L'effet Hall par Gilbert Gastebois 1. Schéma + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + F e = qe U H B e - qv F m = qvb - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - L I D d Épaisseur de la plaque D Hauteur de la plaque L Longueur de la plaque q Charge des porteurs de charge B Champ magnétique perpendiculaire à la plaque v Vitesse d'entraînement des porteurs de charge U H Tension de Hall E Champ électrique dû à la tension de Hall : E = U H /D 2. Théorie de l'effet Hall avec un seul type de porteurs de charge 2.1 Relation entre U H et v Les porteurs de charge ( électrons ou trous ) qui traversent le champ magnétique subissent la force de Lorentz F m = q v ^ B F m = q v B car v et B sont perpendiculaires Les porteurs de charge sont donc déviés vers le haut où ils s'accumulent, créant une tension U H entre les deux faces de la plaque. Cette tension produit un champ électrique E = U H /D. Les porteurs de charge subissent alors une force électrique F e = q E qui s'oppose à F m Quand les deux forces s'équilibrent, les porteurs de charge ne sont plus déviés et la tension n'augmente plus. A l'équilibre, on a donc q v B = q E = q U H /D. U H = v B D
2.2 Relation entre I et v I est le débit des porteurs de charge. I = Dq/Dt Pendant Dt, la charge Dq qui traverse la section S = D d est égale à la charge des porteurs situés dans un volume V = S v Dt = D d v Dt Dq = n V q = n D d q v Dt n étant le nombre de porteurs/m 3 I = Dq/Dt = n D d q v I = n D d q v 2.3 Relation entre U H et B U H = v B D et v = I /(n D d q) U H = B I /(n d q) U H = R H I B/d En posant R H = 1/(n q) Constante de Hall 2.4 Valeurs numériques Dans un métal, n est voisin de 10 29 m -3 ce qui donne R H voisin de 10-10 m -3 et donc U H extrêmement faible même en champ élevé. Pour obtenir une tension facilement mesurable, il faut une valeur plus faible de n, ce qu'on trouve dans les semi-conducteurs dopés où n est inférieur à 10 23 m -3. Exemple : d = 0,1 mm I = 200 ma n = 2.10 22 m -3 q = 1,6.10-19 C On obtient : R H = 3,12.10-4 m 3 /C et U H = 124,8 mv B = 200 mt Dans un semi-conducteur fortement dopé à température ambiante où toutes les impuretés sont ionisées, n est égal à la densité des impuretés et est donc indépendant de la température. La tension de Hall y est donc indépendante de la température. 2.5 Utilisations de l'effet Hall On utilise l'effet Hall comme capteur de champ magnétique, ce qui permet de l utiliser dans les Tesla-mètres à sonde de Hall, mais aussi dans les pinces ampérométriques à sonde de Hall. On peut l'utiliser pour mesurer une vitesse de rotation grâce à la détection du passage d'un aimant fixé sur le rotor. On peut l'utiliser pour commander un transistor servant d interrupteur dans un circuit électrique. L'ouverture et la fermeture se font en approchant ou en éloignant un aimant ou en intervertissant le pôle de l'aimant. On obtient un interrupteur sans contact électrique et donc sans usure. Une utilisation plus fondamentale : Le phénomène permet de connaître la nature des porteurs dans un matériau conducteur, notamment dans les semi-conducteurs. La mesure de R H permet également de mesurer la densité de ces porteurs dans le matériau. On pensait que le test sur les métaux donnerait toujours des porteurs électroniques, mais quand on testa le béryllium qui est manifestement un métal, on trouva une tension qui n'avait pas le ''bon signe''. La conduction dans le béryllium et quelques autres métaux comme le tungstène ou le zinc se fait par des trous!
