Conférence de presse UNIFA - 23 septembre 2005 Sommaire Le marché des engrais : campagne 2004-2005 La hausse des prix de l énergie pèse sur la nouvelle campagne Le contexte réglementaire : la nouvelle transposition SEVESO Agronomie et environnement : bioénergies, fertilité des sols et nitrates INTRODUCTION Mesdames, Messieurs, Nous tenons à vous remercier de votre présence et de l écho que vous donnez généralement à nos informations. Cette rentrée est placée sous le signe de l envolée des prix de l énergie et des matières premières alors que notre industrie après des décennies de restructurations et de fermetures de capacités a retrouvé une certaine stabilité sur le plan de ses entreprises, de son marché et de ses débouchés. La pression réglementaire continue de s exercer mais avec de nouveaux textes plus adaptés, et nous l espérons, plus souples dans leur application, aussi bien pour les produits que pour les installations industrielles. Résultats économiques Les résultats économiques du marché en 2004 sont en amélioration, et pour la première fois depuis longtemps le chiffre d affaires a augmenté de 4%, malgré une très légère baisse des volumes. Cette progression du chiffre d affaires (au stade de la production) des entreprises à 1,71 milliards d uro, résulte de la hausse de toutes les matières premières depuis fin 2003. Ces hausses ont pu être en partie répercutées par les fabricants accompagnant un marché mondial très tendu, à partir du début de la campagne 2004/2005, et ont contribué à l amélioration des marges des entreprises. Pour l année 2004, la rentabilité, mesurée par le bénéfice net, est en effet apparue positive alors que les années antérieures avaient vu les résultats moyens du secteur dans le rouge. Les résultats des entreprises ont aussi été favorisés par l absence de coûts de restructuration, puisque cette année 2004 n a pas connu d opération de fermetures d usines ou de capacités en France, et en Europe. La campagne 2004/05 a vu des livraisons globalement stables: Tout d abord les volumes ont été, pour la troisième année consécutive, relativement stables, avec 10 561 kt exactement. Nous avons déjà évoqué au cours des deux années passées, que ce seuil de 10 600 kt semble constituer un palier, qui correspond à la fois à une surface cultivée stable (malgré les variations de la jachère autorisée) et à une utilisation plus optimale de la fertilisation raisonnée. Cependant, les 3 éléments N, P2O5 et K2O subissent des évolutions différentes : l azote progresse de 1%, essentiellement sous forme d engrais simple, les éléments P2O5 et K2O accentuent leur baisse avec -5% pour le phosphate et -4 % pour la potasse. Dans ce contexte de stabilité des volumes, les adhérents de l UNIFA, producteurs français et européens, représentent 78% des tonnages commercialisés en France. Ils ont encore amélioré leurs positions au détriment des importations des pays tiers, Conférence de Presse UNIFA 23 septembre 2005 page 1/6
principalement Russie Ukraine, Moyen Orient. L élargissement a eu pour conséquence d améliorer le degré d autosuffisance de l agriculture européenne : les principales progressions à l importation depuis quelques années étaient le fait de quelques uns des nouveaux pays de l UE. Ils doivent maintenant respecter les règles du marché unique, faisant disparaître les pratiques de dumping et de concurrence déloyale. L UNIFA continue de défendre ce secteur de la production d engrais, stratégique pour notre agriculture : en 2004, 52% des besoins de fertilisants du marché français ont été fournis à partir du territoire national. Notre industrie se redresse avec des perspectives plutôt positives, malgré les augmentations fortes et répétées des matières premières, qui seront difficiles à répercuter dans un contexte agricole morose. Hausse du prix de l énergie : une influence directe sur le marché des engrais La campagne des engrais 2005-2006 a débuté en juin, et comme l année passée, encore plus que l année passée peut être, elle a commencé sur une hausse des prix importante, puisque la plupart des produits azotés a déjà augmenté de 25%. A titre d exemple, le prix franco vrac de l ammonitrate 33.5% au début de la dernière campagne - juillet 2004 - était aux environs de 140, alors qu en juillet 2005 il était à 175. Les engrais azotés sont fabriqués à partir de gaz naturel, et les cours de cette matière première suivent les cours du pétrole avec un décalage de 6 à 9 mois environ. Une différence essentielle du comportement des marchés entre ces deux sources d énergie est le fait que le marché du gaz est moins «fluctuant» que celui