minoritaires, à une époque où la récente accession au trône de George de Hanovre, trois ans plus tôt, ne fait pas l unanimité 34, où l on dit que 5 écossais sur 6 sont Jacobites 35. Parmi la centaine de francs-maçons écossais non-opératifs vivant encore en 1717, que j ai étudiée, je dirais qu un tiers est jacobite ou quaker, et un quart whig. Qu un gouvernement totalement whig, après avoir porté sur le trône George de Hanovre à la place de Jacques III Stuart en 1714, après avoir maté le soulèvement militaire Jacobite à Sheriffmuir en 1715, après avoir assuré sa prédominance au parlement par le Septennial Act en 1716 36, ait la volonté en 1717 de contrôler la société civile et donc la franc-maçonnerie n a rien d étonnant. 27 A sermon preach d in Swallow-street, St. James s, on Wednesday, Jan. 16. 1711/12 being the national fast-day James Anderson, MA, printed by J.H. for J.Lawrence, at the Angel in the Poultry, 1712 p. 9, 11, 13 et 15 28 No King-Killers, a sermon preach d in Swallow-street, ST. James s on January 30 1714/15 James Anderson, MA, printed for M. Lawrence, at the Angel in the Poultry, 1715 p.13 et 22 29 The new book of constitutions of the Ancient and Honourable Fraternity of free and accepted Masons James Anderson 1738 reprint p. 110, 113, 115 et 116 30 The environs of London Vol.3 Parish of Whitchurch 31 Jean Théophile Désaguliers Michel Baron The rough ashlar 2005 32 The new book of constitutions of the Ancient and Honourable Fraternity of free and accepted Masons James Anderson 1738 reprint p. 109 33 Transactions in Scotland in the years 1715-16 and 1745-46 George Charles Vol.2 p.7 34 The first George in Hanover and England Lewis Melville 1908 Vol.1 p ;219-220 35 A history of english-speaking people Vol II Sir Winston Churchill 36 Walpole John Morley 1899 p.54 5

On ne s étonnera donc pas que quelques jours avant la St Jean d été 1722, la Grande Loge de Londres, inclinée à maintenir le Grand Maître Montagu en fonction, se rende en délégation auprès de Lord Townshend, pour «l assurer de son zèle envers la personne de sa majesté et son gouvernement», ce à quoi le secrétaire d état répond «qu ils ne craignent aucune molestation de la part du gouvernement, aussi longtemps qu ils ne s occuperont que des anciens secrets de la [maçonnerie] 37». La réaction jacobite ne se fera pas attendre. Dans les semaines qui suivent, le duc de Wharton, de retour d Europe où il s est converti à la cause jacobite 38, prend la Grande Maîtrise en 1722 par un mini coup de force 39. Il la perdra l année suivante, mais la lutte d influence, perdue à Londres par les jacobites, se poursuivra sur le sol français. Jacobites et modernes en France de 1725 à 1737 La première loge française attestée est fondée en 1725 par Charles Radcliffe of Derwentwater, James-Hector McLeane of Duart et Dominique O Heguerty, ainsi que l indique l article Franc-Maçonnerie rédigé pour le supplément de l Encyclopédie par le Frère Joseph Jérôme Lefrançois de Lalande 40. Cet article fut un temps mis en cause, mais il semble que les meilleurs historiens jugent maintenant raisonnable d y accorder un certain crédit 41. Ce que ne dit pas notre savant astronome, et néanmoins Vénérable de la loge Les Neufs Sœurs, c est que les fondateurs de 1725 ne doivent rien à la Grande Loge de Londres de 1717 et sont tous trois fervents jacobites, très actifs à la cour de Saint Germain. Les deux frères James et Charles Radcliffe of Derwentwater sont petits-fils de Charles II Stuart. James, le frère ainé, a été décapité à la Tour de Londres le 24 Février 1716, et Charles le sera à son tour le 8 Décembre 1746. Une