Traitement des ouvrages d art atteints de Réaction de Gonflement Interne Gladys VANHEMELSDAELE LRPC d Angers
Sommaire Généralités Prinicpes de la démarche Démarche de gestion des OA atteints Suites et préconisations Exemples d application
Généralités Les causes possibles de dégradation des ouvrages en béton sont variées. Deux grandes familles : Les réactions induites par un agent agressif extérieur. - gaz carbonique => carbonatation - sels marins => pénétration des chlorures - Les actions internes mettant en jeu des éléments présents à l origine dans le béton. - Alcali-Réaction - Réaction Sulfatique Interne (RSI)
Généralités Alcali-réaction = ensemble de réactions chimiques dans lesquelles interviennent certaines formes de silice ou de silicates, pouvant être présentes dans les granulats ; et les alcalins des constituants du béton. Réaction qui touche les OA construits avec des granulats réactifs ou potentiellement réactifs. RSI = Réaction chimique des sulfates présents dans le béton qui forment de l ettringite qui sous certaines conditions présente des propriétés expansives. Réaction qui touche en général les pièces massives ou traitement thermiquement. Ces deux réactions s activent en présence d eau. Les désordres sur ouvrages sont similaires : gonflement du béton à cœur avec faïençage visible en parement. Ces désordres se manifestant en général entre 5 à 10 ans après la construction.
Généralités Ces pathologies touchent des ouvrages sur l ensemble du patrimoine français ; avec une concentration des cas d alcali-réaction dans le Nord et en Bretagne. Dans les années 80 (apparition des premiers cas français), le LCPC s est penché les mécanismes d apparition de l AR. Ces études ont permis d aboutir à des méthodes de diagnostic, pronostic, traitements et surtout à des recommandations de prévention. Depuis leur parution en 1991 : aucun cas nouveau n a été recensé. Suite aux premiers cas de RSI, le LCPC a débuté le même type de recherche. Aujourd hui la réaction est bien connue et les recommandations sont en cours d écriture.
Principe de la démarche Le diagnostic d un OA atteint de RGI fait appel à deux grands types de moyens d investigation : le suivi in situ de gonflement de la structure et de la fissuration dans le temps, l analyse en laboratoire d échantillon prélevés sur l ouvrage. Pour ne réaliser que les investigations pertinentes et limiter les coûts de ces investigations, les LPC adoptent une : DÉMARCHE PROGRESSIVE fonction de l état de l ouvrage et de la vitesse d évolution des désordres.
Principe de la démarche Étape 1 -- Hiérarchisation des priorités Étape 2 -- Évaluation Initiale Étape 3 -- Suivi Étape 4 -- Recherches des causes des désordres Étape 5 -- Pronostic d évolution Conclusion Suites et Préconisations Méthodologie de suivi Diagnostic & Pronostic
Étape 1 -- Hiérarchisation des priorités Classement de priorité entre les ouvrages selon la localisation, l intensité et l étendue des désordres. Priorité de niveau 1 pour les OA présentant une zone vitale Priorité 1intenses. atteinte affectée par des désordres Priorité 1 Les autres OA sont classés en priorité 2. Priorité 2 Priorité 2
Étape 2 -- Évaluation Initiale L évaluation initiale d un OA atteint de RGI a pour objet de : collationner et étudier toutes les informations disponibles sur la construction, caractériser l état d endommagement de l ouvrage : i.e. : caractériser sa fissuration implanter une instrumentation simplifiée de mesure de l évolution des déformations Si plusieurs OA atteints, les traiter dans l ordre de priorité défini à l étape 1.
Étape 2 -- Évaluation Initiale Recueil d informations Recueillir et analyser, à partir du dossier d ouvrage, toutes les informations utiles pouvant être liées à la pathologie. : composition des bétons : nature, origine, dosage de chaque constituant conditions de fabrication : période de bétonnage, traitement thermique, Exemples incidents de bétonnage, pièce massive environnement de la partie atteinte : exposition aux sels, présence de sols agressifs, zone de marnage
Étape 2 -- Évaluation Initiale Caractérisation de la fissuration La méthode utilisée est la méthode LPC 47 «Détermination de l indice de fissuration d un parement de béton». : Relever de façon exhaustive à l aide d un fissuromètre, toutes les fissures interceptant un repère constitué de 4 axes tracés dans une zone d un mètre carré. Principe L indice de fissuration d une zone est la somme des ouvertures des fissures interceptées par les 4 axes, rapportée à l unité de longueur. L indice de pile fissuration permet Socle de S2 face Ouest du pont de Cheviré à Nantes de qualifier IFégalement = 1.5 mm/m origine des désordres = RSI l importance de la fissuration
Étape 2 -- Évaluation Initiale Instrumentation du suivi de déformation L objectif est d évaluer les déformations globales de la structure dans le temps en l équipant de bases de mesures dimensionnelles. Ces mesures permettent de connaître l évolution ultérieure de l ouvrage, mais aussi le cas échéant de paramétrer les modèles de recalcul ou d évaluer l influence d un traitement ultérieur. En fonction de la taille de l élément et des conditions d accès, on choisira la distancemétrie par fil invar, infrarouge, l extensomètre LCPC ou le pied à coulisse à grande capacité. OA SNCF Saint Maurice de Beynost (69) Origine des désordres : RSI
Étape 2 -- Évaluation Initiale Programmation des mesures La programmation des mesures dépend de l indice de fissuration IF0 et de la présence éventuelle de fissures isolées importantes. Si IF0 1 mm/m et/ou présence de fissures isolées d ouv. > 0,5 mm mesures d IF et de distancemétrie à + 3, 6, 9 et 12 mois. Sinon (cas général) : échéance à +12 mois.
