SEMEIOLOGIE CARDIO-VASCULAIRE Mesure de la Pression Artérielle Plan de cours I-Principes généraux... 2 I-1.La mesure exacte : la pression artérielle «intravasculaire»... 2 I.1- La mesure indirecte : notion de «tension artérielle»... 2 II- Mesure de la PA... 2 II.1- La référence : méthode auscultatoire... 2 II.1.1-.L appareillage... 3 II.1.2-.Technique de la mesure... 3 II.2-.La nécessité d une mesure standardisée... 4 II.3 Résultats... 4 III- Les erreurs de mesure... 4 III.1- Erreurs dues à l appareillage... 5 III.2- Erreurs dues aux caractéristiques du sujet... 5 III.3- Erreurs imputables à l observateur... 6
Voir le cours de séméiologie : La PA et ses anomalies (Module Cœur et Poumons) I-Principes généraux I-1.La mesure exacte : la pression artérielle «intravasculaire» Le seul moyen de déterminer la véritable pression intra-artérielle est d introduire un capteur de pression (aujourd hui un manomètre électronique) dans une artère. Ce procédé (historiquement le premier) est dit sanglant, ou encore invasif. Il est désagréable pour le malade, et peut être dangereux. Aussi n est-il utilisé que rarement, lorsqu une exploration hémodynamique est requise (cathétérisme). Par contre, il est d usage courant en recherche animale. I.1- La mesure indirecte : notion de «tension artérielle» La paroi artérielle a une certaine déformabilité. Elle subit une distension cyclique sous l effet de forces latérales lors du passage de l ondée sanguine. Si l on exerce par voie externe avec un brassard pneumatique une contrepression sur le segment de membre dans lequel est situé une artère, la mesure de la pression régnant dans la poche du brassard renseigne sur la pression exercée simultanément par le sang sur la paroi artérielle sousjacente. Pour la distinguer d une véritable mesure de la PA, cette contrepression mesurée est appelée tension artérielle. C est elle qui est déterminée de façon usuelle en clinique. Travail personnel : Histoire de la mesure de la tension artérielle II- Mesure de la PA II.1- La référence : méthode auscultatoire Les sons de Korotkoff a) Principe. Le passage du courant sanguin dans un conduit rétréci induit des turbulences qui génèrent des sons. En conséquence, lorsque, après avoir gonflé le brassard placé autour du bras à une pression suffisamment forte, supposée supérieure à la PA, on le dégonfle lentement, l auscultation simultanée de l artère brachiale au pli du coude permet de distinguer trois périodes : période initiale (A) : aucun bruit n est perçu. Signification : le passage du sang est interrompu même en systole, l artère étant totalement écrasée par la contrepression externe. période intermédiaire (B) : des sons sont perçus. Signification : le sang arrive à se frayer un passage dans l artère rétrécie lorsque la PA est forte (ondée systolique), mais l artère se referme lors du relâchement diastolique. période finale (C) : l auscultation redevient muette. Signification : aucune turbulence n est produite car l artère est totalement béante, aussi bien en systole qu en diastole. Les caractéristiques auscultatoires des bruits engendrés durant la période B par les perturbations hémodynamiques définissent cinq phases successives. Les phases auscultatoires selon Korotkoff Les sons de Korotkoff sont caractéristiques de la période B, alors que, durant les périodes A et C, l artère brachiale, auscultée au pli du coude, demeure habituellement silencieuse. phase I : apparition de petits coups secs, d intensité croissante ; phase II : les bruits deviennent prolongés et intenses, soufflants ; phase III : les bruits deviennent encore plus intenses et vibrants ; phase IV : bruits devenant brusquement plus faibles et assourdis ; phase V : les bruits ont disparu. b) Application (consensus international). La comparaison de ces phases avec la pression intravasculaire a permis d établir les concordances suivantes :
Le passage du silence à la phase I définit la pression systolique (PAS). Le passage de la phase IV à la phase V définit la pression diastolique (PAD). II.1.1-.L appareillage a) Le sphygmomanomètre anéroïde (30 ). Imprécis et déréglable, mais commode et robuste. Il permet une mesure approximative, acceptable dans le cas d un médecin qui se déplace en visite. b) Le manomètre à colonne de mercure (60 ). Il constitue la méthode de référence. c) Les tensiomètres électroniques. Ils comportent une pompe électrique pour le gonflage et un dégonflage automatique. Selon le cas, un microphone ou un capteur des déplacements de la paroi artérielle assure la détermination de la PA. Leur coût va de 150 (lecture directe