du pétrole : en effet, les gazoducs sont les points de passage obligés, les contrats sont la règle, et le marché spot ne fonctionne que sur une faible partie des échanges, il réagit donc plus vivement mais avec retard. Sur ces 12 mois, de juillet 2004 à 2005, le prix du pétrole est passé de 23 à 56 $ le baril, le prix du gaz est passé de 2.2 à plus de 6 $ le million de btu, soit plus de 150% d augmentation. Les producteurs sont donc dans l obligation de répercuter progressivement ces coûts à leurs clients, le gaz représentant près de la moitié du prix de l ammonitrate. En ce qui concerne le marché français, cette situation se traduit en 2005 par une tension sur les prix qui reflète les prix mondiaux de l énergie et des matières premières, les hausses sont donc à nouveau la règle pour ce début de campagne, mais ceci conduit également et sans doute de façon un peu plus forte que lors de la dernière campagne, à une anticipation des commandes et des demandes de livraison. Les clients essayent d éviter les hausses prévisibles des prochains mois, hausses qui semblent inévitables avec des prix de pétrole et de gaz qui continuent d être très élevés. La production française et européenne est donc indispensable car elle permet d amortir les fortes variations de prix et de garantir les approvisionnements face à la volatilité du marché mondial. Conférence de Presse UNIFA 23 septembre 2005 page 2/6
Réglementation : la transcription de la directive SEVESO II bis prend en compte les risques de façon plus précise et modulée en fonction des produits. Depuis la publication au JOCE de cette directive, nous sommes en contact étroit avec les services du MEDD pour élaborer une transposition française avec deux objectifs : - traduire les éléments nouveaux introduits dans la directive tels que la création de la rubrique 1332 qui fixe des seuils de stockage très bas pour les produits «déclassés», à risque plus élevé. - rapprocher la réglementation française de la réglementation européenne, en introduisant un traitement particulier pour chacune des catégories de risques, comme le prévoit déjà la réglementation européenne. Sur la base des connaissances de la profession, encore renforcées par l étude TECHNIP cofinancée par le MEDD et l UNIFA, la FFCAT et la FNA, nous avons dans de très larges proportions, rempli ces deux objectifs et sommes donc satisfaits de ce décret de transposition paru le 13 août dernier. Les principaux éléments de ce texte sont : - Un seuil de déclaration pour le stockage des ammonitrates a été créé à des niveaux de 500 tonnes pour les ammonitrates 33,5 en sac et les ammonitrates 27 en vrac et sac, le seuil de déclaration pour les ammonitrates 33,5 en vrac étant fixé à un niveau plus bas, 250 tonnes, mais le seuil d autorisation de la rubrique 1331 reste inchangé à 1250 tonnes. - une nouvelle catégorie a été intégrée pour les engrais composés non susceptibles de décomposition autoentretenue, dont le régime est plus souple, puisqu ils passent du régime d autorisation dans le précédent décret à un régime de déclaration au delà de 1250 tonnes stockées. Les adhérents de l UNIFA fournissent d ores et déjà que des engrais de ce type. Les conséquences ont été envisagées en détail par les acteurs de la filière, producteurs et distributeurs : en ce qui concerne les restrictions pour les engrais à base de nitrate d ammonium, catégories 1331 I et II, de nombreux sites de stockages vont demander à bénéficier du régime d antériorité pour pouvoir continuer à exploiter les installations existantes, en les adaptant. Les assouplissements qui concernent la catégorie des engrais composés non DAE vont probablement permettre de libérer des capacités de stockage. Nous sommes maintenant en présence d une réglementation plus fine, plus précise, et nous allons accompagner ce nouveau décret en portant une attention toute particulière à la rédaction des arrêtés attendus pour la fin de l année. La profession, avec l appui de l administration, finalise la rédaction d un référentiel professionnel destiné à aider les exploitants à atteindre efficacement les objectifs de sécurité et protection de l environnement définis dans ces arrêtés. Conférence de Presse UNIFA 23 septembre 2005 page 3/6
