L optimisation des ressources : risques et possibilités pour la recherche au service du développement



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Pratiques en matière de partenariat n o 3b L optimisation des ressources : risques et possibilités pour la recherche au service du développement La Division des partenariats avec les bailleurs de fonds traite régulièrement avec un grand nombre d organismes subventionnaires. De plus en plus présente dans toutes les sphères de la société, la notion d optimisation des ressources 1 revêt également une importance croissante pour les bailleurs de fonds. Les intervenants du milieu de la recherche au service du développement doivent apprendre à démontrer qu ils optimisent les ressources qu ils consacrent à la recherche pour s attaquer aux facteurs qui empêchent la stabilité sociale, économique et politique et qui entravent la croissance inclusive. La présente fiche examine le principe de l optimisation des ressources, notamment en développement international, et propose quatre façons d y adhérer en recherche au service du développement. Les personnes désireuses d approfondir le sujet y trouveront en outre des renvois à une étude plus exhaustive (en anglais). L optimisation des ressources En Europe et en Amérique du Nord, les changements survenus au cours des 50 dernières années sur le plan de l idéologie et des pratiques ont donné lieu à une préoccupation accrue à l égard de la responsabilité financière, du rendement des investissements, des cibles quantifiables et des indicateurs d impact. Cette tendance générale a contribué à l émergence de l optimisation des ressources. Cette expression, qui nous vient du milieu de l audit (GSCRC, 2010), est de plus en plus courante du fait que l audit se répand dans l ensemble de la société (Power, 2007). Elle est d ailleurs couramment utilisée dans le secteur public aussi bien que dans le secteur privé et est en voie de devenir synonyme de reddition de comptes et de transparence. En effet, dans le secteur privé tout comme dans le secteur public, l optimisation des ressources est devenue le terme à employer pour montrer (aux actionnaires ou à l électorat, selon le secteur) que l on s attache à réduire le risque, à éliminer les dépenses superflues et à éviter le gaspillage de fonds. Il est fort probable que l optimisation des ressources demeurera, à tout le moins dans un avenir proche, une priorité des programmes politiques (Tibbett, 2011). 1 Autres traductions du terme «value-for-money» : en avoir pour son argent, rapport coûts-avantages, rendement de l investissement.

L optimisation des ressources et le développement international Comme il fallait s y attendre, l importance croissante accordée à l optimisation des ressources dans toute la société influe sur la manière dont on conceptualise et pratique le développement international. L on s attend de plus en plus des organismes d aide qu ils rendent des comptes à ceux et celles qui leur procurent leur revenu, c est-à-dire, en fin de compte, aux contribuables. Selon l OCDE (2012, p. 1), «certains sceptiques ont déclaré que l aide ne fonctionne pas, constitue du gaspillage et doit être réduite ou carrément abolie. Si de telles affirmations ne sont peut-être pas toujours fondées, il demeure qu il est nécessaire de recueillir de solides données probantes pour démontrer que l aide est justifiée et bien administrée et que les responsables de l aide cherchent continuellement à en améliorer le fonctionnement».[traduction LIBRE] Le défi d exprimer clairement la valeur dans l optique de l optimisation des ressources Il importe de démontrer la valeur de l aide et de la recherche au service du développement. On ne s entend toutefois pas sur la meilleure façon de le faire, car l optimisation des ressources laisse place à de nombreuses interprétations. Beaucoup sont d avis que le Royaume-Uni et le DFID sont des chefs de file pour ce qui est de définir l optimisation des ressources et d y adhérer (OCDE, 2012). La définition la plus communément citée provient d ailleurs du National Audit Office du Royaume-Uni, selon lequel elle comporte trois composantes, que l on appelle les trois E : 1. l économie : mesure du coût des intrants et des ressources ce qui est utilisé pour offrir un service ou mener une intervention; 2. l efficience : mesure de la productivité ce que l on obtient par rapport à ce que l on a investi; 3. l efficacité : mesure à la fois qualitative et quantitative du rapport entre les résultats attendus et ceux qui sont obtenus, pour montrer la capacité de réaliser les objectifs. L OCDE mentionne un quatrième E : 4. l équité, qui assure que l on tient compte, dans l