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[TRADUCTION] Citation : D. S. c. Ministre de l Emploi et du Développement social, 2014 TSSDA 260 N o d appel : AD-13-13 ENTRE : D. S. Demandeur et Ministre de l Emploi et du Développement social (anciennement ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences) Intimé DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE Division d appel Décision relative à une demande de permission d en appeler MEMBRE DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE : Janet LEW DATE DE LA DÉCISION : Le 24 septembre 2014

DÉCISION [1] Le membre de la division d appel du Tribunal de la sécurité sociale («le Tribunal») accorde la permission d en appeler. CONTEXTE [2] Le demandeur demande la permission d interjeter appel de la décision du tribunal de révision qui a été rendue le 1 er avril 2013. Le tribunal de révision avait déterminé qu'une pension d'invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) ne devait pas être payée au demandeur, ayant jugé que son invalidité n'était pas «grave» au moment où sa période minimale d'admissibilité (PMA) avait pris fin, soit le 31 décembre 2009. Le demandeur a présenté une demande de permission d'en appeler («la demande») au Tribunal de la sécurité sociale («le Tribunal») le 28 juin 2013, soit à l'intérieur du délai prévu aux termes de la Loi sur le ministère de l'emploi et du Développement social («la Loi»). QUESTION EN LITIGE [3] L'appel a-t-il une chance raisonnable de succès? DROIT APPLICABLE [4] Conformément aux paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi, «il ne peut être interjeté d'appel à la division d'appel sans permission» et la division d'appel «accorde ou refuse cette permission». [5] Le paragraphe 58(2) de la Loi prévoit que «la division d'appel rejette la demande de permission d'en appeler si elle est convaincue que l'appel n'a aucune chance raisonnable de succès». OBSERVATIONS DU DEMANDEUR [6] Le demandeur fait valoir que le tribunal de révision a commis de nombreuses erreurs de droit et dans ses conclusions de fait et a également commis plusieurs manquements à la justice naturelle, que voici :

1. Le demandeur affirme que le tribunal de révision n'a pas observé un principe de justice naturelle, a outrepassé sa compétence ou a refusé de l'exercer : a. Le tribunal de révision n a pas donné au demandeur la possibilité de faire pleinement valoir sa cause et n a pas permis à sa représentante, qui est son ex-femme, de lui faire subir un interrogatoire principal ni de soumettre des observations. b. Le tribunal de révision avait des «dossiers beaucoup plus épais» que ceux du demandeur et de sa représentante. c. Au début de l audience, le tribunal de révision a présenté un aperçu sommaire de la demande d une autre personne en présentant un ensemble complètement différent de problèmes médicaux du demandeur. d. À un stade avancé de l audience, le tribunal de révision a fourni au demandeur les «commentaires supplémentaires» de l intimé liés à l un des rapports médicaux, mais ne lui a pas donné la possibilité de les examiner, ni d y répondre. e. La représentante de l intimé a fait des commentaires gratuits à la suite de l audience selon lesquels elle s attendait à ce que la demande soit accueillie. 2. Le demandeur a allégué que le tribunal de révision a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance : a. Le tribunal de révision n a pas pris en compte comme il se devait la preuve médicale concernant les limites des capacités du demandeur et, en particulier, les déclarations du D r Sharobim, selon lesquelles le demandeur a des limites concernant la position assise ou debout pendant une période prolongée et le fait de marcher sur de longues distances; ces limites peuvent l empêcher de conserver un emploi, même sédentaire. b. Le tribunal de révision a commis une erreur en concluant que la preuve médicale objective était «peu volumineuse». Le demandeur allègue qu une radiographie et une tomodensitométrie de la colonne lombaire ont été

