FICHE 9 LES INSTITUTIONS DE LA V RÉPUBLIQUE

Documents pareils
REGLEMENT INTERIEUR TITRE I : DISPOSITIONS GENERALES

, une nouvelle république

QU EST- CE QU UNE CONSTITUTION

Les Cahiers du Conseil constitutionnel Cahier n 3

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS N , , , , M. Olivier Yeznikian Rapporteur

ASSOCIATION LOI DU 1er JUILLET 1901 COMITE DE COOPERATION AVEC LE LAOS ( C.C.L. )

La Constitution européenne

Recommandation n 22 relative à l ouverture d un compte bancaire ou postal séparé (06 novembre 2001).

Etablissement et dépôt des comptes consolidés et du rapport de gestion consolidé

N 518 SÉNAT QUATRIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE

Loi N 1/018 du 19 décembre 2002 portant ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DE LA COUR CONSTITUTIONNELLE AINSI QUE LA PROCEDURE APPLICABLE DEVANT ELLE

Code de conduite pour les responsables de l'application des lois

Projet de loi n o 58. Loi regroupant la Commission administrative des régimes de retraite et d assurances et la Régie des rentes du Québec

La protection des associés en droit congolais et en droit OHADA

LA COMMISSION DE L'UNION ECONOMIQUE ET MONETAIRE OUEST AFRICAINE (UEMOA)

AZ A^kgZi Yj 8^idnZc

Conclusions de M. l'avocat général Jean Spreutels :

La prise illégale d intérêts

SÉNAT PROPOSITION DE LOI

Décision n L. Dossier documentaire

30 AVRIL Loi relative à l'occupation des travailleurs étrangers (M.B. 21 mai 1999) - coordination officieuse au 1 er juillet 2011

A) Les modifications du champ d'application du Règlement n 1346

REPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS. LA COUR DES COMPTES a rendu l arrêt suivant :

Le Gouvernement de la République, conformément à la loi constitutionnelle du 3 juin 1958, a proposé, Le peuple français a adopté,

TRAITÉ SUR L'UNION EUROPÉENNE (VERSION CONSOLIDÉE)

Vu la constitution, notamment ses articles 151, 154 et 155;

LES PENSIONS ALIMENTAIRES A L'ETRANGER

Circulaire du 5 janvier 2012 Relative au Règlement intérieur type des comités techniques NOR : MFPF C

STATUTS DE CONTACT PARIS ILE-DE-FRANCE

Décret du 25 Avril 2002 modifié pris pour l application de la loi du 4 Janvier 2002 relative aux musées de France

Mise en œuvre de la responsabilité du maire

DECRET DE CREATION DE AGENCE NATIONALE DE L ENVIRONNEMENT (ANDE)

CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE. Bruxelles, le 28 mai 2010 (OR. en) 9633/10 Dossier interinstitutionnel: 2010/0096 (NLE)

Projet de loi modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (L 1 30)

PROJET DE LOI MODIFIÉ PAR LE SÉNAT. relatif au statut de la Banque de France et à l'activité et au contrôle des établissements de crédit.

DÉLIBÉRATION N DU 4 FÉVRIER 2014 DE LA COMMISSION DE CONTRÔLE

Version consolidée AUTORITÉ DE CONTRÔLE PRUDENTIEL Règlement intérieur du Collège. Chapitre 1 er Composition des formations

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANçAIS

Commissaire aux comptes

REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO ACCORD DE PAIX ENTRE LE GOUVERNEMENT ET LE CONGRES NATIONAL POUR LA DEFENSE DU PEUPLE (CNDP)

Les articles modifiés par la loi Macron au 30 janvier 2015

Vu la Loi n du 23 décembre 1993 relative à la protection des informations nominatives, modifiée ;

A. DISPOSITIONS DES TRAITÉS EN MATIÈRE D'AIDES D'ETAT

CONSIDÉRATIONS SUR LA MISE EN ŒUVRE DES DÉCISIONS DE LA COUR CONSTITUTIONNELLE

* * * Loi n portant transformation de Barid Al-Maghrib en société anonyme

COMMISSION DES NORMES COMPTABLES

III L allégement de la loi n La loi n contient des dispositions diverses et transitoires conçues, au départ, pour assurer l application