question se pose : où et comment nos trois fondateurs ont-ils, selon l expression écossaise, «reçu le mot de maçon»? Gustave Bord avance que Charles Radcliffe of Derwentwater aurait pu connaître la franc-maçonnerie par le Chevalier de Ramsay 42, encore faudrait-il que celui-ci ait été maçon à l époque. Or Ramsay n a été initié qu en mars 1730 à la loge The Horn de Londres 43. James Fairbairn Smith imagine que Derwentwater aurait été reçu maçon à Dilston Castle lors de rencontres avec son frère James et les barons écossais 44. André Kervella suppose que Dominique O Heguerty, aurait pu connaître la maçonnerie par son frère Patrick, capitaine du régiment d infanterie de Dillon 45. Gustave Bord relève effectivement Patrice Heguerty comme membre de la loge la Bonne Foi, mais sans citer ni ses sources ni la date 46. Une seule chose est sûre, c est la relation entre Allan Cameron of Lochiel, gentilhomme de la chambre du prince Edouard et membre de la loge écossaise de 37 The masonic delegation of 1722 T. Fuller AQC99 1986 38 The life and times of prince Charles Stuart Alexander Charles Ewald 1883 p.40 39 The new book of constitutions of the Ancient and Honourable Fraternity of free and accepted Masons James Anderson 1738 reprint p. 114 40 Encyclopédie ou dictionnaire raisonné des Sciences, des Arts et des Métiers Troisième édition 1779 Tome XV Article Francs-maçons p.357 Joseph Jérôme Lefrançois de Lalande 41 Les Ducs sous l acacia Pierre Chevalier édition 1994 Chapitre premier p.9 à 43 42 La Franc-maçonnerie en France des origines à 1815 Gustave Bord 1908 Tome 1 p.118 43 Ramsay and his Discours revisited Alain Bernheim Acta Macionica 14 (2004): p.111-134 note 1 44 The rise of the ecossais degrees James Fairbairn Smith 1965 p.10 45 Réseaux maçonniques et mondains au Siècle des Lumières André Kervella 2008 p.34 46 La franc-maçonnerie en France Gustave Bord 1908 page 490 6

Dunblane 47, et James Hector MacLeane, qui remplit en même temps que lui le rôle d agent de liaison des jacobites avec les clans des Highlands 48. On sait qu ils se connaissent et se sont rencontrés 49. Bien que le plus jeune, ce serait peut-être lui le véritable fondateur de la loge, ce qui expliquerait qu il ait été pendant plusieurs années «Grand Maître des loges du Royaume de France 50», avant de passer la main au Comte de Derwentwater à la Saint Jean d Hiver 1736 51. Car si la concurrence whig s est transportée sur le sol français avec la loge Au Louis d argent le 3 avril 1732 52 et la tenue à Paris en 1734 d une loge où la Grande Loge de Londres était représentée par le duc de Richmond et Jean Théophile Désaguliers, en présence de l ambassadeur d Angleterre, Lord Waldegrave, membre de la loge londonienne l oie et le grill 53, la Grande Maîtrise française est encore jacobite en 1737. Mais le gouvernement anglais interviendra politiquement auprès du Cardinal de Fleury, premier ministre de Louis XV par l intermédiaire notre Lord Waldegrave. L abbé de la Garde indique dans son gazetin du 19 Septembre 1737 «Les freys-massons politiques disent que cette déffense de s assembler a été sollicitée par l ambassadeur d Angleterre, de l ordre de son maître qui appréhende que Mylord Derwenhouater grand maître de cet ordre et jacobite outré, ne se serve de toutes ses associations en faveur du Prétendant et contre son gouvernement 54». L intervention sera efficace puisqu à partir du 24 juin 1738 le Grand maître ad-vitam sera un pair de France, le duc d Antin, initié dès avant Septembre 1737 55, peut-être à Aubigny par le duc de Richmond 56. Le rameau Jacobite aura alors perdu le pouvoir de direction