fournies et révèlent des changements dégénératifs de la colonne du demandeur. c. Le tribunal de révision a commis une erreur dans sa conclusion concernant l imagerie de la colonne du demandeur, au paragraphe 38 de sa décision. d. Le tribunal de révision a commis une erreur en concluant que le demandeur n avait pas suivi diverses recommandations liées à des traitements étant donné que la preuve montre qu il avait de la difficulté à trouver un médecin et qu il n était pas en mesure de payer les services de physiothérapie. Le demandeur allègue que s il avait été au courant que cela constituait un enjeu, il aurait témoigné au sujet de ses difficultés à avoir accès à un programme de traitement de la douleur chronique. e. Le tribunal de révision a commis une erreur en concluant que le demandeur ne s était pas informé pour savoir si le ministère de la Santé de l Ontario offrait de l aide pour rembourser le coût des services de physiothérapie puisqu aucun témoignage n a été livré sur ce point. 3. Le demandeur fait valoir aussi que le tribunal de révision a rendu une décision entachée d'une erreur de droit, que l'erreur apparaisse ou non à la lecture du dossier : a. Le tribunal de révision a commis une erreur en n appliquant pas l arrêt Villani c. Canada (Procureur général) [2001] F.C.J. n o 1217, 2001 CAF 248, en estimant que le demandeur était en mesure de faire un certain travail, sans établir de quel type de travail il s agissait. b. Le tribunal de révision a commis une erreur en n appliquant pas l arrêt Villani parce qu il n a pas utilisé le critère du «contexte réaliste» en n examinant pas les limites relatives à l éducation du demandeur et qu il n a pas procédé à une «évaluation holistique». c. Le tribunal de révision a commis une erreur puisqu il n a pas [traduction] «accordé beaucoup de poids au témoignage oral non contredit du

demandeur relativement à l incidence de sa condition médicale sur sa capacité de détenir une occupation véritablement rémunératrice». d. Le tribunal de révision a commis une erreur en concluant qu il n y avait pas suffisamment d éléments de preuve pour démontrer que la condition du demandeur était grave au moment de la fin de sa PMA. OBERVATIONS DE L INTIMÉ [7] L'intimé n'a pas présenté d'observations écrites. ANALYSE [8] Bien que la demande de permission d'en appeler soit un premier obstacle que le demandeur doit franchir et un obstacle inférieur à celui auquel il devra faire face à l'audition de l'appel sur le fond il reste que la demande doit soulever un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l'appel : Kerth c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), [1999] A.C.F. n o 1252 (CF). [9] Dans l affaire Canada (Ministre du Développement des Ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41, la Cour d appel fédérale a estimé qu une cause défendable en droit revient à se demander si un demandeur a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique. [10] Au paragraphe 58(1) de la Loi, il est indiqué que les seuls motifs d'appels sont les suivants : a) La division générale n a pas observé un principe de justice naturelle, a outrepassé sa compétence ou a refusé de l exercer; b) elle a rendu une décision entachée d une erreur de droit, que l erreur ressorte ou non à la lecture du dossier; c) La division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[11] Aux fins des présentes, la décision du tribunal de révision est considérée comme une décision de la division générale. [12] Avant d'accorder la permission, je dois être convaincue que les motifs d'appel du demandeur s'inscrivent dans les moyens d'appel prévus et qu un appel en vertu de l'un ou l'autre de ces motifs a une chance raisonnable de succès. a. Manquement à la justice naturelle [13] Le demandeur fait valoir que le tribunal de révision a commis un certain nombre de manquements à la justice naturelle. Je les aborderai tous un à la fois. [14] L un de ces manquements est le fait que le tribunal de révision «avait des dossiers beaucoup plus épais». Même si cela avait été le cas, le demandeur aurait dû soulever une objection au cours de l audience afin de déterminer s il y avait eu une divulgation et une production complètes. Cela aurait été le moment le plus opportun pour soulever l objection, puisqu ensuite on aurait pu vérifier le contenu des dossiers de l appelant par rapport à ceux du tribunal de révision. Peut-être que le tribunal de révision n avait pas de documents supplémentaires et avait simplement des copies des mêmes documents ou des copies de la jurisprudence, de la correspondance ou même de dossiers pour d autres audiences auxquelles il avait participées ce jour-là. Dans tous les cas, la plupart des documents comme les dossiers médicaux et liés à l emploi auraient été produits par le demandeur. Habituellement, la documentation de l intimé est limitée; elle compte notamment des commentaires et un historique de la rémunération. [15] Dans la pratique, les copies des documents des parties sont généralement distribuées par le Bureau du commissaire des tribunaux de révision dès que possible, avant l audience. Dans ce cas, l intimé avait des [traduction] «commentaires supplémentaires» relativement courts. Le tribunal de révision a distribué une copie des [traduction] «commentaires supplémentaires» à l audience. Le demandeur ne suggère pas que le tribunal de révision a fait référence dans sa décision à des documents qu il ne possédait pas. Je n estime pas que l appel a en l espèce une chance raisonnable de succès du fait que le tribunal de révision semblait avoir un dossier beaucoup plus épais que le demandeur.