3. Théorie de l'effet Hall avec deux types de porteurs de charge 3.1 Expression de la vitesse des porteurs en fonction de l'intensité Si on a à la fois des trous et des électrons comme c'est le cas des semi-conducteurs intrinsèques ( non dopés n e = n t ) ou faiblement dopés, chaque type de porteurs participe à l'intensité totale pour une part qui dépend du nombre de porteurs et de leur mobilité µ. ( Quand une particule subit un champ E, sa vitesse d entraînement vaut v = µ E ) I = I e + I t I e = n e e d D v e = n e e d D µ e E a et I t = n t e d D µ t E a E a étant le champ produit par la tension d'alimentation et e = q donc I e /I t = n e µ e /n t µ t ce qui donne I e = n e µ e/ (n e µ e + n t µ t ) I et I t = n t µ t/ (n e µ e + n t µ t ) I Comme I e = n e e D d v e on a v e = µ e I/(eD d(n e µ e + n t µ t )) v t = µ t I/(eD d(n e µ e + n t µ t )) et de même 3.2 Expression de la tension de Hall Les deux types de porteurs sont déviés dans la même direction, ils se dirigent vers la même face ou ils se recombinent. Les porteurs les plus nombreux arrivant sur la face imposent le signe de la tension de Hall. Dans la suite, je suppose que les trous sont majoritaires et donc que la charge de la face est positive. La grande différence par rapport au cas des porteurs uniques est que la tension de Hall ne peut pas entièrement contrarier la force de Lorentz, elle s'ajoute même à la force de Lorentz pour les électrons qui sont attirés par la charge positive. Le résultat est qu'il y a un flux transversal continu de porteurs des deux signes. Quand la tension de Hall ne varie plus, ces deux débits sont égaux (I H = 0). La force totale subie par les trous est f t = e (v t B - U H /D) et celle subie par les électrons et f e = e (v e B + U H /D) Le courant transverse I H = n t e d L µ t f t /e - n e e d L µ e f e /e = 0 à l'état stationnaire donc : n t µ t (v t B - U H /D) = n e µ e (v e B + U H /D) U H (n e µ e + n t µ t ) = D B (n t µ t v t - n e µ e v e ) On remplace v e et v t par leur expression du 3.1 U H = (n t µ t ² - n e µ e ²)/(e(n e µ e + n t µ t )²) I B/d ou U H = R H I B/d avec R H = (n t µ t ² - n e µ e ²)/(e(n e µ e + n t µ t )²) Si n e µ e ² > n t µ t ² On aura un signe correspondant aux électrons sinon un signe correspondant aux trous. Si par hasard, n e µ e ² = n t µ t ², on n'observera pas d'effet Hall du tout. Il est à noter que n e et n t augmentent beaucoup avec la température et ainsi, la tension de Hall diminue avec la température ( les mobilités diminuent avec la température, mais c'est marginal par rapport à l'augmentation de n ). Dans un semi-conducteur fortement dopé n e >> n t ou n t >> n e, on retrouve R H = 1/(n q). De plus, à température ambiante où toutes les impuretés sont ionisées, n est égal à la densité des impuretés et est donc indépendant de la température. La tension de Hall est indépendante de la température. On utilise donc un semi-conducteur dopé pour fabriquer une sonde de Hall.
Remarque : La déviation latérale d'une partie des porteurs, en présence du champ B, diminue le nombre de porteurs du flux principal, ce qui diminue l'intensité et donc augmente la résistance de la plaque. C'est la magnétorésistance. Le calcul donne Cf 3.4 : R = R 0 ( 1 + n e n t µ e µ t (µ e + µ t )²/(n e µ e + n t µ t )² B² ) C'est en général un faible effet. Pour un semi-conducteur intrinsèque (n e = n t ), on obtient R = R 0 ( 1 + µ e µ t B² ) 3.3 Valeurs numériques Dans le germanium pur à température ambiante, n e = n t = 2,4.10 19 m -3. Les mobilités sont µ e = 0,4 T -1 et µ t = 0,19 T -1 Exemple : d = 0,1 mm D = 8 mm L = 11 mm I = 200 µa e = 1,6.10-19 C B = 200 mt On obtient : R H = 9,26.10-2 m 3 /C U H = 37 mv R 0 = L/(D d e (n e µ e + n t µ t )) = 3030 W et DR/R = 0,3% On remarque que R H est presque 300 fois supérieur au cas du semi-conducteur dopé du 2.4. On pourrait penser que le semi-conducteur intrinsèque est beaucoup plus performant, mais il ne faut pas oublier que n plus faible veut dire résistance plus forte et donc à tension d'alimentation égale, intensité plus faible. Le produit R H I reste essentiellement le même* quel