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21 DECEMBRE 2009 C.08.0106.F/1 Cour de cassation de Belgique Arrêt N C.08.0106.F TECHNO-CONFORT, société privée à responsabilité limitée dont le siège social est établi à Farciennes, rue Fontenelle, 9, demanderesse en cassation, représentée par Maître François T Kint, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Charleroi, rue de l Athénée, 9, où il est fait élection de domicile, contre AXA BELGIUM, société anonyme dont le siège social est établi à Watermael- Boitsfort, boulevard du Souverain, 25, défenderesse en cassation,

21 DECEMBRE 2009 C.08.0106.F/2 représentée par Maître Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Vallée, 67, où il est fait élection de domicile. I. La procédure devant la Cour Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le 19 octobre 2007 par le tribunal de première instance de Mons, statuant en degré d appel et comme juridiction de renvoi ensuite de l arrêt de la Cour du 24 octobre 2003. Par ordonnance du 30 novembre 2009, le premier président a renvoyé la cause devant la troisième chambre. Le conseiller Sylviane Velu a fait rapport. L avocat général Jean-Marie Genicot a conclu. II. Les moyens de cassation La demanderesse présente deux moyens dont le second est libellé dans les termes suivants : Dispositions légales violées Articles 9 et 10, spécialement alinéa 3, de la loi du 1 er juillet 1956 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs (abrogée par la loi du 21 novembre 1989)

21 DECEMBRE 2009 C.08.0106.F/3 Décisions et motifs critiqués Le jugement attaqué, statuant comme juridiction de renvoi après cassation du jugement rendu en la même cause le 16 octobre 2001 par le tribunal de première instance de Charleroi, était saisi de l'action intentée par la demanderesse contre la société anonyme Royale Belge 1994, aux droits et obligations de laquelle est la défenderesse, en réparation du préjudice propre qu'elle a subi à la suite de l'incapacité prolongée de son gérant, L.N., victime d'un accident de la circulation le 23 septembre 1977 à Bois-de-Villers, dans lequel était impliqué le conducteur J. G., dont la responsabilité civile était couverte par la société anonyme Le Foyer, aux droits et obligations de laquelle était la Royale Belge 1994. S'agissant des faits de la cause, le jugement se réfère à l'arrêt rendu par la Cour le 24 octobre 2003. Cette référence ne peut viser que l'énoncé des faits que contenait le moyen invoqué à l'appui du pourvoi et qui est partie intégrante de cet arrêt. La demanderesse croit donc pouvoir reproduire cet énoncé : a) À l'audience du 22 septembre 1978 du tribunal de police de Namur (lire : tribunal de première instance de Namur, siégeant en matière correctionnelle), la demanderesse s'est constituée partie civile contre J. G. en paiement de la somme d'un franc à titre provisionnel sur une action évaluée à 1.000.000 francs sous réserve de majorer ou de minorer et libeller plus amplement en cours de prosécution de cause ; b) Précédemment, les parties ont échangé différentes correspondances par l'intermédiaire de leurs conseils et, notamment, le 18 septembre 1978, le conseil de la défenderesse a informé le conseil de la demanderesse que la responsabilité ne sera pas contestée et que sa cliente est disposée à régler le dommage à l'amiable, et ce, pour autant que les réclamations annoncées soient connues d'une manière précise et, par lettre du 20 septembre 1978, le conseil de la défenderesse a demandé au conseil de la

21 DECEMBRE 2009 C.08.0106.F/4 demanderesse le détail de la réclamation en suggérant une constitution limitée à un franc provisionnel à l'audience pénale, et ce, en raison de l'imminence de l'envoi de la quittance ; c) Le 27 septembre 1978, la défenderesse a émis une quittance provisionnelle de 27.000 francs en faveur de la demanderesse, laquelle a été signée le 3 octobre 1978, le paiement étant effectué dans le courant du mois de novembre 1978 ; d) Le 20 octobre 1978, le tribunal de première instance de Namur a dit J. G. seul responsable de l'accident litigieux et l'a condamné à payer à la demanderesse l'indemnité provisionnelle d'un franc réclamée par celle-ci; e) Statuant en prosécution de cause sur la demande de la demanderesse de liquidation de son préjudice définitif, le tribunal de première instance de Namur, par un jugement du 3 décembre 1987, confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Liège du 8 juin 1989, a dit cette demande non recevable au motif que le tribunal a épuisé sa saisine par le jugement antérieur du 20 octobre 1978 ; f) Par un jugement du 19 septembre 1991, confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Liège du 9 janvier 1995, l'action civile intentée par la demanderesse contre J. G., en réparation de son préjudice définitif, a été dite prescrite et irrecevable». Après ce rappel, le jugement attaqué constate que l'action de la demanderesse est «définitivement prescrite à l'égard de J. G., assuré de la (défenderesse), ce qui ne peut plus être contesté». Il déboute ensuite la demanderesse de son action contre la défenderesse, qu'il dit prescrite, par les motifs suivants : «Que, pour éviter la prescription, la (demanderesse), qui a introduit la présente action par citation du 5 décembre 1997, soit plus de vingt ans après l'accident du 23 septembre 1977, invoque l'article 10, alinéa 3, de la loi du 1 er juillet 1956 suivant lequel : La prescription est interrompue à l'égard de l'assureur par tous pourparlers entre l'assureur et la personne lésée. Un nouveau délai de trois ans prendra cours au moment où l'une des parties aura notifié à l'autre, par exploit d'huissier, qu'elle rompt les pourparlers ; si la

