Les bénéficiaires de la CMU :



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D I R E C T I O N D E S S T A T I S T I Q U E S E T D E S É T U D E S N 29 Isabelle GIRARD - Jocelyne MERLIÈRE LES DÉPENSES DE SANTÉ DES BÉNÉFICIAIRES DE LA CMU Au cours des 5 premiers mois de l année 2000, un bénéficiaire de la CMU a présenté au remboursement 2 340 F alors qu un patient de même âge et de même sexe, couvert par le Régime Général à un autre titre a dépensé 1 906 F. L amélioration du niveau de protection sociale des plus défavorisés semble avoir développé le recours aux soins d une population, qui nécessitait un meilleur suivi médical. En 1999, leur consommation moyenne dépassait, déjà, de plus de 14% celle des autres patients. La Couverture Maladie Universelle (CMU) vise à faire disparaître les inégalités face à la prévention et l accès aux soins (1). Son instauration depuis le 1 er janvier 2000 a élargi le droit à l assurance maladie, notamment pour les nombreuses personnes en situation de grande exclusion qui, jusqu à présent étaient dépourvues momentanément ou durablement de protection sociale. L amélioration des solidarités publiques, pour une population évaluée initialement à environ 6 millions de personnes, a-t-elle favorisé des comportements singuliers face aux systèmes de santé? Ces attitudes sontelles transitoires ou, sont-elles plus profondément liées au niveau de vie? Pour répondre à ces interrogations, une Les bénéficiaires de la CMU : analyse comparative des dépenses de santé des bénéficiaires de la CMU, et des autres personnes protégées par le Régime Général a été réalisée à partir de l Echantillon Permanent des Assurés Sociaux (EPAS) (2). Cette étude porte sur les personnes ayant effectivement consommé des soins. Pour mieux caractériser les premiers effets de la couverture complémentaire, les consommateurs de soins couverts au titre de la CMU ont été divisés en deux groupes (voir encadré méthodologie page 2) : d un côté, les personnes protégées selon le critére de résidence (3) (régime de base), et de l autre, celles bénéficiant exclusivement de la couverture complémentaire (et non de la CMU de base) (4). Les éventuels dépassements (y compris forfaits) sont en revanche, quatre fois moins élevés, en moyenne pour les patients bénéficiaires de la CMU. Malgré l instauration de ces forfaits, une partie des dépenses, en particulier dans le domaine de l optique et des soins dentaires, reste pourtant à leur charge. Une population plus jeune, surtout parmi les femmes Les jeunes, davantage exposés au risque de précarité (5), sont les premiers à avoir bénéficié du dispositif de lutte contre les inégalités d accès aux soins. Près des trois quarts des personnes protégées par la CMU complémentaire seule ont moins de 40 ans. Cette proportion est de 62% parmi ceux qui bénéficient de la CMU de base contre à peine plus de la moitié des autres patients. Au total, un écart de près de 12 ans sépare l âge moyen des bénéficiaires du Régime Général de celui des personnes couvertes par la CMU complémentaire seule. (1) " Le poids des inégalités sociales ", A. Bihr, R. Pfefferkorn - Problèmes Economiques n 2665/ Mai 2000 (2) L EPAS permet de suivre la consommation d 1/600ème de la population protégée par le Régime Général (hors fonctionaires, étudiants et autres bénéficiaires des régimes particuliers dont les prestations sont versées par les Sections Locales Mutualistes). (3) 956 patients dont 80,1% qui ont bénéficié de remboursements au titre de la CMU complémentaire. (4) 3 558 patients, lesquels représentent plus de 78% des bénéficiaires de la CMU. (5) " Précarité et Santé ", J. Lebas, P.Chauvin/PUF - 1998 1

