Dynamique des populations de la processionnaire du pin : Approche historique et évolution Bernard Boutte, Département Santé des Forêts Les populations de chenille processionnaire du pin font l objet d un suivi régulier dans les peuplements forestiers depuis 1981. Le principal outil de suivi est un réseau permanent de 500 placettes de 2500 m2, composée de l espèce de pin représentative de la région. Les observations hivernales portent sur le nombre de pins attaqués, le niveau de défoliations, le nombre et la taille des nids. Depuis 2007, ce suivi est complété par la notation des fortes défoliations sur les lisières à l intérieur de quadrats de 16 km * 16 km, par le suivi du front de progression de l insecte vers le nord et en altitude ainsi que l observation d anomalies éventuelles dans la biologie (cycles décalés, passage sur des essences peu habituelles..). Les observations effectuées dans le cadre de ce suivi seront présentées ainsi que les résultats des années 2010-2011 et 2011-2012
Les causes de l expansion de la processionnaire du pin: réchauffement du climat, pratiques ornementales et introductions accidentelles Jérôme Rousselet, INRA Orléans Depuis le début des années 1990, une forte expansion de la processionnaire du pin a été observée, à la fois vers le nord et en altitude. Cette phase contemporaine d expansion est primairement due à une augmentation des températures automnales et hivernales qui a rendu des territoires en marge de son aire favorables au développement et à la survie de ses larves. Les pins, présents aujourd hui sur l ensemble du territoire français, ne constituent plus un facteur limitant de l expansion vers le nord. Néanmoins, l augmentation de la disponibilité en arbres-hôtes est l autre cause majeure de l extension des problèmes phytosanitaires et sanitaires associés à cet insecte. Le fort développement des petites plantations de production et des arbres ornementaux lui a permis de coloniser des milieux non forestiers, notamment champêtres, prairiaux et urbains, et de circuler entre ces différents compartiments grâce à un maillage de milliers d arbres-hôtes disséminés dans le paysage. Enfin, les introductions accidentelles au-delà du front de colonisation, probablement liées à la transplantation d arbres avec une grande motte de terre, constituent un risque supplémentaire d expansion. La gestion de cet insecte en milieu non forestier appellera certainement une meilleure prise en compte de ses capacités de dissémination dans les pratiques ornementales.
Impacts en médecine humaine et vétérinaire des soies de chenilles processionnaires Gilbert Gault, Campus Vétérinaire de Lyon Les expositions professionnelles, animales et récréatives par les soies urticantes de chenilles processionnaires sont des phénomènes bien connus en zone rurales et forestières mais sont rarement décrites en ville. Avec la cessation des traitements chimiques systématiques dans les années 80, les larves de Lépidoptères ont montré une potentialité invasive exceptionnelle des espaces publics et privés des villes. En 1995, la ville de Lyon est confrontée à une série d accidents liés à des expositions chez des enfants et reprends une réglementation communale de lutte sous l angle de la protection de la santé publique. Depuis de nombreux incidents sont régulièrement décrits et permettent de définir les grandes caractéristiques de cette intoxication entomologique. La pathologie est une envenimation (dose dépendante) par les soies qui se complique chez les allergiques (réaction extraordinaire) aux piqûres d insectes. Les enfants, les personnes âgées et les sportifs constituent les victimes de cette atteinte cutanée. Les chiens sont les principaux animaux impactés et les autres espèces restent exceptionnelles mais nécessite la prise en compte du risque (Parc zoologique de la Tête d Or, animaux territoriaux : moutons chevaux ). Les expositions peuvent être directes ou indirectes. Si les premières permettent de noter dans les commémoratifs la présence des chenilles dans l environnement, les deuxièmes nécessitent une enquête pour débusquer ce danger «invisible» reposant sur les symptômes et les lésions cutanées. L objectif de ces études est d affiner le plan de prévention du risque chenilles processionnaires qui doit gouverner l action publique (analyses, actions préventives, actions palliatives et curatives) et en seconde intention prévenir les risques de recours juridiques contre la collectivité. L information de la population doit être au cœur du dispositif.
