LE TRAITEMENT DU CANCER DU REIN METASTATIQUE

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MISE AU POINT LE TRAITEMENT DU CANCER DU REIN METASTATIQUE S. MELLAS 1, N. MELLAS 2, O. MASBAH 3, M.F. TAZI 1, M.J. EL FASSI 1, M.H. FARIH 1 1. Service d Urologie, Centre Hospitalo-Universitaire Hassan II, Fès, Maroc 2. Service d Oncologie Médicale ; 3. Service de Radiothérapie-Oncologie, Institut National d Oncologie, Rabat, Maroc RESUME Le cancer du rein représente 2 à 3% des tumeurs malignes de l adulte. En situation métastatique, le traitement standard était les cytokines puisque le cancer du rein est chimiorésistant, et la survie à 5 ans était inférieure à 10%. La tumeur du rein est hypervascularisée. La bonne connaissance des mécanismes de biologie moléculaire a permis de mieux comprendre les phénomènes d angiogenèse, élément clé de la prolifération tumorale, et donc d identifier de nouvelles cibles thérapeutiques, ce qui a donné naissance aux thérapeutiques ciblées, transformant les stratégies thérapeutiques. La néphrectomie, quant à elle, reste toujours de mise. Nous allons faire une mise au point sur la prise en charge médicochirurgicale actuelle du cancer du rein métastatique. Mots clés : cancer du rein ; thérapeutiques ciblées ; antiangiogéniques ; néphrectomie ABSTRACT TREATMENT OF METASTATIC RENAL CANCER Kidney cancer accounts for 2 to 3% of malignant tumors in adults. In the metastatic forms, the standard treatment was cytokines because kidney cancer is chemotherapeutic resistant and survival at 5 years was less than 10%. The tumor of the kidney is very vascularised. Good knowledge of the mechanisms of molecular biology has better understand the phenomena of angiogenesis, a key element of the tumor proliferation and thus to identify new therapeutic targets, giving rise to targeted therapies, transforming therapeutic strategies. Key words : kidney cancer ; targeted therapies ; antiangiogenesis ; nephrectomy Correspondance : Dr. S. MELLAS. Service d Urologie. Centre Hospitalo-Universitaire Hassan II, Fès, Maroc. E-mail : mellassoufiane@yahoo.fr INTRODUCTION Le cancer du rein représente 2 à 3% des tumeurs malignes de l adulte. C est le 3ème cancer urologique après le cancer de la prostate et les tumeurs de vessie. Dans 70 à 80%, il s agit d une tumeur à cellules claires, plus rarement d une tumeur papillaire (10 à 20%) ou d une tumeur chromophobe (5%). Un tiers des patients est diagnostiqué d emblée au stade métastatique, et parmi les patients présentant une forme localisée, environ 30% vont développer des métastases. Le site métastatique préférentiel est le poumon (75%), suivi des tissus mous (36%). Les armes thérapeutiques sont limitées puisque le cancer de rein métastatique est chimiorésistant avec des taux de réponse inférieurs à 10% dans la plupart des études publiées. Jusqu'à récemment, le standard de traitement était l immunothérapie avec utilisation de 2 cytokines : l interféron alfa (IFN alfa) et l interleukine 2 (IL-2). La survie globale médiane est de 8 à 10 mois et le taux de survie à 5 ans est inférieur à 10%. Depuis 2006, l intérêt des thérapeutiques moléculaires ciblées (antiangiogénique ou inhibiteurs de tyrosine kinase) a été démontré, bouleversant les stratégies thérapeutiques et posant de nouvelles questions. FACTEURS PRONOSTIQUES DES CANCERS DU REIN EN SITUATION METASTATIQUE Deux scores pronostiques ont été développés : Score pronostique de Motzer (Memorial Sloan- Kettering MSKCC). Score pronostique de Leibovich. Le score de Motzer est le plus utilisé, il comporte 5 facteurs pronostiques : Absence de néphrectomie. Karnofsky performans status (KPS).