L agronomie et la protection de l environnement 1- Gagner en efficacité avec l azote minéral L UNIFA est membre fondateur du COMIFER (Comité français d étude et de développement de la fertilisation raisonnée) qui va fêter ses 25 ans à Blois les 15 et 16 novembre prochains. C est dire notre engagement en faveur de la fertilisation raisonnée et d une utilisation plus économe et plus efficace de nos engrais. Pour cela notre industrie a développé des services de conseils agronomiques et a investi pour mettre à disposition des agriculteurs et de leurs conseillers des outils de pilotage permettant d ajuster l azote en fonction du besoin mesuré sur la culture elle même. Ces efforts commencent à payer. La stabilisation des teneurs en nitrate, la baisse observée depuis 1998 dans les régions les plus touchées laissent espérer une poursuite généralisée de l amélioration dans les années à venir. L étude publiée le 8 septembre 2005 par le Ministère de la Santé montre que, «s agissant des nitrates, 98% des débits d eau mise en distribution en 2002 étaient conformes à la limite de qualité réglementaire de 50mg/L». Cette norme, fixée en 1962 par l OMS, indique que la dose journalière admissible sans aucun risque pour un adulte est de 250 mg. Compte tenu de la présence importante de nitrates dans les légumes (plus de 1000 mg/kg dans la salade, les épinards, la betterave, le radis, le navet), les experts ont calculé une limite de précaution de 50mg/l dans l eau de boisson pour protéger les personnes sensibles comme les femmes enceintes et les nourrissons. Depuis, les connaissances scientifiques ont évolué et les recherches les plus récentes mettent en évidence l innocuité des nitrates dans notre alimentation. On peut heureusement continuer de manger des légumes et de boire de l eau du robinet sans avoir peur des nitrates. Si l agriculture est souvent montrée du doigt lorsqu on parle de nitrates, elle contribue par bien d autres aspects à préserver l environnement et à produire des ressources renouvelables. Fournir des ressources renouvelables et gérer l environnement, un nouveau défi pour l agriculture Le monde vit avec un stock de céréales qui n excède pas 3 mois de consommation. Chaque année depuis des siècles, l agriculture produit et renouvelle ce stock pour nourrir l humanité et donne la preuve qu elle est «durable». Aujourd hui elle doit produire de plus en plus pour satisfaire d autres besoins vitaux : de l énergie, des fibres, des lubrifiants, des biomatériaux qui viendront se substituer à des ressources fossiles en voie d épuisement. Les plantes fixent le CO2 de l air pour en faire de la biomasse ou des biocarburants, c est pourquoi leur utilisation ne compte pas dans l émission de ce gaz à effet de serre. Un hectare de blé fixe ainsi 26 tonnes de gaz carbonique en une année sous forme de biomasse soit les émissions de 8 voitures. L industrie de la fertilisation contribue à l amélioration du bilan environnemental global de la production agricole de deux façons : - en amont elle accroît la performance énergétique de ses usines pour produire des engrais plus économes. Grâce à la technologie la plus avancée 1 tonne Conférence de Presse UNIFA 23 septembre 2005 page 4/6
d azote N, fixé à partir de l air, ne coûte plus aujourd hui en gaz naturel que 0.8 tep (tonne équivalent pétrole) produite sous forme d ammonitrate. - en aval, l industrie développe aussi en partenariat, des outils de raisonnement permettant aux agriculteurs d ajuster précisément la fertilisation aux besoins des plantes pour protéger l environnement. 2 - Une fertilisation plus efficace et plus précise L apport d environ 170 kg de N /ha sur le blé utilisé en moyenne en France, permet de plus que doubler le rendement de cette culture. Le bilan énergétique de l utilisation de l azote minéral est donc très favorable car il augmente la capacité de la photosynthèse à fixer l énergie solaire. Ceci signifie que l investissement d une unité d énergie dépensée pour produire l engrais azoté permet de produire 7 unités d énergie solaire de plus que la plante fixe dans son grain. Avec 12% d azote minéral épandu en moins qu en 1990, l agriculture française a produit en 2004, 29% de plus de céréales et d oléagineux. Cela veut dire que l azote est mieux utilisé par les plantes. Il a été possible de réduire de façon importante les pertes d azote vers l eau ou l air inévitables dans le cycle très ouvert de cet élément. Un ensemble de progrès y ont contribué : la généralisation du calcul prévisionnel, obligatoire depuis 2005 au titre de la conditionnalité, le fractionnement des apports, l ajustement des doses aux besoins observés ou mesurés des cultures, l épandage précis d engrais sous des formes limitant le risque de volatilisation. L UNIFA considère que ces progrès réalisés ensemble par la recherche, les instituts techniques, les distributeurs et les agriculteurs méritent d être reconnus et encouragés. 