Société BNP PARIBAS, SA 1 rue Le Peletier 75009 PARIS



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Transcription:

T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 1 3ème chambre 1ère section N MINUTE : JUGEMENT rendu le 19 Mars 2015 DEMANDERESSE Société MYBEE, SAS 6 rue Félicien David 75016 PARIS représentée par Maître Henri LEBEN de la SELARL COLBERT PARIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #K0184 DÉFENDERESSE Société BNP PARIBAS, SA 1 rue Le Peletier 75009 PARIS représentée par Maître Marianne GABRIEL de la SELAS CASALONGA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #K0177 COMPOSITION DU TRIBUNAL Marie-Christine COURBOULAY, Vice Présidente Camille LIGNIERES, Vice Présidente Julien RICHAUD, Juge assistés de Léoncia BELLON, Greffier, DEBATS A l audience du 03 Février 2015 tenue publiquement Expéditions exécutoires délivrées le : Page 1

JUGEMENT Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe Contradictoirement en premier ressort FAITS ET PRÉTENTIONS La société MYBEE, fondée en 2010, a pour activité la fourniture à des clients organisateurs d'événements de solutions informatiques leur permettant de fournir aux participants des supports RFID pouvant revêtir toutes sortes de formes (cartes, bracelets ou autres gadgets), totalement personnalisables et qui pourront servir ensuite à effectuer des achats dans le cadre de l'événement. Elle a déposé le 19 décembre 2011 dans le cadre de son activité une marque figurative et en couleurs française «MYBEE SYSTÈMES» n 3883143 en classe 36 pour notamment les services : «affaires financières ; affaires monétaires ; services de financement». Cette marque est exploitée depuis février 2011, aussi bien au travers de son apposition sur les produits supportant les services (terminaux ou supports de paiement) que sur les gadgets (cartes, bracelets) fournis par la demanderesse et les supports de communications de cette dernière. La société MYBEE développe aussi son activité à l'international, et fournit ses services au Royaume-Uni, Italie, Belgique mais aussi aux Philippines, et serait en train d'étendre son activité à d'autres pays d'europe ou encore au Mexique. La société BNP Paribas est elle un organisme bancaire. Elle a dans ce cadre développé des services et produits s'adressant spécifiquement à ses clients les plus jeunes, et a ainsi lancé en mai 2013 une carte bancaire de paiement dénommée «MYB'S» qui est proposée aux mineurs titulaires de comptes «Esprit Libre Découverte». La société BNP PARIBAS avait auparavant fait procéder au dépôt le 27 septembre 2012 de la marque verbale française «MYB'S» n 3949163 en classe 36 pour les services suivants : «Assurances ; affaires financières ; affaires monétaires ; affaires immobilières ; affaires bancaires ; services de financement, agences de recouvrement de créances, crédit, consultation en matière immobilière, gérance de biens immobiliers, location d'appartements, consultation en matière d'assurances, courtage en assurances, cautions (garanties), épargne, placement de fonds, actuariat, affacturage, cote en bourse, courtage en bourse, caisses de prévoyance, services de cartes de crédit, services de cartes de débit, opérations de change, vérification des chèques, émission de chèques bancaires, dépôt en coffre-fort, émission de bons de valeur, émission de cartes de fidélité (service financier), estimations fiscales, services fiduciaires, transfert électronique de fonds, gérance de fortunes, parrainage financier, transactions financières, banque directe (home-banking), assurance habitation, assurance loyers impayés ; services d'informations, de conseils et d'assistance bancaires, financiers, monétaires ou immobiliers ; services Page 2

