Siréas asbl Service International de Recherche, d Education et d Action Sociale Année : 2004 DOCUMENT n 10 Analyses et études La régularisation de séjour d un couple homosexuel à la lumière de l article 8 de la convention de sauvegarde et de la circulaire du 30 septembre 1977 de l office des étrangers Rue de la croix,22 1050 Bruxelles Téléphone :02 /649 99 58 Fax 02/ 646 43 24 e-mail : sireas@brutele.be - site : www.sireas-be.org
La régularisation de séjour d un couple homosexuel à la lumière de l article 8 de la convention de sauvegarde et de la circulaire du 30 septembre 1977 de l office des étrangers
Monsieur Tournesol TULIPE, né le 15 mai 1953 à Tchernovididze (Darfour), de nationalité amalfitaine, résidant chez M. Willy Van den Papeliere, à Westende, 73, Nn amalfitain : BH. 167569, n passeport K578952119 (Assisté pour la rédaction de la présente demande par le Sireas, 22 rue de la Croix, à 1050 Bruxelles) 1). Exposé des faits Le requérant est arrivé en Belgique le 11 janvier 1998 muni de son passeport revêtu d'un visa Schengen C. Il a rencontré M. Willy Van den Papeliere, de nationalité belge, le 1 er juin 1998 à l'occasion d'une soirée. Le requérant et son compagnon se sont installés ensemble trois mois après. Ils cohabitent depuis près de 6 ans et entretiennent une relation durable. Des raisons familiales et un changement de statut par trop voyant pour un homosexuel non encore déclaré empêchent les compagnons de se marier. Le requérant s'est depuis toutes ces années totalement intégré dans la société belge. Il suit des cours de néerlandais, il participe à des évènements et fait office de taxi dans les soirées amalfitaines. Le requérant fait état de nombreux témoignages d'amis et de connaissances en sa faveur. Son compagnon est employé dans un cinéma. Le requérant souhaite la concrétisation de cette intégration. Il souhaite obtenir un droit de séjour sur base de la circulaire du 30 septembre 1997 relative à la vie commune dans le cadre d'une relation durable.
2 Au fond Le requérant vit une relation stable et durable avec Monsieur Willy Van den Papeliere depuis près de six ans et demi, relation que le couple n'a pas réussi à officialiser en 1999 tandis qu'à l'époque l'officialisation de ce séjour n'était accessible qu'aux couples strictement européens. Il souhaite voir son séjour régularisé sur base de la circulaire sur la cohabitation dans le cadre d'une relation durable, et l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme. Critères tirés de la circulaire du 30 septembre 1997 1. Son compagnon est belge; 2. Les deux partenaires ne sont pas mariés; 3. Les deux partenaires ont plus de dix-huit ans; 4. Le caractère durable de leur relation est prouvé par des témoignages dignes de foi, des photographies, etc. 5. Les compagnons cohabitent ensemble et utilisent la même adresse vis-à-vis de l'extérieur. Ils entament par la présente la procédure en vue de leur inscription commune à Westende; 6. Les compagnons forment un ménage commun attesté notamment- par les pièces et témoignages joints; 7. Les compagnons s'engagent à contracter vie commune devant notaire; 8. Le partenaire belge dispose personnellement et durablement de moyens de subsistance suffisants, à savoir 1847,24 euros nets par mois, soit environ FB; 9. Le partenaire belge dispose d'un contrat à durée indéterminée; 10. Le partenaire belge a signé un engagement de prise en charge dont copie jointe à la présente; 11. Le requérant ne constitue pas un danger pour l'ordre public et produit à cet égard un certificat de bonne vie et mœurs; Il joint à l'appui de sa demande une série de documents qui établissent qu'il entre parfaitement dans le champ d'application de la circulaire du 30-09-1997: 1) Copie de la carte d'identité du partenaire belge; 2) Certificat de célibat du partenaire belge; 3) Certificat de célibat du requérant; 4) Copie de son ancien passeport; 5) Copie de l'ancienne carte d'identité du requérant 6) L'acte de naissance du requérant légalisé par le consulat du Darfour et le Ministère des Affaires étrangères; 7) Le certificat de nationalité du requérant légalisé par le Consulat du Darfour et le Ministère des Affaires étrangères
