LA SURVEILLANCE PONDERALE EN CONSULTATION DE MEDECINE GENERALE. Étude des pratiques de 38 médecins généralistes Maîtres de Stage

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Transcription:

UNIVERSITE DU DROIT ET DE LA SANTE LILLE 2 FACULTE DE MEDECINE HENRI WAREMBOURG Année 2012 T H È S E P O U R L E D I P L O M E D É T A T D E D O C T E U R E N M É D E C I N E LA SURVEILLANCE PONDERALE EN CONSULTATION DE MEDECINE GENERALE Étude des pratiques de 38 médecins généralistes Maîtres de Stage Universitaire à la Faculté Libre de Médecine de Lille Présentée et soutenue publiquement le 01/02/2012 Par Jury Président : M. le Professeur Raymond GLANTENET Assesseurs : M. le Professeur Monique ROMON M. le Professeur Dominique LACROIX M. le Docteur Julien PELZER Directeur de thèse : M. le Docteur Julien PELZER Travail de la Faculté Libre de Médecine de l Institut Catholique de Lille 1

Remerciements A Monsieur le Professeur R. GLANTENET. Vous me faites l honneur d assurer la présidence du jury de thèse. Soyez assuré de ma respectueuse considération. A Madame le Professeur M.ROMON. Vous avez accepté de juger ce travail. Recevez ici le témoignage de ma profonde gratitude. A Monsieur le Professeur D.LACROIX. Vous avez accepté de juger ce travail. Recevez ici le témoignage de ma profonde gratitude. A Monsieur le Docteur J.PELZER. Vous avez accepté de diriger cette thèse et l avez orientée avec une grande disponibilité. Recevez l expression de mes sincères remerciements. A Monsieur le Docteur B. MOTTE. Vous m avez aidé à initier ce projet et à orienter mes recherches. Soyez remercié pour vos conseils. A Monsieur le Docteur F.VILLE. Vous avez su orienter mon sens critique de la pratique médicale. Nos discussions sont pour beaucoup dans l élaboration de cette thèse et dans ma vision de la pratique médicale scientifique. A Monsieur le Docteur D.DECOSTER. Par votre patience et votre sagesse vous avez su m aider à tempérer mes ardeurs pour me permettre d aller plus loin et plus juste. Travailler avec vous a été pour moi très enrichissant. Recevez l expression de mes sincères remerciements. Aux médecins qui m ont accompagné lors de ma formation universitaire et clinique et aux médecins qui ont accepté de participer activement à l élaboration de cette thèse. C est grâce à votre disponibilité et les valeurs de fraternité et de partage qui nous animent que ce travail aboutit. Recevez l expression de ma profonde reconnaissance. A Ludivine, mon épouse, et à Cyrielle et Léopold, mes enfants A mes parents et beaux-parents A mes sœurs Et à tous ceux dont l amitié et la confiance m ont permis de mener ce travail à son terme. 2

Table des matières 1. INTRODUCTION... 4 2. DEFINITIONS... 5 2.1 En pratique médicale courante... 6 Anthropométrie... 7 2.1.1 Indice de Quetelet ou indice de masse corporelle (IMC ou BMI).... 7 2.1.2 Le rapport taille/hanches.... 7 2.1.3 Les plis cutanés... 7 2.1.4 Evaluation de la masse musculaire avec les diamètres squelettiques.... 8 Impédancemétrie :... 9 2.2 Examen de deuxième intention : Échographie, Scanner, IRM.... 9 2.3 Examens spécialisés... 10 2.3.1 Mesure de la densité corporelle.... 10 2.3.2 DEXA (absorption biphotonique à rayon X)... 11 2.4 Méthodes de laboratoire et de recherche... 12 2.4.1 Méthode par dilution isotopique... 12 2.4.2 Comptage du potassium 40 (40K)... 13 2.4.3 Radioactivation neutronique... 13 2.4.4 Excrétion urinaire de la créatinine et de la 3-méthyl-histidine... 13 2.4.5 Conductivité corporelle totale... 14 2.5 En médecine générale... 14 3. RECOMMANDATIONS EN MEDECINE GENERALE... 15 4. MATERIEL ET METHODES... 18 4.1 Type d étude... 18 4.2 Recueil des données... 18 4.3 Analyse de données... 18 5. RESULTATS... 20 5.1 Description de l échantillon médecin... 20 5.2 Description de l échantillon patient... 22 5.3 Analyse comparative selon les caractéristiques des patients... 25 5.4 Résultats de la surveillance pondérale selon les médecins... 32 5.5 Données issues des entretiens avec les médecins... 37 6. DISCUSSION... 38 6.1 Résultats principaux... 38 6.2 Méthodologie... 39 6.3 Biais... 41 6.4 Représentativité... 43 6.5 Eléments de proposition... 43 7. CONCLUSION... 46 8. ABREVIATIONS... 47 9. REFERENCES... 48 10. RESUME... 53 3

1. INTRODUCTION La mesure du poids d un patient est une donnée élémentaire de l examen clinique, utile dans de nombreux diagnostics comme dans l adaptation d une prise en charge thérapeutique. Il existe une grande variabilité des pratiques existantes en ce qui concerne la surveillance pondérale en médecine générale. Certains médecins, ne souhaitant pas gêner le patient, effleurent parfois le sujet de manière verbale sans mesurer le poids tandis que d autres pèsent systématiquement chaque patient et que d autres enfin n abordent même pas le sujet. Certes, la préoccupation du poids en termes d image a acquis une place prépondérante dans notre société actuelle, mais la surveillance du poids ne doit elle pas rester un élément systématique de l examen clinique? A l échelle individuelle, le médecin traitant est le premier acteur des soins de prévention et de promotion de la santé pour ses patients [1]. Au-delà de toute action de prévention, la surveillance de la courbe pondérale est un élément diagnostique important pour évaluer le retentissement somatique général de toute pathologie chronique mais aussi sous-jacente. Des recommandations existent dans de nombreuses pathologies. L objectif de notre travail était d évaluer la pratique des médecins généralistes quant à la surveillance du poids dans leur patientèle. Quels sont les moyens d évaluation du poids mis en place dans les cabinets et comment sont-ils utilisés? Quels sont les facteurs qui influent sur cette surveillance? 4