Hommes 15 LES 956 BÉNÉFICIAIRES DE LA CMU DE BASE (%) 0,7 1,2 3,1 5,0 6,5 7,2 80 ans et + 60-69 ans 40-49 ans 2,6 2,1 7,1 7,5 3,8 20-29 ans 6,0 6,8 10,1 9,5 < 10 ans 9,1 10 5 0 0 5 10 15 Age moyen = 33 ans 2,1 Femmes 9,5 15 LES 3 558 BÉNÉFICIAIRES DE LA CMU COMPLÉMENTAIRE SEULE (%) 11,8 8,9 Hommes 4,2 5,0 6,4 5,2 0,3 0,6 1,8 80 ans et + 1,0 Femmes 0,8 60-69 ans 2,0 4,4 40-49 ans 20-29 ans < 10 ans 7,6 10,7 9,4 9,3 10,7 10 5 0 0 5 10 15 Age moyen = 28 ans 15 LES 53 740 AUTRES PATIENTS DU RÉGIME GÉNÉRAL (%) Hommes 3,5 4,5 5,4 6,1 6,3 4,6 5,9 6,6 1,4 80 ans et + 60-69 ans 40-49 ans 20-29 ans < 10 ans 3,2 Femmes 5,2 5,4 6,5 8,0 8,6 6,6 6,0 6,2 10 5 0 0 5 10 15 Age moyen = 40 ans Alors que ces trois groupes de patients ne se distinguent pas sensiblement selon le sexe (la part des femmes est de l ordre de 56 %), c est plus particulièrement, parmi les classes d âges les plus jeunes que la population des femmes couvertes par la CMU est la mieux représentée : elles sont près de 2/3 parmi les 20-39 ans à bénéficier exclusivement de la CMU complémentaire. Méthodologie L étude est centrée sur les patients de France métropolitaine, ayant bénéficié de soins de ville au titre du risque maladie (hors indemnités journalières) entre le 1 er Janvier et le 31 Mai 2000, dont les remboursements ont été effectués avant le 1 er Juillet 2000. Ainsi, l analyse porte sur la consommation de soins de près de 58 300 personnes, dont 4 500 bénéficiaires de la CMU. L indicateur de consommation pris en compte est la "dépense reconnue" ou "base de remboursement", qui correspond à la somme du montant remboursé et du ticket modérateur. Les éventuels dépassements d actes professionnels et d appareillage, que viennent diminuer les forfaits de soins dentaires et d optique institués par la CMU, sont exclus de l analyse de ces dépenses couvertes par le Régime Général et font l objet des encadrés pages 3 et 4. DÉCOUPAGE DE LA DÉPENSE DE SOINS Dépassements des praticiens Base de remboursement } Partie des dépassements non pris en charge par la CMU complémentaire Forfaits pris en charge Tickets par la CMU } } modérateurs complémentaire } Remboursements de l'assurance maladie Une répartition des dépenses relativement équivalente (6) Répartition des consommants et des dépenses reconnues de soins de ville au cours des 5 premiers mois de l année 2000 Prescriptions Autres Total Hono- Soins Transports soins soins raires Dentaires Ensemble Auxil. Phar- autres de ville de ville médic. Biologie macie Optique TIPS Bénéficiaires de la % consommants 89,5 14,1 93,8 14,0 26,5 90,6 4,9 18,6 4,4 0,4 100,0 CMU de base (956) % Dépenses 30,1 4,5 62,1 9,1 5,7 43,9 0,4 3,0 3,0 0,3 100,0 Bénéficiaires de la % consommants 91,5 15,2 95,0 16,1 24,8 93,3 5,0 17,3 4,7 0,1 100,0 CMU complément. seule (3 558) % Dépenses 31,2 4,7 59,2 7,5 5,6 42,2 0,4 3,5 5,0 0,0 100,0 Autres patients % consommants 91,0 18,8 93,5 19,6 30,4 90,1 8,2 14,5 4,0 0,4 100,0 du Régime Général (53 740) % Dépenses 29,5 5,4 61,5 9,5 5,8 41,1 0,4 4,8 3,2 0,4 100,0 (6) L ensemble des postes de soins de ville se décompose selon : les honoraires des médecins, les soins des dentistes et des stomatologues, les auxiliaires médicaux, la biologie, la pharmacie, l optique, le TIPS, les transports de malades et les autres soins de ville. 2

La répartition des dépenses par poste ne révèle aucune disparité significative entre les trois groupes de patients. Les prescriptions regroupent la plus large part des dépenses et dépassent 60 %. Les honoraires et les soins dentaires représentent 35 % de la consommation. Bien que les soins dentaires et les frais d optique aient fait l objet de mesures particulières dans le cadre de la CMU, le recours à ce type de soins semble être resté moins fréquent au cours des 5 premiers mois de l année pour ces bénéficiaires. Il faut souligner aussi que les faibles écarts qui différencient le recours aux soins selon les postes peuvent être, pour une large part, imputables à la nouveauté du dispositif. En effet, un bénéficiaire de la CMU a moins de chances de consommer effectivement dès janvier 2000, qu un autre bénéficiaire