8) Le certificat de bonne vie et mœurs légalisé par le Consulat du Darfour et le Ministère des Affaires étrangères; 9) L'engagement de prise en charge souscrit par le partenaire belge; 10) Les preuves des moyens de subsistance suffisants du partenaire belge : copie des dernières fiches de salaire; copie du contrat de travail; copie du dernier avertissement extrait de rôle; 11) Les preuves du caractère durable de la relation : photos, pièces et témoignages dont liste jointe. Critères tirés de l'article 8 de la CESDH L article 8 de la Convention européenne des Droits de l'homme prévoit que «Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d une autorité publique dans l exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l ordre et des infractions pénales,, à la protection de la santé et ou de la morale, ou à la protection des droits et liberté d autrui». La Commission européenne des droits de l Homme englobe dans le droit au respect de la vie privée le droit d entretenir des relations avec autrui, dans le domaine émotif, afin de développer sa propre personnalité (J. VELU, Convention européenne des droits de l Homme, RPDB, Complément, T.VII, Bruxelles, Bruylant, 1990, p.338) L article 8 ne se contente pas d astreindre l Etat à une obligation de non ingérence, à cela s ajoutent des obligations positives inhérentes à un respect effectif de la vie privée. La Cour de Strasbourg a affirmé dans l arrêt REES du 17 octobre (Série A, n 106, p.15, par.37) que pour déterminer l étendue des obligations positives qui pèsent à charge de l Etat, il fallait avoir égard entre un juste équilibre entre l intérêt général et les intérêts de l individu et que les critères formulés à l article 8, par 2 offraient, sur ce point, des indications fort utiles Une ingérence n est justifiée que pour autant non seulement qu elle poursuive un des buts autorisés par la Convention mais aussi qu elle «soit nécessaire dans une société démocratique», c est à dire qu elle ne limite les droits individuels que parce que cette limitation est «proportionnée» à l objectif poursuivi, c est à dire qu elle réalise un équilibre entre le but poursuivi et les inconvénients liés à la restriction de la liberté («La mise en œuvre de la Convention européenne des droits de l Homme», Ed. du jeune Barreau de Bruxelles, 1994, p.92) Au regard des critères de l article 8 al.2, la situation de M. Tulipe ne semble pas justifier une décision de rejet accompagnée d un ordre de quitter le territoire.
Une mesure d éloignement à son égard ne constitue pas «une nécessité pour la sécurité nationale, la sûreté publique, le bien-être économique du pays, la défense de l ordre et la prévention des infractions pénales, la protection de la santé ou de la morale, ou la protection des droits et des libertés d autrui» (article 8) Le requérant souhaite tout simplement vivre une vie normale auprès de son compagnon. La régularisation de son séjour lui permettrait de ne plus vivre à charge de celui-ci et de pouvoir lui aussi assurer les besoins du ménage en travaillant. Circonstances exceptionnelles Le requérant justifie de circonstances qui rendent son retour au Darfour en vue d'y lever l'autorisation de séjour requise particulièrement difficile. 1. Risque de poursuites pénales Ainsi que le rappellent l'association "AMLFIT GAY FRIENDLY" et Amnesty international, l'homosexualité constitue, en septembre 2004, un crime visé par l'article 489 du code pénal amalfitain du 26 novembre 1982 qui prévoit une peine de six mois à trois ans d'emprisonnement et une amende de 120 à 1000 zlotys pour " actes dénaturés avec un individu du même sexe". Or le requérant aurait, au pays, à justifier devant des fonctionnaires -essentiellement amalfitains de l'ambassade de Belgique et devant les autorités amalfitaines à qui différents documents devraient immanquablement être sollicités, des raisons exactes de sa demande d'autorisation de séjour. Il s'en suit que le requérant courre un risque, dont il ne faut pas négliger la portée, de poursuites et de sanctions pénales, fussent elles d'amendes. La probabilité de ces sanctions paraît d'autant plus importante que le gouvernement amalfitain attache une grande importance à la "qualité" de son émigration et supporte difficilement que son image puisse être atteinte à l'étranger par le fait de personnes qui ne correspondraient pas à l'image que le Darfour souhaite donner de lui-même. Récemment, en juin 2004, un éditorialiste d'un journal amalfitain, M. Zibniew Paresty, a ainsi été condamné à une peine de six mois de prison pour avoir annoncé publiquement le coming out d'une personnalité politique 1. 1 www.amalfit.org
