UN OBSERVATOIRE NÉOLITHIQUE DANS LES CÉVENNES *)

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Transcription:

NEWS 96 Int. Conference on Rock Art Research Moving into 2l st Century Swakopmund (Namibia), Aug. 11-18, 1996 UN OBSERVATOIRE NÉOLITHIQUE DANS LES CÉVENNES *) Léo DUBAL, Laboratoire Virtuel d'archéométrie dubal@archaeometry.org Francis TILLAULT, F-30450 Sénéchas (France) UN AFFLEUREMENT REMARQUABLE La dalle gravée du site de La Gardette (44 21 N, 4 1 E, 831 m., Com. Aujac ), voir Fig. 1, présente un intérêt exceptionnel à plus d un égard. Fig. 1: Le site de La Gardette Le support rocheux de gneiss albitique est connu pour sa résistance à l érosion. Les dégradations climatiques et humaines ont réduit la surface gravée à environ 10 m 2. *) Traduction de l anglais. Titre original: Evidence for a Cevenole Neolithic Solar Altar. 1

Le choix de cet affleurement semble être délibéré: sa position, juste au sommet d un dôme, l inclinaison de 25 de sa face gravée regardant le S-E le rendent visible de loin sur la crête S-E, surplombé seulement par La Loubière, 881 m, distante de 1.200 mètres. Dans le voisinage, seuls les faces des affleurements de même orientation portent parfois des gravures. Les figures gravées représentent des anthrop4morphes cruciformes. L ensemble des gravures de La Gardette est présenté dans la Fig. 2. Ce plan a été relevé et publié par Ph. LECLERC [10], et, nous n y avons apporté que des corrections mineures. La composition frappe par son harmonie. Les anthropomorphes cruciformes sont caractérisés par leur axe de symétrie pointant vers le S-E. Plus précisément, la moitié des figures pointent dans une direction proche de 135 N (entre 130 et 140 ), et l autre moitié vers 125 N (entre 115 et 125 ). Nous avons attribué un code d identification aux figures significatives: des lettres minuscules pour les cruciformes orientés vers 135 N et des lettres capitales pour ceux orientés vers 125 N. Afin de faciliter la lecture de la Fig. 2, nous avons superposé au plan de LECLERC le code d identification et deux trames dirigées vers 125 N et 135 N. Par essais successifs, nous avons sélectionné une maille de 55 cm, c est-à-dire 22 pouces. À plus ou moins un demi-pouce près, c est la distance séparant les figures aux bras tendus horizontalement, mesurée sur trois axes: pointant au Nord (D1-D4), pointant vers 35 N (D4-D6) et pointant vers 45 N (b3-b4, d2-ds et el-f4). Nous donnons le nom de coudée cévenole à cette mesure de longueur (la coudée mégalithique, d après la Réf. [2], est plus grande de 50%, soit 33 pouces). Les lapicides cévenols ont utilisé la percussion indirecte. La largeur des gravures est d environ 12 mm et leur profondeur de 5 mm. Deux gravures, d5 et D6, font exception: elles ont manifestement été gravées, ou retaillées à une époque plus récente, car elles sont plus profondes et la couleur diffère (absence de patine). Comme l a relevé LECLERC, une figure, A3, bien que située à 940 m. de distance et sur un affleurement de micaschiste, semble cependant appartenir au même ensemble. La plupart des figures représentent manifestement des anthropomorphes mâles, leurs bras tendus indiquent, à notre avis, qu ils ne doivent pas être confondus avec un groupe d orants ordinaires. Nous convenons de les appeler les observateurs éblouis. 2