du Régime Général, dont l accès aux soins n a pas été modifié par l ouverture de nouveaux droits au cours de cette période. Les dépenses moyennes au cours des 5 premiers mois de l année 2000 Dépense moyenne redressée* selon l âge et le sexe Dépense De la population De la population De la population Dépenses en Francs moyenne bénéficiaire de la bénéficiaire de la bénéficiaire de la CMU de base CMU complé- CMU mentaire seule (Ensemble) de base (956) 2 276 2 276 complémentaire seule (3 558) 2 358 2 358 Ensemble (4 514) 2 340 2 340 Autres patients du Régime Général (53 740) 2 573 2 117 1 850 1 906 * La méthode consiste à calculer ce que serait la dépense moyenne des patients protégés par le Régime Général (hors CMU), si cette population avait la même structure d âge et de sexe que celle, d une part, des personnes couvertes par la CMU de base, et d autre part des patients protégés par la CMU complémentaire seule. Le calage est centré sur la population des personnes non couvertes par la CMU, plus largement représentée à tout âge. Un surplus de consommation sensible Au cours des 5 premiers mois de cette année, les bénéficiaires de soins ambulatoires couverts par la CMU ont en moyenne des dépenses inférieures aux autres personnes protégées par le Régime Général : -11,5 % pour les personnes couvertes par la CMU de base et -8,4 % pour celles bénéficiant exclusivement de la complémentaire. Cet écart de consommation semble cependant pour une large part liée à la différence d âge qui distingue les groupes de patients. En effet, à structure d âge et de sexe identique, les bénéficiaires de la CMU consomment davantage que ceux qui ne bénéficient pas de cette couverture. La moyenne des dépenses des bénéficiaires de la CMU de base s élève à 2 276 F alors qu elle n atteint que 2 117 F pour les autres patients. L écart de consommation est encore plus prononcé quand on compare, à structure d âge et de sexe équivalent, les dépenses moyennes des personnes couvertes par la CMU complémentaire et celles observées pour les autres bénéficiaires du Régime Général (respectivement 2 358 F contre 1 850 F). Le surplus de consommation est manifeste et important, en particulier pour les bénéficiaires de la CMU complémentaire, qui forment l essentiel de la population protégée par la CMU. Cependant, il est difficile de dire, à ce stade, si ce surplus est directement lié à l apport d une meilleure couverture de soins ou bien, s il est plus directement dépendant du milieu social des patients. Dépense reconnue par la sécurité sociale et dépense totale (y compris dépassements) au cours des 5 premiers mois de l année 2000 Après ajout des éventuels dépassements à la dépense reconnue, la consommation moyenne de soins de ville au cours de cette période atteint 2 422 F parmi l ensemble des personnes couvertes au titre de la CMU, alors qu elle s élève seulement à 2 226 F parmi les autres bénéficiaires du Régime Général, après correction des effets d âge et de sexe. Ainsi, avant prise en charge des forfaits (voir encadré méthodologie), la consommation globale dépasse en moyenne de 3,3 % la dépense présentée au remboursement des bénéficiaires de la CMU alors que cet écart atteint 16,5 % parmi les autres patients protégés par le Régime Général. La part représentée par les dépassements dans la dépense totale de soins de ville est donc beaucoup plus importante pour les patients non concernés par la CMU que pour ceux qui en bénéficient. DÉCOUPAGE DE LA DÉPENSE MOYENNE DES PATIENTS AU COURS DES 5 PREMIERS MOIS DE L'ANNÉE 2000 Bénéficiaire de la CMU 2 340 F Base de remboursement 2 422 F Dépassements : 82 F Autre bénéficiaire du Régime Général de même âge et même sexe 2 226 F Dépassements : 320 F Base de remboursement 1 906 F 3