Le traitement du cancer du rein métastatique S. MELLAS et Coll. LDH > 1,5 fois la normale. Hémoglobine inférieure à la normale. Calcium corrigé supérieur à 10 mg/dl. En fonction de ces facteurs, on aura une stratification en 3 groupes de risque (fig. 1) [1] : Aucun facteur : risque faible, avec une survie médiane d environ 22 mois. 2 facteurs : risque intermédiaire avec une survie médiane d environ 11,9 mois. 3 facteurs : haut risque avec une survie médiane d environ 5,4 mois. Fig. 1. Survie en fonction des groupes de risque de Motzer [1] TRAITEMENTS MEDICAMENTEUX La chimiothérapie conventionnelle Le cancer du rein métastatique est très résistant à la chimiothérapie. Cette résistance est expliquée par la surexpression du gène MDR 1 (multidrugs resistance) par les cellules tumorales rénales. En monothérapie, plusieurs agents cytotoxiques (gemcitabine, vinorébine, capécitabine, fluorouracile, ixabépilone, taxanes) ont été testés, avec des taux de réponse inférieurs à 10%. En association, les taux de réponse sont inférieurs à 15% avec une toxicité importante et une survie médiane ne dépassant pas 5 mois. Les cytokines Interféron alfa (IFN) En première ligne métastatique, l IFN a conduit à des taux de réponses globales de 10 à 15% dont 2 à 5% de réponses complètes. L IFN a été comparé au medroxyprogestérone dans une étude de phase III randomisée [2]. La survie médiane est de 8,5 mois pour le bras IFN contre 6 mois pour le bras medroxyprogestérone (p=0,017) avec des taux de survie à 1 an de 43% pour l IFN et 31% pour le medroxyprogestérone. Aucune association n améliore les résultats de l IFN donné en monothérapie en terme de survie globale [3]. De façon générale, l IFN prolonge la survie globale de 3 à 7 mois par rapport à un placebo dans les différents essais. Interleukine 2 (IL 2) L IL 2 permet d obtenir un taux de réponse globale d environ 15%, dont 5% de réponses complètes, et une durée moyenne de réponse de 23 mois. L ajout de l IL 2 à l IFN permet d obtenir un taux de réponse supérieur, au prix d une toxicité plus importante mais sans répercussion significative sur la survie globale. Le bénéfice en survie de l IL 2 n est pas démontré. Par ailleurs, aucune étude n a démontré la supériorité de l IL 2 intraveineuse par rapport à la forme injectée en sous-cutané (SC). Dans l étude Percy Quattro [4], qui est une étude de phase III, 4 bras ont été randomisés : medroxyprogestérone versus IFN versus IL 2 (SC) versus IFN + IL2 (SC), 456 patients de pronostic intermédiaire ont été randomisés, avec un suivi de 28 mois. L objectif principal était la survie globale. L étude ne montre pas de différence en survie avec une médiane de survie de 15 mois dans tous les bras. Il est actuellement recommandé d utiliser les cytokines en première ligne métastatique, chez les patients dits de bon pronostic (bon état général, un seul site métastatique) car il existe une possibilité d obtenir une rémission complète. Les thérapies ciblées L angiogenèse : nouvelle cible thérapeutique La bonne connaissance des mécanismes de biologie moléculaire a permis de mieux comprendre les phénomènes de carcinogenèse, dont l angiogenèse tumorale est un mécanisme clé. Le cancer du rein à cellules claires est réputé hypervascularisé, avec une angiogenèse importante. Une des mutations précoces identifiées concerne le gène de Von Hippel-Lindau (VHL), elle est retrouvée dans 60 à 80% des formes sporadiques. Quand le gène VHL est muté, il existe une accumulation de HIF-1 alfa (hypoxie inducing factor), ce qui entraîne la surexpression de plusieurs gènes impliqués dans l angiogenèse et la prolifération cellulaire comme en situation d hypoxie : ces gènes sont le vascular endothelial growth factor (VEGF), le platelet-derived growth factor (PDGF) ou encore le transforming growth factor (TGF alfa).