de la Franc-maçonnerie Française, au profit du rameau Andersonien, mais il aura eu le temps de transmettre les premiers degrés écossais. En France, le 25 Novembre 1737, Charles Radclyffe of Derwentwater, Grand Maître de la très ancienne et très illustre société des francs-maçons dans le royaume de France, remet au Baron Carl Fredrik Scheffer un pouvoir pour la Suède de «faire des maîtres-maçons et de nommer les maîtres et les surveillants des loges qu il constituera». Ce digne Baron, ambassadeur de Suède, pays dont l appui logistique était très sollicité par les Jacobites, avait été reçu maçon dans la loge du Grand Maître, où il avait aussi reçu «les deux autres grades de Saint Jean ainsi que deux grades écossais 57» Antédiluviens et modernes en Angleterre de 1723 à 1737 En Angleterre cette fois, un certain nombre de documents attestent que toute la franc-maçonnerie n avançait pas à la vitesse de la Grande Loge de Londres. Les Constitutions d Anderson de 1723 ne connaissent pas le troisième degré. Les Obligations d un franc-maçon qu elles incluent citent toujours les compagnons au pluriel et le maître au singulier, réservant cette appellation pour le maître de 47 History of the Lodge of Edinburgh (Mary s Chapel) N 1 David Murray Lyon 1873 p.415 48 Historical papers relating to the Jacobite period Col. James Allardyce 1845 p.156 49 Réseaux maçonniques et mondains au Siècle des Lumières André Kervella 2008 p.32 50 Règlements généraux du 27 décembre 1735 B.N.F. FM 4 146 folio 17 51 Manuscrit 124 f 58 et 59 Bibliothèque d Epernay 52 (Pine s) Engraved list of regular lodges for 1734 W. J. Hughan 1889 Reprint p.33 et suiv. 53 Whitehall Evening Post 5-7 Septembre 1734 cité par Une certaine idée de la franc-maçonnerie Alain Bernheim 2008 p.148 54 Les ducs sous l acacia Pierre Chevallier 1964 p.108 55 Les ducs sous l acacia Pierre Chevallier 1964 p.114 56 The history of freemasonry Robert Freke Gould Vol V Chap XXV Edition 1886 page 140 57 Histoire abrégée de la Franc-maçonnerie Robert Freke Gould 1989 p.397 7

loge 58. La troisième partie des Constitutions, les règlements généraux dus à George Payne, continuent de même, jusqu à la description des réunions trimestrielles de la Grande Loge dans laquelle ils stipulent «les apprentis ne doivent être reçus maîtres et compagnons qu à cette occasion, sauf dispense 59» Ces deux appellations étaient donc confondues pour la Grande Loge de Londres. Et pourtant nous trouvons un texte anonyme, publié dans une gazette londonienne 60, The Flying-Post, en Avril 1723 soit quelques mois avant la publication des premières Constitutions d Anderson, qui contient des éléments troublants sur le troisième degré dans ces quelques vers : «Un maçon entré j ai été, Boaz et Jachin j ai vu ; En compagnon j ai juré, c est plus rare, Et je connais la pierre taillée, le diamant, et l équerre : Je sais très bien la part du maître, Comme un honnête Maughbin vous le dira.» Alors le Maître dit : «Si un maître-maçon tu veux être observe bien la règle des trois ; et ce qu en maçonnerie tu voudras Ta marque et Maughbin t en rendront libre» Un autre document anglais, vraisemblablement de la fin du premier quart de siècle, apporte lui aussi un éclairage sur la coexistence de deux sortes de maçons. Dans un manuscrit comprenant deux autres catéchismes datés respectivement de 1724 et 1725, se trouve un texte intitulé Un dialogue entre Simon, un maçon de la ville, et Philip, un maçon passant 61. Les analystes s accordent tous pour estimer que son contenu est bien similaire aux plus anciens catéchismes d avant 1730. Il présente la particularité d ajouter