3 - La future politique européenne sur les sols devrait inciter à entretenir leur fertilité A la suite des conclusions d un vaste travail d expertise remis à la Commission européenne fin 2004, la DG Environnement a entrepris une large consultation publique sur les menaces pesant sur les sols qui se clôturera le 26 septembre 2005. Elle est ouverte aux associations, aux organismes économiques, scientifiques et à tous les citoyens. La fertilité y est abordée sous l angle du maintien de la matière organique mais rien n est dit sur l action des agriculteurs pour entretenir les réserves des sols en éléments nutritifs et améliorer les propriétés du sol par les amendements basiques. Pourtant l UNIFA constate sur ce plan que les nouvelles baisses des apports minéraux de 5% pour les phosphates et de 4% pour la potasse pour la campagne 2004-2005 portent la chute de ces éléments à plus de 50% depuis 1988-89. Ce sont en 2004, 8 régions à dominante céréales et grandes cultures qui sont en solde négatif pour le bilan (Total des apports- Exportations des récoltes) tant pour P que pour K. Certaines de ces régions le sont depuis plus de 5 campagnes successives. Les raisons en sont plus économiques qu agronomiques. Les agriculteurs préfèrent reporter à plus tard les apports de fumure de fond nécessaires pour compenser les exportations des récoltes afin de sauver à court terme un peu de marge et cela d autant plus que les prix de céréales diminuent alors que ceux des intrants augmentent. Conférence de Presse UNIFA 23 septembre 2005 page 5/6
La préservation de la fertilité des sols repose à notre avis autant sur l entretien des réserves en éléments minéraux que sur la prévention de l érosion, la matière organique, ou d autres menaces. Il n est pas envisageable longtemps de retirer du sol des éléments minéraux avec les récoltes en pérennisant l impasse. C est pourquoi le raisonnement agronomique devrait revenir au premier plan et guider la politique d apport pour une agriculture durable. Les outils de ce raisonnement sont bien connus, ils combinent le bilan des éléments sur la rotation avec l analyse de terre. L UNIFA poursuit en 2005 et 2006 ainsi sa communication sur ce thème et met à disposition un nouvel indicateur constitué par les bilans régionaux pour P2O5 et K2O analysé sur une tendance longue depuis 1988-89. CONCLUSION Les conclusions de cette conférence sont multiples et globalement positives : Tout d abord, la situation de l industrie est meilleure cette année que ces dernières années. Notre environnement a évolué vers une professionnalisation accrue, et des engagements plus forts de nos entreprises pour la gestion responsable des produits à tous les stades de la production et de l utilisation des engrais ont véritablement vu le jour. Certains sujets d actualité n ont d ailleurs pas été traités dans cette conférence, et je peux simplement les évoquer ici. Notre industrie participe activement au plan Kyoto pour la France, elle s est déjà vue allouer des quotas d émission de CO2, elle a demandé à inclure les émissions de N2O dans le calcul des quotas, et pourra ainsi contribuer à une réduction importante de ce gaz à effet de serre qui a un potentiel de réchauffement très élevé. De façon générale nos entreprises sont devenues proactives sur les sujets environnementaux, après avoir du affronter les turbulences économiques de ces dernières décennies. Nous sommes maintenant dans une situation stabilisée, avec un grand marché européen, une distribution qui s est adaptée aux contraintes réglementaires et qui a progressé en efficacité. L agriculture elle-même comme sur les autres plans a amélioré son efficacité économique et agronomique pour l utilisation des engrais. Elle produit de façon encore plus respectueuse de l environnement pour satisfaire des besoins qui vont très au delà de la seule autosuffisance alimentaire. La filière agricole, et notre industrie prendront part à toutes ces missions, produire des denrées alimentaires de haute qualité sanitaire, protéger l environnement, préserver les paysages, améliorer la biodiversité, produire de l énergie renouvelable et des biomatériaux performants et cette liste n est sans doute pas définitive. Les seules incertitudes portent sur la situation financière de nos clients finaux, les agriculteurs, et sur l évolution à la hausse encore prévisible de toutes nos matières premières. Dans ce contexte, la mission de l UNIFA est encore plus évidente : préserver la présence en France d une industrie compétitive, fournisseur important de la filière agricole et agro-alimentaire stratégique pour notre pays. Conférence de Presse UNIFA 23 septembre 2005 page 6/6