Le VEGF qui se lie à un des différents isomères du récepteur au VEGF est l élément clé de l angiogenèse, en induisant la migration des cellules endothéliales, leur prolifération et leur survie. Le PDGF favorise l angiogenèse par son action sur les péricytes. Le TGF alfa qui se lie au récepteur de l epidermal growth factor (EGF-R), favorise la prolifération, la survie, la migration et la différenciation cellulaire. Les voies de transduction de signal liées à ces récepteurs sont la voie PI3/AKT et la voie raf/mapkinase qui jouent un rôle dans la régulation de la prolifération cellulaire, l apoptose ou l angiogenèse (fig. 2) [5]. En phase III, le bevacizumab plus IFN ont été comparés à l IFN seul (Avoren study) en première ligne métastatique chez des patients ayant un cancer du rein à cellules claires métastatique [8]. L association bevacizumab avec IFN améliore le taux de réponse (31% vs 13%), et la survie sans progression médiane (10,2 vs 5,4 mois, p<0,0001) par rapport à l IFN seul. Le bevacizumab a eu l AMM en France dans le cancer du rein localement avancé ou métastatique en décembre 2007. Une autre étude phase III a repris le même schéma de l étude Avoren, mais une stratification des patients a été faite en fonction des groupes de risques selon Motzer (MSKCC) [9]. L association bevacizumab avec IFN améliore le taux de réponse (25,5% vs 13,1%), et la survie sans progression médiane (10,2 vs 5,4 mois, p<0,0001) par rapport à l IFN seul. Les résultats en fonction des groupes de risque montrent que seulement les groupes à risques faible et intermédiaire tirent bénéfice de l association bevacizumab plus IFN. Fig. 2. Conséquences des anomalies moléculaires dans le cancer rénal [5] Grâce à la mise en évidence de ces anomalies moléculaires, de nouvelles cibles thérapeutiques ont été identifiées, donnant naissance aux thérapies ciblées antiangiogéniques (fig. 3) [6]. Fig. 3. Cancer de rein métastatique : nouvelles cibles thérapeutiques [6] Le sunitinib Il s agit d un inhibiteur des tyrosines kinases multicibles (VEGF-R 1 et 2, PDGF-R, ckit, FLT3). Une mise à jour récente de deux essais de phase II avec le sunitinib [10] a montré un taux de réponse objective de 45% ((95% IC : 39%, 54%), une survie sans progression médiane de 8,4 mois (95% IC : 7,9, 10,7) et une survie globale médiane de 22,3 mois (95% IC : 14,8, 36,0). Les principales toxicités sont l asthénie (38% de grade 2-3), les diarrhées (24% de grade 2-3), les nausées (19% de grade 2-3), des lymphopénies, des neutropénies et des anémies de grade 3-4 sont retrouvées dans 10%. Une étude de phase III [11] comparant chez 750 patients l IFN contre le sunitinib en première ligne métastatique, a montré un avantage en faveur du sunitinib avec une survie sans progression médiane (PFS) de 11 mois contre 5 mois (fig. 4) [11] pour l IFN (p<0,000001), et 6 fois plus de réponses partielles en faveur du sunitinib. Les groupes de patients qui tirent bénéfice du sunitinib sont les patients à risque faible et intermédiaire selon MSKCC. Le sunitinib a reçu l AMM en France en juillet 2006. Le bevacizumab Cette molécule est un anticorps monoclonal humanisé qui agit sur le VEGF. Sa fixation sur le ligand circulant empêche l activation du VEGF-R. C est la première thérapie ciblée qui a démontré un intérêt dans le cancer du rein métastatique. Dans un essai de phase II randomisé [7], le bevacizumab à la dose de 10 mg/kg apporte un bénéfice de survie sans progression de 2,3 mois chez les malades prétraités par rapport à un placebo. 10% de réponses partielles sont observées. Les principales toxicités sont l épistaxis, l hypertension artérielle, la protéinurie et l hématurie. Fig. 4. Survie sans progression [11]