2. DEFINITIONS Le poids, ou force de pesanteur, est défini selon la science comme la force exercée sur un corps (de masse m) immobile dans le référentiel terrestre, par l attraction universelle des autres masses et les forces inertielles. Pour notre propos, il convient ainsi de parler de masse corporelle et non de poids. La masse corporelle humaine est ainsi «la masse» d un sujet, exprimée en kilogrammes. Elle est composée de la masse osseuse, la masse musculaire, la masse grasse, la masse viscérale, la masse sanguine, de la peau et téguments et des humeurs. Ces constituants sont variables d un individu à l autre. Ils varient selon l âge, le sexe, l activité physique, l alimentation et les pathologies. Pour mieux évaluer la masse corporelle, on peut utiliser différents modèles [2] : le modèle anatomique qui reprend les tissus un par un (tissu musculaire, adipeux, organes, ) le modèle biochimique qui sépare les composants de l organisme en fonction de leurs propriétés chimiques : eau, protéines, lipides, minéraux. Ce modèle est peu utilisé mais a servi de référence à différentes méthodes d évaluation de la masse corporelle. Cela a permis d évaluer la densité de la masse grasse, de la masse maigre, de l hydratation moyenne du corps. les modèles physiologiques qui permettent de diviser la masse corporelle en compartiments, liés par leur fonction et non par leur anatomie ou composition biochimique. On en distingue plusieurs types : un système dichotomique masse grasse / masse maigre (comprenant le reste : masse musculaire, osseuse, viscérale, sanguine, téguments et humeurs). Système le plus simple et le plus utilisé 5

le système DEXA à 3 compartiments : masse grasse, masse cellulaire active (qui correspond aux cellules des organes et muscles) et l eau extracellulaire (liquides interstitiels et plasma). le système à 4 compartiments de Brozek : masse grasse, eau extra-cellulaire, masse cellulaire active et la masse minérale osseuse. Il n existe pour tous ces paramètres pas de norme définie mais des intervalles de norme qu il convient d intégrer à chaque contexte. Figure 1 Les compartiments corporels d après Brozek («Enseignement de la Nutrition», Collège des enseignants de Nutrition) De manière pragmatique, il existe différents outils qui ont été créés pour permettre d évaluer selon une norme la corpulence d un individu. Ceux ci n ont d intérêt que définis dans un contexte précis. Ainsi selon les situations il sera judicieux d utiliser l un ou l autre.[3] 2.3. En pratique médicale courante En pratique médicale courante, le médecin généraliste utilise des mesures élémentaires des patients (poids, taille, périmètre abdominal, ) et l impédancemétrie. 6

Anthropométrie : 2.3.2 Indice de Quetelet (1871) ou indice de masse corporelle (IMC ou BMI) IMC (kg/m²) = Masse corporelle (kg) / Taille² (m²) Cet indice est un marqueur de la corpulence globale, il ne fait pas de distinction entre la masse grasse et la masse non grasse. Il fluctue selon l âge et le sexe. L OMS a classifié cet indice en table de référence [4]. Ainsi, par exemple à l âge adulte, on parle d insuffisance pondérale pour un IMC < 18,5 ; de corpulence normale pour un IMC compris entre 18,5 et 24,99 ; de surpoids pour un IMC > 25 et d obésité au-delà de 30. 2.1.2 Le rapport taille/hanches. Il consiste à calculer le rapport entre les périmètres du tour de taille et du tour de hanches. Si celui-ci est supérieur à 1 chez l homme et à 0,88 chez la femme, cela signifie que la graisse abdominale viscérale est trop importante et constitue ainsi un facteur de risque cardiovasculaire [5]. 2.1.3 Les plis cutanés [6] Cette méthode est validée pour apprécier l adiposité. Elle nécessite l utilisation d un adipomètre (pince de Holtain ou Harpenden, seule pince à avoir fait l objet d étude de Figure 2 Adipomètre validation). Il mesure l épaisseur des plis cutanés. On peut ensuite intégrer la mesure de ces plis à des équations pour déterminer la densité corporelle (DC) puis le pourcentage d adiposité. 7

Parmi ces équations, la plus communément utilisée est celle des 4 plis de Durnin & Womesley (plis bicipital, tricipital, sous scapulaire et supra iliaque). Cette équation s écrit DC = C (M Log10 Σ 4plis) (avec C et M constantes variables selon l âge et le sexe). Puis, selon l équation de Siri, on calcule le pourcentage de tissu adipeux (%Tadx). % Tadx = [(4,95/DC) 4,50] x 100 La masse grasse (MaGr) est ensuite calculable : MaGr = Poids (kg) x (% Tadx/100) On pourra choisir d autres équations selon les caractéristiques des patients (ethnie, sport). On peut ainsi comparer ce résultat à des tables de références. Par exemple, pour la population générale [7] : Tableau I Normes de proportion de la masse grasse pour la population générale selon le sexe et l âge. 2.1.4 Evaluation de la masse musculaire avec les diamètres squelettiques. Il s agit de calculer la masse musculaire totale à partir de la circonférence brachiale et de la mesure du pli cutané tricipital. Ainsi, le calcul de la circonférence musculaire brachial (Cm) se fait avec la mesure circonférence brachiale (Ca en cm) et la mesure pli cutané tricipital (S en cm) selon la formule Cm = Ca πs Les mesures normales se situent entre 20 et 23 cm chez la femme et entre 25 et 27 cm chez l homme. On en déduit le calcul de la surface musculaire brachiale (M) : M = Cm² / 4π 8

