Congo Indépendant (RDC)

Documents pareils
«Vous serez punis» Attaques contre les civils dans l est du Congo. Résumé

Allocution de M. Hassan B. Jallow Procureur du TPIR et du MTPI, devant le Conseil de sécurité de l ONU 10 décembre 2014

Interview du journaliste Phocas Fashaho de la Voix de l Amérique avec Abdul Ruzibiza ancien officier de l Armée du FPR, Dimanche le 2 mai 2004.

Cluster protection en RDC KATANGA BESOIN DE RENFORCEMENT DE LA PROTECTION DES CIVILS. Septembre avril 2015

El Tres de Mayo, GOYA

Programme. Modératrice de la matinée Sylvie Braibant, rédactrice en chef à TV5 Monde

JOURNAL OFFICIEL. de la République Démocratique du Congo CABINET DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE. Journal Officiel - Numéro Spécial - 09 mai 2009

Chap. 5 : la 2 nd guerre mondiale : une guerre d anéantissement Pourquoi parle-t-on de la 2 nd guerre mondiale comme d une guerre d anéantissement

7 ème Edition des Assises de la Coopération Belge au Développement

LOI N 04/002 DU 15 MARS 2004 PORTANT ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DES PARTIS POLITIQUES

Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. (Croatie c. Serbie).

Titre I Des fautes de Gestion

Ce projet de loi fixe un plafond pour le budget de la Défense et un plancher pour le budget de l Aide internationale.

La protection des associés en droit congolais et en droit OHADA

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE I. Mme la juge Elizabeth Odio Benito M. le juge René Blattmann

AZ A^kgZi Yj 8^idnZc

Annexe 6 : La Société Affimet (Belgique), présentée comme un soutien aux dictatures Hima

ENTRETIEN AVEC BOB RUGURIKA

Référence: EuropeAid/ /L/ACT/CD Numéro de contrat: DCI-NSAPVD/2011/

Animer une association

Colloque Hommage à la Résistance au Génocide des Tutsi du Rwanda - Enquête, Justice et Réparations pour les Basesero

27 Janvier : Journée internationale de commémoration en mémoire des victimes de l'holocauste

Titre : POLITIQUE AFIN DE CONTRER LE HARCÈLEMENT PSYCHOLOGIQUE OU TOUTE AUTRE FORME DE VIOLENCE EN MILIEU DE TRAVAIL

L égalité femmes-hommes dans le développement : alibi ou réalité? Claudine Drion Le Monde selon les femmes

LA RECONSTRUCTION POST-CONFLIT LA RECONVERSION D UN MOUVEMENT DE GUERILLA EN PARTI POLITIQUE

LAURENT FABIUS, MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES

Rapport 2, Juin 2015

La lutte contre le révisionnisme : quel enjeu pour l agent de développement au Rwanda?

Service de presse novembre 2014

Promouvoir des synergies entre la protection des enfants et la protection sociale en Afrique de l Ouest et du Centre

Histoire Leçon 15 La marche vers la guerre ( 1938 / 1939) Dates : 1936 : remilitarisation de la Rhénanie 1938 : Anschluss de l Autriche

Sensibilisaton à la CPI en RDC : Sortir du «Profil Bas»

LE 7 AVRIL QUAND UN CERTAIN RWANDA PLEURE D UN ŒIL OU DE LA CONFISCATION POLITICIENNE DE LA MEMOIRE.