TYPOLOGIE DES GRAVURES La saisie des gravures présentées dans la Fig. 4 a été faite par "tactigraphie" [5]. La barre-étalon est de 10 cm. Le code d identification permet de localiser sur le plan, Fig. 2, les observateurs éblouis présentés. Fig. 2: Plan des gravures du site de La Gardette (adapté d'après Ph. LECLERC [10] Au site de La Gardette, nous distinguons six types d'"observateurs éblouis, d après leur morphologie. Tous présentent un phallus dirigé vers le bas, de longueur variable, graphiquement séparé ou attaché, qui définit l axe de symétrie des cruciformes. Les observateurs du type A ressemblent à des fusées. De ce type, seulement A2 et A3 ont été enregistrés par LECLERC [10]. Leurs bras allongés sont représentés par des lignes horizontales; les pieds ne sont pas représentés. Une cupule suggère l ouverture buccale et une autre le phallus. Le groupe A est le seul qui soit dispersé, occupant les parties inférieures des affleurements concernés et regardant vers 125 N. Les observateurs du type B rappellent des pinces à glaçons. Leur tronc est délimité vers le bas par le phallus. Les yeux, le nez et la bouche sont représentés par quatre cupules, des traits horizontaux indiquent les bras et les pieds. Un anthropomorphe, B2, bien à l écart (du côté gauche) du groupe principal a ses pieds tournés en-dedans (voir Fig. 3). Comme sa position est la plus au Sud, son statut devait être spécial. B2, B5 et B6 regardent vers 125. Les autres regardent vers le S-E. Le groupe B occupe la partie inférieure de l affleurement principal. 3

Fig. 3: L'estampage de l' "observateur ébloui B2" situé au sud du groupe principal (Photo L.D.) Les observateurs du type C ressemblent à des grylles. Ils ont un phallus aussi long que leurs bras, tous trois attachés à une tête monstrueuse, avec comme yeux, deux cupules. L un d eux, C2, a ses trois extrémités terminées par des cupules. Fig. 4: Les observateurs éblouis du nouveau soleil. (tactigrammes). Classifiés d'après six niveaux proposés d'abstraction. Le code d'identification se réfère à la Fig. 2. Un autre, C4, a ses yeux en dessous de son encéphale, esquissant un visage secondaire. Bien qu évoquant une femme, i1 représente probablement un homme: la femme avec les cupules bilatérales du couple d amoureux bien connu du Valcamonica (site de Foppe di Nadro) [6] est reconnaissable grâce à son ventre proéminent, alors que les anthropomorphes à cupules bilatérales de la Valle Grana (site de Campofei) [1], représentent sans ambiguïté des mâles. Le groupe du type C est plus ou moins aligné suivant un axe dirigé vers 125 N. 4

Les observateurs du type D ont une tête ronde. Leur bras sont dessinés par une barre horizontale, les jambes sont habituellement terminées par des pieds dirigés vers l extérieur. L un d eux, d2, a ses pieds et ses mains représentés par quatre petites cupules. Une partie de ce groupe (D0, Dl, D4 et D6) regarde vers 125 N et est alignée sur un axe pointant vers le N. Les figures d2 et d3 sont alignées le long d un axe pointant vers le S-E. Les observateurs du type E sont filiformes et rappellent les figures en bâton de l arc alpin. Ce groupe forme un amas, regardant vers le S-E. Les observateurs du type F ont la forme d une croix. L un d eux, f4, a ses extrémités se terminant par quatre cupules. Le groupe F est plus ou moins aligné le long d un axe pointant S-E. II ne semble pas inclure de graffiti conjuratoires d époque historique. Les cruciformes de types A à F suggèrent une séquence dans les niveaux d abstraction, et par là, une séquence temporelle. SIGNIFICATION : OBSERVATION DU SOLSTICE D HIVER L influence des phénomènes astronomiques sur l art rupestre et 1 architecture sacrée (autels du mégalithique aux temps modernes) est probablement plus importante que généralement admis. La prédiction d évènements astronomiques a été, nous croyons, une motivation profonde pour l art rupestre gravé. La nouvelle lune avec son cycle de 29 jours 1/2 a été uti1isée comme signal de référence dans les premières tentatives de décompte des jours, puis couronnée avec l invention du calendrier lunaire [2]. Qui plus est, la nouvelle lune offre occasionnellement des évènements très dramatiques: les éclipses solaires. Les gravures des sites de Fossum (Com. Tanum, Suède), et Carshenna (Com. Thusis, Suisse) ont été associées aux éclipses de soleil de - 1.067 et - 884 respectivement, voir Réf. [3], et la symbolique des stèles votives de Carthage a été mise en relation avec l éclipse de soleil de - 462, voir Réf.[8]. Le nouveau soleil (qui pourrait bien être la signification du mot Noël ) avait une valeur symbolique qui devait peser lourd en ces jours lointains. Il se lève avec l azimut le plus au sud dans le cycle solaire de 365 jours 1/4. Son azimut, en l absence de connaissances astronomiques préalables, est la marque la plus sûre du cycle solaire. Cet azimut dépend de la latitude du site d observation, et de l angle de l écliptique, qui décroît actuellement d un demi degré tout les mille ans (voir Fig. 5). 5