[16] Bien que la représentante du demandeur s attendait à ce que le tribunal de révision accueille l appel, cela ne signifie d aucune façon que le tribunal de révision eût commis une erreur. [17] Le tribunal de révision n a pas donné au demandeur la possibilité d examiner les «commentaires supplémentaires» de l intimé ni d y répondre. Les «commentaires supplémentaires» ont été obtenus en réponse au rapport de consultation relativement bref du D r Jack Hakoun, daté du 11 février 2013. L auteur des «commentaires supplémentaires» a résumé l information que l intimé avait reçue du demandeur et a formulé d autres commentaires. Les «commentaires supplémentaires» sont reproduits intégralement dans ce qui suit : [Traduction] Bien qu il soit reconnu que [le demandeur] a des limites en raison de sa douleur au dos, l information fournie n appuie pas l affirmation selon laquelle il a une incapacité l empêchant d exécuter tout travail. Même s il souffre de douleur au dos qui irradie dans la jambe et que les médicaments ne lui donnent que peu de soulagement, [le demandeur] a reçu récemment une première injection d une série de trois, lui ayant procuré un certain soulagement. On s attendrait à ce qu en poursuivant le traitement, il soit davantage soulagé. Même si le demandeur a dit qu il n a pas pu suivre de programme de réadaptation en raison de contraintes financières, si la condition [du demandeur] était grave, on s attendrait à ce qu il soit référé à un programme de traitement de la douleur chronique. Ainsi, l opinion de RHDCC demeure la même, et nous demandons respectueusement que son appel soit rejeté. [18] Étant donné que les «commentaires supplémentaires» étaient relativement brefs, je ne crois pas qu une période appréciable aurait dû être consacrée à leur examen. En d autres mots, je ne crois pas qu une courte pause ou un ajournement des procédures était nécessaire étant donné la brièveté des commentaires supplémentaires. Le demandeur n indique pas non plus en quoi sa réponse aurait pu être différente s il avait eu le temps d examiner les «commentaires supplémentaires». Je ne crois pas que l appel a une chance raisonnable de succès pour ce motif. J aurais pu tirer une autre conclusion s il y avait eu une suggestion selon laquelle le demandeur voulait demander un ajournement des procédures pour préparer une réponse ou obtenir un autre avis d expert et s il était raisonnable de le faire.

