Existe-t-il une limite à l endettement public? (oral ESCP 2014) Eléments de correction

Documents pareils
Approches macroéconomique et fiscale. Introduction à la première partie... 14

Eco-Fiche BILAN DE L ANNEE 2012 QUELLES PERSPECTIVES POUR 2013? 1

Les mécanismes de transmission de la politique monétaire

Les questions relatives aux finances publiques, longtemps réservées aux spécialistes, sont

QUELLE DOIT ÊTRE L AMPLEUR DE LA CONSOLIDATION BUDGÉTAIRE POUR RAMENER LA DETTE À UN NIVEAU PRUDENT?

Comprendre les enjeux actuels. et les defis futurs. Carine Bouthevillain Gilles Dufrenot. Philippe Froute Laurent Paul. Preface de Michel Bouvier

Réduire la dette publique, une priorité?

La politique monétaire après la crise financière mondiale : Nouveaux enjeux

Chapitre 3. La répartition

Economie Générale Initiation Ecole des Ponts - ParisTech

L équilibre Ressources Emplois de biens et services schématisé par une balance

L Equilibre Macroéconomique en Economie Ouverte

Réunions publiques janvier Présentation du Débat d Orientation Budgétaire

Tests de sensibilité des projections aux hypothèses démographiques et économiques : variantes de chômage et de solde migratoire

la quête du Graal? Michel Aglietta Université Paris Ouest et Cepii

Annexe - Balance des paiements et équilibre macro-économique

Crises financières et de la dette

Epargne et investissement

L OBSERVATOIRE DES CRÉDITS AUX MÉNAGES. Tableau de bord. 25 ème rapport annuel. Michel Mouillart Université Paris Ouest 29 Janvier 2013

Quelle est la place de l Union Européenne dans l économie globale?

Note de présentation générale. Secrétariat général du Conseil d orientation des retraites

ANNEXE VII EFFETS MACROECONOMIQUES DE LA REFORME PIECE JOINTE N 2 SIMULATIONS REALISEES A PARTIR DU MODELE MACROECONOMETRIQUE MESANGE

CYCLE FINANCIER, POLITIQUE MONÉTAIRE, DETTE PUBLIQUE. Michel Aglietta Université Paris Nanterre et Cepii

AUDIT FINANCIER ET FISCAL DE LA COMMUNE COMMUNE DE SAINT-JULIEN EN GENEVOIS

La crise de Lionel Artige. Introduction à la Macroéconomie HEC Université de Liège

POURQUOI LES ETATS ET LES ENTREPRISES ONT NORMALEMENT UNE TRESORERIE NETTE NEGATIVE OU POURQUOI LES ETATS SONT NORMALEMENT EN «DEFICIT»

Simulation d impact de l augmentation des salaires du personnel de l administration publique et du SMIG et du SMAG dans le secteur privé

Chapitre 4 Comment s opère le financement de l économie mondiale?

Genèse de la dette publique et taux d épargne Michel Husson, 1998

La croissance des pays développés au cours des trente dernières

La BNS capitule: Fin du taux plancher. Alain Freymond (BBGI Group SA)

EPARGNE, INVESTISSEMENT, SYSTEME FINANCIER

Les comptes nationaux et le SEC 2010

Institut National de la Statistique - Annuaire Statistique du Cameroun Chapitre 26 : LE CAMEROUN DANS LA ZONE CEMAC

L emploi permet-il toujours de s intégrer à la société française?

[ les éco_fiches ] Situation en France :

B - La lecture du bilan

Perspectives économiques régionales Afrique subsaharienne. FMI Département Afrique Mai 2010

Les politiques de réduction du coût salarial en Belgique

Editorial. Chère lectrice, cher lecteur,

I) L ouverture des économies à l international

Forum de l investissement Ateliers d Experts. 15 Octobre Les Dangers de l Assurance Vie

FINANCEMENT DU DEFICIT BUDGETAIRE AU MAROC

LE ROLE DES INCITATIONS MONETAIRES DANS LA DEMANDE DE SOINS : UNE EVALUATION EMPIRIQUE.

ELEMENTS DE COMPTABILITE NATIONALE

ECONOMIE GENERALE G. Carminatti-Marchand SEANCE III ENTREPRISE ET INTERNATIONALISATION

Programme de stabilité Quel impact sur l investissement local?