REGLEMENT INTERIEUR TITRE I : DISPOSITIONS GENERALES

PLAINTE AVEC CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE

FEU SUR LES MESSAGERS

IBUKA. Mémoire et Justice. Section suisse STATUTS

ALLOCUTION DE M. BENJAMIN HOUNTON CHARGE DU BUREAU DU HAUT COMMISSARIAT DES NATIONS UNIES AUX DROITS DE L HOMME POUR L AFRIQUE DE L OUEST

Accès des gouvernements aux données du secteur privé

COALITION POUR METTRE FIN À L UTILISATION D ENFANTS SOLDATS

OFFRE DE CONSULTANCE Volet Gouvernance judiciaire à l Est de la RDC

Le recyclage des médicaments en question

Loi n du 30 juin 2006 relative aux archives et aux documents administratifs 1 EXPOSE DES MOTIFS

1 ère partie - Avant la libération, le contexte historique

GROUPE DE RÉDACTION SUR LES DROITS DE L HOMME ET LES ENTREPRISES (CDDH-CORP)

Responsabilité civile et pénale de l instituteur

PROJET DE BONNE GOUVERNANCE DANS LE SECTEUR MINIER COMME FACTEUR DE CROISSANCE (PROMINES) UNITE D EXECUTION DU PROJET

Décision du Défenseur des droits MDE-MSP

Qu est-ce que je dois faire lorsque je reçois une assignation à comparaître?

Allocution d ouverture M. Philippe Boillat, Directeur général, Direction générale Droits de l'homme et Etat de droit, Conseil de l'europe

CLUB DE REFLEXION SUR LE MALI (CRM)

) Découvrez les métiers de la Justice. Informez-vous sur

TABLE DES MATIÈRES TITRE I L AUTEUR DE L INFRACTION PÉNALE

Auxiliaire avoir au présent + participe passé

Afrimex (UK) République démocratique du Congo

Révision de l ombudsman du texte sur le camp d extermination nazi de Sobibor en Pologne, diffusé au Téléjournal le 30 novembre 2009.

C était la guerre des tranchées

Le Ministre Pieter De Crem prend la parole

Sos Rwanda. Transcript de l'émission de Jean Marie CAVADA:

Chapitre 2 LE CAS PRATIQUE

Le soutien financier des projets sur les budgets prévention des conflits et diplomatie préventive

La petite poule qui voulait voir la mer

LOI N DU 7 MARS 1961 déterminant la nationalité sénégalaise, modifiée

Alcool au volant : tous responsables? La question de la co-responsabilité sera enfin posée au Tribunal de Saint Nazaire

Arrêté royal du 27 mars 1998 relatif à la politique du bien-être des travailleurs lors de l exécution de leur travail (M.B

Plan d Action de Ouagadougou contre la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants, tel qu adopté par la Conférence

Rapport du Panel à la Haut Commissaire aux Droits de l'homme sur les moyens de recours et de réparation pour les victimes de violences sexuelles en

Cour du travail de Bruxelles (6e ch.) - Arrêt du 29 mai Rôle n 2011-AB-923

Décrets, arrêtés, circulaires

Dossier pratique n 6

REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO ACCORD DE PAIX ENTRE LE GOUVERNEMENT ET LE CONGRES NATIONAL POUR LA DEFENSE DU PEUPLE (CNDP)

COMPRENDRE CE QU EST L OTAN

Le regard des Français sur le secret des échanges entre un avocat et son client. IFOP pour Ordre des avocats de Paris

QU EST-CE QUE LE PLAIDOYER?

COUR PENALE INTERNATIONALE

CORRIGE DU LIVRET THEMATIQUE NIVEAU 3 ème

«En avant les p tits gars» Chanté Par Fragson Mais que chantait-on en Décembre 1913, à quelques mois du déclenchement de la grande tragédie?

Forum Pan-Africain des Secrétaires Généraux de Gouvernements

I) La politique nazie d extermination

Groupe de travail. Renforcer la confiance mutuelle RAPPORT

L organisation du programme «Jeunes pousses» Rapport

LOI ORGANIQUE N DU PORTANT ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DES FORCES ARMEES EXPOSE DES MOTIFS

PRESENTATION DU PROGRAMME D ACTION NATIONAL DE LUTTE CONTRE LA DEGRADATION DES TERRES ET DES FORETS EN RDC

La responsabilité juridique des soignants

Décision n QPC 6 octobre M. Mathieu P.