[19] Le demandeur allègue qu en fournissant un aperçu préliminaire, le tribunal de révision a apparemment ciblé une autre partie ayant un ensemble différent de problèmes médicaux. Cela soulève la question visant à déterminer si le tribunal de révision était confus au sujet de l identité du demandeur et de la documentation médicale. Toutefois, le demandeur n a pas fait d allégation ferme à ce sujet, et un examen de la décision du tribunal de révision n indique pas qu il était vraiment confus sur l identité de l une des parties en cause. Je ne crois pas que l appel a une chance raisonnable de succès pour ce motif. [20] Le demandeur fait valoir que le tribunal de révision ne lui a pas donné la possibilité de faire valoir pleinement sa cause et, en particulier, n a pas permis à son ex-femme, représentante non juriste, de l interroger ni de soumettre des observations. [21] Le fait de ne pas avoir la possibilité de faire valoir pleinement sa cause n entraîne pas toujours une audience inéquitable. Il n y a pas de droit rattaché à une période définie pour témoigner ou soumettre des observations. Cela aurait eu une certaine utilité si le demandeur avait présenté les observations, lesquelles n étaient pas déjà devant le tribunal de révision, que sa représentante avait l intention de soumettre. [22] Le tribunal de révision aurait pu mener son propre interrogatoire du demandeur, à la place de sa représentante, puis conclure en invitant la représentante du demandeur à procéder à un contre-interrogatoire concernant toute question n ayant pas été abordée. Le cas échéant, cela ne constituerait pas un manquement à la justice naturelle. Le tribunal de révision (ou, en l espèce, la division générale) n est tenu de suivre aucune règle pour déterminer comment il doit mener l instance, en autant qu au bout du compte le demandeur puisse avoir une audience équitable. Le tribunal de révision aurait pu indiquer qu il n avait pas besoin d en entendre plus du demandeur ni de sa représentante, s il n avait aucune autre question ni observation déjà abordée dans la documentation ou dans le témoignage du demandeur. Cependant, je ne dispose d aucun élément de preuve soit sous la forme d un affidavit ou autre démontrant que le tribunal de révision a invité la représentante du demandeur à procéder à un interrogatoire ou à soumettre des observations non formulées vers la fin de l audience.

[23] Le fait de soulever la question du manquement à la justice naturelle est, en soi, insuffisant pour faire droit à l appel; autrement, cela pourrait donner lieu à une avalanche d appels. Bien qu il existe certaines lacunes dans les documents relatifs à l autorisation du demandeur (je m attendais au moins à ce que le demandeur ait déterminé quel a été l impact des procédures prétendument inéquitables sur son cas), je suis prête à accorder le droit d appel, pour le motif que le tribunal de révision n a pas permis à la représentante du demandeur de procéder à un interrogatoire, ni de soumettre des observations. En accordant le droit d appel, je ne tire pas de conclusions, ni n accepte que le tribunal de révision n a pas permis à la représentante du demandeur de défendre sa cause ni de soumettre des observations ou, si ça avait vraiment été le cas, que cela a nécessairement causé un préjudice au demandeur. En accordant le droit d appel pour ce motif, le demandeur pourrait être bien avisé de présenter des éléments de preuve concernant les intentions de sa représentante relativement au contre-interrogatoire et aux observations, en quoi ils diffèrent ou pourraient renforcer les éléments de preuve ou les observations déjà présentés au tribunal de révision et de quelle façon ils pourraient appuyer sa demande de prestations d invalidité. b. Conclusions de fait erronées [24] Le demandeur soutient que le tribunal de révision a commis de nombreuses erreurs dans ses conclusions de faits et qu'il n'a pas tenu compte des éléments portés à sa connaissance. Pour qu une demande d en appeler ait une chance raisonnable de succès, le demandeur doit au minimum établir ce qui est différent que d avoir à prouver qu une conclusion de fait erronée a été tirée, que le tribunal de révision a fondé sa décision sur cette conclusion de fait erronée et que cela a été fait sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Et, bien que le demandeur n est pas tenu de prouver l erreur du tribunal de révision dans une demande d en appeler, il doit me convaincre que le tribunal de révision a tiré la conclusion alléguée. À tout le moins, le demandeur devrait établir ce qu il considère comme la conclusion de fait erronée ainsi que les éléments que le tribunal de révision est présumé ne pas avoir examinés. [25] Certaines des observations soumises par le demandeur rattachées au motif de la «conclusion de fait erronée» ne sont pas considérées comme des conclusions de faits.