Fig. 5: Azimut du nouveau soleil pour quelques sites représentatifs, aujourd hui et il y a 5.000 ans. La Fig. 6 quantifie l effet de la hauteur de la ligne d horizon sur l azimut du soleil levant au solstice d hiver à La Gardette. Fig 6: Effet de la hauteur de la ligne d'horizon sur l'azimut du nouveau soleil Rappelons que l azimut du soleil levant au solstice d hiver est juste opposé, à1800, de celui du soleil couchant au solstice d été. Au site de La Gardette, jusqu à présent, nous avons seulement eu la chance d assister au coucher du soleil au solstice d été. Au 21 décembre, à l aube, le soleil se lève sur l horizon juste à côté du flanc est du dôme de La Loubière, c est-à-dire, à l azimut de 125 N. Ce dôme représente un obstacle sur la ligne d horizon d une hauteur de 2 35 (voir Fig. 7). Fig. 7 : Niveau 830 mètres, au S-E de "La Gardette" (en pointillé: la limite intercommunale) 6

La direction S-E (135 N), vers laquelle regardent la moitié des observateurs éblouis est donnée soit par la position - une heure après l aube - du soleil au dessus dç l autre côté du dôme, soit en se référant aveuglément au standard de "Newgrange". A Newgrange (Co. Meath, Irlande), le couloir de la chambre centrale du tumulus est dirigé vers 135 N, de telle sorte que la gravure du labyrinthe triscèle situé au plus profond du monument est illuminé par le soleil levant le 21 Décembre [11]. Alors que le labyrinthe monocursif semble être un symbole matrifocal [7], cet observateur labyrinthique du nouveau soleil suggère l émergence du triangle familial patriarcal. Au cours de la semaine précédant et celle suivant le solstice d hiver, la variation quotidienne de la durée de l illumination de la chambre principale de Newgrange a du permettre la première détermination précise du début du cycle solaire, et donc l établissement du calendrier solaire. MOTIVATION : MODERNISER LE CALENDRIER? Le cycle lunaire qui donne le signal, depuis la nuit des temps, à rien moins que la cycle menstruel de la femme, apparut subitement, il y a 5.000 ans, comme un instrument inadéquat pour la prédiction du rythme des saisons et fût, dès lors, condamné à être (partiellement) détrôné par le nouveau calendrier solaire. Les besoins de l agriculture ont motivé l humanité à accroître son contrôle symbolique sur le temps en modernisant le calendrier. Une métaphore de ce changement est l observation du lever du soleil au jour le plus court. Nous devons mentionner ici le site de Jäggestad (Co. Simrishamn, Suède) où se trouve le pétroglyphe d une paire de pieds nus dirigés vers le nouveau soleil (considérant la latitude de ce site, cette gravure suggère aussi que le climat était à l époque plus doux qu actuellement), voir Réf. [4]. Probablement dans toute l Europe des temples ont été construits dans les temps historiques sur des restes de temples celtiques dont 1 orientation (le mot correct manque!) a été conservée, par exemple la cathédrale de Zürich (Suisse), voir Réf. [9] Au solstice d'été au couché, l'alignement de cette cathédrale avec le soleil indique qu'au solstice d'hiver au lever, la position du soleil devait être visible dans l'axe du temple celte précurseur de la basilique carolingienne, précurseur du bâtiment actuel. 7