bancaires, financiers, monétaires, immobiliers ou d'assurances en ligne sur des réseaux de télécommunication (y compris téléphones mobiles), des réseaux télématiques et des réseaux de communications informatiques» Elle exploite cette marque depuis le lancement de sa carte MYB'S en l'apposant sur ces cartes mais aussi les supports promotionnels autour de cette nouvelle offre. Mise au fait de ce dépôt et de cette exploitation, la société MYBEE a mis en demeure la défenderesse, par courrier du 1er août 2013 : cesser toute utilisation de sa marque MYB'S procéder à son retrait auprès de l'inpi procéder au retrait de l'ensemble des supports de communication et publicitaires la reproduisant procéder au retrait de l'ensemble des cartes MYB'S et enfin de communiquer le nombre de cartes distribuées afin de permettre l'évaluation du préjudice subi du fait de la contrefaçon des droits de la demanderesse. La société BNP PARIBAS a répondu à cette mise en demeure par un courrier officiel de son conseil du 5 novembre 2013, indiquant qu'elle ne considérait pas qu'il y ait de risque de confusion entre les deux signes, et rejetait de ce fait l'ensemble des demandes formulées par la société MYBEE. C'est dans ces circonstances que la demanderesse a fait assigner la société BNP PARIBAS pour contrefaçon de marque par exploit introductif d'instance du 8 novembre 2013. Par dernières conclusions, signifiées par voie électronique le 4 décembre 2014, la société MYBEE demande au tribunal de : Constater que la société MYBEE est titulaire de la marque française «MYBEE SYSTÈMES» pour l'avoir déposée auprès de l'inpi le 19 décembre 2011 sous le numéro 3883143 en classes 9, 36, 38 et 41 ; Dire et juger qu'en déposant le 27 septembre 2012 la marque française «MYB'S» sous le numéro 3949163 en classe 36 et en l'exploitant, la société BNP Paribas a commis des actes de contrefaçon en application des dispositions de l'article L.713-3 b) du Code de la propriété intellectuelle ; En conséquence : Déclarer la société MYBEE recevable et fondée en ses demandes ; Prononcer la nullité de la marque française «MYB'S» numéro 3949163 ; Dire et juger que la décision d'annulation de la marque française précitée sera portée sur le registre national des marques, conformément à l'article R.714-3 du Code de la propriété intellectuelle ; Interdire à la société BNP Paribas, sous astreinte de 1.000 par infraction constatée, d'exploiter directement ou indirectement et sous quelque forme que ce soit et à quelque titre que ce soit, la marque «MYB'S» à compter de la signification du jugement à intervenir ; Condamner la société BNP Paribas au paiement de la somme de 159.461 de dommages et intérêts au titre de la contrefaçon au bénéfice de la société MYBEE, sauf à parfaire; Page 3

Ordonner la publication du jugement à intervenir aux frais de la défenderesse dans cinq revues ou sites Internet au choix de la demanderesse, dans la limite de 5.000 HT par insertion ; Condamner la société BNP Paribas à payer à la société MYBEE la somme de sept mille euros (7.000 ) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ; Condamner la société BNP Paribas aux entiers dépens, en application de l'article 696 du Code de Procédure Civile ; Débouter la société BNP Paribas de l'ensemble de ses demandes, Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir. A l'appui de ses prétentions, la société MYBEE soutient que les services désignés par les deux marques aux débats sont identiques ou similaires puisqu'elles visent toutes deux les services de la classe 36 en l'espèce les «affaires financières, affaires monétaires, services de financement», que les services «assurances», «affaires immobilières» visés par la marque seconde sont des services complémentaires à ceux fournis sous la marque MYBEE ; que le consommateur d'attention moyenne sera donc susceptible d'attribuer la même origine à ces services, ou tout du moins à supposer l'existence d'un lien économique entre les deux entreprises. Elle ajoute que les deux marques et les services exploités sous ces marques visent par ailleurs le même public, et le même domaine, à savoir des services de transaction financière (dématérialisée ou non) pour un public jeune. Elle explique que le degré de similitude entre les signes opposés s'apprécie au regard de leur degré de similitude visuelle, auditive et conceptuelle, et ce en partant de l'impression d'ensemble produite par les signes en cause sur un consommateur d'attention moyenne et en tenant compte de la marque litigieuse telle qu'elle est exploitée ainsi que du contexte dans lequel elle est exploitée. Elle prétend que dans le signe MYBEE, l'élément distinctif et dominant en est l'élément verbal MYBEE, les éléments figuratifs ou verbaux complémentaires étant purement accessoires et que le terme MYBEE doit être pris dans son entier, et non scindé ; que les deux marques comportent la même séquence de 3 lettres en position d'attaque, et la même structure avec 2 éléments verbaux, le second élément de chacune des marques rappelant celui de l'autre, le S étant aussi la première lettre du mot «systèmes». ; que le fait que la marque invoquée soit en couleur n'affaiblit pas le degré de similarité visuelle et que le gris, couleur principale du signe, est une couleur très proche du noir de la marque litigieuse ; qu'enfin, la couleur jaune employée est insignifiante aux yeux d'un consommateur moyen. Elle fait valoir que d'un point de vue phonétique, les deux marques reproduisent le même phonème initial, à savoir [MAÏ]. Le deuxième phonème est lui reproduit de manière quasi identique : il s'agit de [BI] pour la marque MYBEE et de [BIZ] pour la marque MYB'S ; que le sondage réalisé auprès de lycéens et étudiants en atteste et conteste les critiques formulées par la société défenderesse quant au caractère probant de ce sondage. Page 4