21 DECEMBRE 2009 C.08.0106.F/5 notification est faite par lettre recommandée, le nouveau délai prendra cours le lendemain du dépôt de celle-ci à la poste ; Qu'elle soutient qu'à défaut d'exploit d'huissier ou de lettre recommandée, les pourparlers n'ont jamais été interrompus depuis les premiers courriers de 1978 jusqu'à ce jour ; Que le jugement du tribunal de première instance de Charleroi - cassé par la Cour de cassation - a considéré qu'en se constituant partie civile contre l'assuré dans le cadre de la première action pénale devant le tribunal correctionnel de Namur et en obtenant un jugement contre lui le 20 octobre 1978, la (demanderesse) avait mis un terme aux pourparlers ; Qu'en réalité, les pourparlers n'ont pas été rompus, mais ont abouti au règlement du sinistre par l'émission d'une quittance en date du 3 octobre 1978 et le paiement de 27.000 francs - à titre d'indemnisation du dommage matériel au véhicule - reçu par la (demanderesse) le 6 novembre 1978 (...) ; Qu'après réception de ce paiement, la [demanderesse] n'a plus adressé aucun courrier ni formulé aucune réclamation pendant plus de huit ans, avant la lettre de son conseil du 10 février 1987 et la signification d'un avenir devant le tribunal correctionnel de Namur par exploit d'huissier du 18 février 1987 - procédure dont elle a été déboutée par arrêt de la cour d'appel de Liège du 8 juin 1989 ; Que, suivant la jurisprudence citée par [la demanderesse], la notion de pourparlers au sens de l'article 10, alinéa 3, de la loi du 1 er juillet 1956 comprend tout échange de courrier et même toute discussion pour régler un dommage à l'occasion duquel chaque partie a fait des propositions, de manière telle que l'attitude de l'assureur a obligé le préjudicié à introduire une action en justice ; qu est essentielle l'idée que les deux parties ont entamé une discussion que chaque partie a fait des propositions et que l'assureur a agi de façon telle qu'il a fait croire à la personne lésée qu'il avait l'intention d'indemniser le dommage (Gand, 6 juin 1989, R.W., 1990-1991, 433) ; que le terme pourparlers implique une négociation, une discussion, des échanges de nature à laisser entendre à la personne lésée que l'assureur envisage un règlement de sinistre ;