Les perspectives économiques

Consolidation budgétaire et croissance économique

LES RETRAITES. Dossier d information. Avril 2010

Faut-il encourager les ménages à épargner?

TD de Macroéconomie Université d Aix-Marseille 2 Licence 2 EM Enseignant: Benjamin KEDDAD

TD n 1 : la Balance des Paiements

REPÈRES ÉCONOMIQUES POUR UNE RÉFORME DES RETRAITES JUILLET 2015

Avertissement sur les risques liés aux instruments financiers Clients professionnels

«Quelle fiscalité pour le capital à risque?»

Le marché de l assurance de protection juridique en Europe. Octobre 2013

Territoires et Finances

SITUATION FINANCIÈRE DE L ASSURANCE CHÔMAGE

1. Les fluctuations économiques : une dynamique heurtée de développement économique

Chapitre 4 Un besoin de financement du système de retraite qui s établirait à 4 points de PIB en 2040, à réglementation inchangée

NORME IAS 32/39 INSTRUMENTS FINANCIERS

la voie bilatérale reste la meilleure option

Le Québec en meilleure situation économique et financière pour faire la souveraineté

Stratégie d assurance retraite

Les investissements internationaux

INDICATIONS COMPLÉMENTAIRES

LES ETAPES DE LA CREATION

Synthèse n 16, Février Financement de la croissance verte et orientation de la création monétaire

ENSIIE. Macroéconomie - Chapitre I

Audit financier & budgétaire de la Ville de Clamart

Quels enseignements de l expérience française ( )

b ) La Banque Centrale Bilan de BC banques commerciales)

Partie 2 : Qui crée la monnaie?

Dans quelle mesure la baisse des taux d intérêt permet-elle de relancer la croissance?

ECONOMIE GENERALE LA POLITIQUE ECONOMIQUE DE L ETAT

ECONOMIE. DATE: 16 Juin 2011

Résumé Comme d autres, nous faisons le constat que la France se trouve au bord d une grave crise de surendettement

Le trading haute fréquence vu de l AMF. Arnaud Oseredczuck, chef du service de la surveillance des marchés

Les temps forts de l année Les grandes masses budgétaires Les résultats de la politique financière. La dette régionale et le bilan

Alternatives pour l Europe

DES PAROLES ET DES ACTES : LES 4 MENSONGES DE MONSIEUR LENGLET

Compte rendu du 7 ème colloque organisé par Groupama Asset Management, CEPII-CIREM, le 22 octobre 2009

3 ) Les limites de la création monétaire

Dossier retraite. Profil 1B. Année de naissance. Profil 1A

Qu est-ce que la croissance économique? Quels sont ses moteurs?

Consolidation du budget l Etat répercussions sur le secteur communal. Prise de position du SYVICOL

ATELIER : Comment expliquer l instabilité de la croissance économique?

Recommandation de RECOMMANDATION DU CONSEIL. concernant le programme national de réforme du Luxembourg pour 2015

Perspectives économiques régionales du Moyen-Orient et de l Afrique du Nord

Royaume du Maroc. La masse salariale et ses impacts sur les équilibres économiques et financiers

Les instruments d une bonne gestion financière: budget et prévisions

Le FMI conclut les consultations de 2008 au titre de l article IV avec le Maroc

Les durées d emprunts s allongent pour les plus jeunes

Isabelle KEBE Tél I Fax Mail : ikebe@fcl.fr

LE COMMERCE EXTÉRIEUR CHINOIS DEPUIS LA CRISE: QUEL RÉÉQUILIBRAGE?