instantanée) à 3000 (enregistrements programmés et mémorisés). LES MESURES AUTOMATIQUES DE LA PA Des appareils électroniques permettant la mesure indirecte automatique de la PA ont été mis au point. Leur précision n est pas supérieure à celle du manomètre à mercure. Avantage : l absence d observateur réduit le stress lié à la prise de la PA (voir le cours de séméiologie). Inconvénient : du fait de la réduction de l effet blouse blanche, les chiffres normaux de la PA sont plus bas situés qu en cas d observateur. Ces valeurs «corrigées» sont pour l instant mal validées. Méthode automatique avec enregistrement. Elle est utilisée pour la surveillance répétitive (réanimation). Méthode semi-automatique. Elle commence à être utilisée en auto surveillance par les malades qui peuvent se payer un appareil relativement cher (150 à 300 ), non remboursé par la Sécurité sociale. Méthode automatique ambulatoire (Holter tensionnel). Elle est : - coûteuse (appareils > 4.000 ) ; - réservée aux spécialistes ; - le plus souvent inutile. Bien qu ils représentent un luxe coûteux, les appareils automatiques commencent pourtant à supplanter les manomètres à mercure dans les hôpitaux, au nom du principe de précaution qui vise à interdire l emploi du mercure. Expression de la pression artérielle approchée et usuelle : le cm Hg. précise : le mm Hg. Officielle : le kpa (1 mm Hg = 0,1333 kpa) On ne peut pas mesurer la PA au mm Hg près sans un manomètre à colonne de mercure, ou sans un tensiomètre électronique préalablement étalonné grâce à un manomètre à colonne de mercure. II.1.2-.Technique de la mesure a) Lieu de mesure habituel : le bras Chez un sujet couché horizontalement, la PA est pratiquement la même à quelque endroit du corps que se situe la mesure sur les grosses artères. Par contre, si le sujet passe à la position verticale, la PA diffère selon qu elle est mesurée plus ou moins haut (membre supérieur ou inférieur - effet de la pesanteur) par rapport au point de référence, l atrium droit.1 Il est donc recommandé de conserver le 1 Certains tensiomètres électroniques relativement fiables, destinés au grand public, s installent autour du poignet et captent les sons de l artère radiale.
bras le long du corps pour mesure une PA représentative quelle que soit la position du sujet (assis, debout, couché ). b) Protocole. La détermination de la PA n est fiable qu à condition d un protocole irréprochable. Principales recommandations (Société Internationale d Hypertension Artérielle Les règles suivantes s appliquent quel que soit l appareil : Brassard totalement dégonflé au départ, serré sans jeu autour du bras ; Taille du brassard adaptée à celle du bras du sujet ; Bras soutenu au niveau du cœur ; Stéthoscope positionné à la saignée du coude, non recouvert par le brassard afin de ne pas comprimer l artère. Dégonflage régulier (2 à 3 mm Hg par seconde) et total ; 2 Temps de repos observé entre les mesures. II.2-.La nécessité d une mesure standardisée La PA varie d instant en instant. Pour réduire ses fluctuations naturelles d un contrôle à l autre, sa mesure doit être normalisée. Toute PA mesurée au repos ne constitue pas pour autant la PA de repos. Pour représenter la PA de référence, la mesure de la PA de repos doit : être effectuée par un médecin à l occasion d une consultation,3 avec un manomètre à colonne de mercure, par la méthode auscultatoire, chez un sujet au calme, détendu, au repos en position couchée depuis 10 minutes. PRISE DE LA PA : COUCHE OU ASSIS? Les recommandations internationales préconisent la position couchée. Cette règle doit être respectée strictement si elle est requise dans le cadre d un protocole de recherche clinique. En pratique courante, la position assise est souvent tolérée, avec des résultats peu différents. Il est fréquent qu un sujet se sente plus confortable dans cette position, ce qui réduit le surcroît tensionnel lié au stress. Par contre, le passage à la position debout induit des variations significatives de la PA (voir le cours de séméiologie). II- Résultats La PA de repos de la majorité des adultes dits normaux (c est-à-dire en bonne santé apparente) se situe entre 100/60 et 140/90 mmhg. III- Les erreurs de mesure Identifier une mesure erronée ; en reconnaître la cause ; en prévenir la répétition. 2 Ces manœuvres sont réglées automatiquement en cas d emploi d un tensiomètre électronique. 3 Médecin et non autre professionnel de santé : non par esprit de caste ou expression d une hiérarchie, mais parce que cela permet de standardiser aussi le biais dû à l observateur (voir plus loin : les effets du stress).
