Les rencontres de l Asset management Quelle allocation d actifs sous solvabilité II Le 22 juin 2010 ---



Documents pareils
La supervision des banques et des assurances par l Autorité de contrôle prudentiel : Défis et opportunités dans un environnement en mutation

DÉCOUVRIR L AUTORITÉ DE CONTRÔLE PRUDENTIEL ET DE RÉSOLUTION

SOLVABILITE II Glossaire et notions clés

Mise en place du Mécanisme de Supervision Unique (MSU)

INSTALLATION DE LA NOUVELLE AUTORITÉ DE CONTRÔLE PRUDENTIEL

Les objectifs de l Autorité de Contrôle prudentiel

Les réformes se poursuivent en faveur d une économie française plus compétitive et d un appui renforcé aux entreprises à l export

LES MODALITES DE MISE EN PLACE DE L AUTORITE DE CONTROLE PRUDENTIEL

Quels liens entre les modèles et la réalité? Mathilde Jung Université d été / Lundi 9 Juillet 2012 AG2R LA MONDIALE

L assurance, un secteur singulier : En quoi les assurances diffèrent-elles des banques? Synthèse Juin 2010

TECH COMPRENDRE LA NOTION DE GROUPE PRUDENTIEL INFOTECH # 33 INTRODUCTION RAPPEL : QUEL CONTOUR DU GROUPE D ASSURANCE AUJOURD HUI?

L UNION BANCAIRE 1. LE MÉCANISME DE SURVEILLANCE UNIQUE (MSU) 1.1. PRÉPARATION

Solvabilité II. De Solvabilité I àsolvabilitéii. Les trois piliers. Le processus «Lamfalussy» Le calendrier. Le rôle de la FFSA aujourd hui

Lancement de l Association Professionnelle des Intermédiaires en Crédits (APIC)

Le Comité de Bâle vous souhaite une belle et heureuse année 2013 Adoption du ratio de liquidité LCR

Les réformes prudentielles : évolutions et impacts sur la gouvernance des établissements

La mesure et la gestion des risques bancaires : Bâle II et les nouvelles normes comptables

Solvabilité 2, pour une meilleure protection des assurés européens

ACCORD ENTRE LA COMMISSION BANCAIRE ET LA BANQUE NATIONALE DE ROUMANIE

Comment piloter une entreprise d assurance IARD sous Solvabilité II?

Décrets, arrêtés, circulaires

Jean-Francois DECROOCQ - 03/01/2012

Toronto (Ontario) Le vendredi 26 octobre 2007 L ÉNONCÉ FAIT FOI. Pour de plus amples renseignements, s adresser à :

Réforme du Code des assurances :

Présentation à l EIFR. 25 mars 2014

rv de septembre - 09/09/ XC

Le dispositif de Bâle II : rôle et mise en oeuvre du pilier 2

Une gamme complète de solutions d investissement et de services à destination des investisseurs

L activité financière des sociétes d assurances

Note TDTE N 44. Philippe Foulquier, Directeur du pôle «Analyse Financière et Comptabilité» de l EDHEC.

Paris Europlace Forum financier international 20 avril 2015 «FAVORISER LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE EN EUROPE»

LIFE MOBILITY. épargne patrimoniale

Résultats du premier trimestre SCOR enregistre un résultat net de grande qualité de EUR 175 millions et un ROE annualisé de 12,1 %

Allocution de Monsieur le Ministre à l occasion du 1 er meeting sur l information financière

La surveillance prudentielle du secteur financier

La commercialisation des produits financiers : quelles sont les attentes des épargnants?

Bulletin Officiel de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes

Stratégie de la surveillance des assurances en Suisse

UN REGARD PRÉVOYANT SUR VOTRE AVENIR

Cadre de référence de la gestion du patrimoine de l Institut Pasteur

MARKT/2508/02 FR Orig. EN REGIME DE SURVEILLANCE DES ENTREPRISES DE REASSURANCE A INSTAURER PAR PROCEDURE ACCELEREE

Solvabilité 2 et mutuelles: état des lieux et priorités Paris, le 6 juin 2013

Politique de placements

Considérations sur la crise et le marché intérieur 1

Rémunération des Professionnels du Capital Investissement Lignes Directrices

AG2R LA MONDIALE - RÉUNICA - VIASANTÉ 1 AG2R LA MONDIALE - RÉUNICA - VIASANTÉ

Principes anti-blanchiment de Wolfsberg pour les banques correspondantes

Réformes européennes et stabilité financière

L environnement juridique et fiscal

Asset Quality Review

Réforme bancaire : ce que dit le

DEUXIÈME ÉTUDE D'IMPACT QUANTITATIVE SUR LE RISQUE DE MARCHÉ SOMMAIRE DES RÉSULTATS

Travaux internationaux et grandes lignes du dispositif français

Site de repli et mitigation des risques opérationnels lors d'un déménagement

Introduction. Jean-Philippe Thierry, vice-président de l ACP 27/06/2012. Banque de France - Autorité de Contrôle Prudentiel