analyse de l optimisation des ressources, de l importance d atteindre différents groupes. De nombreux autres bailleurs de fonds de l aide bilatérale qui font état de l optimisation des ressources ne disposent pas d une définition explicite du terme et estiment que sa signification va de soi. Au New Zealand Aid Programme (NZAID), on décrit l optimisation comme «le fait d atteindre les meilleures incidences possibles en matière de développement au cours du cycle de vie d une activité par rapport au coût total des ressources nécessaires à l exécution et à la gestion de l activité en question et de s assurer que les ressources sont utilisées de manière économique et efficace, sans gaspillage». [TRADUCTION LIBRE] En Afrique du Sud, on a choisi de définir l optimisation des ressources comme un processus concerté faisant l objet de négociations entre le bailleur de fonds et le pays bénéficiaire. L absence d une définition commune de l optimisation des ressources témoigne du fait que les bailleurs de fonds hésitent souvent à fournir une orientation interne sur la question, car il ne s agit pas d un système, mais plutôt d une «solide et constante appréciation critique des raisons pour lesquelles on fait ce que l on 2

fait» (entrevue avec un conseiller en économie du DFID). [TRADUCTION LIBRE] Pour certains bailleurs de fonds, l expression «optimisation des ressources» n est qu une nouvelle façon de véhiculer de vieux messages. Pour d autres, il s agit d une approche monétaire radicalement nouvelle née de la culture de la privatisation et de l audit qui consiste à jauger le changement et la valeur et à assurer le rendement des investissements. Où qu elle se situe dans ce large spectre de définitions, l optimisation des ressources est clairement la stratégie établie pour justifier des dépenses continues (Norton, 2012). Il est aussi probable qu elle demeurera, à tout le moins dans un avenir proche, une priorité dans les programmes de développement international (Gilligan, 2012; Hope, 2012). Quatre façons de faire en sorte que les organismes de recherche au service du développement adhèrent à l optimisation des ressources La notion d optimisation des ressources ne vient pas en soi menacer la validité de la recherche au service du développement. En raison de l importance qu on lui accorde, toutefois, il faut trouver des façons nouvelles et créatives d y adhérer. Voici quatre façons dont les organismes oeuvrant à la recherche au service du développement peuvent intégrer l optimisation des ressources à leurs pratiques. 1. Établir des paramètres et des processus d optimisation des ressources convenant à la recherche au service du développement L ambiguïté qui entoure actuellement l application de l optimisation des ressources offre au milieu de la recherche au service du développement une occasion de la façonner et de la définir de manière avantageuse. L optimisation des ressources peut devenir un outil constructif assorti de paramètres clairs, qui favorise et permet la production de données probantes pour la recherche au service du développement. Pour y parvenir, le milieu doit se doter des outils voulus pour critiquer certaines interprétations de l optimisation des ressources et se rallier à d autres approches et définitions de cette notion. Déjà, le milieu de la recherche au service du développement peut apprendre de plusieurs ONG internationales influentes qui ont adopté une démarche proactive pour ce qui est de l interprétation de l optimisation des ressources et ont établi leur propre définition. Leurs principes, adaptables à la recherche au service du développement, sont résumés ci-dessous : planifier dès le début la façon de mesurer; mesurer le changement surtout à long terme plutôt qu à court terme; mesurer ce qui compte plutôt que ce qui est facilement mesurable; mesurer ce qui compte aux yeux des bénéficiaires; reconnaître que l optimisation des ressources repose notamment sur une saine gestion interne et sur de bons processus administratifs; travailler avec les plus vulnérables, même si cela est inévitablement plus coûteux; s engager à collaborer et à empêcher que l optimisation des ressources entraîne une concurrence plus vive entre les bailleurs de fonds et d autres partenaires stratégiques; prendre des risques soigneusement réfléchis et mettre en balance ces risques et l impact attendu; reconnaître l importance de l efficacité et de l équité ainsi que de l économie et de l efficience. 3