Étape 3 -- Suivi Mesure IF1 Absence de fissures isolées d ouv. 0,5 mm Présence de fissures isolées d ouv. 0,5 mm si IF ou Dm 0,5 mm/m/an Étape 4 idem si IF ou Dm < 0,5 mm/m/an si ouv. 0,2 mm/an et IF0 1 mm/m et IF0 < 1 mm/m Évolution lente ou en cours de stabilisation prochaine mesure à 3 ans Fin du suivi spécifique + Conserver périodicité de 3 à12 mois
Étape 4 -- Recherche des causes de désordre A ce stade, il s agit d identifier par des essais en laboratoire l origine de la pathologie parmi les causes possibles : alcali-réaction réaction sulfatique (interne ou externe) association de l alcali-réaction et de la réaction sulfatique Dans tous les cas, il faut procéder à des prélèvements d échantillons sur l ouvrage (carottes)
Étape 4 -- Recherche des causes de désordre Méthodes de diagnostic Le test par fluorescence des ions uranyls Test simple et rapide qui consiste à asperger un échantillon de béton d une solution d acétate d uranyls puis de le soumettre à un éclairage UV. La présence de produits issus de l alcali-réaction se traduit par une fluorescence jaune-verte. - Méthode uniquement valable pour l alcali-réaction. - Particulièrement pertinente pour caractériser l étendue de la réaction.
Étape 4 -- Recherche des causes de désordre Méthodes de diagnostic L examen au Microscope Électronique à Balayage (MEB) L examen au MEB est la seule technique permettant d identifier des produits résultants soit d une alcali-réaction (produits cristallisés ou sous aspect de gel) soit d une réaction sulfatique (ettringite délétère aux propriétés expansives à distinguer de l ettringite normale résultant d une hydratation du ciment).
Étape 4 -- Recherche des causes de désordre Méthodes de diagnostic Calcul de l exothermie au jeune âge du béton : Dans le cas d une présomption de réaction sulfatique liée à une température élevée lors de la prise, le recalcul des températures à l aide de CESAR-LCPC permet d obtenir une confirmation Exemple de recalcul des températures au jeune âge OA SNCF de St Maurice de Beynost LRPC Angers 2005
Étape 5 -- Pronostic d évolution Essai d expansion accéléré Le pronostic d évolution s appuie sur : les résultats du suivi in situ l évaluation du potentiel de gonflement futur : essai d expansion accéléré sur les carottes prélevées. Ces essais consistent à placer les carottes dans un environnement favorisant la réaction et de mesurer leur déformation au cours du temps. On détermine ainsi que le gonflement du béton de d expansion accéléré pour l alcali-réaction l ouvrage peut Essai encore augmenter fortement. Réalisé au LRPC de Saint-Brieuc
Étape 5 -- Pronostic d évolution Recalcul spécifique en tenant compte des effets du gonflement Dans le cas des OA dont une partie structurelle est atteinte et dont l évolution pourrait conduire rapidement à un doute sur sa capacité portante, on peut procéder à un recalcul spécifique tenant compte des effets du gonflement du béton. Ce recalcul (uniquement pour l AR) s appuie sur un modèle chimicomécanique couplé à un modèle de diffusion hydrique. Le test du module (CESAR LCPC ALKA) a été réalisé par le LCPC. Son application est programmée au LRPC d Angers sur un cas d ouvrage du LRPC de Saint-Brieuc.
Suites & Préconisations Cas des OA peu endommagés et évoluant peu OA soumis aux règles de gestion communes à l ensemble du patrimoine + Vérification (tous les 3 ans) de l état de son aspect visuel dans le cadre de la surveillance organisée. Cas des OA endommagés et évoluant peu Vérification de la capacité portante (recalcul spécifique) Si pas de pb de durabilité : colmatage des fissures et/ou mise en place de protection pour limiter la pénétration des agents agressifs et limiter le risque de corrosion des armatures. Choisir produit souple s accomodant de l évolution des fissures du support. + Vérification (tous les 3 ans) de l évolution avec IF et distancemétrie.
Suites & Préconisations Cas des OA très endommagés et/ou évoluant rapidement OA qui nécessitent des investigations sur site complémentaires (épreuve de chargement) + recalcul + renforcement du suivi (périodicité entre 3 et 12 mois) Pas de méthode permettant d arrêter une RGI ni pouvant être considérée comme une méthode de réparation définitive. Pour limiter l évolution du phénomène ou en limiter les effets : - mise en place d une protection générale - mise en œuvre d une précontrainte pour confiner le gonflement - réalisation de saignées pour libérer les efforts de compression emmagasinés dans la structure. - démolition de tout ou partie de l OA
Exemples d application Cette démarche a été appliquée par l ensemble des LRPC, et notamment sur le réseau RN breton (base de donnée des OA atteints d AR). Elle est également appliquée sur le réseau RN des Pays de la Loire pour des cas de RSI (pont de Cheviré, périphérique Nantais). Les cas recensés dans ces régions ont permis aux laboratoires de se spécialiser : Réalisation des essais de diagnostic et de pronostic de l AR au LRB Recalcul des températures au jeune âge et des structures atteintes avec CESAR-LCPC au LRA.