DIPLOMES OUVRANT DROIT A L'EXERCICE DE LA MEDECINE EN FRANCE AUTORISATIONS MINISTERIELLES D'EXERCICE

SÉNAT PROJET DE LOI ADOPTÉ PAR LE SÉNAT

Nomination et renouvellement de MCF et PR associé à temps plein

DELIBERATION N DU 20 MAI 2015 DE LA COMMISSION DE CONTROLE

Cour de cassation de Belgique

Loi n du 30 juin 2006 relative aux archives et aux documents administratifs 1 EXPOSE DES MOTIFS

Agrément des associations de protection de l environnement

GUIDE INTERMINISTERIEL SUR LES SYSTEMES D'INFORMATION ET APPLICATIONS SENSIBLES

STATUTS ROLLER DERBY RENNES ASSOCIATION LOI 1901

Institutions L'organisation de la Justice

Après examen par le conseil des ministres réuni le 8 ramadan 1417 (17 janvier 1997),

LOIS ET DECRETS PUBLIES DANS LA FEUILLE OFFICIELLE

N de convention Audencia/MAE à rappeler pour toute candidature : 97/08

La fin de fonctions dans l emploi fonctionnel

Statuts et Règlement Intérieur de l Union des Associations Suisses de France

CONTRAT OBSEQUES ET TUTELLE : UN ARRET* PRECISE LES MODALITES D APPLICATION

LOI N portant Code des Postes

Arrêtons. Chapitre I er. - Les assemblées générales de copropriétaires

STATUTS DE L'UNION SUISSE DES FIDUCIAIRES SECTION VALAIS

Décrets, arrêtés, circulaires

Association Européenne pour la défense des Droits de l Homme au sein de l Union Européenne

DECRET N fixant les attributions du Ministre de la Défense Nationale ainsi que l organisation générale de son Ministère.

FONDEMENTS JURIDIQUES

Loi sur l'archivage (LArch)

Article L52-4 Article L52-5 Article L52-6

Statuts du Touring Club Suisse

LOI N 04/002 DU 15 MARS 2004 PORTANT ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DES PARTIS POLITIQUES

M.S - Direction de la réglementation et du contentieux - BASE DE DONNEES. REFERENCE : B O N 5070 du 2 janvier 2003

Clause assurance des conventions de Maîtrise d œuvre > 15 M HT

LOI N DU 7 MARS 1961 déterminant la nationalité sénégalaise, modifiée

Loi du 11 floréal an X (1 e mai 1802)

LES SOURCES DU DROIT

TRAITE DE LISBONNE. Marie-Laure BASILIEN-GAINCHE* La Cour constitutionnelle fédérale d Allemagne a rendu, le 30 juin 2009, une décision fort

REMUNERATION. Passage au nouveau système 2015

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE LILLE N Mme Dejana R M. Dzibrail R RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

de la commune organisatrice ou bénéficiaire, ci-après dénommée «société de transports en commun bénéficiaire». Par dérogation aux dispositions de

180 ans d'indépendance dont 30 ans de fédéralisme...

Vu la loi n du 14 avril 1990, modifiée, relative à la monnaie et au crédit, notamment ses articles 44, 47, 142 et 143 à 158;

ASSEMBLÉE NATIONALE 8 janvier 2015 AMENDEMENT

41/128 Déclaration sur le droit au développement

3. Un crédit à la consommation responsable

SCP Thouin-Palat et Boucard, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, avocat(s) REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

RÈGLES DE PRATIQUE RELATIVES AUX AFFAIRES DU CONSEIL D ADMINISTRATION ET AUX ASSEMBLÉES GÉNÉRALES

I Buts, Composition et Ressources de l'association

CHAPITRE 6 PROTECTION STATUTAIRE ET ASSURANCE GROUPE RESPONSABILITE CIVILE PROFESSIONNELLE

Déclaration sur le droit au développement

CIRCULAIRE CDG90 PROTECTION SOCIALE COMPLEMENTAIRE

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

D M.B Le Parlement de la Communauté française a adopté et Nous, Gouvernement, sanctionnons ce qui suit :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LA CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES D AUVERGNE, STATUANT EN SECTION

ADMISSION DES TITULAIRES D UN DIPLOME EXTRACOMMUNAUTAIRE DE MASSEUR KINESITHERAPEUTE SOLLICITANT L EXERCICE DE LA PROFESSION EN FRANCE

CIRCULAIRE N Mesdames et Messieurs les préfets de régions et de départements

Avons ordonné et ordonnons:

Transcription:

Année 2011-2012 Travaux Dirigés de Droit constitutionnel et Institutions politiques Cours de Mme HIEBEL, Licence 1 Sociologie politique. FICHE 9 LES INSTITUTIONS DE LA V RÉPUBLIQUE Equipe pédagogique : M. Thomas DUVAL