Eyben et Guijt (2012) apportent une contribution utile à la réflexion en affirmant que «nous devons nous doter de meilleures façons de mesurer la transformation afin de jauger les changements auxquels nous assistons d une manière respectueuse, juste et utile qui permette d élaborer des programmes pouvant susciter des transformations sociales bénéfiques». [TRADUCTION LIBRE] L Agence suédoise de coopération internationale au développement (Asdi) mène des activités encourageantes à cet égard par le positionnement résolument transformateur de ses programmes de recherche au service du développement. L organisme, qui s efforce d utiliser les fonds dont il dispose pour renforcer les capacités de recherche d universités de pays en développement, insiste sur le fait qu à ses yeux, la manière la plus efficace d assurer un rendement élevé des investissements est de faire du renforcement des capacités de recherche dans les pays en développement une priorité (Asdi, 2009; Gansberghe et coll., 2011; Thulstrup et coll., 2006). 2. Cerner l optimisation des ressources à partir de la théorie du changement La théorie du changement sert à déterminer ce qui doit être fait pour que des objectifs visés soient atteints et des impacts attendus, obtenus. On y a recours pendant la planification, le suivi et l évaluation de programmes et de projets, surtout de ceux qui sont axés sur le changement social. La théorie du changement offre une façon d adhérer à l optimisation des ressources. Tout d abord, une théorie du changement clairement formulée permet de se doter d indicateurs efficaces et de démontrer le lien de causalité tout au long d un programme. De plus, elle permet de décrire des processus de changement social complexes dans des termes clairs et d une manière logique. Enfin, elle incite les parties prenantes à définir leurs objectifs dès le début et à y associer des indicateurs mesurables. Ces trois éléments montrent que la théorie du changement constitue une base utile sur laquelle édifier l assise de données probantes systématiques nécessaire pour démontrer qu il y a optimisation des ressources. La théorie du changement s éloigne des façons plus simplistes de jauger la valeur. En utilisant les données probantes dans leur globalité, en rendant légitime l incertitude et en admettant la multiplicité des causes, elle permet de rendre compte de la complexité (James, 2011; Vogel, 2012). La réflexion inhérente à la théorie du changement revêt aussi de l importance pour les organismes oeuvrant à la recherche. Soucieux que l on utilise leurs ressources de façon optimale, les bailleurs de fonds exigent de plus en plus que l on réalise des études et des analyses tout au long de l exécution des programmes pour s assurer que ces derniers demeurent efficaces dans des contextes précis. Comme l explique Tembo (2012, p. 34), un projet «a souvent pour point de départ une théorie et des hypothèses générales sur la manière dont survient le changement. Il est à espérer que les cycles successifs d action et de réflexion (...) amélioreront les façons de faire dans différents contextes et, de ce fait, l efficience, l efficacité et l impact des interventions». [TRADUCTION LIBRE] 3. Aborder des contextes aux éléments difficilement mesurables au moyen de l analyse de la contribution Il n est pas toujours facile de jauger la valeur des interventions en matière de développement, aussi les chercheurs se concentrent-ils généralement sur ce qu ils peuvent évaluer sur le plan quantitatif. 4

Comment établir la valeur des éléments les plus difficiles à mesurer, tels que les activités de plaidoyer (Tibbett, 2011), l évolution des États touchés par un conflit (Maxwell, 2012), le renforcement des capacités (Datta et coll., 2012) et la gouvernance (Barnet et coll., 2010)? Mayne (2008) est d avis que, face à de tels éléments, il vaut mieux se concentrer sur l analyse de la contribution plutôt que sur la causalité directe, c est-à-dire examiner la mesure dans laquelle le programme en question a contribué au changement observé. L analyse de la contribution peut s avérer particulièrement utile au moment d apprécier l optimisation des ressources dans des systèmes complexes en interaction et dans le cadre de l évaluation de la recherche au service du développement. Elle a d ailleurs été employée par deux organismes distincts et mise de l avant dans la méthodologie de la cartographie des incidences. Bond, un réseau d ONG dont le siège est situé au Royaume-Uni, a créé en 2012 le Improve it Framework, un cadre permettant aux ONG d évaluer et de gérer leur efficacité dans différents contextes aux éléments difficilement mesurables et d en rendre compte. CONCORD, la Confédération européenne des ONG d urgence et de développement, a réalisé en 2011 un travail considérable pour modéliser l efficience des activités de plaidoyer et de sensibilisation, démontrant ainsi la valeur de ces activités en dépit de la difficulté à la mesurer. 