Les dépenses de la CMU complémentaire Les dépenses remboursées au titre de la complémentaire La CMU complémentaire prend en charge les tickets modérateurs de l ensemble des prestations et certains forfaits en particulier pour les soins dentaires et les frais d optique des patients les plus démunis. Dans l EPAS, cette dépense s élève à 598 F, pour les 5 premiers mois de l année, parmi les bénéficiaires de la CMU complémentaire couverts à ce titre depuis la mise en place du dispositif (1). Plus de la moitié de ces remboursements correspond à des dépenses de pharmacie et 27 % à des honoraires médicaux. Selon les catégories de prestations versées, les classes d'âge des patients concernés diffèrent. Les dépenses complémentaires d analyses et de prélèvements, de soins dentaires, d honoraires médicaux et de pharmacie sont payées d'abord pour les 20 à 39 ans (respectivement 42,8 % ; 41,2 % ; 35,3 % ; et 34,7 % de ces dépenses). Les dépenses d'auxiliaires médicaux concernent à raison de 48,2 % les plus jeunes, les moins de 20 ans, celles d'optique concernent en revanche à raison de 38,3 %, une population plus âgée : les 40 à 59 ans. Les forfaits, avec 24 F en moyenne, représentent seulement 4 % du montant moyen effectivement pris en charge au titre de la CMU complémentaire. La faible consommation d optique et de soins dentaires des bénéficiaires de la CMU explique la large part afférente à la prise en charge du ticket modérateur. Les dépassements et la dépense restant à charge du patient Le montant des dépassements (y compris éventuellement les forfaits remboursés au titre de la CMU complémentaire) est, en moyenne, quatre fois moins élevé pour les bénéficiaires de la CMU que pour les autres patients (voir encadré page 3). Cet écart est en partie dû au fait que les bénéficiaires de la CMU consultent principalement des praticiens du secteur 1, et plus rarement des praticiens du secteur 2, ces derniers n'étant pas autorisés à dépasser les tarifs du secteur 1 sauf exigence particulière du patient. Par ailleurs les dentistes et opticiens pratiquent des dépassements moindres pour les patients bénéficiaires de la CMU. En effet, la mise en place de la CMU complémentaire vise en particulier à pallier le manque de prise en charge des frais dentaires et des frais d'optique pour ceux qui renonçaient à ce type de soins pour des raisons financières. Or, après prise en charge des forfaits au titre de la CMU, une partie des dépenses d'optique, et surtout de soins dentaires reste à la charge du patient couvert par la CMU complémentaire. Cette part atteint 70% des dépassements se rapportant aux soins dentaires et près de 40% des dépassements de frais d optique. Par ailleurs, bien que les praticiens ne soient pas autorisés à dépasser les tarifs conventionnels (secteur 1) pour leurs patients couverts par la CMU, un certain nombre de ces patients ont dû payer des dépassements pour leurs soins des cinq premiers mois de l'année 2000 : 7,1 % des patients bénéficiaires d'actes prescripteurs, couverts par la CMU complémentaire ont payé des honoraires avec dépassements. Ces pourcentages sont à comparer à la proportion de patients non bénéficiaires de la CMU acquittant des dépassements (34 %). Même s'ils sont faibles au regard de ces derniers chiffres, ils restent loin d'être négligeables et sont contraires à l'esprit de la loi (Article 24 de la loi du 27 juillet 1999). (1) Sont exclus de cette analyse environ 13 % des consommants bénéficiant de la CMU complémentaire pour lesquels une partie des dépenses engagées depuis janvier 2000, n a pas été remboursée au titre de la CMU. Dépassements moyens de soins dentaires, d'optique et d'honoraires par patient de l'e.p.a.s.(f) (*) dont dépassements moyens restant à la charge des patients après déduction des forfaits CMU (F) (*) 1 800 1 800 1 600 1 600 1 400 1 400 1 200 1 200 1 000 1 000 800 1 622 800 1 622 600 600 400 832 400 832 200 0 290 337 86 10 Soins dentaires Optique Honoraires 200 0 204 86 133 10 Soins dentaires Optique Honoraires CMU complémentaire Non bénéficiaires de la CMU CMU complémentaire Non bénéficiaires de la CMU (* ) par personne ayant eu recours à ce type de soins. 4