21 DECEMBRE 2009 C.08.0106.F/6 Que, suivant la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass., 3 octobre 1997, Pas., 1997, I, 385), reprenant la position de la Cour de justice Benelux, un échange d'avis, par écrit ou autrement, par lequel la partie lésée avise l'assureur qu'elle le tient pour responsable en raison d'un fait déterminé, sans préciser le fondement ni l'étendue de la responsabilité imputée à l'assureur, et par lequel, d'autre part, l'assureur avertit la personne lésée qu'il examine la prétention de cette dernière, sans manifester aucune disposition à accéder, en tout ou en partie, à cette prétention, doit être considérée comme des pourparlers (Cour de justice Benelux, 5 juillet 1985, A 84/1) ; que le seul cas où un échange de lettres entre la personne lésée et l'assureur ne peut, à partir des déclarations de celui-ci, être considéré comme des pourparlers, au sens de l'article 10, alinéa 3, de ces dispositions est celui où la personne doit inférer de ces déclarations que l'assureur exclut tout règlement (Cour de justice Benelux, 20 octobre 1989, A 88/2) ; Que, comme le relève la Cour de cassation dans l arrêt de renvoi, l'exigence d'une notification par exploit d'huissier ou par lettre recommandée pour rompre les pourparlers a pour but d'éviter à la personne lésée la surprise de se voir opposer la prescription alors qu'elle pouvait croire que des pourparlers étaient toujours en cours ; Que, vu les circonstances de la cause, et notamment la position défendue par Maître Derenne, conseil de la compagnie, représentant le sieur G. devant les juridictions pénales suite à l'avenir signifié le 18 février 1987, la (demanderesse) n'a pu raisonnablement croire que tel était le cas ; Qu'elle ne peut prétendre, sans faire preuve de mauvaise foi, que des pourparlers interruptifs de prescription se sont poursuivis, sans être rompus, jusqu'à ce jour ; Que c'est à tort qu'elle soutient que c'est à l'assureur qu'il incombe de rompre les pourparlers et pas à l'assuré ; Qu'au contraire, l'article 10, alinéa 3, de la loi du 1 er juillet 1956 permet à chacune des parties de rompre les pourparlers par exploit d'huissier : Un nouveau délai de trois ans prendra cours au moment où l'une des parties aura notifié à l'autre, par exploit d'huissier, qu'elle rompt les pourparlers ;

21 DECEMBRE 2009 C.08.0106.F/7 Qu'en l'espèce, si la (demanderesse) a réactivé les pourparlers par la lettre de son conseil du 10 février 1987 et si, par impossible, elle a continué à croire à une possibilité de règlement amiable par l'assureur, elle a, en toute hypothèse, elle-même rompu les pourparlers au plus tard par exploit d'huissier du 29 décembre 1989 en signifiant à J. G., assuré de la (défenderesse), une citation à comparaître devant le tribunal de première instance de Namur (action civile déclarée irrecevable car prescrite par arrêt de la cour d'appel de Liège du 9 janvier 1995) ; Qu'après avoir été déboutée de son action devant les juridictions pénales par l arrêt de la cour d'appel de Liège du 8 juin 1989, la (demanderesse) avait clairement compris que la (défenderesse) n'avait nulle intention de l'indemniser et qu'elle devait agir judiciairement, ce qu'elle a fait en signifiant le 29 décembre 1989 un exploit d'huissier à J. G. ; Que cet exploit du 29 décembre 1989 est opposable à l'assureur, maître du procès, et a incontestablement rompu les éventuels pourparlers toujours en cours avec la compagnie à cette date ; Qu'en conséquence, en application de l'article 10, alinéa 3, de la loi du 1 er juillet 1956, un nouveau délai de prescription de trois ans a pris cours à l'égard de l'assureur au plus tard à partir du 29 décembre 1989 et est venu à expiration le 29 décembre 1992 ; Que, sur la base de l'article 2247 du Code civil, ce nouveau délai n'a pu être interrompu par la procédure en cours dans la mesure où l'action civile a été déclarée prescrite et irrecevable ; Que la prescription triennale à l'égard de l'assureur était acquise au plus tard le 29 décembre 1992 ; Que la présente action introduite par citation du 5 décembre 1997 doit, en toute hypothèse, être déclarée irrecevable car manifestement prescrite».

21 DECEMBRE 2009 C.08.0106.F/8 Griefs En vertu de l'article 10, alinéa 3, de la loi du 1 er juillet 1956 relative à l assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs, la prescription est interrompue à l'égard de l'assureur par tous pourparlers entre l'assureur et la personne lésée, un nouveau délai de trois ans prend cours au moment où l une des parties notifie à l'autre, par exploit d'huissier, qu'elle rompt les pourparlers et, si la notification est faite par lettre recommandée, le nouveau délai prend cours le lendemain du dépôt de celle-ci à la poste. Il se déduit de ce texte que la rupture des pourparlers entre les parties, qui fait à nouveau courir le délai de prescription, ne peut résulter que d'un exploit d'huissier signifié par une partie à l'autre ou d'une lettre recommandée adressée par une partie à l'autre ayant cette rupture pour objet. Il s'ensuit que le jugement attaqué, qui reconnaît l'existence de pourparlers entre les parties, n'a pu légalement décider que la circonstance que ces pourparlers ont abouti à l'émission d'une quittance le 3 octobre 1978, quittance dont il résulte de l'exposé des faits par le jugement qu'elle n'était que provisionnelle et ne couvrait que le «dommage matériel au véhicule», le paiement de la somme de 27.000 francs par la demanderesse à la défenderesse conformément à cette quittance, l'absence de tout courrier ou de toute réclamation de la défenderesse pendant un délai de huit ans avant une lettre de son conseil du 10 février 1987 et la signification d'un avenir donné devant le tribunal de première instance de Namur, siégeant en matière correctionnelle dont il résulte de l'exposé des faits par le jugement qu'il avait pour objet la liquidation du préjudice définitif de la demanderesse, la demanderesse ayant été déboutée de cette demande par l'arrêt de la cour d'appel de Liège du 9 juin 1989, que ces pourparlers ont été rompus, au sens de la disposition citée de la loi du 1 er juillet 1956, avec cette conséquence que le délai de prescription de trois ans recommençait à courir, dès lors que le jugement ne constate pas qu'un exploit d'huissier a été signifié ou une lettre recommandée adressée par une partie à l'autre ayant cette rupture pour objet et qu'il se déduit au contraire de ces constatations que tel n'a pas été le cas.