Puis le calcul de la masse musculaire totale (Mm) : Pour un homme : Mm(kg) = taille x (0,0264 + 0,0029 x (M-10) Pour une femme : Mm(kg) = taille x (0,0264 + 0,0029 x (M-6,5) Cette méthode est facile d utilisation mais elle conduit à une erreur de l ordre de 10%. Impédancemétrie : Cette méthode est basée sur la capacité de conduction d un courant alternatif de faible intensité et de plusieurs fréquences, sur un sujet en décubitus entre la main et le pied et après 10 à 15 mn de repos. Plus le tissu est riche en eau, meilleure est la conductivité et plus faible l impédance. Le tissu graisseux oppose une forte résistance. L eau corporelle et la masse maigre (hydratation supposée constante à 73%) sont extrapolées à partir d équations prédictives où sont pris en compte le poids, la taille, l âge, le sexe et l ossature (circonférence du poignet). En pratique, à l aide de l impédancemètre, il faut réaliser les mesures le matin, sur un patient à jeun, avec poids et taille vérifiés, allongé au repos et vessie vide. On obtient ainsi une estimation de la masse maigre de laquelle on déduit la masse grasse. Avantages : simplicité, rapidité, réalisable en routine au lit, faible coût, intérêt pédagogique Inconvénients : prend surtout en compte la composition des membres. Surévaluation de l eau et de la masse maigre chez l obèse. Spécificité des équations prédictives pour une population donnée. 2.2 Examens de deuxième intention : Échographie, Scanner, IRM. Trois examens radiologiques sont utilisables en complément pour évaluer les composants de la masse corporelle. 9

ECHOGRAPHIE L échographie permet de déterminer l épaisseur du tissu adipeux sous-cutané. Toutefois, avec cette technique la mesure de la graisse viscérale intra-abdominale reste incertaine et il n est pas possible d estimer la totalité des composants. SCANNER ou TOMODENSITOMETRIE par rayons X : Cet examen permet l identification des surfaces graisseuses sous-cutanées et péri-viscérales, le calcul de leurs proportions respectives et l estimation de leur masse. Avantages : calculs précis des composants de la masse corporelle Inconvénients : coût et irradiation. IRM (Imagerie par Résonance Magnétique) : L IRM identifie les mêmes éléments que la tomodensitométrie. Avantage : non irradiante. Inconvénients : très coûteuse, image sensible aux mouvements du sujet et accessibilité limitée. 2.3 Examens spécialisés 2.3.1 Mesure de la densité corporelle. Cette méthode utilise le modèle physiologique bi-compartimental basé sur le principe d Archimède. Elle consiste à mesurer le volume corporel corrigé par hydrodensitométrie (en plongeant le patient dans une cuve d eau et en retirant le volume résiduel pulmonaire et les gaz digestifs) ou par pléthysmographie (le patient est introduit dans une cabine de volume connu, le régime de pression de la cabine est modifié en proportion du volume introduit et permet de déterminer le volume corporel). 10

Figure 3 Pléthysmographie corporelle totale (extrait du Cahier de Nutrition et Diététique, 40,3,2005) Ainsi la densité corporelle : DC = Masse (kg) / Volume En admettant que les densités des masses grasse (dmagr) et maigre (dmam) soient constantes et respectivement dmagr = 0,9 et que dmam = 1,1 on utilise la formule de SIRI pour déduire le pourcentage de Masse Grasse : % Tadx = [(4,95/DC) 4,50] x 100. Cette méthode a longtemps été considérée comme la référence et a fourni une grande partie de nos connaissances de la composition corporelle. Toutefois, cette technique ne peut pas être utilisée chez les enfants, les malades, les personnes âgées à mobilité réduite et les patients à coopération réduite. 2.3.2 DEXA (dual energy X-ray absorptiometry ou absorption biphotonique à rayons X) Cette méthode correspond au balayage de l ensemble du corps avec un faisceau de rayons X à deux niveaux d énergie. Le rapport d atténuation des deux rayonnements est fonction de la matière traversée. Le calibrage est effectué avec des «fantômes» contenant des triglycérides et du calcium. 11

Cette méthode permet de séparer 3 compartiments : masse grasse, masse maigre, contenu minéral osseux. Avantages : Bonne précision, bonne sensibilité (même aux variations de faible amplitude); Bonne reproductibilité des mesures ; Faible irradiation (3 millirems). Possibilité d approches régionales (bras, tronc, jambes). Inconvénients : Coût du matériel; Absence de standardisation des appareils et des algorithmes de calcul ; Poids du sujet limité à 150 kg. C'est ainsi une méthode fiable, alternative valable aux méthodes dites de «référence» (pesée hydrostatique, dilution, comptage 40K). 2.4 Méthodes de laboratoire et de recherche 2.4.1 Méthode par dilution isotopique Le principe de cette méthode repose sur la mesure de la concentration d un produit de contraste introduit en quantité définie dans un volume pour en déduire le volume de dilution. On utilise le modèle physiologique dichotomique (masse grasse/masse maigre) et on va chercher à déterminer la masse maigre. La masse maigre est présumée hydratée à 73,2%. En utilisant un marqueur qui se dilue dans l eau, on peut ainsi calculer la masse maigre. La graisse ne contient pas d eau, donc ne fixe pas l isotope. On utilise de l'eau lourde 3 H 2 O. Le volume de diffusion du traceur V = Q/C (Q = quantité injectée; C = concentration mesurée à l équilibre) La Masse grasse s obtient en soustrayant la masse maigre de la masse corporelle totale. Avantages : méthode précise, «de référence». Inconvénients : méthode lourde, longue, coûteuse, irradiante. Il faut tout de même préciser qu il existe une variabilité de l hydratation de la masse maigre (65 à 80%) selon l âge, l état de dénutrition ou d obésité. 12