Solvabilité II : Vers une approche globale et cohérente de la solvabilité

L assurance vie luxembourgeoise pour investisseurs internationaux

6. Assurance automobile et assurance multirisques habitation : une année riche en actualité

La réglementation de l assurance vie au Grand-Duché de Luxembourg

Comité de la réglementation des assurance de l AAI Le rôle de l actuaire dans le contrôle prudentiel des sociétés d assurances

Note d orientation : La simulation de crise Établissements de catégorie 2. Novembre This document is also available in English.

Assurance et capital-investissement Directive AIFM et utilité de l assurance RC Professionnelle

Une information plus détaillée sur ce document est disponible sur demande écrite.

Stratégie Redonner du sens à la finance

Calcul d une provision technique en assurance vie dans le cadre de Solvabilité 2. Le cas des contrats d épargne : les approches «markedto model»

L activité financière des sociétes d assurances

Solvabilité II Les impacts sur la tarification et l offre produit

Remarques d Ouverture par M. Mohammed Laksaci, Gouverneur de la Banque d Algérie, Président de l Association des Banques Centrales Africaines

DU RISQUE DANS LES CADRES RÉGLEMENTAIRES*

des compagnies d assurance : évolutions récentes

I N V I T A T I O N Cycle de formation

25 / 06 / 2008 APPLICATION DE LA RÉFORME BÂLE II

Comité de Bâle sur le contrôle bancaire. Charte

FÉDÉRATION FRANÇAISE DES SOCIÉTÉS D'ASSURANCES

Associations Dossiers pratiques

Le risque opérationnel - Journées IARD de l'institut des Actuaires

Charte de contrôle interne

Investir sur les marchés de taux au sein des pays émergents

CIRCULAIRE AUX ETABLISSEMENTS DE CREDIT N Objet : Renforcement des règles de bonne gouvernance dans les établissements de crédit.

Présentation du métier d actuaire vie

Mobiliser l épargne pour l investissement productif. Pistes de réflexion stratégique en matière de fiscalité de l épargne individuelle

N 4032 ASSEMBLÉE NATIONALE

SESSION SPECIALE. Impacts de SOLVENCY 2 sur vos contrats d assurances

PIERRE MOSCOVICI, MINISTRE DE L ÉCONOMIE ET DES FINANCES, PRÉSENTE SON PLAN POUR LE RENFORCEMENT DE LA TRÉSORERIE DES ENTREPRISES

«La Mutualité Française ouvre de nouveaux chantiers innovants.»

CANDIDATURE AUX FONCTIONS DE DIRECTEUR GENERAL DE L ENSAM

L actuariat et les nouveaux horizons de l assurance en Afrique

Décision du Haut Conseil du Commissariat aux Comptes

Comité de Bâle sur le contrôle bancaire. Bâle III : Ratio structurel de liquidité à long terme

Compte d exploitation Assurance vie collective.

Le Data Risk Center. Plateforme de pilotage et de gestion des risques Pilier I de la directive Solvabilité II

Comment mieux comprendre la communication financière?

Solvabilité II & IFRS 4

La surveillance prudentielle des institutions de dépôt

Chapitre 1 : Introduction au contrôle de gestion. Marie Gies - Contrôle de gestion et gestion prévisionnelle - Chapitre 1

Plateforme électorale Ecolo Elections fédérales du 13 juin Axe Emploi et Solidarité. PME - Indépendants

LIGNE DIRECTRICE SUR LA CONFORMITÉ

Transcription:

Les rencontres de l Asset management Quelle allocation d actifs sous solvabilité II Le 22 juin 2010 --- Intervention de Christian Noyer, Gouverneur de la Banque de France et Président de l Autorité de Contrôle prudentiel La création de la nouvelle Autorité de Contrôle prudentiel : quels enjeux? Je vous remercie de me donner l opportunité d ouvrir ces Rencontres de l Asset management en vous présentant brièvement la nouvelle Autorité de Contrôle prudentiel (ACP) et les enjeux auxquels elle est d ores et déjà confrontée. Une large part des débats de la journée étant consacrée aux conséquences de la réforme du régime européen de solvabilité des assurances sur la gestion d actifs, je vous livrerai également quelques réflexions sur ce sujet. Au même titre que «Bâle III», qui vise à renforcer la couverture en fonds propres des risques du secteur bancaire, la définition et la mise en œuvre de «Solvabilité II» constituent l un des principaux défis de la nouvelle autorité. L ACP soutient pleinement ces deux réformes, qui me paraissent nécessaires à plusieurs égards, qu il s agisse d améliorer la couverture des risques du secteur bancaire, dont la crise a mis en lumière qu elle restait perfectible, ou d homogénéiser les règles applicables au secteur assuranciel, dans l objectif plus général de mettre en place un véritable marché unique de l assurance européenne. Il n en reste pas moins que les autorités françaises la Banque de France, l ACP qui lui est adossée, et la Direction générale du Trésor (DGT) - seront particulièrement attentives à ce que leur mise en œuvre, ne remette pas en cause des business models qui ont fait la preuve de leur pertinence et de leur résilience pendant la crise et, n obère pas le rôle fondamental que jouent les banques comme les organismes d assurance dans le financement de l économie. Mais je souhaiterais commencer par une rapide présentation de l ACP. Née du rapprochement des autorités d agrément (CECEI et CEA) et des autorités de contrôle (CB et 1

ACAM) des secteurs de la banque et de l assurance, l ACP, qui a été installée le 9 mars dernier par Mme LAGARDE, a été crée dans le but de renforcer l efficacité du système de contrôle français au service de l intérêt général. Elle a deux missions essentielles : contribuer à la stabilité du système financier et protéger les clients des banques comme les bénéficiaires des contrats d assurance. En outre, l ACP est appelée à jouer un rôle déterminant au niveau international, à un moment où s élaborent des réglementations aussi cruciales que «Bâle III» et, j y viendrai plus longuement, Solvabilité II. Sur le plan opérationnel, l autorité est représentée par un collège de 16 membres et une commission des sanctions distincte, composée de 5 autres membres réunissant des représentants des autorités publiques, des magistrats et des spécialistes issus des secteurs de l assurance et de la banque. Pour assurer son fonctionnement, la nouvelle autorité s appuie sur près de 900 agents dotés d une expertise incontestée, et plus généralement peut compter sur le soutien de l ensemble des services et moyens de la Banque de France. Venons-en plus en détail aux missions confiées à l ACP, dont le renforcement de la stabilité financière constitue le premier objectif. La stabilité financière revêt une importance fondamentale. C est pour les ménages la garantie que leurs dépôts seront en sécurité. Pour les bénéficiaires des contrats d assurance, c est la possibilité d engager leurs activités en sachant que les risques pourront être couverts en cas d adversité. Afin de répondre à cette exigence, le Gouvernement a choisi de regrouper la surveillance des risques bancaires et assuranciels au sein d une même autorité adossée à la Banque de France. Cette décision repose sur deux constats : En premier lieu, la crise a mis en lumière, de manière plus que jamais évidente, que les banques et les assurances entretenaient des relations étroites et complexes, qu elles étaient confrontées à des risques communs qu il devenait impératif de mieux appréhender, notamment en période de fortes turbulences économiques et financières ; En second lieu, le modèle de supervision bancaire français, fondé sur l adossement à la banque centrale, a démontré toute sa pertinence pendant la crise, pertinence reconnue au niveau européen puisque d autres pays mettent en œuvre des organisations similaires. Il convenait donc d en conserver le principe. Le maintien de ce lien fort entre l ACP et la banque centrale permet ainsi à la nouvelle autorité de bénéficier dès aujourd hui d une vue élargie des acteurs du système financier ainsi que de l expertise économique et financière que la Banque de France a su mobiliser avec succès au cours de ces trois dernières années particulièrement difficiles. Cette organisation garantit un traitement optimum et coordonné des situations d urgence en institutionnalisant les échanges d information entre les acteurs des autres fonctions de banque centrale (qu il s agisse de l expertise macroéconomique, de la mise en œuvre de la politique monétaire, de la surveillance des systèmes de paiement et de règlement ou de la stabilité financière dans toutes ses dimensions) et des acteurs du contrôle prudentiel. De tels échanges sont, par expérience, 2