21 DECEMBRE 2009 C.08.0106.F/9 Il en est ainsi même si le jugement a pu déduire des circonstances de fait qu'il a relevées que la défenderesse «n'a pu raisonnablement croire» que «des pourparlers étaient toujours en cours». De même, la circonstance que la demanderesse ait, le 29 décembre 1989, signifié à l'assuré de la défenderesse, J. G., une citation à comparaître devant le tribunal de première instance de Namur, citation ayant abouti, devant la juridiction d'appel, à l'arrêt de la cour d'appel de Liège du 9 janvier 1995 déboutant la demanderesse de son action contre J. G., n'a pu avoir pour conséquence la rupture des pourparlers, au sens de la disposition légale visée, dès lors que a) l'exploit d'huissier n'a pas été signifié par une partie à l'autre mais par la demanderesse à l assuré de la défenderesse et b) il n'avait pas pour objet la rupture des pourparlers entre la demanderesse et la défenderesse mais la demande de réparation par la demanderesse à l assuré de la défenderesse de son préjudice définitif. Le jugement attaqué ne justifie donc pas légalement sa décision. III. La décision de la Cour Sur le second moyen : En vertu de l article 10, alinéa 3, de la loi du 1 er juillet 1956 relative à l assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs, la prescription est interrompue à l égard de l assureur par tous pourparlers entre l assureur et la personne lésée, un nouveau délai de trois ans prend cours au moment où l une des parties notifie à l autre, par exploit d huissier, qu elle rompt les pourparlers et, si la notification est faite par lettre recommandée, le nouveau délai prend cours le lendemain du dépôt de celle-ci à la poste. L exigence d une notification par exploit d huissier ou par lettre recommandée a pour but d éviter à la personne lésée la surprise de se voir opposer la prescription alors qu elle pouvait croire que les pourparlers étaient

21 DECEMBRE 2009 C.08.0106.F/10 toujours en cours ; cette notification constitue le point de départ d un nouveau délai de prescription. Il s ensuit que la rupture des pourparlers ne peut être déduite que de la notification par l une des parties à l autre, par exploit d huissier ou par lettre recommandée, de sa décision de rompre les pourparlers. Le jugement attaqué n a pu, partant, sans violer l article 10, alinéa 3, précité, déduire la rupture des pourparlers entre parties des circonstances suivantes : - la position défendue par le conseil de l assureur, représentant l assuré devant les juridictions pénales à la suite de l avenir signifié le 18 février 1987, la demanderesse ne pouvant raisonnablement croire, vu les circonstances de la cause, que des pourparlers étaient toujours en cours ; - l exploit d huissier du 29 décembre 1989 adressé par la demanderesse à l assuré de la défenderesse. Le moyen est fondé. Par ces motifs, La Cour Casse le jugement attaqué ; Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge du jugement cassé ; fond ; Réserve les dépens pour qu il soit statué sur ceux-ci par le juge du Renvoie la cause devant le tribunal de première instance de Tournai, siégeant en degré d appel.

21 DECEMBRE 2009 C.08.0106.F/11 Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président Christian Storck, les conseillers Christine Matray, Sylviane Velu, Martine Regout et Alain Simon, et prononcé en audience publique du vingt et un décembre deux mille neuf par le président Christian Storck, en présence de l avocat général Jean-Marie Genicot, avec l assistance du greffier Marie-Jeanne Massart. M.-J. Massart A. Simon M. Regout S. Velu Ch. Matray Chr. Storck