que soit le semi-conducteur utilisé. On utilise donc un semi-conducteur suffisamment dopé pour lequel R H est indépendant de la température. * D'après 3.1, on a I = (n e µ e + n t µ t e D d E a = (n e µ e + n t µ t ) e D d V a /L Va étant la tension d'alimentation. On a donc : R H I = (n e µ e ² - n t µ t ²)/(n e µ e + n t µ t ) D d/l V a Pour un semi-conducteur fortement dopé n : R H I = µ e D d/l V a Pour un semi-conducteur intrinsèque : R H I = ( µ e ² - µ t ²)/(µ e + µ t ) D d/l V a Les deux expressions donnent des valeurs similaires : pour Ge à 25 C, µ e = 0,4 et ( µ e ² - µ t ²)/(µ e + µ t ) = 0,356 Cependant les deux expressions dépendent des mobilités, donc de la température, c'est pourquoi on préfère alimenter une sonde de Hall avec un générateur de courant ( I = cste ) plutôt qu'avec un générateur de tension ( V a = cste ). Il faut choisir l'intensité I la plus élevée possible tout en veillant à ce que V a ne dépasse pas quelques volts pour ne pas claquer le semi-conducteur et que la puissance P = V a I reste assez faible pour ne pas trop échauffer la sonde ( P < ½ W ) Exemple de sonde de Hall : Ge dopé n : µ e = 0,4 T -1 d = 0,1 mm D = 8 mm L = 11 mm n e = 2.10 22 m -3 I = 0,214 A On obtient : R = V a /I = L/(e D d n e µ e ) = 10,75 W P = 0,49 W V a = 2,3 V R H = 3,12.10-4 m 3 /C et B = 1,5 U H ( k H = 1,5 T/V )
3.4 Magnétorésistance Dans le semi-conducteur, les porteurs de charges sont entraînés par la force de Lorentz F = q (E + v ^ B ), mais ils subissent des chocs qui les ralentissent. Le résultat est un mouvement d'entraînement à la vitesse v telle que m v = F t t étant le temps de parcours moyen entre deux chocs. La mobilité des porteurs vaut par définition µ = e t/m donc v = µ/e F = µ q/e (E + v ^ B ) D'autre part la densité de courant j = n q v donc j = j e + j t = n e µ e e (E j e /(n e e) ^ B ) + n t µ t e (E + j t /(n t e) ^ B ) On projette sur deux axes Ox horizontal et Oy vertical, on obtient : j x = n e µ e e (E x j ey /(n e e) B) + n t µ t e (E x + j ty /(n t e) B) = (n e µ e + n t µ t )e E x + (µ t j ty - µ e j ey )B j ey = n e µ e e (E y + j ex /(n e e) B) = n e µ e e E y + µ e j ex B j ty = n t µ t e (E y - j tx /(n t e) B) = n t µ t e E y - µ t j tx B D'autre part, j ex = - n e e v x = n e e µ e E a et j tx = n t e v t = n t e µ t E a donc j ex /j tx = n e µ e /n t µ t et comme j x = j ex + j tx on a : j ex = n e µ e /(n e µ e + n t µ t ) j x et j ey = n e µ e e E y + n e µ e ²/(n e µ e + n t µ t ) j x B j ty = n t µ t e E y - n t µ t ²/(n e µ e + n t µ t ) j x B j tx = n t µ t /(n e µ e + n t µ t ) j x donc A l'état stationnaire, j y = j ey + j ty = 0, on peut en déduire E y = (n t µ t ² - n e µ e ² )/(e(n e µ e + n t µ t )²) j x B On reporte les expressions de E y dans celles de j ey et de j ty, puis les expressions obtenues dans l'expression de j x et on obtient, en mettant au même dénominateur : (µ t j ty - µ e j ey )B = ((n t µ t ² - n e µ e ² )² - (n e µ e + n t µ t )(n t µ t 3 + n e µ e 3 ))/(n e µ e + n t µ t ²) j x B² = - n e n t µ e µ t (µ e ² + 2 µ e µ t + µ t ²)/(n e µ e + n t µ t )² j x B² = - n e n t µ e µ t ( µ e + µ t )²/(n e µ e + n t µ t )² j x B² On en déduit : j x ( 1 + n e n t µ e µ t ( µ e + µ t )²/(n e µ e + n t µ t )² B²) = (n e µ e + n t µ t )e E x La résistivité du matériau vaut : r = E x /j x = 1/((n e µ e + n t µ t )e) (1 + n e n t µ e µ t ( µ e + µ t )²/(n e µ e + n t µ t )² B²) 1/((n e µ e + n t µ t )e) est l'expression de la résistivité r 0 en l'absence de champ donc r = r 0 (1 + n e n t µ e µ t ( µ e + µ t )²/(n e µ e + n t µ t )² B²) R = R 0 (1 + n e n t µ e µ t ( µ e + µ t )²/(n e µ e + n t µ t )² B²) Si n e >> n t ou n t >> n e, la magnétorésistance est quasi nulle, ce qui est normal car dans ce cas le flux de porteurs n'est pas perturbé par le champ magnétique. Remarque : Si on reprend l'expression ou E y = (n t µ t ² - n e µ e ² )/(e(n e µ e + n t µ t ) ²) j x B On a E y = U H /D et j x = I/(D d) donc U H = (n t µ t ² - n e µ e ² )/(e(n e µ e + n t µ t )²) I B/d C'est une autre manière qui n'est pas réellement différente, de trouver l'expression de la tension de Hall.