une condition nécessaire pour aboutir rapidement au meilleur diagnostic possible et pour garantir réactivité et efficacité. Deuxième mission essentielle, l ACP est chargée de la protection des consommateurs. Cette seconde mission ne constitue pas à proprement parler une nouveauté pour le secteur assuranciel, puisque l ACAM disposait déjà d une équipe dédiée en la matière ; mais il n existait pas d équivalent du côté du SGCB. L ACP est donc désormais investie de responsabilités étendues en matière de contrôle de la commercialisation des produits financiers. Grâce à une Direction du contrôle des pratiques commerciales comptant une soixantaine de collaborateurs dont le Secrétariat général s est doté, l ACP veille au respect des dispositions législatives et réglementaires ; elle veille également au respect des règles de bonne conduite de chaque profession, en contrôlant que les banques, les établissements de crédit, les assurances et les mutuelles, mais aussi leurs intermédiaires, remplissent loyalement leurs obligations d information et de mise en garde de leurs clients. Pour remplir efficacement cette mission, l ACP va s appuyer pleinement sur le réseau de la Banque de France. Elle sera en outre amenée à coopérer étroitement avec l AMF, avec laquelle elle vient d instituer un pôle commun pour intensifier les échanges d informations et la coordination des contrôles des pratiques commerciales. Cette collaboration se traduit par la mise en place d un guichet unique pour faciliter le traitement des demandes d information ou des réclamations des usagers. Enfin, l ACP travaillera en lien étroit avec la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), avec laquelle la loi prévoit qu elle entretiendra des échanges réguliers. En dernier lieu, il incombe au secrétariat général de l ACP de participer activement à l élaboration et à la défense des positions de la France au sein des instances internationales, en étroite coopération avec les autres services de la Banque de France qui sont impliqués, et avec les services compétents de l Etat. Cette mission est particulièrement importante à l heure où se dessinent les réformes fondamentales que sont Bâle III et Solvabilité II. Ces réformes suscitent de nombreux commentaires et interrogations, la première d entre elles portant sur les buts qu elles poursuivent. La réponse est claire : l instauration d un ratio mondial harmonisé de liquidité et le renforcement des ratios prudentiels pour les établissements de crédit (Bâle III) et les organismes d assurance européens (Solvabilité II), vont permettre d accroitre la solidité des systèmes bancaires et financiers et de garantir que les organismes d assurance soient en mesure d honorer à tout moment leurs engagements. A cet égard, il me paraît nécessaire de rappeler que les autorités françaises sont pleinement décidées à promouvoir la mise en œuvre d un cadre prudentiel renforcé, qui préserve la croissance économique. 3

Mais venons-en au détail de Solvabilité II qui est l un des principaux objets de cette manifestation. La réforme du cadre réglementaire applicable aux assureurs en matière de solvabilité, qui devrait entrer en vigueur au début de 2013, a pour objectif de renforcer la protection des assurés, l intégration du marché européen de l assurance et la compétitivité des assureurs et des réassureurs européens. Cette réforme, qui concerne l ensemble du bilan des assureurs et touche à des problématiques aussi fondamentales que la valorisation des actifs et des passifs, le calcul des provisions techniques et des exigences de capital, les règles sur les placements ainsi que la définition des actifs éligibles à la couverture des exigences en capital, était nécessaire. En effet, même si la réglementation française s est révélée robuste, y compris sur la période récente, aucun défaut d assureur hexagonal n ayant ainsi été à déplorer, le cadre existant est perfectible : peu sensible à la diversité des risques associés à chaque type d activité, il était surtout devenu illisible au plan international en raison de la multiplicité des principes comptables, des règles prudentielles et des pratiques de contrôle alors même que, dans une économie mondialisée, les produits se sont complexifiés et l interdépendance des marchés s est accrue. A l image des réformes en cours de discussion pour le secteur bancaire, l un des principaux enjeux de Solvabilité II réside dans le calibrage des différentes exigences de fonds propres, qui sera réalisé au regard des résultats des études d impact conduites par le Comité européen des contrôleurs de l assurance et des pensions professionnelles (CEIOPS). Il est dès lors fondamental que les assureurs collaborent pleinement à la prochaine étude d impact (QIS 5), qui se déroulera d août à novembre 2010. Pour leur part, tout en soutenant entièrement le principe de la réforme, les autorités françaises seront particulièrement attentives : à ce que Solvabilité II préserve les spécificités françaises de l assurance-santé et de l assurance-retraite, en l absence de fonds de pension en France ; à la préservation du rôle fondamental des assureurs-vie dans le financement de l économie, via par exemple le réinvestissement des fonds collectés dans le capital des entreprises ; à cet égard le chargement des actions dans le futur cadre réglementaire est un point d attention essentiel. Indépendamment des questions relatives aux aspects quantitatifs de la réforme, je souhaite insister sur l importance de la préparation de l ensemble des organismes d assurance à ce nouveau cadre réglementaire, y compris les plus petits d entre eux : l appropriation des principes de Solvabilité II doit dépasser le cercle des spécialistes et se diffuser à l ensemble des fonctions au sein des organismes d assurance : la Direction générale bien sûr, mais aussi les opérationnels, les juristes, les comptables, et bien d autres agents encore ; 4