Néanmoins, je les aborderai dans le cadre de ce motif pour des raisons de commodité, puisque le demandeur les a rattachées à celui-ci. [26] Mis à part la question de savoir si le fait que le tribunal de révision eût évalué la preuve médicale objective comme étant «peu volumineuse» peut être considérée comme une conclusion de fait, je ne vois pas comment cela aurait pu d aucune façon être le fondement de la décision du tribunal de révision, et j estime que cela ne fait pas en sorte que l appel a une chance raisonnable de succès. En fait, le tribunal de révision exprimait simplement le fait que peu d éléments avaient été portés à sa connaissance afin de déterminer si le demandeur était invalide. [27] Le demandeur allègue que le tribunal de révision a commis une erreur en ne reconnaissant pas que des examens diagnostiques montraient des changements dégénératifs à sa colonne. En fait, le tribunal de révision a abordé les examens diagnostiques au paragraphe 38 de sa décision. De toute façon, des signes de changements dégénératifs sans égard à l importance de ces changements n indiquent pas la gravité de l incapacité médicale d une personne, et les conclusions seules issues de tout examen diagnostique ne constituent pas le fondement d une décision. Par conséquent, j'estime que cet argument ne fait pas en sorte que l appel a une chance raisonnable de succès. [28] Le demandeur fait valoir que le tribunal de révision a tiré des conclusions erronées concernant l imagerie de sa colonne. Il affirme que la tomodensitrométrie datée du 14 octobre 2009 révélait [traduction] «une sténose foraminale neuronale légère à modérée du côté gauche et une sténose foraminale neuronale modérée à sévère du côté droit consécutives à un bombement discal diffus à base large» et que cela pouvait certainement constituer l origine de sa douleur. Le tribunal de révision a écrit ce qui suit : [Traduction] Le Tribunal estime que le seul examen médical du dos de Monsieur D. S. a été réalisé en octobre 2009 et n indiquait que de légers changements dégénératifs; les corps vertébraux et la hauteur discale étaient relativement préservés. La tomodensitométrie de sa colonne lombaire montre un rétrécissement du foramen invertébral droit au niveau L4-5 et une ancienne fracture par tassement au niveau T12. Aucun autre examen n a été effectué depuis 2009. Ces analyses n appuient pas une conclusion liée à une invalidité grave rattachée à la PMA prenant fin en décembre 2009. (Souligné par mes soins.)

[29] La section de la conclusion de la tomodensitrométrie datée du 14 octobre 2009 se lit comme suit : [Traduction] Changements dégénératifs les plus importants au niveau L4-5 entraînant une sténose foraminale neuronale légère à modérée du côté gauche et une sténose foraminale neuronale modérée à sévère du côté droit consécutives à un bombement discal diffus à base large. Une sténose foraminale neuronale légère est présente à la gauche au niveau L3-4. Il n y a aucune sténose centrale dans la colonne lombaire. [30] Le tribunal de révision a résumé les conclusions de la tomodensitométrie. Il n était pas nécessaire de décrire en détail les conclusions de la tomodensitométrie, mais ce point pris séparément ne signifie pas que le tribunal de révision a commis une erreur. Bien que le demandeur allègue que le tribunal de révision a commis une erreur, il n a pas précisé en quoi le résumé du tribunal de révision était erroné. Si un avis d expert avait appuyé cette observation, c.-à-d. que le résumé était inexact, cela aurait pu faire en sorte que l appel ait une chance raisonnable de succès. Bien que je n aurais pas examiné le bien-fondé de l affaire, ni déterminé si j aurais même pu accepter l avis d expert en lui-même à l étape de la demande d autorisation d appel, le fait d avoir l avis d un expert aurait bien pu me convaincre que l appel a une chance raisonnable de succès par rapport à l exactitude du résumé des conclusions de la tomodensitométrie fait par le tribunal de révision. [31] Le demandeur allègue également que les conditions révélées par la tomodensitométrie sont sûrement à l origine de sa douleur irradiante. Toutefois, l étiologie de toute incapacité médicale ne constitue pas un fondement au moyen duquel le Régime de pensions du Canada évalue la gravité de l invalidité d une personne, et il n était pas nécessaire que le tribunal de révision détermine la cause de la douleur irradiante du demandeur. Tout «défaut» du tribunal de révision de déterminer la cause de la douleur du demandeur n est pas considéré comme une conclusion de fait erronée. [32] Le demandeur a ensuite allégué que le tribunal de révision avait commis une erreur en concluant qu il n avait pas suivi les traitements médicaux qu on lui avait offerts. Le demandeur fait valoir qu il a soumis en preuve au tribunal de révision qu il avait des difficultés à trouver un médecin de famille et n était pas en mesure de payer les frais de