Les erreurs dites de mesure correspondent à une PA mesurée différente de la PA réelle du sujet au même instant. Même si les critères ci-dessus sont respectés, la détermination de la PA dépend en effet d une mesure ponctuelle, soumise à des artefacts. Les erreurs, faciles à commettre, sont liées à trois ordres de facteurs : III.1- Erreurs dues à l appareillage Des erreurs facilement évitables avec un peu d attention. - brassard mal serré ; brassard trop large ou trop étroit (respecter les normes : utiliser les brassards pour obèse, pour enfant) ; - manomètre anéroïde déréglé (perte de l étalonnage) ; - fuite d air (poire, tubulure) ; - prise d air obstruée ; colonne de mercure encrassée ; - cuve de mercure incomplètement remplie. III.2- Erreurs dues aux caractéristiques du sujet a) Trou auscultatoire Décrit par Gallavardin, ce phénomène consiste en la disparition transitoire des sons de Korotkoff, au cours des phases II et III. Si le brassard n a pas été gonflé au-delà de la phase I, on peut croire à une PA plus basse qu elle ne l est en réalité.4 b) Non repérage de la phase V Chez certains sujets, une hyperpulsatilité artérielle fait que les sons de Korotkoff sont audibles jusqu à zéro. Cette particularité traduit un état circulatoire dit hyperkinétique, constitué par une vasodilatation avec élévation du débit cardiaque. LES CIRCONSTANCES QUI S ACCOMPAGNENT D UN ETAT HYPERKINETIQUE enfants et sujets jeunes, émotifs (éréthisme cardiovasculaire) ; effort physique avec mesure consécutive immédiate, sans repos de récupération ; grossesse ; anémie ; hyperthyroïdie ; insuffisance aortique.5 En cas de bruits audibles jusqu à zéro, la phase IV est choisie pour mesurer la PAD. c) Influence du côté de la mesure Il peut exister une faible différence, réelle et physiologique, entre la PA des deux membres supérieurs. Par contre, une différence > 20 mm Hg doit faire évoquer une anomalie (obstacle artériel unilatéral par sténose ou compression). Pour garantir des conditions de mesure reproductibles d un examen à l autre, il est bon de choisir un des deux bras de façon définitive. 4 Pour ne pas sous-estimer la PAS, le gonflage doit atteindre une pression supérieure à la PA présumée, la disparition du pouls radial étant un guide utile. Se guider sur la disparition du pouls radial est la règle chez un sujet dont on ignore la PA. Le gonflage s effectue 30 mm au-dessus de cette disparition. Gonfler moins est source d erreur sur la PAS. Gonfler plus est inutilement douloureux. 5 Dans le cas de l insuffisance aortique, la PA diastolique est réellement effondrée, du fait de la régurgitation du sang vers le ventricule gauche.