2.4.2 Comptage du potassium 40 (40K). L isotope 40K représente 0,0118% du potassium de l organisme. La mesure est faite avec un appareil de comptage corps-entier. La concentration en potassium dans la masse maigre est supposée constante et égale à 68 mmol/kg. La masse maigre peut alors être calculée. Avantages : méthode précise, «de référence» Inconvénients : installation sophistiquée (chambre blindée) et calculs complexes. De plus le contenu en potassium de la masse maigre varie avec l âge, le sexe et le degré d obésité. 2.4.3 Radioactivation neutronique : Cette méthode consiste en l'irradiation du corps entier par des neutrons rapides. On quantifie ensuite le contenu en Calcium, Phosphore, Azote et Carbone ce qui permet d estimer la masse osseuse (à partir du calcium et phosphore : Ca et P), la masse protidique (à partir de l azote : N) et la masse grasse (à partir du carbone : C). Avantage : Méthode directe et la plus précise in vivo (erreur < 3%). Inconvénients : méthode très coûteuse et très irradiante ; rareté des installations. 2.4.4 Excrétion urinaire de la créatinine et de la 3-méthyl-histidine (catabolisme musculaire): Cette méthode consiste à mesurer l excrétion urinaire de la créatinine, produit à 98% par la masse musculaire. De manière pratique, après un régime de trois jours sans viandes ni poissons afin d éviter les apports exogènes, il faut recueillir les urines de 24 h. Le calcul de la masse musculaire est basé sur une équivalence de 17,9 kg à 20 kg de muscle par gramme de créatinine. Avantages : seule mesure biologique de la masse musculaire, facilitée de mise en œuvre. Inconvénients : peu fiable car aléas du recueil des urines de 24h et variabilité biologique des dosages. 13

2.4.5 Conductivité corporelle totale : Cette méthode repose sur le principe des différences de conduction entre les tissus; Le sujet est placé dans un anneau électromagnétique. Inconvénients : irréalisable en pratique courante, coût très élevé. 2.5 En médecine générale Il existe donc de nos jours de nombreux moyens pour mesurer et évaluer la masse corporelle ainsi que sa composition. En pratique médicale de consultation, ou en hospitalisation, la DEXA dans la mesure où elle est accessible, représente la méthode de choix, étant donné la précision et la qualité des renseignements obtenus. A défaut, dans les cabinets de médecine générale, l impédance bioélectrique peut être utilisée en tenant compte des limites et des imprécisions de cette méthode, c'est-à-dire en n accordant de valeur aux modifications de composition corporelle observées que pour des pertes ou des augmentations de poids suffisamment importantes selon chaque contexte. Sinon, les données anthropométriques constituent un moyen peu coûteux d évaluation et leur suivi longitudinal par des mesures répétées compense le manque de précision. Ainsi, la connaissance de la composition corporelle doit être intégrée dans le raisonnement et la pratique médicale. Les méthodes d'évaluation ne sont plus réservées à des cercles d'initiés. Elle permet de prendre des décisions et de formuler des propositions thérapeutiques les mieux adaptées, telles que l'interprétation des variations pondérales, le choix d'un programme d'amaigrissement ou de renutrition. 14

3. RECOMMANDATIONS EN MEDECINE GENERALE La mesure et la surveillance de la masse corporelle sont ils réellement des paramètres indispensables à la pratique de la médecine générale? Il n'existe pas de réponse universelle car toute consultation médicale s'inscrit dans un contexte unique auquel il convient de s'adapter. Toutefois, selon les pathologies incriminées, il existe des recommandations de bonne pratique appuyées par des publications scientifiques validées. D après la WONCA [8], la médecine générale est caractérisée par la gestion des soins de santé primaire, centrés sur le patient selon un modèle holistique et dans une orientation communautaire ; tout ceci s'inscrivant dans une approche globale c'est à dire gérant simultanément les problèmes aigus et chroniques et en faisant la promotion de la santé et la prévention des maladies. Cette définition reprend la vocation de prévention de la médecine générale au delà de la simple réponse au problème présenté par le patient. En reprenant les recommandations concernant la médecine générale préventive [9];[10] ou l enseignement de la sémiologie médicale [11], la surveillance du poids fait bien partie des bases de l examen clinique. En Belgique, on trouve une publication de 2006 justifiant la surveillance pondérale systématique en médecine générale au titre de la prévention systématique et de la prise en charge du facteur de risque du surpoids [12]. L OMS décrit également le surpoids et l obésité comme des facteurs de risque de morbi-mortalité à prendre en charge [4]. En France, une politique de prévention a été mise en place avec la création du programme national de nutrition et de santé en 2001 (PNNS) [13];[14]. Toutefois, les objectifs de ce plan ne sont pas atteints. On note la création de comités de rédaction de recommandations clarifiées et des opérations de communication bien perçues par la population mais l'impact 15

attendu sur la prévalence du surpoids de la population générale n'est pas atteint [15]. De nouveaux objectifs ont été redéfinis pour préciser l action du PNNS 3 ème version en 2011[14]. Il est centré sur la réduction de l obésité et du surpoids dans la population, l augmentation de l activité physique et la diminution de la sédentarité à tous les âges, l amélioration des pratiques alimentaires et des apports nutritionnels, notamment chez les populations à risque, et la réduction de la prévalence des pathologies nutritionnelles (dénutrition, troubles du comportement alimentaire). De plus, au-delà de toute action de prévention, la surveillance de la courbe pondérale est un élément diagnostique important pour évaluer le retentissement somatique général de toute pathologie chronique mais aussi sous-jacente [16]. Outre ces recommandations générales, il existe des recommandations spécifiques selon chaque type de pathologie. Les désordres endocriniens ou métaboliques, débutants ou existants, engendrent des variations de poids qui peuvent être les seuls symptômes significatifs. On peut citer par exemple les dysthyroïdies, dyslipidémies et syndrome de Cushing [17];[18];[19]. Dans le diabète, le poids est un marqueur général de l équilibre nutritionnel et le surpoids un facteur de risque cardiovasculaire associé à prendre en charge d'après les recommandations de l'affspas et de l'alfediam. [20];[21];[22]. Les populations de personnes âgées ou les patients aux antécédents de cancer, plus fragiles, à risque de dénutrition, nécessitent une surveillance pondérale mensuelle selon les recommandations de bonne pratique de l HAS [23][24]. 16

A l inverse, pour la population pédiatrique, la surveillance du poids pour la réalisation des courbes de croissance permet le dépistage des pathologies des troubles de croissance [25] et également de définir l état de santé et de nutrition de ces jeunes patients [26]. En psychiatrie, la surveillance du poids a son intérêt dans les syndromes dépressifs comme le rappelle l HAS en citant les critères du DSM IV [27]. D'un point de vue cardiovasculaire, outre le cas du diabète déjà évoqué, l'has précise l'intérêt d'une surveillance pondérale spécifique chez les patients porteurs d'une cardiopathie congénitale ou valvulaire [28], chez les insuffisants cardiaques [29] et d une prise en charge d éducation thérapeutique sur le surpoids pour les coronariens [30] mais aussi pour tous en raison du facteur de risque qu il représente [31];[32]. Ainsi, évaluer la masse corporelle d un patient et suivre son évolution sont effectivement des éléments importants pour prévenir et prendre en charge tout déséquilibre, facteur de risque de morbi-mortalité, pour déceler une maladie ou en suivre de manière globale et complète l évolution. 17