Assurance maladie publique et «Opting out» - Réflexions théoriques

Transcription:

Existe-t-il une limite à l endettement public? (oral ESCP 2014) Eléments de correction Accroche : pour la première fois depuis 1945, crise des dettes souveraines dans un PDEM ; qu est-ce qui a amené à cette situation exceptionnelle en temps de paix? 1. L expression des préférences collectives : un premier type de limite de l endettement public 1.1 Les motifs de l endettement public L Etat est le seul agent économique qui peut agir à la fois sur le mondant de ses recettes et/ou ses dépenses ; donc théoriquement : il peut toujours avoir un budget équilibré ; rien ne l oblige à pratiquer un déficit ; pourquoi produire un déficit et donc s endetter? On distingue trois types de déficit : un premier qui est censé avoir un impact sur la croissance potentielle et l outpug gap (la dette provient donc d un déficit «volontaire» réalisé par l Etat pour augmenter la croissance potentielle ou réduire l écart de production) ; un second qui est la conséquence de l effet des stabilisateurs automatiques (ce déficit n est pas «volontaire» même s il réduit aussi l output gap) ; un troisième qui est la conséquence d une «passivité» des pouvoirs publics qui laissent filer le déficit et la dette publics (ce dernier déficit est plutôt qualifié de «mauvais» déficit) ; on en conclue donc que tous les déficits n ont pas le même objectif et la même portée sur la croissance (réelle et potentielle) ; Une partie des déficits se justifie parce que l Etat est un acteur économique dont les missions ont évolué avec le temps : à partir de l après seconde guerre mondiale, l intervention économique de l Etat se décline en une intervention sur l allocation des ressources, la stabilisation du cycle et la redistribution (Musgrave). En conséquence, les citoyens acceptent l existence de déficits publics dans le cas où ces derniers permettent à l Etat d accumuler du capital public ou de réduire le chômage. 1.2 Les préférences collectives en matière d endettement public Comme le déficit public doit être remboursé ultérieurement, cela signifie donc qu il y a un transfert de génération en génération de la dette publique : la première limite à la dette publique est alors une limite politique qui concerne les préférences des citoyens = 1) quel montant d une dette, une génération accepte-t-elle de transférer à une génération future? 2) puisqu il faut rembourser une partie de la dette (et des intérêts) chaque année, quel montant dans les recettes de l Etat les citoyens acceptent-ils de transférer/verser aux créanciers de l Etat? Les réponses à ces questions sont des choix politiques. Mais ces choix dépendent aussi des motifs de la dette : plus la dette a pour origine des investissements en infrastructures ou des actions conjoncturelles sur l écart de production, plus la dette sera considérée comme «légitime» et politiquement acceptée. En effet, l investissement capital public permet la constitution d un «patrimoine d actifs publics» qui sont finalement la contrepartie de la dette. Dans ce cas, il serait d ailleurs plus juste de mesurer l actif net de l Etat (la différence entre la valeur de l actif et la valeur des dettes à rembourser) pour discuter du montant de la dette. Dans le cas des dépenses discrétionnaires, ou des stabilisateurs automatiques, la dette se constitue à partir de déficits qui sont conjoncturels, ils sont donc sensés se résorber et, dans les phases de croissance l Etat doit au contraire dégager un excédent. Par contre, plus la dette a pour origine la passivité des gouvernements, moins elle sera acceptée. En conclusion : la première limite à l endettement public est donc une limite politique qui provient des citoyens puisqu ils savent qu une partie de leurs impôts va servir à rembourser les créanciers de l Etat.