d) Pseudohypertension par rigidité artérielle Chez certains sujets âgés, l artère brachiale athéromateuse est extrêmement indurée (médiacalcose), si bien qu elle ne se laisse pas occlure par la compression exercée par le brassard même si la pression de gonflage de celui-ci est poussée très haut, ce qui fait croire à tort à une HTA. La manœuvre d Osler (compression manuelle de l artère brachiale avec prise simultanée du pouls radial), décrite dès 1892, est utilisée pour détecter cet artefact. e) Pression diastolique non déterminable Un pincement excessif de la pression différentielle doit faire présumer une mesure erronée de la pression diastolique. Cette difficulté survient si les sons de Korotkoff sont affaiblis, ce qui est le cas dans les circonstances suivantes : Spasme artériel, déclenché par des mesures répétées. Traitement antihypertenseur, notamment en cas de baisse conjointe du débit cardiaque (bêtabloquant) ;6 Collapsus cardiovasculaire : le pouls est petit, filant, et la PA diastolique souvent non mesurable. Dans cette situation, la PA systolique est souvent mieux perçue par la palpation de l artère radiale que par l auscultation de l artère brachiale. LES RARES INDICATIONS DE LA METHODE PALPATOIRE La méthode palpatoire a une précision qui ne dépasse pas le cm Hg. Elle consiste à palper : - soit l artère brachiale, au bord inférieur du brassard : le pouls apparaît lors de la PAS, et redisparaît lors de la PAD (attention à ne pas prendre son propre pouls pour celui du sujet) ; - soit l artère radiale : on ne discerne que le moment de l apparition du pouls (PAS), car le pouls est perçu à l état normal, donc même lorsque le brassard est totalement dégonflé. Cette méthode approximative est utilisable en examen d orientation, ou lorsque la méthode auscultatoire est défaillante. III.3- Erreurs imputables à l observateur 7 La plupart des erreurs sont dues au médecin et non au malade. absence de mise au zéro ; dégonflage trop lent, trop rapide, par à-coups (molette trop vissée, bloquée) ; mesures répétées, temps de relaxation insuffisant (moins de 30 sec) ;8 erreur de parallaxe ; mauvaise vision, mauvaise audition ; compression de l artère brachiale par le stéthoscope placé sous le brassard, ou par une manche de chemise retroussée ; mesure approximative (arrondie sur les valeurs paires, le 0 ou le 5). La facilité de la mesure de la PA est une illusion trompeuse. N ajoutez pas vos propres erreurs à l incertitude naturelle de la valeur. 6 On peut demander au sujet d effectuer quelques brèves poignées de main (sans contraction soutenue), ce qui augmente le flux sanguin du membre supérieur et renforce les sons de Korotkoff, sans pour autant élever la PA. 7 L artefact décrit sous le nom d effet blouse blanche n est pas décrit ici car il ne s agit pas à proprement parler d une erreur de mesure. Le stress lié à l examen peut faire monter la PA par rapport aux chiffres habituels, mais il s agit d une élévation bien réelle de la PA (voir le polycopié de séméiologie : La PA et ses anomalies). 8 Le gonflage répété du brassard sans temps de repos entre chaque mesure est désagréable pour le sujet et, à la limite, douloureux, surtout si des pressions de gonflage fortes (200 mmhg et au-delà) sont atteintes. Ce geste peut induire une réaction psychologique de défense qui contribue à élever la PA.
La mesure de la PA ne supporte pas l imperfection. En pratique courante, chez un sujet normotendu, les imprécisions du moins légères de la mesure de la PA n ont qu une importance relative. Les erreurs deviennent dangereuses si elles ont pour conséquence de faire porter à tort un diagnostic d hypertension artérielle en cas de PA limite, ce qui peut inciter à instaurer un traitement inutile.9 Elles ne sont pas admissibles en cas de participation à un protocole de recherche clinique. Aucune étude épidémiologique ou thérapeutique n est possible sans détermination précise, exacte et reproductible de la PA.10 9 Qu il soit crédité d une PA de 120/ 80, et non de 110/70 mmhg, un sujet normotendu reste un sujet normotendu. C est a fortiori le cas si on ne dispose que d une valeur arrondie et donc inexacte (11/7 cm Hg et non 108/72 mmhg). Créditer par contre un sujet dont la PA réelle est de 14/9 cm Hg, d une valeur de 15/10 cm Hg peut faire porter à tort une indication thérapeutique. 10 Vous apprendrez vite à estimer grossièrement, au 1/2 cm Hg près, la PA avec un tensiomètre anéroïde. Déterminer avec précision la PA est beaucoup plus minutieux et surtout beaucoup plus lent.