Un atelier philo pour se reconnaitre hommes et femmes

Evaluation du projet Fonds pour la consolidation de la paix, Welthungerhilfe Butembo République Démocratique du Congo

VOLUME, REPARTITION SPATIALE ET STRUCTURE PAR SEXE ET AGE DES POPULATIONS AUTOCHTONES DU CONGO

FICHES DE REVISIONS LITTERATURE

Mise en œuvre de la responsabilité du maire

Manifeste. pour l éducation au développement. Pour une autre citoyenneté ouverte aux questions de solidarité internationale

Conditions Générale de «Prestations de services»

Refondation du Mali et refondation de l aide internationale

MISSION DE VERIFICATION D'INFORMATION ET PROTECTION DES CIVILES - AGUEL-HOC

Conseil de sécurité. Nations Unies S/2015/486

La seconde guerre mondiale

Guide des expositions temporaires. Service Educatif Édition 2015

RAPPORT DU BUREAU CONJOINT DES NATIONS UNIES AUX DROITS DE L HOMME SUR LES VIOLATIONS DES DROITS DE L HOMME COMMISES PAR LE MOUVEMENT DU 23 MARS

La dépolitisation de l administration publique congolaise : trajectoire, enjeux et heurts

Transcription:

Quand Joseph Kabila accusait l APR d avoir Congo Indépendant (RDC) Kinshasa, RDC, 2010-09-19 (Congo Indépendant (RDC)) - Untitled 1 Quand Joseph Kabila accusait l APR d avoir "génocidé" des réfugiés Hutu et des citoyens congolais... Source: Congo Independant (RDC) Le rapport du Haut commissaire aux droits de l Homme (HCDH) sur les massacres commis par l Armée patriotique rwandaise sur le sol congolais va-t-il sonner le glas de la "nouvelle amitié" entre l homme fort de Kigali et son "filleul" Joseph Kabila? Depuis la publication par le quotidien français "Le Monde", daté du 27 août dernier, des extraits de ce document explosif accusant l armée patriotique rwandaise d avoir commis, sur le sol congolais, contre des Hutus, des massacres "systématiques et généralisés" assimilables à des "crimes de génocide", on assiste à une agitation tant à Kigali qu à Kinshasa. Et pour cause? Dans une interview accordée au "Soir" de Bruxelles, daté 7 mars 2001, le successeur de Mzee "dénonçait" déjà avec une certaine candeur la cruauté des éléments de l APR. Le quotidien kinois "Le Potentiel" avait à l époque publié un article à ce sujet. Le journal avait retranscrit un entretien accordé à la Voix de l Amérique (VOA) par la journaliste Colette Braeckman qui commentait les révélations de "Joseph". A moins qu il se dédise - en prenant le risque de se faire prendre en flagrant délit de mensonge -, Joseph Kabila a été un témoin oculaire et peut-être un des acteurs des tueries massives imputées aux soldats de l APR. Kisangani, Tingi Tingi, Amisi, dans la Province Orientale, Bokatola, Mbandaka, Wendji Secli (à l Equateur) sont autant des noms des lieux où des éléments de l APR se sont livrés à des carnages en ciblant non seulement des ex-far (Forces armées rwanadises) et les miliciens Interahamwe mais aussi tout individu qui ressemblait à un Hutu. Des femmes, des enfants et des vieillards ont ainsi été "canardés". La paisibles populations de lex-cuvette centrale sont restées à jamais traumatisées face à tant de cruauté à la limite de la barbarie. Cacophonie à Kigali