Elle argue que les marques sont aussi extrêmement proches d'un point de vue intellectuel, et la marque litigieuse apparaît dès lors comme la contraction ou la déclinaison de celle qui lui est opposée, ainsi qu'il ressort là aussi du sondage versé aux débats par la demanderesse. Elle évalue son préjudice en indiquant que les actes de contrefaçon poursuivis dans le cadre de la présente instance ont entraîné une banalisation de sa marque, et ont sapé ses efforts de communication et publicitaires réalisés afin de promouvoir son activité, et ce de manière d'autant plus conséquente lorsqu'on connaît l'implantation et la force de frappe de la société défenderesse. Dans ses écritures récapitulatives signifiées par voie électronique le 9 janvier 2015, la société BNP PARIBAS sollicite du tribunal de : Dire et juger la société BNP PARIBAS recevable et bien fondée en ses demandes, et y faisant droit, Débouter la société MYBEE de l'ensemble de ses demandes comme étant irrecevables et à tout le moins mal fondées, Condamner la société MYBEE à payer à la société BNP PARIBAS la somme de 15.000 au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Condamner la société MYBEE en tous dépens dont distraction au profit de Maître Marianne GABRIEL conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. En réplique, la société BNP PARIBAS soutient que les intitulés visés par la demanderesse sont très larges et ne permettent pas par conséquent de déterminer quels sont les services précisément couverts ; qu'ils ne peuvent dès lors être valablement opposés à la défenderesse ; qu'en tout état de cause, ces services ne sont pas similaires à ceux visés par la marque litigieuse car tout service/intitulé qui a trait aux affaires immobilières ou au domaine de l'assurance ne peut en aucun cas être considéré comme complémentaire/lié aux services relevant des affaires financières ou monétaires et services de financement. Elle rappelle que l'appréciation de la similitude entre les signes doit se faire entre les signes tels que déposés et non tels qu'exploités et qu'il ressort de la comparaison visuelle des différences conséquentes : la marque invoquée est une marque semi-figurative en couleurs et avec une représentation graphique particulière alors que la marque seconde MYB'S est une marque verbale sans aucun autre élément la composant; que les marques en cause sont aussi différentes d'un point de vue structurel, mais aussi phonétique ; que la marque de la défenderesse doit se prononcer comme [MIBZ] tandis que la prononciation de la marque de la demanderesse est [MAÏ] [BI] [SIS] [TÈ] [ME]. Elle fait valoir que le sondage réalisé par la demanderesse ne permet en rien d'infléchir ces conclusions, et n'a par ailleurs aucune valeur probante car il manque un certain nombre de précisions (date, composition du panel interrogé, modalités de réalisation, etc) et surtout a été réalisé par une entreprise liée à la demanderesse. Elle précise que d'un point de vue conceptuel, la marque de la demanderesse reprend deux termes anglais et se traduit comme «mon abeille» tandis que la marque de la défenderesse n'a aucune signification directe, que les deux marques ne s'adressent pas au même Page 5

public, la société MYBEE visant les professionnels alors que la défenderesse touche un public de particuliers avec sa carte MYB'S et qu'aucun risque de confusion ne peut être retenu. Elle a contesté le préjudice tel qu'évalué par la société demanderesse. La clôture a été prononcée le 13 janvier 2015. MOTIFS sur la contrefaçon de la marque MYBEE SYSTÈMES L'article L.713-3 du même code dispose que "sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public : a) la reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l'enregistrement". b)l'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement. Le risque de confusion doit faire l'objet d'une appréciation abstraite par référence au dépôt d'une part en considération d'un public pertinent correspondant au consommateur des produits et services concernés normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, et d'autre part par comparaison entre le signe litigieux utilisé et la marque protégée par référence à son enregistrement indépendamment de ses conditions d'exploitation mais également par comparaison des services et produits visés dans l'enregistrement et des produits et services commercialisés sous le signe litigieux. Le risque de confusion est en outre analysé globalement : tous les facteurs pertinents, dont la notoriété de la marque et l'importance de sa distinctivité, doivent être pris en considération, l'appréciation globale de la similitude de la marque et du signe litigieux devant être fondée sur l'impression d'ensemble qu'ils produisent au regard de leurs éléments distinctifs et dominants. Sur la comparaison des signes En l'espèce, la marque première est une marque semi figurative en couleurs constituée d'un élément verbal MYBEE SYSTÈMES, composé selon une structure particulière le terme MY écrit en gris sur une ligne, le terme BEE écrit en jaune sur une ligne inférieure, la barre du "b" s'appuyant sur la jambe du "y", le troisième terme SYSTÈMES écrit en gris et en majuscules sous le signe MYBEE. Le troisième terme est précédé de deux carrés l'un jaune et l'autre gris. La marque seconde est une marque verbale française «MYB'S». D'un point de vue visuel, les deux marques présentent un même terme d'attaque constitué des trois mêmes premières lettres m, y et b. Cependant, ce terme est l'essentiel de la marque seconde qui n'a d'autre élément la constituant qu'une apostrophe et un s quand la marque première est constituée elle de deux "e" et d'un autre mot SYSTÈMES. Page 6