Mais cette limite est cependant difficile à définir théoriquement. Il faut en effet connaître les préférences collectives des citoyens (qui peuvent être très différentes d un pays à un autre). Par ailleurs, les déficits ne sont pas toujours remboursés par ceux qui les contractent : les individus d une génération peuvent donc chercher à faire peser sur les générations suivantes le remboursement de leur propre besoin de financement. C est pour cela qu il faut se pencher sur la dynamique de la dette publique et ses limites «économiques» : à quelle moment une dette publique devient-elle insoutenable et bascule-ton dans une crise de la dette souveraine? 2. La soutenabilité financière de la dette : un second type de limite de l endettement public 2.1 La dynamique de la dette publique Nous avons vu qu une première différence entre l endettement public et l endettement privé résidait dans la capacité de l Etat a pour agir à la fois sur ses recettes et ses dépendes. A la différence d un agent privé, il peut faire en sorte en manipulant les prélèvements obligatoires que les recettes publiques progressent de manière à compenser une hausse éventuelle de dépenses publiques. Mais il existe une seconde différence entre l endettement public et l endettement privé. Elle concerne leur durée de vie respective. L endettement privé est doublement limité : par sa durée de vie qui est finie et, par ses revenus futurs qui sont contraints. L Etat lui n est pas concerné par ces deux limites. Sa durée de vie (potentiellement) infinie a une conséquence importante sur la manière dont il va gérer sa dette et sa pratique du déficit. L Etat peut en effet sans arrêt remplacer une ancienne dette par une nouvelle ; il reporte indéfiniment dans le temps le remboursement intégral de son endettement. A chaque période, il se trouve donc en train de s endetter de nouveau et sa préoccupation essentielle est de pouvoir faire face en permanence au montant du service de sa dette (et non au remboursement de la totalité de la dette). Quels sont les facteurs qui font augmenter le service de la dette? Le service de la dette augmente parce que le budget de l Etat est en déficit et qu il faut donc contracter un nouveau prêt. Quelle est l origine de ce déficit? On décompose le solde du budget de l Etat de la manière suivante : solde primaire conjoncturel + solde primaire structurel + services de la dette. Le solde conjoncturel dépend des stabilisateurs automatiques, le service de la dette dépend des intérêts de la dette et le solde structurel dépend des autres sources qui peuvent affecter le solde du budget de l Etat. Nous sommes donc face à plusieurs situations puisque seul le service de la dette est de signe négatif. Observons tout d abord les conséquences d une variation du solde primaire sur le solde budgétaire : Si le solde primaire (conjoncturel et structurel) est négatif alors le solde budgétaire sera négatif ce qui induira une nouvelle dette et une hausse future du service de la dette ; Si le solde primaire est positif et inférieur au service de la dette, alors le solde budgétaire sera là aussi négatif ; Si le solde primaire est positif et supérieur au service de la dette, alors le solde budgétaire sera positif ; Mais le service de la dette peut aussi augmenter et provoquer un déficit budgétaire indépendamment du solde primaire : c est le cas lorsqu au moment du renouvellement de la dette, les taux d intérêt augmentent. Cette hausse des taux d intérêt fait donc automatiquement le service de la dette (c est ce que l on appelle l effet boule de neige). Il faut néanmoins noter ici que l on parle de taux réels et qu il faut donc à la fois connaître les taux nominaux et l inflation. Ce qui peut faire augmenter les taux réels c est donc par exemple une hausse des primes de risques (Grèce 2010) ou une baisse de l inflation (France début années 1990). C est pour cela qu aujourd hui certains économistes défendent l inflation