4. MATERIEL ET METHODES 4.1 Type d étude L'étude effectuée est une étude descriptive, observationnelle et transversale. Elle a été réalisée auprès de médecins généralistes du Nord-Pas-de-Calais, Maîtres de Stage Universitaire au sein du Collège des Généralistes Enseignants de la Faculté Libre de Médecine de Lille, Université Catholique. 4.2 Recueil des données Les données ont été recueillies entre septembre 2010 et juin 2011 lors d'entretiens en face à face avec le médecin ou par téléphone. L'objectif de l'entretien était de passer en revue les dossiers d'une journée de consultation en cabinet et de repérer la surveillance pondérale des patients en notant les caractéristiques de chaque patient et du médecin interrogé. Comme nous l avons dit, il n existe pas de référence universelle pour la surveillance pondérale des patients. Le critère principal de notre étude a donc été de noter si le poids mesuré figurant dans le dossier datait de moins d un an, en référence à une publication d un audit sur la surveillance pondérale en médecine générale parue dans la Revue du praticien en février 1999 [33]. Le logiciel Excel de Microsoft Office a permis l'enregistrement des données. 4.3 Analyse de données Les données ont été analysées avec le logiciel SPSS version 18. Pour les données quantitatives, les résultats sont présentés sous forme de moyennes avec écart type. Pour les données qualitatives, les résultats sont exprimés sous forme de pourcentage. 18

Pour les comparaisons de groupe avec variable qualitative, le test du «Khi2» a été utilisé, ou le test exact de Fischer si un effectif théorique était inférieur à 5. Pour les comparaisons de variables quantitatives, nous avons soit utilisé un test t de Student soit effectué des regroupements de classe cliniquement satisfaisants et utilisé un test du «Khi2». La significativité retenue était de 5%. 19

5. RESULTATS 5.1 Description de l échantillon médecin L enquête a été effectuée auprès de 38 médecins généralistes entre les mois de septembre 2010 et juin 2011. Sexe Figure 4 - Répartition des médecins selon le sexe Caractéristiques physiques Dans la population interrogée, l'âge moyen était de 51,4 ans avec un écart type de 7,64. L indice de masse corporelle moyen était de 24,27 Kg/m2 avec un écart type de 2,56. A noter que 2 médecins n ont pas communiqué leur poids ou taille pour estimer l IMC. Répartition géographique Figure 5 - Répartition des médecins selon leur emplacement géographique 20

Répartition des médecins informatisés La majorité des médecins était informatisée : 94,7 % (soit 36/38). Médecins équipés d une balance La totalité des médecins était équipée d'une balance. 82% n assurait pas de contrôle d étalonnage de leur appareil. 4 médecins étaient également équipés d un impédancemètre. Expérience médicale Les médecins ont passé leur thèse entre 1974 et 2001 avec une moyenne autour de 1987. Concernant leur année d installation, ces derniers se sont installés entre 1975 et 2005 avec une moyenne autour de 1989. Activité médicale 34 médecins ont communiqué le volume de leur activité annuelle. Elle s établit entre 3323 actes/an et 11750 actes/an, avec une moyenne de 6307 actes/an (un écart type de 1687). Sur la journée étudiée, les médecins avaient une activité de consultation au cabinet qui s échelonnait de 11 à 43 consultations par jour avec une moyenne de 22 consultations par jour. 21

5.2 Description de l échantillon patient L enquête a permis d inclure 799 patients. Sexe Age Figure 6 Répartition des patients selon le sexe Figure 7 Pyramide des âges selon le sexe Dans la population générale, l âge moyen était de 41,7 ans avec un écart type de 24,36. Chez les patients âgés de plus de 18 ans (642 patients), l âge moyen était de 50,78 ans avec un écart type de 18,45. Pour l analyse des données, nous avons regroupé les patients selon leur âge pour comparer les patients selon les recommandations : soit «enfants» (< 18 ans), «séniors» (> 70 ans) et «adultes» (entre 18 et 70 ans). 22

Surveillance pondérale Figure 8 Répartition des patients selon la surveillance pondérale annuelle Poids et IMC Dans l échantillon, 641 poids ont été inscrits dans leur dossier, pour une moyenne de 63,7kg avec un écart type de 26,97. Dans la population pédiatrique, les normes étant différentes selon l âge, nous n avons pas fait d étude descriptive globale de ces paramètres. Sur la population adulte (n=642), 512 poids étaient connus pour une moyenne de 74,4kg et un écart type de 17,26. Dans cette population, 390 patients ont un IMC estimé, soit 60,7 % des patients adultes. L IMC moyen constaté dans cet échantillon est de 26,79 kg/m² avec un écart type de 5,83. Figure 9 Répartition des patients adultes selon leur IMC 23

Existence d antécédents médicaux Dans l échantillon étudié, il a été noté la présence ou non de pathologie(s) chronique(s) existante(s). En raison de la grande rareté de ces pathologies chez l enfant, ces derniers n ont pas été inclus dans la description. 31,6 % des adultes ne présentaient pas de pathologie chronique. Détaillons ci après la répartition des 68,4% restant selon leur(s) pathologie(s) : Dans la population adulte Effectifs Total Pourcentage Hypertension artérielle 176 642 27,4% Maladie coronarienne 54 642 8,4% Diabète 74 642 11,5% Dyslipidémie 62 642 9,7% Antécédents endocrinologiques autres 32 642 5% Antécédents de cancer 45 642 7% Antécédents psychiatriques 102 642 15,9% Tableau II Répartition des pathologies au sein de l échantillon des patients adultes Les autres pathologies retrouvées lors des interrogatoires n étaient pas en nombre suffisant pour permettre des comparaisons et ne sont ainsi pas décrites. 24