4. Tenir compte du risque et constituer un portefeuille au sein duquel il y a modulation des risques De nombreux bailleurs de fonds investissent de façon soutenue dans la recherche au service du développement, reconnaissant les risques inévitables que cela comporte. Ils estiment souvent que la meilleure manière d aborder l optimisation des ressources consacrées à la recherche est de constituer un portefeuille de projets ayant des cotes de risque différentes; ils s attendent à ce que certains projets à haut risque changent très peu de choses et à ce que d autres changent complètement la donne. Ils peuvent soutenir la recherche novatrice ou visant à ouvrir de nouveaux horizons à l intérieur d un portefeuille plus vaste, adoptant ainsi une démarche équilibrée en matière d investissement dans le savoir aux fins du développement. Il semble donc qu il soit possible de consolider l importance que revêt la recherche au service du développement en passant à un processus d appréciation de l optimisation des ressources fondé principalement sur le portefeuille de projets plutôt que sur des programmes donnés. Adhérer à un tel processus permet d accepter le risque et d admettre que l échec fait partie intégrante de l apprentissage (Collier, 2008; Laugharn, 2012). Si certaines personnes chez les organismes bailleurs de fonds peuvent être attirées par un risque élevé, cette pratique est rarement institutionnalisée au sein des grands bailleurs de fonds de l aide bilatérale. Les bailleurs de fonds exigent généralement de leurs bénéficiaires qu ils établissent dès le départ un ensemble d activités, les résultats attendus et un cadre logique à partir desquels on pourra suivre le rendement et l évaluer. Il existe cependant certaines fondations internationales qui adoptent des démarches plus novatrices comportant plus de risques. Elles soutiennent que, même en situation d échec généralisé, de nouvelles connaissances sont produites et que, par conséquent, l investissement peut tout de même être utile (Laugharn, 2012). 5

D ailleurs, l innovation est la quatrième valeur de la Fondation Bill et Melinda Gates (2012) : Nous croyons que bon nombre des problèmes les plus épineux ne peuvent être résolus qu au moyen de solutions créatives et novatrices. Dans notre quête de telles solutions, nous acceptons les risques et apprenons de nos échecs, et aidons les autres à éviter de commettre les mêmes erreurs que nous. Lorsque nous prenons des risques et que nous bravons les conventions, remettons en question les idées reçues et mettons à mal les stéréotypes, nous nous efforçons de maintenir le cap et d agir de manière stratégique et réfléchie. [TRADUCTION LIBRE] Jauger l'apport de la recherche au service du développement On peut se poser les questions suivantes dès le début d un programme de recherche au service du développement pour s assurer qu on s entend sur la façon dont on jaugera l optimisation des ressources. Des critères devraient être établis de manière concertée au tout début d un projet de recherche, puis de nouveau ultérieurement, au moment de jauger l optimisation des ressources a posteriori. scientifiques, couverture de la recherche par les médias, mentions de la recherche dans des notes d analyse et des communications présentées à l occasion de conférences. 4. Sur quoi s appuiera-t-on pour jauger l optimisation des ressources sur le plan qualitatif? Exemples : données probantes indiquant une sensibilisation accrue, influence sur l élaboration des politiques, anecdotes, récits illustrant l impact obtenu. 5. Comment jaugera-t-on l optimisation des ressources pour ce qui est des incidences et des impacts obtenus de manière plus générale? Exemples : contribution au changement souhaité, obtention du point de vue de la collectivité, consultation de «sages» (chefs de file du secteur) en mesure de comprendre le contexte de la recherche et de procéder à une appréciation qualitative de cette dernière. Références bibliographiques 1. Comment déterminera-t-on après coup l efficience de la recherche? Il faut prendre en compte les coûts, le temps et les ressources. 2. Comment saura-t-on si les extrants réels de la recherche correspondent aux extrants attendus? 3. Sur quoi s appuiera-t-on pour jauger l optimisation des ressources sur le plan quantitatif? Exemples : résultats obtenus par les moteurs de recherche, renvois à la recherche dans des revues Division des partenariats avec les bailleurs de fonds Centre de recherches pour le développement international CP 8500 Ottawa ON Canada K1G 3H9 Téléphone : 1 613 236 6163 Télécopieur : 1 613 567 7749 Courriel : info@crdi.ca Août 2013 crdi.ca 6