comme un facteur d allègement de la dette publique puisqu elle fait baisser le service réel de la dette publique. 2.2 L absence de limite théorique à l endettement public et l importance des anticipations des créanciers A quel moment la dette devient-elle insoutenable? La dette est insoutenable quand l Etat ne peut plus faire face au montant du service de la dette et qu il ne peut donc plus faire «rouler» sa dette. On a déjà vu que la dette progresse quand les déficits se cumulent et que les taux réels augmentent. On pourrait donc penser qu une limite de l endettement public devrait apparaître «naturellement» parce que la dette ne cesse de progresser. Or, il faut se rappeler que l Etat n est pas un agent économique comme les autres. En effet, ses revenus dépendent de l évolution de l activité, mais aussi des politiques fiscales qu il met en place et de facteurs comme l inflation/déflation. Si l activité progresse plus vite que la dette, on sait que cela va se traduire par une baisse du ratio d endettement. inversement, un pays dont le montant de la dette n augmente pas mais qui voit son PIB baissé, comme la Grèce depuis 2012, a un ratio d endettement qui augmente. si l Etat décide de modifier sa politique fiscale et ses dépenses publiques, une dette croissante durant une période peut se réduire ensuite : c est le cas par exemple au Danemark après 1993. Si l inflation s accélère cela fait baisser le coût réel de la dette, par contre la déflation a exactement l effet inverse (cas de l affreuse déflation). Au final, il n est donc pas possible de prédire à l avance quelle sera la situation de l endettement public plusieurs années à l avance même si l on connaît le montant des dettes passées et du coût actuel du service de la dette. C est pourquoi on dit qu il n existe pas de limite théorique à l endettement public. La soutenabilité de la dette publique dépend donc de la dynamique de cette dette et du scénario que les investisseurs se font de l avenir : si les créanciers de l Etat estiment que la capacité de celui-ci à rembourser sa dette diminue alors ils vont demander des primes de risque plus importante, ce qui va produire une hausse du service de la dette, et rendre (peutêtre) le remboursement de la dette impossible. C est ce qui s est passé en Grèce fin 2010. La limite de l endettement public apparaît parce que la convention a changé. On peut alors se demander ce qui fait changer une convention. On revient ici sur des éléments que l on retrouve pour expliquer l évolution des cours sur les marchés financiers. Il y a à la fois des explications «fondamentales» : les investisseurs découvrent que les Grecs ont menti sur les chiffres. Et des explications auto-référentielles : les comportements mimétiques conduisent à des prophéties auto-réalisatrices. En 2010, Reihnart et Rogoff publient une étude qui portent sur les PDEM depuis un demisiècle et qui tend à montrer qu à partir d un ratio d endettement public supérieur à 90% du pib, la dette publique se paie d une croissance économique plus faible ; On pourrait donc penser que la limite à l endettement public serai ce seuil de 90% du pib. Mais la réflexion ne peut s arrêter là : admettons qu un Etat dépasse ce seuil, que doit-il faire? Doit-il mettre en place une politique de consolidation budgétaire de manière à passer au-dessous de 90% du pib et ainsi limiter l impact négatif de la dette publique sur la croissance? La réponse dépend en réalité de l effet (négatif) multiplicateur que peut engendrer une telle politique de consolidation budgétaire. On distingue en effet deux types d expériences historiques. Certaines consolidations budgétaires (Danemark 1993) n ont pas entraîné de chute de l activité. D autres comme l Europe depuis 2012 se sont traduites par un effondrement du PIB qui a pour effet non voulu de faire augmenter le ratio d endettement alors même que les dettes ne progressaient plus. En conclusion : rien ne dit qu une politique de consolidation fiscale menée lorsqu un Etat a franchi le seuil de 90% du pib ne permette une croissance plus importante du PIB. Dans

certains cas les multiplicateurs sont faibles dans la logique théorique monétariste ou des NEK et la consolidation sera une réussite, dans d autres cas les multiplicateurs sont élevés dans la logique keynésienne et la consolidation sera un échec. Dans ce dernier cas, il vaut alors mieux retarder la consolidation budgétaire en pratiquant une consolidation lente. *************

La politique budgétaire est-elle utile? Eléments de correction Remarque de départ : la politique budgétaire n est pas la politique qui décide du budget de l Etat. Depuis Samuelson, la politique budgétaire a pour objectif la stabilisation du cycle économique. La politique budgétaire est donc une politique de type conjoncturel. Elle s appuie sur le budget de l Etat (ensemble des dépenses et recettes). Le budget de l Etat peut donc être utilisé pour mener une politique budgétaire ; mais le budget peut être également utilisé pour autre chose (la politique sociale, la politique d investissement ). Décomposition du budget de l Etat Solde budgétaire = solde conjoncturel + solde structurel + services de la dette Attention au vocabulaire Le solde conjoncturel varie indépendamment de mesures prises par le gouvernement (effet des stabilisateurs automatiques). Il ne peut rien faire pour agir sur ce solde. Même remarque pour le service de la dette qui dépend des conditions de renouvellement de la dette publique. Par contre, concernant les autres dépenses & recettes de l Etat, ce dernier est tout à fait en mesure des les contrôler. Donc, il est en mesure d équilibrer son budget. Ce qui signifie que rien n empêche l Etat d avoir un solde primaire structurel à l équilibre. Si un déséquilibre apparaît sur ce solde c est donc que l Etat choisit de le faire apparaître. C est pour cela que l on dit que ce solde résulte du choix du gouvernement. Pourquoi peut-il décider de produire un déficit structurel? Le gouvernement peut décider d une politique d investissements lourds dans les infrastructures, il peut décider de mener une politique budgétaire, et il peut être passif et laisser filer le déficit. Conclusion : mener une politique budgétaire a une conséquence sur le solde primaire structurel mais c est une politique conjoncturelle (car elle agit sur le cycle conjoncturel). Dernière remarque : la politique budgétaire a pour objectif de faire apparaître des effets multiplicateurs lorsqu un Etat utilise une politique budgétaire c est pour faire apparaître délibérément cet effet multiplicateur ; on qualifie la politique de «discrétionnaire». Mais, cet effet sur la demande globale existe aussi avec les stabilisateurs automatiques. Conclusion : lorsque l on veut comprendre ou étudier l effet contra-cyclique du budget il faut faire référence, à la fois, à la politique budgétaire (relance) et aux stabilisateurs automatiques. En résumé, une politique conjoncturelle s appuie sur le solde conjoncturel (effets stabilisateurs automatiques) et le solde structurel (politique budgétaire) du budget de l Etat. Mais les stabilisateurs affectent le solde conjoncturel du budget tandis que la politique budgétaire discrétionnaire affectent le solde structurel. «La politique budgétaire est-elle utile?» : la question porte donc essentiellement sur la politique budgétaire «discrétionnaire». 1. L utilité de la politique budgétaire : les arguments keynésiens 1.1 La politique budgétaire : un instrument utilisé pour réduire l écart de production Présentation des mécanismes théoriques ; développement de la pensée keynésienne (circuit monétaire de production et chômage involontaire) ; la dépense publique remplace la dépense privée ; Présentation du multiplicateur de la dépense publique et du multiplicateur fiscal Conséquence de la politique budgétaire sur le déficit public ; rappeler le théorème d Haavelmo