des notes aux questions et réponses. La note (a) est intéressante : «Tous les compagnons et frères me reconnaissent comme tel : C est la manière dont les anciens maçons répondent à cette question. Mais les nouveaux maçons sous le règlement de J. T. Désaguliers répondent seulement Je le suis». Il semble bien que «les nouveaux maçons sous le règlement de J. T. Désaguliers» soient ceux de la Grande Loge de 1717, que Le dialogue entre Simon et Philippe date de la même époque que les deux autres textes du même manuscrit, 1725 environ, et que cette note ne fasse que confirmer la persistance, en parallèle avec la Grande Loge de Londres, de cette tradition plus ancienne de la maçonnerie que nous avons rencontrée avec les rituels manuscrits antérieurs à 1717. Le Nota Bene de la note (h) prend alors tout son intérêt. Le candidat est introduit par un apprenti entré qui frappe trois grands coups à la porte et le rédacteur du manuscrit note : «La raison de ces trois coups n est pas connue des apprentis mais du Maître. Cela vient d Hiram le Grand Maître dans le temple de Salomon, assassiné par trois apprentis et achevé par le troisième coup que le dernier apprenti lui donna» Il n est pas question ici de compagnons, mais d apprentis. Est-ce une forme primitive du mythe? Les minutes de la société Philo musicae et architecturae Apollini confirment aussi la progression maçonnique en trois degrés du frère Charles Cotton. Plusieurs 58 The constitutions of the freemasons 1723 The charges of a free-mason 59 The constitutions of the freemasons 1723 General regulations p.xiii 60 The early masonic catechisms Douglas Knoop, G.P. Jones & Douglas Hamer 1975 p.73 61 The early masonic catechisms Douglas Knoop, G.P. Jones & Douglas Hamer 1975 p.177 8

fondateurs de l association «avaient été faits maçons le 22 décembre 1724 par sa Grâce le Duc de Richmond Grand maître, qui alors constitua la loge, immédiatement après quoi Charles Cotton, esq, fut fait maçon par le dit Grand Maître [] Et avant que nous fondions cette société, une loge fut tenue, composée d un nombre de maître suffisant dans ce but, afin de faire passer Charles Cotton, esq, M. Papillon Ball et M. Thomas Marshall Compagnons de métier». Enfin «le 12 mai 1725 nos bien aimés frères et directeurs de cette très vénérable Société dont les noms suivent, frère Charles Cotton, esq, Frère Papillon Ball furent régulièrement passés maîtres, le frère F X Geminiani fut régulièrement passé Compagnon de métier et maître 62». Enfin une coupure de presse datée de 1726, retrouvée dans un ensemble de coupures similaires dans les archives de la Grande Loge de Londres s avère être une charge contre les innovations du Dr. Désaguliers présentée comme une convocation adressée «à tous les maçons qui ont été faits à la manière Antédiluvienne 63». Sa date n est pas tout à fait certaine, mais l ensemble des éléments et références extérieures à la maçonnerie qu elle contient sont cohérents avec 1726. Elle annonce «plusieurs conférences sur l Ancienne Maçonnerie, particulièrement sur la signification de la lettre G. et comment et de quelle manière les Maçons Antédiluviens formaient leurs loges, montrant quelles innovations ont récemment été introduites par le Docteur et quelque autre des Modernes» Plus intéressant encore, elle confirme la connaissance par ces maçons «antédiluviens» de la légende du meurtre d Hiram : «avec toute l histoire du fils de la veuve tué d un coup de masse, trouvé ensuite trois pieds Est, trois pieds Ouest, et trois pieds perpendiculaires, ainsi que la nécessité qu il y a pour un maître de bien comprendre la règle des