Depuis la sortie du numéro 20401 du quotidien "Le Monde", les dirigeants rwandais semblent avoir perdu leur superbe au point de mener une "contre-attaque" plutôt cacophonique. Dans une déclaration faite au quotidien bruxellois "Le Soir" daté du 1er septembre 2010, le chef de la diplomatie rwandaise, Louise Mushikwabo, ne nie guère les faits contenus dans le rapport du HCDH. Elle joue la carte de la justification :"Il faut être sérieux, dire toute la vérité. Comment négliger le fait que les camps de réfugiés, établis au Kivu au lendemain du génocide étaient devenus un véritable poudrière pour toute la région. (...)". Et d ajouter : "Dans cette espèce de terrain vague, les combattants hutus s étaient réarmés, sous les yeux de l ONU et avec la complicité de toutes les Ong qui les assistaient. Bien avant d entamer les opérations militaires, le Rwanda avait dénoncé, à plusieurs reprises, le danger que représentait ces camps où les auteurs du génocide étaient melangés aux civils, mais n avait pas été entendu. Aujourd hui, l action du Rwanda est dénoncée par ces mêmes Ong dont le passé est loin d être clair". Ancien ministre rwandais des Affaires étrangères, Charles Murigande, actuellement en charge de l Education, dit autre chose : "Nous n avons commis aucun crime de guerre". Selon lui, l APR est intervenue "militairement pour obliger les camps à se disperser en novembre 1996". "La violence n a pas été nécessaire : il suffisait de tirer en l air. Les forces génocidaires ont fui et une majorité de réfugiés a pu rentrer au Rwanda. (...)", soutient-il (voir J.A n 2592 du 12-18.9.2010 p. 37). Qui dit vrai? Joseph Kabila, témoin ou un des acteurs des massacres? Pour les Congolais, le rapport du HCDH est une occasion inespérée. D abord pour savoir un peu plus sur "l homme secret" qui dirige leur pays depuis bientôt dix ans. Ensuite, de cerner le rôle que ce même homme, alors aide de camp du "colonel James" {Kabarebe}, chef des Opérations du Front Nord, a pu jouer lors des massacres des réfugiés Hutu rwandais mais aussi des Congolais perpétrés par des soldats de l armée patriotique rwandaise (APR) camouflés sous le label de "rebelles zaïrois" de l AFDL. Dans une interview accordée au quotidien "Le Soir" daté 7 mars 2001, le successeur Joseph Kabila fait littéralement des aveux. Il affirme in tempore non suspecto d avoir été "témoin" des massacres précités. Simple témoin? "J étais avec les Rwandais et lorsque j ai vu comment ils se comportent avec les réfugiés Hutus, j ai pensé qu un jour nous aurions la guerre avec ces gens-là. Mais à l époque, il était impossible de parler de cela et par la suite, tout a été fait pour bloquer la commission d enquête de l Onu par Bizima Karaha entre autres, qui était le ministre des Affaires étrangères, raconte-t-il. Depuis lors, dans la région, il y a eu d autres victimes, congolaises celles-là. Une Ong américaine a estimé que 2.500.000 civils congolais avaient péri au

cours de la guerre actuelle. Un chiffre aussi massif n est pas le fait du hasard : il y a bien eu l intention de tuer la population. Cela aussi, c est un génocide contre les Congolais". B.A.W Ci-après l article publié par "Le Potentiel" en mars 2001: Texto : KABILA JUNIOR : une phrase de plus L interview accordée à notre consœur belge Colette Brackman par le général-major Joseph Kabila et parue dans le journal Le Soir du 07 mars 2001 fait l objet des commentaires en sens divers dans les salons, et particulièrement dans les milieux politiques, à Kinshasa. Avec raison, bien entendu. Dans la mesure où c est pour la toute première fois que le jeune président s ouvre à l opinion, par la presse interposée, après sa prestation de serment et son discours d investiture. Cet entretien aura permis, une fois de plus, à l opinion, singulièrement nationale, de se faire une idée de ce que le président pense de l ouverture politique tant attendue, du Dialogue intercongolais et de l enquête en cours sur l assassinat de son père. Sans oublier le rôle que doit jouer la jeunesse dans l édification du pays. Pour ce qui est de la mise en place d une nouvelle équipe gouvernementale, celle-ci n est pas liée à l enquête sur la mort de feu Laurent Désiré Kabila, un ministre pouvant toujours être invité à témoigner si c est nécessaire. Le chef de l Etat se serait donné un temps de d observation, surtout pour les ministres hérités de son père, afin d apprécier les capacités d un chacun. S agissant de la libéralisation des partis politiques dont l abrogation du décret 194 portant organisation et fonctionnement des partis politiques en Rdc constituerait un signal fort, le chef de l Etat n aurait pas encore une opinion exacte. il est tôt pour donner une réponse directe, complète, dit-il. Mais comme son père et prédécesseur, il note : Jadis, il y avait ici 450 partis politiques, et je ne veux plus que cela se reproduise. Par ailleurs, pour moi, les partis doivent avoir un caractère national, et non ethnique ou régional. Faisant savoir que le pays est en partie sous occupation, Kabila junior relève que ce n est pas seulement le gouvernement qui doit libéraliser, les partis politiques n étant libres de se constituer sous les cieux rebelles.