physiothérapie. En d autres mots, il était justifié de ne pas suivre de traitement de physiothérapie ni de chercher d autres solutions médicales. [33] Le demandeur fait valoir que le tribunal de révision a commis également une erreur en concluant qu il ne s était pas informé auprès du ministère de la Santé de l Ontario pour obtenir une aide financière afin de couvrir les frais de traitement puisqu aucun témoignage n a été livré à ce sujet. [34] S il avait été au courant de certains de ces enjeux, comme sa difficulté à avoir accès à un programme de traitement de la douleur chronique, le demandeur affirme qu il les aurait abordés au cours de l audience devant le tribunal de révision. Le demandeur allègue que le tribunal de révision aurait dû l aviser qu il devait montrer qu il avait suivi toutes les recommandations raisonnables en matière de traitement. [35] Le tribunal de révision a écrit ce qui suit : [Traduction] [39] Bien que le Tribunal comprenne qu il était difficile de trouver un médecin de famille, ça aura pris trois ans après que le demandeur eut arrêté de travailler pour trouver un médecin qui accepte de le traiter. Après ses examens au dos en 2009, il a vu un physiatre, comme cela était suggéré par son médecin de famille. Il a essayé deux fois d obtenir les résultats de ses examens, mais ça n a pas marché. Il incombe au demandeur de toujours obtenir les résultats pouvant contribuer à son rétablissement. Il n a pas suivi la suggestion relative aux traitements de physiothérapie pour soulager sa douleur parce qu il a dit qu ils étaient trop coûteux. Il ne s est pas informé auprès du ministère de la Santé de l Ontario pour savoir si une aide était offerte à ce sujet. Il a aussi besoin de médicaments pour son taux de cholestérol. Le Tribunal a fait valoir que le demandeur doit assumer la responsabilité de sa santé et qu il n a pas suivi de façon optimale toutes les recommandations en matière de traitement. [...] [41] Le demandeur ne participe pas à un programme d exercice pour contribuer à soulager sa douleur au dos. Il n a pas fait de demande à ce sujet, ni n a obtenu de référence pour un programme de traitement de la douleur chronique. [36] Le tribunal de révision a estimé que le demandeur aurait dû être plus sérieux dans l obtention des résultats de sa consultation avec un physiatre et qu il aurait dû suivre des traitements de physiothérapie, même s ils étaient coûteux, puisqu une aide financière aurait peut-être été offerte par le biais du ministère de la Santé de l Ontario.

[37] Habituellement, si un tribunal de révision doit tirer une conclusion défavorable à l égard d un demandeur, il doit, à des fins d équité, aborder le sujet avec le demandeur. Toutefois, dans une demande de prestations d invalidité, il faut aborder la question de la conformité aux recommandations en matière de traitement sans obtenir de directives du tribunal de révision, puisque la conformité est l un des enjeux principaux devant être déterminés. Après tout, le fardeau de la preuve incombe au demandeur, qui doit établir le bien-fondé de sa demande et prouver que son invalidité est non seulement grave, mais qu il se conforme à toutes les recommandations en matière de traitement raisonnables. Dans l affaire Canada (Procureur général) c. St-Louis, 2011 CF 492, la Cour fédérale a examiné brièvement la jurisprudence sur cette question : [24] Dans la décision Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Mulek (1996), 1996 LNCCAP 38, appel n o CP04719, il a été établi qu une personne qui demande des prestations d invalidité est obligée de faire tous les efforts raisonnables pour entreprendre et suivre les programmes et traitements recommandés par les médecins traitants et les médecins-conseils. En l espèce, le tribunal de révision a cité cette décision à l appui de sa conclusion selon laquelle le défendeur n avait pas fait d efforts raisonnables. De fait, il a souligné que le défendeur avait refusé de subir l intervention chirurgicale pour l unique raison que son médecin ne pouvait lui garantir que cela augmenterait son niveau d énergie. Si elle se soustrait à de telles recommandations, la personne désireuse d obtenir des prestations d invalidité doit convaincre le tribunal qu elle a eu raison de le faire : Bulger c. Canada (Ministre du Développement des Ressources humaines) (2000), 2000 LNCCAP 8, appel no CP09164. [ ] [38] Le tribunal de révision a bien établi la preuve, c est-à-dire que le demandeur avait de la difficulté à trouver un médecin et ne suivait pas de traitement de physiothérapie en raison de contraintes financières. On ne peut pas dire que le tribunal de révision a tiré une conclusion erronée sur le fait que le demandeur n a pas accepté les traitements médicaux qui lui étaient offerts, étant donné que des éléments de preuve avaient été portés à sa connaissance. [39] Le demandeur fait valoir que selon la preuve, il était justifié qu il ne suive pas de traitement de physiothérapie ou qu il opte pour d autres solutions médicales, en grande partie parce qu il avait de la difficulté à trouver un médecin de famille et qu il subissait des contraintes financières. Toutefois, cela relevait tout à fait de la compétence du tribunal de