Il n y a pas de doute que Newgrange ait été le Greenwich du monde pré-celte, sans compétition pendant un millier d années, de - 3.000 à - 2.000, jusqu à ce que Stonehenge s impose. Mais nous pensons que dans la tâche exigeante de modernisation du calendrier, l Irlande mégalithique n a pas été le seul acteur. L autel-observatoire de La Gardette peut tout aussi bien avoir été impliqué dans cette aventure humaine extraordinaire qui est la conquête du temps. Le caractère non narratif dans ce collectif d observateurs éblouis est rehaussé par l absence de représentations d artéfacts ou d animaux. Cette composition nous rappelle les gravures paléolithiques de plein air, où l image exposée modifie le paysage. Un tel tableau, n était pas utilisé à des fins magiques, car il était magique par lui-même. D où notre hypothèse qu avec l affleurement de gneiss de La Gardette, on a affaire à un autel solaire néolithique cévenol, jusqu ici unique en son genre: l absence de chevauchement des figures indique un respect inhabituel des gravures précédentes, alors que leur orientation confère à ce site le statut d observatoire pour la mise à jour du nouveau calendrier, le calendrier solaire. II est donc à espérer qu à l avenir, les archéologues, en marche vers le 21 ème siècle, auront soin d enregistrer l orientation des gravures d art rupestre afin de pouvoir établir où, comme à La Gardette, leur direction correspond à l azimut du soleil levant au solstice d hiver. Remerciements Nous somme très reconnaissants à Bernard LACHAL (Genève, CH) pour sa précieuse collaboration dans le calcul de l azimut des levers de soleil discutés ici. RÉFERENCES: [1] BALDI Riccardo (1993): Antropomorfi Schematici in Valle Grana (Cuneo), SURVEY, 7-8, pp 125-129, Boli. del CeSMAP, Pinerolo (1993). [2] BRUNNER William (1985): Hinweise auf urgeschichtliche astronomische Kenntnisse, HELV. ARCH. 16, pp. 50-61 [3] BRUNNER William (1987): Sonnenfinsternisse auf prähistorischen Kultplätzen durch Felsritzungen dokumentiert", ORlON, Zeitschr. Schw. Astron. GeseIl. 221, pp. 132-135 [4] CYR Donald L. (1994): The Colorado Ogam Album, STONEHENGE VIEWPOINT, p. 113, Santa Barbara, ISSN 0140-654X [5] DUBAL Léo (1995): La tactigraphie: une nouvelle méthode pour le relevé des gravures préhistoriques INORA, Int, Newsletters on Rock Art, 10, pp. 22-24 8

[6] DUBAL Léo, LARREY Monique & MAFFESSOLI Battista (1993): Gravures rupestres du Valcamonica, Quelques tactigrammes, Autopublication, Berne - [7] DUBAL Léo (1995): The Labrys Symbol, Initiatic or Sacrifical ", Int NEWS 95, Rock Art Congress, Torino, Ed. CeSMAP, Pinerolo, p. 54 [8] DUBAL Léo (1995): The Riddle of the Protective Crescent in Punic Votive Ail, to appear in the Proceed. of IVth Congresso Int. de Estudios Fenicios y Pùnicos, Cadiz, 2-6 Octubre 1995 [9] HUGENTOBLER Christof (1996): Ausrichtung kultischer Bauten nach den Gestirnen", CH-FORS- CHUNG, 3, pp. 13-19, Zürich (1996) & "Das Sonnen-Münster, TAGES ANZEIGER, June 20th, 1996, p. 19, Ziirich (1996) [10] LECLERC Phillippe (1985): L art Schématique Rupestre en Haute-Cézarenque, GERSAR, Bu!!. Groupe d Études, de Recherches & Sauvegarde de l Art Rupestre, 25, pp. 103-117, ISSN 0766-3 161 [11] PATRICK Jon (1974): Midwinter sunrise at Newgrange, NATURE, 249, pp. 517-519 9