La structure et la couleur de la marque première rendent également les deux signes très différents visuellement. Intellectuellement le consommateur français comme tout consommateur essaiera automatiquement de comprendre le sens des mots qu'il lit et les raccrochera aux mots anglais my et bee signifiant "mon abeille" ; le terme SYSTÈMES lui est immédiatement intelligible car il fait référence au fait que c'est une solution qui est offerte. Lisant la marque seconde, il n'en comprendra pas immédiatement le sens et essaiera plusieurs prononciations pour tenter d'en comprendre le sens. Cette locution peut être lue à la française mibz ou à l'anglaise maïbz sans qu'aucun sens ne se dégage de cette construction linguistique. Phonétiquement, la première marque fait référence à des termes anglais et se lira maï bi sis tè me alors que la seconde marque se lit soit mibz soit maïbz. En conséquence, il existe un très faible degré de similarité entre les deux signes. sur la comparaison des services. La marque première a été déposée pour les services suivants de la classe 36 : «affaires financières ; affaires monétaires ; services de financement». La marque seconde pour les services suivants de la classe 36 : «Assurances ; affaires financières ; affaires monétaires ; affaires immobilières ; affaires bancaires ; services de financement, agences de recouvrement de créances, crédit, consultation en matière immobilière, gérance de biens immobiliers, location d'appartements, consultation en matière d'assurances, courtage en assurances, cautions (garanties), épargne, placement de fonds, actuariat, affacturage, cote en bourse, courtage en bourse, caisses de prévoyance, services de cartes de crédit, services de cartes de débit, opérations de change, vérification des chèques, émission de chèques bancaires, dépôt en coffre-fort, émission de bons de valeur, émission de cartes de fidélité (service financier), estimations fiscales, services fiduciaires, transfert électronique de fonds, gérance de fortunes, parrainage financier, transactions financières, banque directe (home-banking), assurance habitation, assurance loyers impayés ; services d'informations, de conseils et d'assistance bancaires, financiers, monétaires ou immobiliers ; services bancaires, financiers, monétaires, immobiliers ou d'assurances en ligne sur des réseaux de télécommunication (y compris téléphones mobiles), des réseaux télématiques et des réseaux de communications informatiques». Le fait que la société MYBEE ait déposé sa marque en classes 36 pour des services larges ne rend pas ces services inopposables à la société défenderesse mais impose lors de la comparaison de se rapprocher des services tels qu'exploités sauf à conférer du fait d'un dépôt trop large un monopole sur des titres de services et non des services pour lesquels le titulaire a entendu protéger son signe. Page 7

Contrairement à ce que prétend la société MYBEE, elle ne propose pas un système de paiement sécurisé aux étudiants mais une solution qui permet lors de soirées organisées de contrôler les entrées grâce à une box d'identification qui peut également avoir pour fonction de permettre un paiement sécurisé lors des soirées si on a pris soin de charger la carte préalablement ; ce système est connu et existe également pour l'accès aux cantines des entreprises. Il ne s'agit donc pas d'affaires monétaires ou bancaires ou de financement qui pour être développées en France nécessitent une accréditation du ministère des Finances. Il ne s'agit pas davantage d'assurances qui sont tout aussi contrôlées. La première comparaison effectuée par la société MYBEE porte uniquement sur les titres des services «affaires financières ; affaires monétaires; services de financement» qui dans son cas ne sont pas développés et qui s'agissant du dépôt de marque de la société BNP PARIBAS le sont. Cette comparaison est insuffisante à établir une similarité des services à partir des seuls titres et la société MYBEE ne peut se contenter d'affirmer que "les affaires bancaires et autres services visés par la marque MYB'S" sont compris dans les services visés par sa propre marque. Faute d'avoir explicité dans son dépôt les services bancaires qu'elle entend développer, elle ne peut tirer une conséquence de similarité avec les affaires bancaires visées à son dépôt. Elle ne peut davantage prétendre que les "Assurances ; consultation en matière d'assurances, courtage en assurances, caisses de prévoyance, assurance habitation, assurance loyers impayés" visés au dépôt de la marque verbale française «MYB'S» n 3949163 renvoient aux services généraux qu'elle a visés "affaires financières ; affaires monétaires; services de financement" et en sont complémentaires en indiquant que les sociétés proposant des services liés aux «affaires financières, affaires monétaires et des services de financement» proposent également régulièrement des services d'assurance et qu'il est courant que les sociétés d'assurance exercent des activités liées aux «affaires financières, affaires monétaires et aux services de financement". Sauf à prétendre que tous les services de la classe 36 sont par nature et du seul fait qu'ils sont inclus dans la même classe sont complémentaires ou similaires, il convient de rappeler que les services d'affaires financières, d'affaires monétaires et de financement s'entendent de services relatifs aux ressources pécuniaires, à l'argent et notamment aux financements, lesquels ne présentent pas les mêmes nature, objet et destination que les services d'assurance, en particuliers les services d'assurance habitation ou loyers impayés, que ces services ne sont pas davantage en étroite relation dès lors que les premiers n'ont pas pour objet les seconds, lesquels sont rendus indépendamment des premiers, et qu'ils ne sont donc pas complémentaires, ni dès lors similaires, étant précisé qu'il ne suffit pas qu'un opérateur puisse rendre divers services pour qu'ils deviennent similaires. Page 8