Ce risque de répression, dont le motif est naturellement condamné par la Convention européenne des droits de l'homme et notamment son article 3 ( "traitement dégradant"), constitue un motif sérieux qui rend particulièrement difficile à un homosexuel amalfitain de retourner dans son pays d'origine lever l'autorisation requise. 2. Atteinte au droit au respect de la vie privée du requérant En outre, il est vraisemblable que les autorités amalfitaines, à l'instar des fonctionnaires amalfitains de l'ambassade, freineront des quatre fers elles seraient légalement en droit de le faire la délivrance des documents requis. Le requérant, qui vit depuis longtemps avec son compagnon, justifie de circonstances protégées par l'article 8 de la CESDH qui lui permettent d'écarter, en droit, la possibilité d'une séparation contrainte de plusieurs mois. En outre, cette séparation contrainte n'aura rien d'une villégiature mais imposera au requérant des démarches fastidieuses et des questions insidieuses qui mettront à mal son droit respect de sa vie privée. Cette vie privée sera dès lors immanquablement soumise à la rumeur et le requérant devra certainement, durant les longs mois où il sera forcé de vivre dans son pays d'origine en ayant obligatoirement déclaré aux autorités son homosexualité, subir l'ostracisme et le rejet. Ce rejet risque enfin d'être perçu par la famille du requérant, absolument ignorante de son orientation sexuelle. A celle-ci, ce dernier devra expliquer les motifs de son court séjour et les motifs qui justifient sa volonté de retour en Belgique. S'il ne le fait pas, et par l'une ou l'autre probable indiscrétion, cette famille sera mise au courant de la vie privée du requérant, à son corps défendant. Dans un cas comme dans l'autre, ce coming out forcé et imposé par des justifications étrangères au libre arbitre du requérant constitueront immanquablement une atteinte à son droit au respect de sa vie privée. La conséquence de ce coming out sera immanquablement le rejet de son milieu familial et le renoncement à pouvoir entretenir plus avant des relations avec sa mère ainsi que ses frères et sœurs. "Si le garçon est homosexuel, passif donc, il est tout de suite amené chez un charlatan, un sorcier, une voyante ou dans la société citadine, chez un psychologue. Il est malade et il faut absolument le guérir.
S'il ne veut pas guérir, donc il est hanté, il faut le rejeter avant que le mal s'empare de toute la famille. Le pauvre homosexuel va se trouver contraint de quitter une famille qui l'a peut être longtemps chéri" 2. 3. Risque d'une interdiction de sortie du territoire Enfin, les motifs pénaux précités, et le fait que le requérant a quitté son pays d'origine depuis plus de cinq ans, pourraient entraîner que les autorités amalfitaines refusent qu'il sorte du territoire national, entraînant dans son chef un préjudice grave et difficilement réparable. Dans cette hypothèse, le partenaire belge du requérant subira un préjudice par répercussion qui consistera en la rupture durable de sa relation affective. Dans les autres hypothèses, le partenaire subira également le préjudice de l'éloignement forcé de son compagnon. Nous ne tenons bien entendu à votre disposition si vous désirez obtenir des renseignements ou documents complémentaires. En vous remerciant d avance de votre diligence, Veuillez agréer, Monsieur le Bourgmestre, Monsieur le Ministre, Madame, Monsieur, à l assurance de notre haute considération. Le 22 mars 2005 Tournesol Tulipe XY, Juriste 2 www.darfourru.net/modules/newbb/sujet-15067-1-homosexualite- Darfour