5.3 Analyse comparative de l existence de la surveillance pondérale selon les caractéristiques des patients Selon l âge des patients Figure 10 - Répartition des patients par catégories d âges Il existait une différence statistique significative entre ces 3 classes d'âge (p<0,001) La figure ci-dessous illustre qu il existait une différence statistique significative entre les enfants et les adultes (séniors inclus) (p<0,001). Figure 11 - Répartition des patients enfants et adultes selon la surveillance pondérale annuelle 25

De même, il existait ainsi une différence statistique significative de surveillance pondérale entre les adultes de plus et de moins 70 ans (p<0,001). Figure 12 - Répartition des patients adultes de plus ou moins de 70 ans selon la surveillance pondérale annuelle Pour analyser les autres paramètres des patients, il a été décidé de se concentrer uniquement sur la population adulte de l échantillon puisque la population pédiatrique est suivie de manière quasi systématique. Selon le sexe des patients Figure 13 - Répartition de la population adulte étudiée selon le sexe et la surveillance pondérale annuelle Il n existait pas dans cet échantillon de différence statistique significative entre les patients masculins et féminins. (p=0,94). 26

Selon la corpulence des patients adultes Pour permettre d'évaluer si une corpulence anormale influait sur la surveillance pondérale, nous avons regroupé les IMC normaux (compris entre 18,5 et 25) et les autres. Figure 14 - Répartition de la population adulte étudiée selon la corpulence et la surveillance pondérale annuelle Il n existait pas de différence statistique significative de surveillance pondérale dans l année entre les patients ayant une corpulence normale ou anormale (p=0,84). Selon les antécédents Figure 15 - Répartition de la population adulte étudiée selon l existence d antécédents médicaux et la surveillance pondérale annuelle Notre étude montre une différence statistique significative entre les patients avec et sans antécédent (p<0,001). 27

Etudions ci-après les différentes pathologies : Pour l hypertension Figure 16 - Répartition de la population adulte étudiée selon l existence d hypertension et la surveillance pondérale annuelle Il existait ainsi dans cet échantillon une différence statistique significative entre les patients hypertendus et les autres. (p<0,001). Pour le diabète Figure 17 - Répartition de la population adulte étudiée selon l existence d un diabète et la surveillance pondérale annuelle Il existait une différence statistique significative entre les patients diabétiques et les autres (p<0,001). 28

Pour la coronaropathie Figure 18 - Répartition de la population adulte étudiée selon l existence d une coronaropathie et la surveillance pondérale annuelle Il n existait pas de différence statistique significative entre les patients atteints de coronaropathie et les autres (p=0,12). Pour la dyslipidémie Figure 19 - Répartition de la population adulte étudiée selon l existence d une dyslipidémie et la surveillance pondérale annuelle Il n existait dans cet échantillon pas de différence statistique significative entre les patients atteints de dyslipidémie et les autres (p=0,44). 29

Pour les pathologies endocriniennes Figure 20 - Répartition de la population adulte étudiée selon l existence d antécédents endocriniens et la surveillance pondérale annuelle Il n y avait pas de différence statistique significative entre les patients aux antécédents endocriniens et les autres (p=0,22). Pour le cancer Figure 21 - Répartition de la population adulte étudiée selon l existence d antécédents de cancer et la surveillance pondérale annuelle Il n existait pas de différence statistique significative entre les patients aux antécédents de cancer et les autres (p=0,16). 30

Pour les antécédents psychiatriques Figure 22 - Répartition de la population adulte étudiée selon l existence d antécédents psychiatriques et la surveillance pondérale annuelle Il n existait ainsi dans cet échantillon pas de différence statistique significative entre les patients aux antécédents psychiatriques et les autres (p=0,21). 5.4 Résultats de la surveillance pondérale selon les médecins En analysant les données par médecin interrogé, il est possible de déterminer la prévalence de la surveillance pondérale annuelle des patients consultés au cabinet sur la journée. Figure 23 - Pourcentage de surveillance annuelle pondérale des patients pour chaque médecin 31

Avec cette représentation graphique, on peut visualiser la dispersion des pratiques. Ainsi, la surveillance pondérale annuelle selon les médecins s échelonne de 0 % à 100 %, avec une moyenne à 69,95 % de patients pesés dans l année. De nouveau, il est intéressant de réaliser l analyse de cette surveillance du poids uniquement pour la population adulte. Figure 24 - Pourcentage de surveillance annuelle pondérale des patients adultes pour chaque médecin Pour la population adulte, la surveillance pondérale annuelle selon les médecins s échelonne de 0 % à 100 %, avec une moyenne à 65,66 %. Nous avons cherché à déterminer si certaines caractéristiques propres au médecin influent sur l exercice de la surveillance pondérale. 32

Selon le sexe Figure 25 - Répartition de la surveillance annuelle pondérale des patients adultes pour chaque médecin selon leur sexe Selon l âge Figure 26 - Répartition de la surveillance annuelle pondérale des patients adultes pour chaque médecin et répartition de leur âge Selon l indice de masse corporelle Figure 27 - Répartition de la surveillance annuelle pondérale des patients adultes pour chaque médecin et répartition de leur IMC 33

Selon la localisation Figure 28 - Répartition de la surveillance annuelle pondérale des patients adultes pour chaque médecin selon leur localisation d installation Selon la durée d installation Figure 29 - Répartition de la surveillance annuelle pondérale des patients adultes pour chaque médecin et répartition de leur année d installation Selon l activité de maître de stage Figure 30 - Répartition de la surveillance annuelle pondérale des patients adultes pour chaque médecin selon les étudiants sous leur responsabilité 34

Figure 31 - Répartition de la surveillance annuelle pondérale des patients adultes pour chaque médecin selon les étudiants sous leur responsabilité Figure 32 - Répartition de la surveillance annuelle pondérale des patients adultes pour chaque médecin selon les étudiants sous leur responsabilité Selon le volume de l activité médicale Figure 33 - Répartition de la surveillance annuelle pondérale des patients adultes pour chaque médecin et répartition de leur activité 35