Pour mieux comprendre l écart de consommation qui sépare les bénéficiaires de la CMU des autres personnes protégées par le Régime Général, l analyse a été élargie aux dépenses de ces trois groupes de patients l année précédente, sur les 5 premiers mois de 1999. L échantillon de départ a donc été restreint aux patients ayant eu des dépenses de santé au cours de l année 1998 ou 1999. Cette sélection implique que l on étudie les dépenses, non seulement des consommateurs de soins les plus fréquents, mais surtout des patients qui étaient déjà couverts par le Régime Général antérieurement à la mise en place de la CMU (7). Entre 1999 et 2000 : Une augmentation des recours aux soins de ville Part des bénéficiaires 2000 qui n ont pas consommé au cours des 5 premiers mois de l année 1999 Avant correction Après correction (âge et sexe) (âge et sexe) (2 206) 18.7% 18.7% Autres patients du Régime Général (26 816) 13.7% 15.9% Une hausse des dépenses plus significative Parmi les patients non concernés par la CMU qui ont bénéficié de soins ambulatoires (8) au cours des 5 premiers mois de l année 2000, 13,7% n avaient pas eu recours à un médecin durant la même période, l année précédente. Cette proportion, plus importante parmi ceux qui bénéficient actuellement de la CMU, pourrait se justifier, au moins partiellement, par un effet d âge : étant plus jeunes, leur propension à consommer est moins fréquente (9). Mais, à structure d âge et de sexe équivalente, la part des patients qui n avaient consulté aucun médecin en 1999 reste toujours plus élevée parmi les bénéficiaires de la CMU. Ecart entre la consommation moyenne des bénéficiaires de la CMU et celle des autres patients du Régime Général De Janvier à Mai 2000 De Janvier à Mai 1999 Avant correction Après correction Avant correction Après correction (âge et sexe) (âge et sexe) (âge et sexe) (âge et sexe) -9,9%* +20,1% -13,0% +14,5% *Lire : La consommation moyenne d une personne couverte par la CMU est inférieure de 9,9% à celle d une personne non couverte par la CMU sur la même période. A même structure d âge et de sexe, la consommation moyenne des bénéficiaires de la CMU est supérieure de 20,1% à celles des autres patients. Comme en 2000, les dépenses médicales de l année 1999 révèlent, à âge et sexe égaux, un recours aux soins plus important parmi les bénéficiaires de la CMU. Ce résultat confirme la prégnance du niveau de vie sur l état de santé des individus. Cependant, l écart de consommation semble avoir été amplifié en 2000 par l instauration de la CMU : alors que ces bénéficiaires avaient une consommation moyenne individuelle supérieure de 14,5% à celle des autres personnes protégées en 1999, l écart dépasse 20 % en 2000. (7) Cette sélection exclut de l étude environ 5 % des personnes couvertes par la CMU en 2000, ce qui risque d écarter des personnes plus démunies. Cependant, la majorité des bénéficiaires de la CMU disposaient de l aide médicale départementale. Néanmoins, on peut supposer que l apport de nouveaux droits n a pu qu améliorer le niveau général de protection d une large part des consommants, notamment, des bénéficiaires de la CMU complémentaire. (8) Cette partie ne porte que sur 29 022 personnes. En effet, le doublement du tirage de l EPAS n a été effectif qu à partir de juin 1999. L analyse du suivi de la consommation entre 1999 et 2000 a donc nécessité de se restreindre aux données sur l EPAS non doublé. (9) " Concentration des dépenses d assurance maladie et montant des remboursements individuels - Année 1995 ", J. MERLIERE, CNAMTS 5