1.2 Articulation avec la politique monétaire (policy-mix) ; primauté de la politique budgétaire sur la politique monétaire (qui peut être touchée par la trappe à la liquidité) ; développement des politiques de stop and go à partir des années 1950 ; Exemple de relances «réussies» : Etats-Unis début années 1980 (baisse des impôts) et Etats- Unis après 2008 (hausse des dépenses) Echec politique de relance quand le policy mix est incohérent : Europe aujourd hui 2. La politique budgétaire : un outil de relance critiqué 2.1 L inefficacité de la politique budgétaire Monétaristes / NEK : effet d éviction et modification des comportements (critique de Lucas) Fuites du multiplicateur Temps de mise en œuvre trop long Erreur dans l analyse du taux de chômage naturel et conjoncturel Conséquence pas d effet multiplicateur = échec relance = exemple : France 1976-1979-1981 2.2 L encadrement des politiques budgétaires et monétaires Conclusion : redéfinir le cadre des politiques budgétaires et monétaires (critique keynésianisme) = la politique budgétaire doit être encadrée par des règles de finance publique et la politique monétaire doit suivre uniquement une cible d inflation ; Conséquence : face à la hausse du ratio d endettement, volonté de réduire la dette publique en mettant en œuvre une politique de consolidation budgétaire ; Exemple Danois 1993 / travaux de Reinhart et Rogoff / vers une consolidation «rapide» mais critique de «l austérité maniaco-dépressive» (OFCE) : une difficulté à connaître les multiplicateurs ex ante. **********