Selon l intérêt affiché par les médecins pour la surveillance pondérale Figure 34 - Répartition de la surveillance annuelle pondérale des patients adultes pour chaque médecin selon l intérêt affiché pour la surveillance pondérale A partir de ces données, il a été possible d utiliser des tests comparatifs pour affirmer l existence ou non d un lien entre les variables. En voici les résultats synthétisés dans le tableau suivant : Caractéristique du médecin Résultats (p) Interprétation Sexe 0,745 Non significatif Âge 0,329 Non significatif IMC 0,182 Non significatif Informatisation du médecin Non réalisable car effectifs trop petits Localisation 0,028 Significatif Durée d'installation 0,404 Non significatif Maitre de stage Externe 0,979 Non significatif Maitre de stage SAP 0,343 Non significatif Maitre de stage SASPAS 0,918 Non significatif Activité (actes/an) 0,32 Non significatif Intérêt porté au poids <0,001 Significatif Tableau III - Résultats des tests comparatifs de moyennes de la surveillance pondérale En annuelle des patients selon les caractéristiques propre aux médecins 36

5.5 Données issues des entretiens avec les médecins Lors de l entretien, deux questions ouvertes ont été posées aux médecins : 1 ) «Prenez-vous la tension artérielle de vos patients de manière systématique? Pourquoi?» 2 ) «Effectuez-vous une surveillance pondérale de vos patients de manière systématique? Pourquoi?». Pour la surveillance tensionnelle chez l'adulte, 97% (soit 37/38) la réalisaient de manière systématique. Les arguments cités pour justifier cette surveillance étaient la surveillance de la pathologie en cas d'hypertension artérielle et une évaluation de l'état général du patient. Certains citaient également l'attente forte des patients quant à ce contrôle (26 % soit 10/38). Pour les 3 % restants (soit 1/38), la surveillance tensionnelle n était à réaliser qu en cas de point d'appel clinique ou de pathologique associée. Pour la surveillance pondérale, 45% (soit 17/38) estimaient effectuer une surveillance pondérale systématique. La raison principale évoquée était la surveillance de l'état général. Les autres médecins (55% soit 21/38) affirmaient effectuer une surveillance pondérale chez les enfants mais ne pas en effectuer une systématique chez l'adulte pour ne pas exaspérer les patients. En effet ils notaient parfois un refus du patient de se peser au nom de leur pudeur ou de l absence de raison médicale justifiée selon eux. D autres expliquaient que la patientèle adulte venait consulter pour un motif précis et ne pas avoir la place d'aborder d'autre sujet ou de réaliser une prise en charge préventive globale. Certains ont décrit un manque de temps suffisant pour permettre au patient, parfois âgé ou handicapé de se déchausser et se déshabiller. Enfin, d autres avouaient que simplement ils n y pensaient pas. 37

6. DISCUSSION 6.1 Résultats principaux On observe une franche disparité entre les médecins dans la surveillance pondérale de leurs patients. En analysant les données, on peut expliquer la diversité des pratiques selon plusieurs critères. Concernant les facteurs propres aux patients, il existe une nette différence de surveillance selon l'âge des patients. En ce qui concerne la population pédiatrique, la surveillance pondérale est bien effective avec une surveillance quasi systématique. En effet, cela s explique aisément avec les recommandations bien connues de surveillance de la croissance, l existence du carnet de santé incitant au suivi de ces paramètres et l inquiétude des parents quant au bon développement staturo-pondéral de leur enfant. Toutefois, pour les 2 groupes de populations restantes (adultes et séniors), la surveillance pondérale est non systématique, avec respectivement 65.3% pour la population adulte et 81,7% pour la population âgée de plus de 70 ans et avec une différence statistique significative entre ces 2 populations. On peut penser que le concept de fragilité de la personne âgée largement médiatisé et le développement des formations en gériatrie influencent les pratiques vers une surveillance plus accrue pour cette population. Toutefois, ces statistiques ne sont pas satisfaisantes. Quelles sont les facteurs limitant cette surveillance? En reprenant les propos des médecins généralistes lors des entretiens, on trouve plusieurs éléments : le manque de temps, la compliance du patient et la vigilance du médecin. Pourtant, les barrières du temps nécessaire pour la pesée (convaincre le patient, déshabillé, déchaussé) et du tabou du poids sont elles légitimes? 38

Pour les autres paramètres du patient, on observe que la surveillance pondérale est significativement plus effective chez les patients avec antécédents de pathologie chronique (74%), d hypertension (79,5%) et de diabète (90,5%). Il n existe pas de différence statistique significative pour les autres paramètres. Il faut tout de même nuancer ce propos concernant les patients aux antécédents de coronaropathie puisqu il n existait pas de différence avec p = 0,12. On peut supposer qu en agrandissant l échantillon la différence deviendrait significative. Cela illustre ainsi la connaissance des recommandations concernant certaines pathologies avec une pratique adaptée pour une prise en charge globale et ainsi une efficacité sur la morbi-mortalité. Mais l aspect non systématique de cette surveillance illustre aussi l importance des barrières citées précédemment, et aussi pour le reste de la population la difficulté rencontrée pour une prise en charge préventive globale lors d une consultation pour un autre motif comme une infection virale intercurrente par exemple. Il faut noter que tous les paramètres du patient ou antécédents n ont pas pu être analysés en raison de la taille de l échantillon. Il n existe ainsi pas de statistique pour les patients insuffisants cardiaques. Concernant les facteurs propres aux médecins, le principal facteur discriminant est l intérêt porté par les médecins à la surveillance du poids d après notre étude statistique. Cela illustre ainsi que pour améliorer les pratiques il faut que les médecins généralistes soient convaincus de la nécessité de cette surveillance pour qu elle soit appliquée le plus largement possible. Toutefois, seuls 45 % des médecins interrogés estimaient effectuer une surveillance pondérale systématique. Il est légitime de se demander pourquoi si peu. Il n existe pas de réponse 39