Une répartition des dépenses légèrement différenciée Modification de la structure des consommations entre 1999 et 2000* Autres patients du Régime Général Honoraires -1,5 % -0,7 % Soins Dentaires -0,4 % -0,2 % Prescriptions +1,9 % +0,9 % Auxiliaires Médicaux -0,7 % +0,5 % Biologie -1,1 % 0 Pharmacie +2,4 % +0,2 % Lire : pour les consommants non bénéficiaires de la CMU (colonne 1) la part des honoraires dans leur consommation totale a diminué de 0,7 point entre 1999 et 2000, celle des soins dentaires de 0,2 point, le tout au profit des prescriptions (+0,9 point) * Sont exclus de cette répartition des dépenses " les transports " et " les autres soins de ville " pour lesquels le nombre de consommants observés est trop faible dans l EPAS non doublé, pour la période étudiée. En même temps que la consommation augmente entre 1999 et 2000, sa structure évolue Dans l'ensemble, la part des consommations affectées aux dépenses prescrites progresse d'une année sur l'autre. Mais cette évolution est beaucoup plus sensible pour les bénéficiaires de la CMU. Pour ces derniers, la part de la consommation médicamenteuse est ainsi en nette augmentation entre 1999 et 2000. La part des autres postes semble plutôt régresser. La mise en place de la CMU ne semble pas, jusqu ici, avoir favorisé particulièrement la consommation de soins d optique et dentaires, comme on pouvait le supposer. Les populations défavorisées orientent davantage leurs dépenses vers une médecine de première intention, désormais mieux remboursée, avant de passer à des soins qu ils jugent moins urgents (10). Cependant, globalement, les bénéficiaires de la CMU ont mis à profit en 2000 l amélioration de leur couverture sociale : leurs dépenses de santé ont progressé plus vite que celles des autres bénéficiaires du Régime Général. Il est encore trop tôt pour savoir si cet écart de consommation va se maintenir, c est-à-dire si l élargissement de la couverture maladie comblera les inégalités face à l état de santé, ou bien si, au contraire, ce surplus de consommation est temporaire. Il ne serait alors que la conséquence d un effet de " rattrapage " d une population qui, jusqu à présent, était médicalement moins bien suivie. En tout état de cause, les répercussions sur l'évolution des dépenses de santé sont restées très modérées. En effet, les bénéficiaires de la CMU qui ont consommé au cours des 5 premiers mois de l année 2000 dans l échantillon d étude, ne concentrent que 7% de l ensemble des dépenses ambulatoires. POUR EN SAVOIR PLUS La couverture maladie universelle, BO n 2000/4 bis, ministère de l Emploi et de la Solidarité. Ce document rassemble tous les textes législatifs et réglementaires concernant la CMU. La loi n 99-641 du 27 juillet 1999 créée, "pour les résidents de la France métropolitaine et des départements d'outre mer, une Couverture Maladie Universelle (CMU) qui garantit à tous une prise en charge des soins par un régime d'assurance maladie, et aux personnes dont les revenus sont les plus faibles le droit à une protection complémentaire et à la dispense d'avance des frais". Ainsi la loi assure d'une part, une protection pour maladie de base, établie sur un critère de résidence, et, d'autre part, une protection maladie complémentaire sur un critère de ressources. On notera que la plupart des personnes bénéficiant de la CMU de base sont également concernées par la CMU complémentaire. " Six mois de couverture maladie universelle dénombrement des bénéficiaires et structure des dépenses ", Point Stat n 28/ Septembre 2000, Cnamts. (10) "Dépenses de santé non remboursées et accès aux soins des plus démunis ", A. ALIGON, M. GRIGNON - Les Cahiers du GRATICE-CREDES - n 15/2ème semestre 1998. Point STAT n 29 / Octobre 2000 - ISSN : 1241-5545 Directeur de la publication : Gilles JOHANET Rédaction : Marie-Hélène MOUGARD Conception et réalisation technique : Division Imprimerie Arts Graphiques de la CNAMTS - Tirage : 4000 exemplaires Diffusion : Direction des Statistiques et des Études 66, avenue du Maine - 75694 PARIS CEDEX 14 Téléphone : 01.42.79.33.72 6