Quant au Dialogue intercongolais, à l instar de son prédécesseur, il souligne : A mes yeux, le dialogue, cela ne doit être une table ronde où on se partage le gâteau. Ce qui compte, c est de voir comment on va donner au peuple congolais le pouvoir de décider, comment préparer les élections qui, évidemment, auront lieu sur l ensemble du pays. Parlant de la commission d enquête chargée de faire la lumière sur l assassinat de son père, Kabila Junior veut savoir la vérité totale sur tout ce qui s est passé. Ainsi, cette commission se doit de travailler, d interroger tout le monde et d aller jusqu au bout de ses investigations. S agissant des jeunes générations dont il apparaît comme le porte-parole, le chef de l Etat répond qu il ne s agit pas uniquement d une question de génération. Certes, dit-il, les jeunes doivent apporter leur contribution, mais l expérience compte aussi. Et d ajouter : Je dois prendre le temps d évaluer la situation. Mais c est au sujet des Hutus assassinés au Congo lors de la guerre dite de libération menée en son temps par l Alliance des forces démocratiques du Congo que Kabila Junior a prononcé une phrase de trop, phrase ayant des implications sur les plans tant des droits de l homme, judiciaire que diplomatique ainsi que cela transparaît dans l entretien téléphonique ci-dessous entre Colette Braeckman et Ferdinand Ferella sur la Voix de l Amérique le jeudi 8 mars dans la matinée. A la base, la question suivante de la journaliste belge au président congolais. Colette Braeckman : M. le Président, on commence à vous connaître sur la scène internationale. Mais humainement, vous demeurez un inconnu. Je me souviens cependant vous avoir vu de loin à Kisangani, en 1997.. Kabila Junior : C est vrai, j étais là lorsque la ville est tombée aux mains de l Afdl (Alliance des forces pour la démocratie et la libération du Congo, qui visait à renverser Mobutu). J étais avec les Rwandais et lorsque j ai vu comment ils se comportaient avec les réfugiés Hutus, j ai pensé qu un jour nous aurions la guerre avec ces gens-là. Mais à l époque, il était impossible de parler de cela et par la suite, tout a été fait pour bloquer la commission d enquête de l Onu par Bizima Kahara entre autres, qui était alors ministre des Affaires étrangères. Aujourd hui, bien sûr, si l Onu voulait encore enquêter sur cette affaire, elle serait la bienvenue. Depuis lors, dans la région, il y a eu d autres victimes, congolaises celles-là. Une Ong américaine a estimé que 2.500.000 civils congolais avaient péri au cours de la guerre actuelle. Un chiffre aussi massif n est pas le fait du hasard : il y a bien eu l intention de tuer la population. Cela aussi, c est un génocide, contre les Congolais cette fois, mais nul ne s en émeut. Il est vrai que dans les forêts de l Est, il n y a pas les caméras de Cnn..On a parlé