unique mais une cohorte de facteurs : les facteurs du temps et des difficultés de mise en œuvre, auxquels on peut ajouter le manque de publications explicites concernant la surveillance pondérale ou des recommandations concernant l examen clinique en médecine générale. En effet, dans la littérature, seul l audit de 1999 sur la surveillance pondérale en médecine générale [33] était réellement au cœur du sujet. Les autres publications citées concernaient une spécialité donnée ou alors la sémiologie médicale, mais pas la pratique de la médecine générale en particulier. De plus, on a noté que la localisation des médecins influe de manière significative sur cette pratique de surveillance. Ainsi en secteur semi rural, la surveillance pondérale était moins effective que dans les secteurs ruraux et de centre ville. Il est probable que la taille de l échantillon soit responsable de cette donnée. Il faudrait analyser cette variable sur un échantillon plus important pour s assurer de ce résultat. 6.2 Méthodologie L objet principal de l étude est la surveillance pondérale dans les cabinets de médecine générale. La définition même de cette surveillance était problématique. En effet il n existe pas de recommandation universelle concernant la surveillance du poids mais des recommandations à adapter à chaque patient et à chaque pathologie. Il a ainsi été choisi de prendre la fréquence la plus généraliste qui soit pour permettre de comparer tous les patients. En référence à l audit publié en 1999 sur ce sujet [33], la fréquence d une mesure sur l année a ainsi été retenue. Elle est certes insuffisante selon certaines recommandations mais elle a permis de comparer tout le monde et de réaliser l étude. 40

Dans un souhait d analyse objective de la réalité du terrain, il a été choisi d effectuer une étude des dossiers médicaux des patients. Pour ce faire, devant la diversité de l exercice de la médecine générale, une participation du praticien était nécessaire. La durée de l interrogatoire ne pouvant pas être excessive pour permettre une participation la plus importante possible, il a été choisi de limiter l entretien autour de 30 minutes correspondant aux questions d usage et à l analyse d une seule journée de consultation, soit selon le médecin de 11 à 43 patients. Il en résulte un faible échantillon de la patientèle mais cela a permis toutefois de distinguer des tendances de pratiques bien différentes. Concernant l analyse des paramètres des médecins, pour les mêmes raisons, la petite taille de l échantillon des médecins nous expose à des conclusions qu il faut relativiser et à l impossibilité de réaliser certains tests statistiques. Il est à noter que l analyse des paramètres des patients a été faite indifféremment du médecin référent en raison de la taille des échantillons. Nous nous exposons ainsi à un constat global de la population médicale lorsque nous nous intéressons à ces paramètres. 6.3 Biais Il est à noter un biais de sélection. En ne sélectionnant que des maîtres de stage, on ne peut être représentatif de la population médicale générale. Mais c'est toutefois une population hétérogène (âge, sexe, localisation) de médecins généralistes, sensibilisée à la formation médicale continue et potentiellement ouverte à la discussion sur l évaluation de leur pratique. Il existe également un biais de sélection dans l'accord de participation à cette étude. Toutefois, il n'existe qu'un seul refus de participation en raison du sujet de la thèse. D autres praticiens 41

n ont pas pu participer malgré plusieurs relances, probablement en raison d un manque de temps. Il existe un autre biais quant à la tenue du dossier médical par le médecin. En effet, le critère principal de notre étude était un poids surveillé dans l année lorsqu il a été inscrit dans le dossier. En cas de tenue incomplète du dossier, si le médecin n inscrit pas le poids, il ne sera pas considéré comme surveillé bien qu'il ait pu être mesuré. On peut citer l intérêt évident d un dossier médical informatisé pour permettre une visualisation rapide et analytique des variations du poids. Toutefois, la grande majorité des médecins étant informatisée, il n a pas été possible de comparer les médecins selon ce critère en raison de la taille de l échantillon. De plus, il existe un biais concernant la population suivie au domicile. Le dossier concernant les visites n était pas toujours en possession du médecin au moment de l étude car il est le plus souvent présent chez le patient. Ainsi, la population suivie en visite n a pas été incluse dans l étude. On peut en plus se poser la question de la présence de matériel pour peser le patient à son domicile, de la fiabilité de ce matériel et également de l existence d un dossier médical au domicile. On peut penser que la prise en charge médicale au domicile ressemblera à la prise en charge au cabinet lorsque celle ci sera systématique et encrée dans les mœurs. Il était tout de même intéressant de mettre en lumière cet aspect de la prise en charge médicale qui concerne une population souvent dépendante et fragile (personnes âgées, handicapée ou isolée). Enfin, il est à noter que le patient peut refuser de se peser et qu'il n'existe alors pas de surveillance pondérale dans le dossier. Ceci n'est pas imputable au médecin et fausse ainsi en partie les résultats de l étude. 42

6.4 Représentativité Les échantillons étant limités, il est légitime de se poser la question de la représentativité. Dans l atlas de la démographie médicale publié en 2009 [35], on voit que la population des médecins généralistes libéraux du Nord-Pas de Calais avait en moyenne 51 ans, que la féminisation était de l ordre de 22% et était installée en milieu urbain autour de 24 % (372/1546). Ces statistiques sont comparables à celles de notre échantillon (en effet, âge moyen de 51 ans, féminisation de 16% et installation en milieu urbain à 34%). Concernant les patients, l étude OBEPI [36];[37] retrouvait une population moyenne française avec 52,3% de femmes et une prévalence du surpoids à 31,9% et de l obésité à 14,5%. Il est à noter une prévalence de l obésité dans le Nord-Pas de Calais mesurée en 2009 à 20,5% et en augmentation. Dans l échantillon de patients, les statistiques étaient : 55% de femmes, une prévalence du surpoids à 26,7% et d obésité à 27,9%. En considérant que l augmentation progressive de l obésité se poursuit, on peut donc penser l échantillon comme représentatif de la population du Nord-Pas de Calais. 6.5 Eléments de propositions Un élargissement de ce travail à la population globale des médecins généralistes pourrait être à réaliser pour permettre une meilleure représentativité de l étude et ainsi sensibiliser plus largement la population médicale à cette problématique. Une communication envers la population médicale serait nécessaire pour informer les praticiens de la réalité du terrain et des recommandations de bonne pratique. 43