trois.» Francis Drake, un célèbre historien de l époque, reçu maçon dans une loge à York le 6 Septembre 1725, élu Second Grand Surveillant de la Grande Loge d York le 27 décembre de la même année 64, dans son «discours donné à la Vénérable et Ancienne Société des Maçons Libres et Acceptés lors de la Grande Loge tenue à Merchant s Hall, dans la cité de York, pour la St Jean le 27 Décembre 1726 65», fait lui-aussi allusion aux trois degrés, dans le style grandiloquent et ampoulé de l époque : «Le temple de Belus, ou les remparts de Babylone mille ans avant la construction du Temple de Salomon, sont des témoignages suffisants, ou au moins donnent de bonnes raison de penser, que les trois quarts de la terre devaient alors être divisés en Apprentis Entrés, Compagnons de Métier, et Maîtres Maçons» Outre la division en trois degrés reconnue ici sans problème à York dès 1726, on notera aussi qu il n y est pas encore question de la Grande Loge de Toute l Angleterre dont parlera William Preston dans les éditions tardives de Illustrations of Masonry 66. Emergence du Royal Arch, du Royal Order of Scotland, et des degrés écossais Ces évolutions parallèles à la Grande Loge de Londres, qui montrent dans certains cas une progression rapide vers le troisième degré alors que certaines loges des Modernes, mais aussi de l Ecosse traditionnelles, ne le connaîtront pas avant la 62 Ars Quatuor Coronatorum N 16 1903 p.113-114 63 Early masonic pamphlets Douglas Knoop, G.P. Jones & Douglas Hamer 1978 p.192 64 History of Freemasonry in York W. J.Hughan 1871 reprint 2010 pages 56 et 57 65 Early masonic pamphlets Douglas Knoop, G.P. Jones & Douglas Hamer 1978 p.203 66 Illustrations of masonry William Preston 1781 p.230 et suiv 9

seconde moitié du siècle 67, s accompagnent d une émergence de degrés ultérieurs, Royal Arch, Royal Order of Scotland, ou degrés Ecossais, qui seront attesté bien avant la création de la Grande Loge des Anciens en 1751. Alain Bernheim s est penché dès 1997 sur les premières apparitions en Grande-Bretagne de degrés écossais 68. La plus ancienne mention connue d écossais n est pas française mais anglaise. Une Loge des maçons écossais se réunissant à la Taverne du Diable, Temple Bar, à Londres, apparait sous le n 115 dans la liste manuscrite de Rawlinson en 1733, ainsi que dans la liste gravée de Pine en 1734 69. Mais rien n indique qu il s agisse du degré de Maître Ecossais ; ce pourrait être une loge de maçons originaires d Ecosse. L affaire se précise avec une minute de la loge de Bath, petite ville du Somerset : «Le 28 octobre 1735 la loge se réunit exceptionnellement et notre digne frère le Dr. Kinneir fut admis et fait maçon [] Nos dignes frères Henry Balfour, esq, William Nisbett, esq, and le Dr Theobald furent passés maîtres. A la même date la loge des maîtres se réunit exceptionnellement et les dignes frères suivants furent faits et admis Maîtres Maçons Ecossais Jacob Skinner Maître, Johnson Robinson Premier Surveillant, Thomas Bragg Second Surveillant, John Morris, Richard Ford, James Vaughan, Wm. Nisbett esq., Henry Balfour esq., Docteur Troy, Edward Pembridge. Etaient présents Hugh Kennedy Maître Ecossais, David Threipland Premier Surveillant Ecossais, David Dappe Second Surveillant Ecossais 70» On constate ici que le maître et les surveillants écossais sont venus d une autre loge pour apporter le degré de Maître Ecossais, y compris au maître et aux deux surveillants de la loge de Bath. Dans son interrogatoire par l inquisition de Lisbonne, le 1er Août 1738, le Colonel Hugo O Kelly, maître de la loge irlandaise de Lisbonne, utilise les appellations utilisées