Discours de Bayeux du Général de Gaulle du 16 juin 1946 (extrait) Du Parlement, compose de deux Chambres et exercant le pouvoir legislatif, il va de soi que le pouvoir executif ne saurait proceder, sous peine d'aboutir a cette confusion des pouvoirs dans laquelle le Gouvernement ne serait bientot plus rien qu'un assemblage de delegations. Sans doute aura-t-il fallu, pendant la periode transitoire ou nous sommes, faire elire par l'assemblee nationale constituante le President du gouvernement provisoire, puisque, sur la table rase, il n'y avait aucun autre procede acceptable de designation. Mais il ne peut y avoir la qu'une disposition du moment. En verite, l'unite, la cohesion, la discipline interieure du gouvernement de la France doivent etre des choses sacrees, sous peine de voir rapidement la direction meme du pays impuissante et disqualifiee. Or, comment cette unite, cette cohesion, cette discipline, seraient-elles maintenues a la longue si le pouvoir executif emanait de l'autre pouvoir auquel il doit faire equilibre, et si chacun des membres du gouvernement, lequel est collectivement responsable devant la representation nationale tout entiere, n'etait, a son poste, que le mandataire d'un parti? C'est donc du chef de l'etat, place au-dessus des partis, elu par un college qui englobe le Parlement mais beaucoup plus large et compose de maniere a faire de lui le President de l'union francaise en meme temps que celui de la Republique, que doit proceder le pouvoir executif. Au chef de l'etat la charge d'accorder l'interet general quant au choix des hommes avec l'orientation qui se degage du Parlement. A lui la mission de nommer les ministres et, d'abord, bien entendu, le Premier, qui devra diriger la politique et le travail du gouvernement. Au chef de l'etat la fonction de promulguer les lois et de prendre les decrets, car c'est envers l'etat tout entier que ceux-ci et celles-la engagent les citoyens. A lui la tache de presider les Conseils du gouvernement et d'y exercer cette influence de la continuite dont une nation ne se passe pas. A lui l'attribution de servir d'arbitre au-dessus des contingences politiques, soit normalement par le conseil, soit, dans les moments de grave confusion, en invitant le pays a faire connaitre par des elections sa decision souveraine. A lui, s'il devait arriver que la patrie fut en peril, le devoir d'etre le garant de l'independance nationale et des traites conclus par la France. Discours de M. Debré devant le Conseil d Etat du 27 aou t 1958 (extrait) : Si vous me permettez une image empruntee a l'architecture, je dirai qu'a ce regime parlementaire neuf, et a cette Communaute qui commence a s'ebaucher, il faut une clef de voute. Cette clef de voute, c'est le President de la Republiqu Chaque fois, vous le savez, qu'il est question, dans notre histoire constitutionnelle, des pouvoirs du President de la Republique, un curieux mouvement a pu etre observe : une certaine conception de la democratie voit, a priori, dans tout President de la Republique, chef de l'etat, un danger et une menace pour la Republique. Ce mouvement existe encore de nos jours. N'epiloguons pas et admirons plutot la permanence des ideologies