révision de conclure que le demandeur n avait pas suivi de façon constante des traitements en essayant les options qui lui étaient offertes afin de surmonter certaines de ses contraintes financières. Le tribunal de révision savait que le demandeur avait de la difficulté à trouver un médecin de famille mais a affirmé qu en dépit de cela, il n avait pas vu de physiatre, comme suggéré par son médecin traitant. [40] Le demandeur allègue que le tribunal de révision a aussi commis une erreur en concluant qu il ne s était pas informé auprès du ministère de la Santé de l Ontario pour obtenir une aide financière afin de couvrir les coûts de traitement puisqu aucun témoignage concernant le ministère de la Santé de l Ontario n a été livré à ce sujet. Il semble que c est une conclusion qui a été tirée par le tribunal de révision. Il semblerait que si le demandeur s était informé auprès du ministère de la Santé de l Ontario, il aurait avisé le tribunal de révision (et le Tribunal) de ce fait et aurait peut-être inclus des photocopies de pièces de correspondance avec ce ministère. Bien que le Tribunal n examine généralement pas de nouveaux éléments de preuve dans une demande de permission d en appeler ou un appel, la documentation prouvant toute correspondance avec le ministère de la Santé de l Ontario (antérieure à l audience devant le tribunal de révision) pourrait aider à appuyer les observations du demandeur selon lesquelles le tribunal de révision a, en quelque sorte, mal interprété la preuve ou a miné toute conclusion tirée concernant ses efforts visant à se conformer à toutes les recommandations en matière de traitement raisonnables. [41] Le demandeur ne me convainc pas que l appel a une chance raisonnable de succès pour les motifs que le tribunal de révision a tiré diverses conclusions de fait erronées. c. Erreur de droit [42] Le demandeur fait valoir que le tribunal de révision a commis plusieurs erreurs de droit. Il allègue qu il a commis une erreur en n appliquant pas l arrêt Villani, avant tout en ne précisant pas quel type de travail il pouvait être capable d exécuter, ensuite en n appliquant pas le critère du «contexte réaliste».