au degré de Royal Arch : «et il y a deux classes supplémentaires qu ils appellent Excellents Maçons, et Grand Maçon, qui sont audessus de tous les autres, et supérieurs à ce que lui, le témoin, pratiquait 71» De même que la loge de Bath, d autres loges firent des maîtres maçons écossais en cette période très précoce. En 1740 c est la loge de Bristol, voisine de quelques miles de celle de Bath. Cette même année c est aussi la loge Antiquity (ancienne loge de St Paul), ce qui est tout à fait significatif compte tenu de son ancienneté, et de sa place de doyenne de la Grande Loge de Londres. Mais il faut cependant que ce soit un frère de la loge n 17, The Mourning Bush qui vienne d Aldersgate pour présider la tenue et apporter le nouveau degré de Maître Ecossais 72. En mars 1743, John Coustos, fondateur en 1736 à Paris de la loge A la ville de Tonnerre 73 plus connue sous le nom de Coustos-Villeroy, puis Vénérable Maître d une loge à Lisbonne 74, est interrogé sous la torture par l inquisition portugaise. Son récit de la légende du meurtre d Hiram ne présente que de minimes variantes 67 History of the free-masonry in the province of Roxburgh, Peebles and Selkirkshire Fred Vernon 1893 p. 120 68 Did early high or Ecossais Degrees originate in France? Heredom 5 (Washington D.C.) 1997 p.87-114 69 Engraved list of regular lodges for 1734 William James Hughan 70 Intervention dans A.Q.C. 32 Edward Armitage 1919 p.40-41 71 A lodge of Irishmen at Lisbon, 1738 Vatcher AQC 84 1971 p.88 72 Early master s lodges and their relation to degrees Eric Ward AQC 75 1962 p.131 73 Les ducs sous l acacia Pierre Chevallier Editions Slatkine 1994 p.71 74 The mysteries of Popery unveiled John Coustos édition 1821 p.11 10

par rapport à Masonry dissected, cependant il ajoute une phrase significative : «quand le fameux Temple de Salomon fut détruit, on trouva sous la première pierre une tablette de bronze sur laquelle était gravée le nom suivant, Jehova, qui signifie Dieu 75», phrase qui évoque clairement le Royal Arch. C est d ailleurs à peu près à la même époque qu apparait en Ecosse la première mention du Royal Arch Britannique, dans une minute du 30 Juillet 1743 de la loge de Stirling : «Mungo Nicol, cordonnier, et le Frère James McEwan, étudiant en Théologie à Stirling, ont été trouvés qualifiés, et furent admis Maçons de Royal Arche de cette loge 76» de même qu en Irlande, à la loge de Youghall, la procession de la Saint Jean d Hiver 1743 incluait «Quatrièmement le Royal Arch porté par deux Excellents Maçons 77». Enfin le 23 Novembre 1743 apparait dans un journal de Londres la première mention du Royal Order of Scotland, dans une convocation : «Les frères du H-d-m Ecossais, ou l Ordre ancien et honorable de K-n-g, sont invités à rencontrer le Grand Maître du dit Ordre, et le reste des Grands Officiers 78 En 1744 le Dr. Fifield Dassigny fait paraître à Dublin un Enquête sérieuse et impartiale sur les causes de la décadence actuelle de la franc-maçonnerie. Il y déclare, parlant de la cité d York : «Je suis informé que dans cette cité se tient une assemblée de Maîtres Maçons sous le titre de Maçons du Royal Arch 79» et raconte le conflit entre deux frères, l un ayant été fait Maçon du Royal Arch à York, et l autre, Maçon du Royal Arch de Londres, qualifiant le précédent d imposteur. La même année, 1744, on peut lire à Bruxelles dans La Francmaçonne 80 «L ignorance est si générale, que la plupart des maîtres et des surveillants ne savent pas encore que la maçonnerie est composée de sept grades, et la loge générale même a décidé à l aveugle, le 11 décembre 1743, qu elle ne