Faut-il définir des principes de politique budgétaire? Eléments de correction Attention, ici il faut entendre ici le terme de politique budgétaire au sens «très large», ie le budget de l Etat / les finances publiques. Principes de politique budgétaire = des règles de finances publiques. Sur cette question, il faut se souvenir de l ouvrage de J.P.Fitoussi «La règle et le choix» (1995) dans lequel il dresse une critique des «règles» de finances publiques mises en œuvre en Europe avec les critères de convergence préalables à l entrée dans l euro. 1. L instauration de principes de politique budgétaire : contrôler le déficit et la dette publique 1.1 Les justifications d un contrôle des finances publiques Pourquoi mettre en œuvre des critères de finances publiques? Il faut tout d abord rappeler que ces critères de finances publiques visent à «limiter» le déficit public. Quel est l intérêt d une telle limitation? D où vient le déficit public? Le solde public se décompose en un solde primaire conjoncturel + un solde primaire structurel + service de la dette. Le solde primaire conjoncturel dépend des fluctuations de l activité et du fonctionnement des stabilisateurs automatiques. Le gouvernement a peu d influence sur ce solde. Le solde primaire structurel, lui, peut parfaitement être à l équilibre ou positif mais le gouvernement peut délibérément choisir de produire un déficit : pour financer des investissements publics lourds, pour mettre en place une politique budgétaire, ou tout simplement par passivité. Enfin, le solde budgétaire dépend du service de la dette est toujours négatif. Lorsque le solde primaire est positif mais inférieur au service de la dette, cela nécessite un emprunt. On constate donc que seul le solde structurel peut être «sous contrôle» des pouvoirs publics. Pourquoi contrôler le déficit public? a) Première série d arguments - la critique des politiques de relance keynésienne Les politiques de relance n ont pas les effets que les keynésiens supposent. L effet multiplicateur est limité ; par ailleurs, les relances produisent des pressions inflationnistes. Critique de Lucas. Conclusion : puisque les politiques budgétaires ne fonctionnent pas, il faut produire des règles qui en limitent l utilisation. Une conclusion similaire à celle portée à la politique monétaire (un unique objectif : le contrôle de l inflation). - la critique de la passivité des pouvoirs publics c est la critique du public choice / existence d un cycle politico-économique b) parce que le cumul des déficits publics a pour conséquence une dynamique de la dette qui peut devenir explosive = crise de dette souveraine ; c) les travaux de Reihnart et Rogoff montrent que lorsque le ratio d endettement dépasse 90% du pib alors le poids de la dette freine la croissance ; d) dernier argument : le cadre de la monnaie unique ; dans le contexte de la construction européenne, le passage à la monnaie unique impose de contrôle les pratiques budgétaires car risque de comportement de passager clandestin (le déficit budgétaire n est plus «sanctionné» par une augmentation des taux d intérêt sur la dette publique)

Conséquence : il faut imposer des limites à l usage des déficits et de la dette ; tout particulièrement concernant l usage de la politique budgétaire et les comportements passifs qui laissent filer le déficit. 1.2 La diversité des principes de finances publics Dans le cadre de l intégration européenne Critère de convergence / critère de Maastricht ; assez général puisqu il ne distingue pas les origines des déficits ; attention dans Maastricht, dette de l ensemble des administrations (pas uniquement Etat central, aussi Sécurité sociale) ; situation de déficit excessif ; Critère du TSCG de l UEM ; une limite du déficit primaire structurel à 0,5% du pib. Ce qui laisse aux chocs conjoncturels et au service de la dette 2,5% du PIB pour rentrer dans les critères de Maastricht. Après 2012, les pays de la zone euro basculent dans la consolidation budgétaire. Remarque : dans le cadre de l UEM, l application des critères a été peu coercitive ; notamment dans les périodes de crises (comme en 2008/09). Dans le cadre européen, comme les politiques budgétaires relèvent des décisions exclusifs des Etats membres, pour intégrer une règle de finance publique il faut qu elle soit constitutionnalisée. Il existe d autres règles de finances publiques Par exemple en Angleterre, une limite du déficit primaire structurel après avoir enlevé les dépenses publiques d investissement ; En Espagne : la limite du déficit public est fixée à 0,4% du pib La définition et la mise en œuvre de principes de finances publiques soulèvent cependant de nombreuses critiques qui conduisent à préférer la «discrétion» à la «règle». Cette critique portent sur essentiellement sur l intérêt de l usage discrétionnaire du déficit public et sur les caractéristiques de la dette publique qui en font une dette de nature différente de la dette privée. 2. Préférer le choix à la règle : ne pas encadrer la dépense publique 2.1 Les arguments en faveur de l utilité du déficit public discrétionnaire L intérêt des politiques de relance : le budget de l Etat peut être utilisé pour suppléer la dépense privée en cas de choc de demande négatif ; mécanisme de l effet multiplicateur (de la dépense publique et fiscal) ; La règle produit un effet pro-cyclique : la mise en œuvre d une règle produit un effet procyclique car elle oblige à faire un effort budgétaire quand la conjoncture se retourne ; en effet, le retournement de la conjoncture dégrade mécaniquement le budget et le gouvernement va alors avoir comme objectif de limiter le déficit et la dette plutôt que de relancer l activité ce qui renforce la récession ; c est le cœur de la critique de Fitoussi : il faut que le budget reste un outil dont on peut se servir le cas échéant, donc de manière discrétionnaire (lorsqu on juge que cela est nécessaire) ; Les politiques de consolidation budgétaire peuvent générer des effets multiplicateurs importants et casser la croissance : les politiques «d austérité maniaco-dépressive» (OFCE) menées dans l UE depuis 2012 ; 2.2 Les spécificités de la dynamique de la dette publique La dette publique ne relève pas des mêmes mécanismes que la dette privée. Elle est atemporelle, donc se renouvelle de génération en génération. La dette publique ne se rembourse pas (plus exactement chaque remboursement s accompagne d un nouvel endettement) et l Etat ne la gère pas comme un agent privé. Ce qui importe c est donc moins le montant de la dette que le service de la dette et la capacité du gouvernement à en assurer le