des massacres de Kasika, de Makobola, de Shabunda plus récemment, mais qui s y intéresse? Lorsque les Maï-Maï révèlent ces atrocités, on répond qu il s agit de la propagande des extrémistes hutus..expliquez-moi comment la communauté internationale peut considérer que tout le peuple congolais est devenu interhamwe (les milices Hutus, Ndlr). Et ainsi que le note bien notre consœur dans l entretien téléphonique, c est à se demander si Kabila Junior a jugé sincèrement les implications diplomatiques de sa réponse. Et même au-delà. Car, non seulement cela peut affecter les rapports entre Kigali et Kinshasa qui sont au dégel, mais également et désormais, le chef de l Etat congolais est un témoin de premier plan dans l affaire des massacres des Hutus au Congo, une affaire qui sera, au terme du point 9.1a de l annexe A de l Accord de cessez le feu de Lusaka, versée au Tribunal international. Cela aussi a des répercussions sur le plan international, surtout en matière des droits de l homme. Cette phrase de trop du chef de l Etat congolais est une preuve, si besoin en était encore, qu il n est entouré du tout. Comment ses conseillers, dans une interview qui n est pas en direct, n ont pas réalisé que cette phrase peut être assassine, même si d autre part cela apparaît comme une façon de demander aux Rwandais de quels Hutus ils parlent encore. Ci-dessous, des larges extraits de l entretien téléphonique entre Colette Braeckman et Ferdinand Ferella retranscrits par Moïse Musangana Entretien téléphonique entre Colette Braeckman et Ferdinand Ferella Voa : Avez-vous été surprise par ces propos? Colette Braeckman : Je savais qu il avait été témoin. Je lui ai posé la question en lui disant : je me rappelle que vous avez été à Kisangani cette année-là. J étais surprise par la précision de sa réponse. L information, elle-même, on l avait déjà parce que son père avait dit la même chose. La différence est que son père n était pas sur le terrain. Il était à Goma ou à Bukavu, tandis que le fils était intégré dans l armée, dans les troupes de libération qui avançaient à travers le Congo. Donc, il est aussi un témoin de premier plan. Voa : L on sait aussi qu il est proche de James Kabarebe qui, à l époque - vous l avez relaté dans votre livre sur le conflit congolais dirigeait les opérations de l armée rwandaise à Kisangani. Colette Braeckman : Il était jeune. Il devait avoir 25 ou 26 ans. Kabila père avait confié son fils au commandant James pour avoir une formation militaire. Donc, ils étaient ensemble. Et Joseph Kabila me dit qu avant, il avait été aussi en Ouganda, il connaissait très bien l armée ougandaise ( ).

Voa : Est-ce que vous avez le sentiment, Colette, que Joseph Kabila serait prêt à collaborer éventuellement avec une reprise éventuelle de cette enquête sur cette affaire? On sait bien que le 1er rapporteur spécial de l Onu Roberto Garreton est attendu à Kinshasa dans les prochains jours? Colette Braeckman : Je ne sais pas s il est prêt à témoigner personnellement. Ça, je ne lui ai pas posé la question (..). Il a indiqué très clairement qu aujourd hui la commission d enquête est la bienvenue à Kinshasa. Si elle veut reprendre ses investigations, elle aura toute la latitude de Kinshasa pour continuer à travailler. Autrement dit, M. Garreton est le bienvenu à Kinshasa. Voa : Comment vous interprétez le fait que cette affaire fasse surface aujourd hui, au moment où il y a dégel entre Kinshasa et Kigali? Est-ce que tout cela ne va pas à nouveau empoisonner le climat? Colette Braeckman : Je pense que le président Kabila n a pas sincèrement pesé les implications diplomatiques lorsque je lui ai posé la question : était-il là à Kisangani à ce moment là? Il a seulement confirmé. Je ne crois pas qu au moment où il a répondu, il a pensé à ce que tout cela pouvait entraîner sur le plan diplomatique ( ). On verra bien. In Le Potentiel mars 2001