Et encore pour les mêmes raisons et contrairement à ce que soutient la société MYBEE, les affaires financières ; affaires monétaires ; services de financement visés au dépôt de sa marque semi-figurative «MYBEE SYSTÈMES» ne comprennent pas les services d'informations, de conseils et d'assistance immobiliers, les services immobiliers visés au dépôt de la marque «MYB'S», ils ne sont ni identiques ni similaires ni complémentaires car il ne suffit pas que des sociétés qui proposent des services liés aux affaires financières, affaires monétaires et des services de financement proposent également régulièrement des services immobiliers. Les affaires immobilières consistent à fournir une assistance lors de l'achat, la vente ou encore la location de biens immobiliers.» ce qui se distinguent clairement des «affaires financières ; affaires monétaires ; services de financement» ; ils ont une nature, une fonction ainsi qu'une méthode d'usage différentes et ne coïncident pas davantage en ce qui concerne leur origine commerciale, les consommateurs finaux et les canaux de distribution ; enfin, le simple fait que les affaires immobilières puissent faire l'objet de financements et d'investissements n'est pas suffisant pour considérer ces services similaires à ceux des affaires financières. Il n'existe donc aucune similarité entre les services visés au dépôt de la marque figurative et en couleurs française «MYBEE SYSTÈMES» et ceux visés au dépôt de la marque verbale française «MYB'S» n 3949163. Le consommateur Le consommateur des services bancaires est un consommateur moyen ne prêtant pas une attention particulière au signe. Cependant, pour apprécier le risque de confusion dans l'esprit du public et compte tenu du fait que les services visés à l'enregistrement de la marque première sont extrêmement larges et ne couvrent pas précisément le service pour lequel le signe a été déposé, il sera tenu compte du fait que le dépôt de marque est destiné à couvrir un système proposé à des organisateurs d'événements et donc à un consommateur constitué de professionnels beaucoup plus vigilants quant à l'origine des produits et services. Au vu de la faible similarité des signes et de l'absence de similarité des services visés au dépôt, il n'existe aucun risque de confusion d'autant que le consommateur de la marque première est un consommateur avisé et qui sollicitera éventuellement la reproduction de sa propre marque sur le service rendu. Aucune acte de contrefaçon par imitation n'est donc constitué par la marque verbale française «MYB'S» n 3949163 à l'encontre de la marque figurative et en couleurs française «MYBEE SYSTÈMES» et la société MYBEE sera déboutée de l'ensemble de ses demandes en ce compris la demande de nullité de la marque seconde. Page 9

Sur les autres demandes Les conditions sont réunies pour allouer à la société BNP PARIBAS la somme de 7.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. L'exécution provisoire est compatible avec la nature de l'affaire, elle est nécessaire et sera ordonnée. PAR CES MOTIFS Le tribunal, statuant publiquement par remise au greffe le jour du délibéré, par jugement contradictoire et en premier ressort, Déclare la société MYBEE mal fondée en ses demandes de contrefaçon de sa marque figurative et en couleurs française «MYBEE SYSTÈMES» par la marque verbale française «MYB'S» n 3949163 de la société BNP PARIBAS. En conséquence La déboute de l'ensemble de ses demandes. Condamne la société MYBEE à payer à la société BNP PARIBAS la somme de 7.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Condamne la société MYBEE aux dépens dont distraction au profit de Maître Marianne GABRIEL conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision. Fait et jugé à Paris le 19 Mars 2015 Le Greffier Le Président Page 10