constitutionnelles. Le President de la Republique doit etre la clef de voute de notre regime parlementaire. Faute d'un vrai chef d'etat, le Gouvernement, en l'etat actuel de notre opinion, en fonction de nos querelles historiques, manque d'un soutien qui lui est normalement necessaire. C'est dire que le President de notre Republique ne peut etre seulement, comme en tout regime parlementaire, le chef d'etat qui designe le Premier ministre, voire les autres ministres, au nom de qui les negociations internationales sont conduites et les traites signes, sous l'autorite duquel sont placees l'armee et l'administration. Il est, dans notre France, ou les divisions intestines ont un tel pouvoir sur la scene politique, le juge superieur de l'interet national. A ce titre, il demande, s'il estime utile, une deuxieme lecture des lois dans le delai de leur promulgation (disposition deja prevue et desormais classique); il peut egalement (et ces pouvoirs nouveaux sont d'un interet considerable) saisir le Comite constitutionnel s'il a des doutes sur la valeur de la loi au regard de la Constitution. Il peut apprecier si le referendum, qui doit lui etre demande par le Premier ministre ou les presidents des assemblees, correspond a une exigence nationale. Enfin, il dispose de cette arme capitale de tout regime parlementaire qui est la dissolution. Est-il besoin d'insister sur ce que represente la dissolution? Elle est l'instrument de la stabilite gouvernementale. Elle peut etre la recompense d'un Gouvernement qui parait avoir reussi, la sanction d'un Gouvernement qui parait avoir echoue. Elle permet entre le chef de l'etat et la nation un bref dialogue qui peut regler un conflit ou faire entendre la voix du peuple a une heure decisive. Ce tableau rapidement esquisse montre que le President de la Republique, comme il se doit, n'a pas d'autre pouvoir que celui de solliciter un autre pouvoir : il sollicite le Parlement, il sollicite le Comite constitutionnel, il sollicite le suffrage universel. Mais cette possibilite de solliciter est fondamentale. Conseil constitutionnel, Décision n 62-20 du 6 novembre 1962, Loi relative a l'élection du Président de la République au suffrage universel direct, adoptée par le référendum du 28 octobre 1962 (extrait) : 1. Considerant que la competence du Conseil constitutionnel est strictement delimitee par la Constitution ainsi que par les dispositions de la loi organique du 7 novembre 1958 sur le Conseil constitutionnel prise pour l'application du titre VII de celle-ci ; que le Conseil ne saurait donc etre appele a se prononcer sur d'autres cas que ceux qui sont limitativement prevus par ces textes ; 2. Considerant que, si l'article 61 de la Constitution donne au Conseil constitutionnel mission d'apprecier la conformite a la Constitution des lois organiques et des lois ordinaires qui, respectivement, doivent ou peuvent etre soumises a son examen, sans preciser si cette competence s'etend a l'ensemble des textes de caractere legislatif, qu'ils aient ete adoptes par le peuple a la suite d'un referendum ou qu'ils aient ete votes par le Parlement, ou si, au contraire, elle est limitee

seulement a cette derniere categorie, il resulte de l'esprit de la Constitution qui a fait du Conseil constitutionnel un organe regulateur de l'activite des pouvoirs publics que les lois que la Constitution a entendu viser dans son article 61 sont uniquement les lois votees par le Parlement et non point celles qui, adoptees par le Peuple a la suite d'un referendum, constituent l'expression directe de la souverainete nationale ; 3. Considerant que cette interpretation resulte egalement des dispositions expresses de la Constitution et notamment de son article 60 qui determine le role du Conseil constitutionnel en matiere du referendum et de l'article 11 qui ne prevoit aucune formalite entre l'adoption d'un projet de loi par le peuple et sa promulgation par le President de la Republique ; 4. Considerant, enfin, que cette meme interpretation est encore expressement confirmee par les dispositions de l'article 17 de la loi organique susmentionnee du 7 novembre 1958 qui ne fait etat que des "lois adoptees par le Parlement" ainsi que par celles de l'article 23 de ladite loi qui prevoit que "dans le cas ou le Conseil constitutionnel declare que la loi dont il est saisi contient une disposition contraire a la Constitution sans constater en meme temps qu'elle est inseparable de l'ensemble de la loi, le President de la Republique peut promulguer la loi a l'exception de cette disposition, soit demander aux Chambres une nouvelle lecture" ; 5. Considerant qu'il resulte de ce qui precede qu'aucune des dispositions de la Constitution ni de la loi organique precitee prise en vue de son application ne donne competence au Conseil constitutionnel pour se prononcer sur la demande susvisee par laquelle le President du Senat lui a defere aux fins d'appreciation de sa conformite a la Constitution le projet de loi adopte par le Peuple francais par voie de referendum le 28 octobre 1962 ; Decide : ARTICLE PREMIER - Le Conseil constitutionnel n'a pas competence pour se prononcer sur la demande susvisee du President du Senat. ARTICLE 2 - La presente decision sera publiee au Journal officiel de la Republique francaise. Intervention de J.-L. Debré devant l Assemblée nationale, défendant le passage du septennat au quinquennat (extrait) : Assisterons-nous, de ce fait, a une "presidentialisation" du regime, a un glissement lent mais ineluctable vers le regime presidentiel? Rien ne permet de l'affirmer. Continuent de coexister, dans notre Constitution, un President de la Republique et un Premier ministre dont le role et la legitimite sont de nature differente, mais non concurrente. C'est manifeste en cas de concordance des majorites presidentielles et parlementaires. C'est egalement le cas en periode de cohabitation, car vous ne m'en voudrez pas de rappeler que le chef du Gouvernement est, certes, adosse a une

majorite parlementaire qui soutient son action, mais qu'il procede malgre tout du chef de l'etat, ne serait-ce que par sa nomination.