Enquête sur les pratiques de lutte de la processionnaire du pin mises en œuvre en zones non agricoles Anne-Sophie Brinquin, INRA Avignon Une enquête en ligne a été réalisée par l INRA et Plante & Cité en 2012 afin de mettre en évidence les différentes politiques de lutte instaurées par les 36 000 communes de France métropolitaine contre la Processionnaire du Pin et de suivre l évolution des méthodes privilégiées depuis la dernière enquête en ligne réalisée en 2009. Cette seconde enquête a permis de mettre en évidence une nette hausse de l utilisation des techniques de luttes alternatives par les communes à l instar de l emploi des produits phytosanitaires, notamment de type chimique. La lutte biologique et le piégeage des chenilles étaient deux pratiques peu utilisées avant 2009 car peu connues (innovations en cours d expérimentation). Elles semblent devenir aujourd hui des pratiques incontournables qui peuvent être facilement compatibles et combinées avec d autres moyens de lutte. La politique mise en place par le Plan Ecophyto depuis 2008 ainsi que les recherches constantes d innovations par l INRA dans la lutte contre la Processionnaire du Pin ont accompagné cette évolution. Les communes s orientent maintenant plus facilement vers des pratiques plus écologiques, même si elles restent généralement considérées comme moins efficaces que les traitements chimiques ou microbiologiques. Les mentalités évoluent vers une tolérance des populations de Processionnaires du Pin sur le territoire avec un contrôle réfléchi et ajusté des risques sanitaires. Malgré cette évolution, les besoins des communes sont encore importants, particulièrement concernant le financement des pratiques de lutte. Les communes expriment aussi nettement un besoin d information sur les techniques existantes et de formation pour leur mise en place. Enfin, dans le but d optimiser l efficacité du contrôle des populations de Processionnaires du Pin sur le territoire national, il faudrait développer une homogénéisation de la lutte concertée entre communes voisines infestées.
Techniques de contrôle de la processionnaire du pin : Avantage, limites et perspectives Jean-Claude Martin, INRA Avignon Depuis quelques années, à l Unité expérimentale Entomologie et Forêt Méditerranéenne (UEFM) du centre de recherche INRA-PACA, des expérimentations sont conduites afin de développer des solutions nouvelles, en alternative ou en complémentarité des traitements BtK pour réguler écologiquement la processionnaire du pin. Plusieurs techniques alternatives au traitement phytosanitaire ont été expérimentées avec l utilisation de la phéromone sexuelle de synthèse ou en favorisant l action des prédateurs comme la mésange (Parus sp.). Des tests comparatifs de piégeage grande capacité et de diffuseurs de phéromone ont permis d optimiser le piégeage de masse des adultes mâles comme méthode de lutte avec des réductions significatives des populations (testés par 22 collectivités partenaires dans le cadre du projet Alterpro*). Un nouveau piège à phéromone développé avec la firme Protecta et commercialisé depuis 2011, a des performances significativement améliorées par rapport aux modèles existants. Une technique innovante, développée par la firme la Mésange Verte est le piège à chenilles, l Ecopiège. Ce piège répond à une forte demande au niveau des arbres de jardins ou d espaces urbains. Un itinéraire technique des stratégies combinées de régulation sera proposé en fonction du niveau de risque pour la santé des arbres et pour la santé publique afin d aider le gestionnaire dans ces décisions. D autres pistes d études comme la confusion sexuelle ou la lutte biologique avec les parasitoïdes oophages seront brièvement présentées. *Alterpro : Projet initié par Plante & Cité et l INRA, soutenu par l ONEMA dans le cadre du plan Ecophyto avec les Ministères chargés du Développement durable et de l Agriculture.