regarderait les maçons du quatrième, c est-à-dire, les maîtres écossais, que comme de simples apprentis et compagnons.» En effet, le 11 Décembre 1743, quelques jours après la mort du Duc d Antin et la veille de l élection à la grande maîtrise du comte de Clermont 81, le marquis de La Cour de Balleroy, député du Duc d Antin, signe 82 des Règlements généraux extraits des anciens registres des loges à l usage de celles de France 83. Ces règlements, dont les 19 premiers articles sont empruntés aux constitutions d Anderson 84, condamnent dans leur article 20 les prétentions et les exigences de Maîtres Ecossais et détermine qu ils «ne seront considérés par les frères que comme les autres apprentis et compagnons, dont ils doivent porter l habillement sans aucune marque de distinction quelconque» A l évidence, les rédacteurs de ces règlements ne reconnaissent comme légitimes que les degrés d apprenti et de compagnon. Il apparait donc clairement qu à cette époque, des deux courants concurrents de la franc-maçonnerie en France, l un, autour du duc d Antin, suit le lent cheminement de la franc-maçonnerie anglaise d Anderson vers le troisième degré, 75 John Coustos and the Portuguese Inquisition Vatcher AQC 81 1968 p.52 76 The freemason s Book of the Royal Arch Bernard E. Jones 1957 p.46 77 Faulkner s Dublin Journal 14 Janvier 1744 78 The Royal Order of Scotland Robert Strathern Lindsay 1972 p. 26 79 Memorials of the masonic union including Dr Dassigny s serious and impartial enquiry W. J. Hughan 1913 p. 119 80 La Franc-maçonne, ou révélation des mystères des francs-maçons Bruxelles 1744 81 Réseaux maçonniques et mondains au Siècle des Lumières André Kervella 2008 p.109 82 La genèse du Rite Ecossais Ancien et Accepté Claude Guérillot 1993 p.48 83 Une certaine idée de la franc-maçonnerie Alain Bernheim 2008 p.421 84 Histoire de la franc-maçonnerie française Pierre Chevallier 1974 Vol.1 p.120 11

alors que l autre, initié par Derwentwater et MacLean, l a précédé dans le troisième degré et progresse déjà dans l Ecossisme. Le 14 juin 1745, paraissent les Statuts dressés par la R L St jean de Jérusalem gouvernée par N T C F Louis de Bourbon Grand Maitre de toutes les L régulières de France 85 précisant le rôle des maîtres écossais et confirmant l existence de degrés supérieurs à celui-ci : «Les maîtres ordinaires s assembleront avec Les maîtres Les parfaits et Irlandois trois mois après la St jean, Les maîtres Elus six mois apres, Les Ecossois neuf mois apres, et Ceux pourvûs de grade supérieurs quand ils le jugeront a propos.» Il s agit ici de la filière de l Ecossais des trois JJJ, appelé aussi Ecossais de Paris ou Ecossais de Clermont, pratiquée par les loges filles de Clermont, telle que Saint Ferréol à Marseille, Saint Jean des parfaits amis à Metz, ou La Vertu à Mayence 86. Une autre filière, celle du Grand Ecossais est personnifiée par un homme, le frère Charles de Valois, qui en sera Secrétaire et Archivaire, ou Garde des sceaux, à tous les degrés de 1747 87 à 1762 88. Maître parfait, Parfait illustre Irlandais juge des ouvriers, Maître Anglais, Grand Ecossais ou Ecossais grand architecte, Chevalier de l Orient, Prince de Jérusalem et Chevalier du Soleil, tous ces degrés sont attestés entre 1747 et 1750 89. Notons comme un indice de l origine de cette filière que le bijou de ce maître écossais est bien particulier, un compas porté par un triangle pointe en bas. Ce même bijou se trouve en exergue d une patente de 1747 signée du frère de Valois Grand Secrétaire, encore lui, et délivrée par le «Grand Maître de la seule et véritable Loge Ecossaise saint Edouard fondée à