[43] L arrêt Villani n exige pas que le juge des faits précise le type de travail qu un demandeur est capable d exécuter. Il incombe au demandeur de prouver de façon constante qu il est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. J'estime que cet argument n'a pas de chance raisonnable de succès. [44] Le demandeur fait valoir que le tribunal de révision n a pas appliqué le critère du «contexte réaliste» puisqu il n a pas pris en compte ses limites relatives à l éducation afin de déterminer s il pouvait être considéré comme gravement invalide. Le tribunal de révision semble avoir procédé à une évaluation de la situation personnelle du demandeur puisqu il a examiné ses expériences de vie et ses compétences transférables. Le Tribunal estime qu il a des «compétences transférables» avec lesquelles il aurait pu [traduction] «chercher régulièrement une occupation rémunératrice respectant ses limites». Étant donné que le tribunal de révision semble avoir procédé à une évaluation de sa situation personnelle (au paragraphe 42), je ne suis pas d avis que le demandeur soulève une cause défendable sur ce point. Comme la Cour d appel fédérale l a énoncé dans l arrêt Villani, «... L évaluation de la situation du requérant est une question de jugement sur laquelle la Cour hésite à intervenir.» [45] Le demandeur allègue que le tribunal de révision a commis une erreur en n accordant pas beaucoup de poids à son témoignage oral non contredit relativement à l incidence de sa condition médicale. La Cour d appel fédérale a déjà traité de cet argument dans d'autres cas où les tribunaux de révision ou les commissions d'appel des pensions n'ont pas tenu compte de l'ensemble des éléments de preuve. Dans l affaire Simpson c. Canada (Procureur général), 2012 CAF 82, l'avocate de la demanderesse a fait mention d'un certain nombre de rapports médicaux que la Commission d'appel des pensions avait, à son avis, ignorés, mal compris ou mal interprétés ou auxquels elle avait accordé trop de poids. En rejetant la demande de contrôle judiciaire de la demanderesse, la Cour d appel a statué ainsi : Premièrement, un tribunal n est pas tenu de mentionner dans ses motifs chacun des éléments de preuve qui lui ont été présentés, mais il est présumé avoir examiné l ensemble de la preuve. Deuxièmement, le poids accordé à la preuve, qu elle soit orale ou écrite, relève du juge des faits. Ainsi, une cour qui entend un appel ou une demande de contrôle judiciaire ne peut pas en règle générale substituer son

appréciation de la valeur probante de la preuve à celle du tribunal qui a tiré la conclusion de fait contestée. [...] [46] Un tribunal de révision peut prendre en considération les éléments de preuve qui lui sont présentés qu'ils soient objectifs ou subjectifs et leur accorder, le cas échéant, l'importance qu'il juge appropriée, puis rendre une décision fondée sur son interprétation et son analyse de ces éléments. Seul le juge des faits peut déterminer le poids à accorder aux éléments de preuve portés à sa connaissance. [47] Si le tribunal de révision avait indiqué qu'il s'était limité à l'examen de la preuve médicale objective sans tenir compte des expériences subjectives du demandeur, cela aurait été une toute autre question. J estime que la décision dans l affaire Simpson est utile et je présume que le tribunal de révision a examiné tous les éléments de preuve portés à sa connaissance, y compris les expériences subjectives du demandeur, pour rendre sa décision. [48] Le demandeur fait valoir que le tribunal de révision a également commis une erreur en concluant que la preuve n était pas suffisante pour démontrer que sa condition était «grave» à la fin de sa PMA. Le demandeur allègue de plus qu il y avait suffisamment d éléments de preuve présentés sur tous les éléments du critère lié à l invalidité. Essentiellement, le demandeur demande que nous évaluions et que nous apprécions de nouveau la preuve médicale et que nous rendions une décision qui lui est favorable. Je n'ai pas le pouvoir d'agir ainsi : mon devoir est de déterminer si l'une ou l'autre des raisons invoquées se rapporte à un moyen d'appel admissible et si l'une de ces raisons fait en sorte que l'appel a une chance raisonnable de succès. La demande de permission d en appeler d une décision n est pas une occasion d évaluer ou d apprécier de nouveau la preuve ou d entendre à nouveau la demande afin de déterminer si le demandeur est invalide au sens du Régime de pensions du Canada. [49] Le demandeur doit me convaincre que l appel a une chance raisonnable de succès pour le motif que le tribunal de révision a commis une erreur de droit.

CONCLUSION [50] La demande est accueillie pour le motif d appel restreint susmentionné, à savoir qu il est possible que le tribunal de révision ait commis un manquement aux principes de la justice naturelle en ne permettant pas à la représentante du demandeur de procéder à un contre-interrogatoire ni de formuler des observations. [51] La présente décision sur la demande de permission d'en appeler ne présume aucunement du résultat de l'appel sur le fond du litige. Janet Lew Membre de la Division d appel