Le traitement du cancer du rein métastatique S. MELLAS et Coll. Le sorafenib Il s agit d un inhibiteur de tyrosine kinase multicibles, qui va agir sur le VEGF-R 2 et 3, sur ckit, sur PDGF- R, modulant ainsi l angiogenèse, la prolifération cellulaire et l apoptose. Dans une grande étude de phase II [12], chez 202 patients, traités en deuxième ligne pendant 12 semaines, il existe 36% de réponse globale et 34% de stabilisation. La survie sans progression médiane est de 24 semaines chez les patients traités par sorafenib contre 6 semaines avec le placebo (p=0,0087). Les principales toxicités sont l asthénie et le syndrome main-pied. Une étude phase III randomisée (essai TARGET), a comparé en deuxième ligne métastatique chez 905 patients le sorafenib contre placebo [13], elle a montré que le sorafenib double la médiane de survie sans progression par rapport au placebo (24 semaines contre 12 semaines, p=0,01) (fig. 5) [13]. Actuellement, cette molécule a l AMM au Maroc en deuxième ligne métastatique. Le temsirolimus Fig. 5. Survie sans progression [13] Il s agit d un inhibiteur de la voie mtor agissant sur la voie PI3 kinase/akt. Quand la voie mtor est activée, il existe une surexpression de Hif, et donc activation de l angiogenèse. Une étude de phase III menée chez 626 patients de mauvais pronostic (selon les critères de Motzer), en première ligne métastatique, ayant comparé 3 bras : temsirolimus versus IFN versus temsirolimus + IFN [14], a montré un doublement de la médiane de survie sans progression avec une augmentation de la survie globale avec le temsirolimus. Le temsirolimus a eu l autorisation du FDA (food and drug administration) en Mai 2007 aux Etats-Unis. Le tableau I résume les nouvelles recommandations de traitement du cancer du rein métastatique d après ASCO 2008 (American Society of Clinical Oncology). Tableau I. Recommandations à partir des essais de phase III Patients naïfs Patients pré-traités La place de la néphrectomie Deux études prospectives de phase III ont montré son intérêt chez les patients métastatiques traités ensuite par immunothérapie : EORTC 30947 (European Organisation for Research and Treatment of Cancer) [16] et SWOG 8949 (Southwest Oncology Group) [17]. La néphrectomie apporte un bénéfice en survie de 5 à 10 mois, et un gain de survie de l ordre de 30%, faisant passer la médiane de survie de 7,8 mois sans néphrectomie à 13,6 mois avec une néphrectomie première chez les patients en bon état général [18]. La chirurgie des métastases est recommandée en cas de : Métastase unique et résécable (cérébrale, osseuse). Régression partielle sous traitement permettant une chirurgie carcinologiquement satisfaisante. La néphrectomie reste indiquée avant les antiangiogéniques [19]. Les anti-angiogéniques doivent être arrêtés dix jours avant la chirurgie et dix jours après la chirurgie [20]. CONCLUSION Setting Risques favorables ou intermédiaires* Risques défavorables Cytokines VEGF-TKI Inhibiteur mtor antérieur *groupes de risque selon les critères de Motzer Phase III Sunitinib Bevacizumab + IFN-a Temsirolimus Sunitinib Sorafenib Evérolimus La prise en charge du cancer du rein métastatique a été transformée par l arrivée des thérapeutiques ciblées, et on dispose de plusieurs choix en 1ère ou en 2ème ligne métastatiques. Cependant, plusieurs questions persistent encore : intérêt des associations? Quelle est la place de ces thérapeutiques ciblées en adjuvant et en neoadjuvant?? Evérolimus (RAD001) C est un autre inhibiteur de la voie mtor. Il a été comparé dans une étude phase III au placebo en 2ème ligne métastatique après échec des inhibiteurs de tyrosine kinase. La survie sans progression médiane a été doublée par l évérolimus : 4 mois contre 1,9 mois pour le placebo (p<0,001) [15]. REFERENCES 1. Mekhail TM, Abou-Jawde RM, Boumerhi G, Malhi S, Wood L, Elson P, Bukowski R. Validation and extension of the Memorial Sloan-Kettering prognostic factors model for survival in patients with previously untreated metastatic renal cell carcinoma. J Clin Oncol 2005 ; 23 : 832-41.

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