Paris sous les auspices du Très Excellent Maître Derventwater 90» Or ce bijou n est autre que celui du degré de Heredom of Kilwinning 91, premier degré du Royal Order of Scotland que nous avons vu apparaitre en Angleterre en 1743 92. Est-ce une coïncidence si Heredom, heirdom, veut dire héritage, si Edouard est le prénom commun aux deux prétendants jacobites, le père et le fils, et si Charles de Derwentwater vient de mourir pour leur cause? Le Royal Order of Scotland donnera le 22 Juillet 1750 une patente de Grand Maître Provincial à William Mitchell avec pouvoir de constituer en Europe des Chapitres de Heredom of Kilwinning et de Knights of the Rosy-Cross 93. Un autre série de degrés peuvent aussi semble-t-il être rattachés aux Jacobites, ce sont les degrés de vengeances, y compris le Chevalier Kadosch, dont l origine se trouve dans les rituels de 1750 de l Ordre Sublime des Chevaliers Elus qu André Kervella et Philippe Lestienne ont découverts à Quimper et à Poitiers 94. 85 Une certaine idée de la franc-maçonnerie Alain Bernheim 2008 p.457 86 Lettre de Meusnier de Précourt du 28 avril 1761 87 Patente d André de Gilly Roger Dachez Renaissance Traditionnelle 131-132 Octobre 2002 p. 234 à 236 88 Précis historique de la Maçonnerie Française (1780) publié par la Sublime Mère Loge Ecossaise du Grand Globe Français 89 Manuscrit B.N.F FM 4 76 90 Patente d André de Gilly Roger Dachez Renaissance Traditionnelle 131-132 Octobre 2002 p. 234 à 236. Roger Dachez l attribue, me semble-t-il à tort, aux Ecossais des trois JJJ : le bijou n est pas le bon. 91 The Royal Order of Scotland Robert Strathern Lindsay 1972 page 129 92 The Royal Order of Scotland Robert Strathern Lindsay 1972 p. 26 93 The Royal Order of Scotland Robert Strathern Lindsay 1972 p. 41 et suiv. 94 Un haut grade templier dans les milieux jacobites en 1750 André Kervella et Philippe Lestienne 1997 Renaissance Traditionnelle N 112 p. 229 et suiv. 12

De multiples indices rattachent cet ordre aux Stuart, ne serait-ce que la fin délibérée de l ordre en 1752, ultime fin des espérances Jacobites Enfin l origine de la filière des Elus Parfaits Grands Ecossais de Bordeaux, est bien connue. Etienne Morin reçoit ce grade du Capitaine-Général William Matthews 95, Gouverneur Général des Iles anglaises sous-le-vent, Grand Maître provincial de la Grande Loge de Londres 96, lors de son séjour forcé à Antigua en 1744. Ce même Morin reçoit le 26 juin 1745 97 de la Respectable Mère Loge de Londres une patente l autorisant à établir des Loges de Perfection, et fonde alors une Parfaite Loge d Ecosse à Bordeaux Les Elus parfaits 98. Nous pouvons donc constater qu en 1750, à la veille de la création de la Grande Loge des Anciens à Londres, notre franc-maçonnerie écossaise est déjà quasiment constituée, et pour une grande part en provenance des îles Britanniques d ailleurs. Nous ne descendons donc pas plus de la Grande Loge des Anciens que de la Grande loge des Modernes. En réalité la Grande Loge des Anciens comme la Franc-maçonnerie écossaise, descendent toutes les deux de cette tradition maçonnique non-opérative qui a précédé la Grande Loge de Londres d un demisiècle. Ce n est qu en 1804 que la Grande Loge Générale Ecossaise réunira les loges écossaises de France sous un rituel traduit des anciens, mais ceci est une autre histoire. 95 Le Quarré, ou le Parfait Elu Ecossais ou la Voûte sacrée Bibliothèque du Grand Collège des Rites 96 Constitutions d Anderson de 1738 97 Lettre de Morin et Lagère aux Elus Parfaits de Bordeaux le 24 juin 1757 Document Sharp 57 98 Lettre de Dupin Deslezes du 24 mai 1759 Documents Sharp 61 13