versement. A côté du service de la dette, il faut donc prendre en considération tous les facteurs qui peuvent le rendre plus ou moins soutenable mais que l Etat ne connaît pas à l avance : la croissance économique, les recettes fiscales, l inflation, les taux d intérêt. Théoriquement, il n existe pas de limite à l endettement public. Par contre, ce qui peut déclencher une crise c est la hausse des taux d intérêt suite à une perte de confiance des investisseurs (hausse des spreads). ******************

Doit-on et peut-on réguler le cycle économique? Eléments de correction La formulation doit-on et peut-on consiste à distinguer deux temps dans le raisonnement : Premier temps «doit-on»? : Il s agit ici de présenter les débats «théoriques» autour d une problématique de politique économique. Seconde temps, admettons que l on suive l idée d une régulation, quelles sont alors les contraintes/limites/difficultés auxquelles la politique vient se heurter? 1. La régulation du cycle économique : nécessaire ou inutile? 1.1 L intervention de la puissance publique sur le cycle économique : une nécessité pour réduire l output gap Penser à articuler politique budgétaire et politique monétaire / présenter le policy-mix / présenter les mécanismes par lesquels la politique de régulation agit sur le cycle (les deux multiplicateurs mais aussi le théorème d Haavelmo) Des politiques de stop & go aux politiques néo-keynésiennes des années 1990/2000 (qui distinguent chômage conjoncturel et chômage structurel) Les exemples de présence du multiplicateur dans les économies (relance réussi ou bien consolidation à effet dépressif). 1.2 L intervention de la puissance publique sur le cycle économique : inutile et dangereuse Ici, il faut rappeler les critiques des politiques budgétaires (pas d effet multiplicateur) et les politiques monétaires (risque de dérapage inflationnistes) Les exemples d absence du multiplicateur (relance ratée ou consolidation sans effet dépressif). 2. Les contraintes qui limitent la capacité à réguler le cycle économique 2.1 Les fuites dans le multiplicateur Les fuites dans le multiplicateur qui renvoient à deux problématiques : la compétitivité de l économie nationale (c est l échec des politiques de relance qui va conduire le gouvernement français à mener une politique de désinflation compétitive) + importance de la coordination internationale des politiques de relance comme en 2009/2010 (dans une économie globalisée dans laquelle les cycles économiques convergent les politiques doivent se synchroniser). 2.2 Les contraintes institutionnelles : la présence de règles réduit la capacité à stabiliser le cycle Les contraintes institutionnelles qui encadrent l usage des politiques conjoncturelles : cible d inflation et règles de finances publiques. Exemple zone euro. La (in)cohérence du policy-mix *************

L arbitrage inflation-chômage guide-t-il la politique monétaire? Eléments de correction Sujet purement historique qui début à partir des années 1950, c est-à-dire à partir de l essor des politiques conjoncturelles dont la politique monétaire est un outil central. Il faut regrouper dans une même partie les périodes durant lesquelles la politique monétaire a consisté en un arbitrage entre l inflation et le chômage puis, dans une seconde partie, montrer durant quelles périodes au contraire cet arbitrage a disparu. 1. L arbitrage inflation-chômage au cœur des objectifs de la politique monétaire 1.1 La période des politiques de stop and go (années 1950-1970) 1.2 La période de l application de la règle de Taylor (années 1990-2000) 2. La disparition de l arbitrage inflation-chômage 2.1 Le seul objectif de la politique monétaire : le contrôle du NGP (décennie 1980) 2.2 Un nouvel objectif pour les politiques monétaires depuis la crise de 2008 : la stabilité financière *************