les organismes d assurance devront également à court terme adapter significativement leurs systèmes d information afin de traiter les données prudentielles ; il est essentiel que cette préparation se fasse suffisamment en amont, afin que les systèmes soient pleinement opérationnels lors de l entrée en vigueur de la réforme ; la mise en œuvre du nouveau cadre prudentiel aura également des conséquences directes sur la gouvernance des organismes d assurance, notamment en imposant davantage de formalisation en matière de contrôle interne et de gestion des risques ; enfin, chaque organisme d assurance devra appréhender les implications financières de «Solvabilité II» dans son cas particulier et, le cas échéant, adapter en conséquence ses politiques en matière de souscription, placement, réassurance et solvabilité. Je terminerai par quelques réflexions concernant l impact de Solvabilité II et, plus généralement, des réformes réglementaires en cours, sur les allocations d actifs. Il me semble en premier lieu toujours indispensable de rappeler que la confrontation du rendement attendu pour un investissement et de l estimation du risque qu il présente doit constituer le principal déterminant d une allocation d actifs, ainsi que l a montré Markowitz dès les années 1950. Il est donc normal que se dessine une hiérarchie des actifs, certains d entre eux présentant par nature une plus grande volatilité que d autres, compte tenu par exemple d une plus grande incertitude quant aux revenus futurs qu ils pourront générer. Une action est ainsi plus risquée qu une obligation ; elle est d avantage susceptible de générer des pertes importantes. Du point de vue du régulateur, cela implique que le niveau de fonds propres d une banque ou d un organisme d assurance qui détiennent une action doit être plus élevé que s ils détenaient une obligation. Dans ce contexte, tout l enjeu des réformes en cours est d accroître la sensibilité des exigences en fonds propres aux risques en limitant les possibilités d arbitrage réglementaire, qui pourraient se traduire par des allocations d actifs non justifiées économiquement. En s appuyant sur l expertise macroéconomique de la Banque de France, le Secrétariat général de l ACP sera particulièrement vigilant à cet égard, en examinant en détail les conséquences possibles des propositions du CEIOPS et de la Commission européenne en matière de solvabilité des organismes d assurance. Je donnerai deux exemples : premièrement, l exigence de capital associée à chaque risque identifié au bilan d un assureur est déterminée, conformément aux principes généraux de la directive, au moyen du calcul d une Value at Risk à un an avec un intervalle de confiance de 99,5%. Cet horizon ne correspond pas nécessairement à l horizon d investissement des organismes d assurance, qui dépend principalement de la duration de leur passif. Il pourrait dès lors en résulter une dichotomie entre la gestion actif-passif des organismes d assurance et cet horizon réglementaire d un an, susceptible de conduire in fine à ce que l'intérêt de l'entreprise («optimiser son exigence de capital réglementaire») et l'intérêt du client (maximiser son rendement pour un horizon de placement donné) ne soient plus alignés. Il ne faut pas perdre de vue cet aspect lors de la calibration finale ; 5

en second lieu, on peut aussi souligner la problématique propre à l'investissement en actions dans des PME : il peut être d'intérêt général que les organismes d assurance maintiennent un flux significatif d'investissement vers les PME, mais il y a un risque que, compte-tenu de la volatilité qui leur est propre, les placements en actions dans les PME soient considérés comme une classe d'actifs non prioritaire dans la hiérarchie des actifs des assureurs. En l absence de calibrage précis de l ensemble des volets de la réforme, qui ne seront finalisés qu à la lumière des résultats de l étude d impact qui sera lancée en août prochain, il est néanmoins totalement prématuré, pour l heure, de dessiner une «nouvelle» hiérarchie des actifs. A cet égard, si l attention a pu se focaliser depuis longtemps sur la problématique du chargement des actions, en valeur absolue, le point plus important me paraît être leur chargement relatif au regard des autres classes d actifs (obligations, immobilier, etc.). Je terminerai en rappelant que la réglementation prudentielle vise, en tout premier lieu, à renforcer la capacité des banques et des organismes d assurance à absorber les chocs auxquels ils peuvent devoir faire face. En contribuant ainsi à l accroissement de la stabilité financière, elle bénéficie directement aux investisseurs en réduisant les incertitudes auxquelles ils peuvent être confrontés au moment de décider de leurs allocations d actifs ainsi que la volatilité de la rentabilité future de leurs placements. En ce sens, les objectifs du régulateur et de l investisseur me paraissent convergents et non pas contradictoires. Je vous remercie de votre attention. 6