REMERCIEMENTS AVANT-PROPOS



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Transcription:

REMERCIEMENTS Ce travail de diplôme n aurait pu être mené à bien sans la collaboration de nombreuses personnes. Je souhaite tout d abord mentionner M. Yves Hausser, qui m a donné l opportunité de ce séjour en Tanzanie au travers de son association, et qui s est occupé de l essentiel de l organisation du stage, avec M. Ezra Ricci. Parmi les membres de l ADAP, mes remerciements vont à M. Jean-Felix Savary, pour le soutien qu il m a manifesté, ainsi que les membres de l ADAP en Tanzanie, M. Henry-Felix Ogejo, pour son support logistique et les informations qu il m a transmises, M. Shaaban Kyombo et M. Gerald Ngassa. Je remercie l ICRAF et plus particulièrement M. Gerson Nyadzi, ainsi que M. Humphrey Natai de TAWIRI qui m ont encadré durant mon séjour. Un grand merci aussi à M. René Couturier, qui m a présenté la Tanzanie sous ses aspects historiques, sociologiques et commerciaux, ainsi que M. Malembeka, M. Mazemba, M. Malilo et M. Nguvumali qui m ont présenté l histoire de leur région et leurs croyances. Merci aussi à M. Palangyo (Mpanda District Natural Resources Officer), Mme Singleton (Tanzania Natural Resources Forum) et Mme Redding-Jones (Tanzania Big Game Safari.) Merci enfin à Mama Aswele et Mary pour leur accueil leur gentillesse. AVANT-PROPOS Ce travail de diplôme s inscrit dans le cadre de la formation dispensée par la HES- SO, filière Gestion de la Nature de l Ecole d Ingénieurs de Lullier. Il consiste en la mise en pratique des connaissances acquises tout au long de la formation par l élaboration d un travail de recherche technique et scientifique, ainsi que par le suivi d un stage favorisant l intégration du diplôme dans le cadre professionnel. Le stage fut effectué au sein de l ADAP (Association pour le Développement des Aires Protégées) en Tanzanie. Il s insère dans un projet de développement communautaire des ressources naturelles mené par l association depuis 2001, axé essentiellement sur le soutien à l apiculture villageoise dans la région de Rukwa.

LISTE DES ACRONYMES ADAP: BKP: BKZ : CBC: CBT: CCA: DBO: DGO: DNRO: ECS: FBD: GCA: GR: GTZ : IBA: ICRAF: IDBC: IEA: IUCN : MNRT: NEP: NFP: NTP: TANAPA: TAWIRI : TBGS: WD: WMAs: WPT: Association pour le Développement des Aires Protégées Beekeeping Policy Beekeeping Zone Community-Based Conservation Community-Based Tourism Community Conservation Area District Beekeeping Officer District Game Officer District Natural Resources Officer Environment Conservation Scout Forestry and Beekeeping Division Game Controlled Area Game Reserve Deutsche Geselschaft für technische Zusammenarbeit Inyonga Beekeepers Association International Centre Research for Agronomy and Forestry Inyonga Division Board of Coordination Inyonga Ecotourism Association The World Conservation Union Ministry of Natural Resources and Tourism National Environmental Policy National Forest Policy National Tourism Policy Tanzania National Parks Tanzania Wildlife Institute Tanzania Big Game Safaris Wildlife Division Wildlife Management Areas Wildlife Policy of Tanzania LISTE DES PHOTOGRAPHIES 1. Escarpements de Mlele 2. Mlele Forest, miombo mixte 3. Mlele Forest, miombo mixte avec prairies 4. Iloba River 5. Mbuga 6. Ruche en tronc 7. Déforestation

RESUME La région d Inyonga a vu sa population doubler durant ces quinze dernières années, ce qui conduit à une surexploitation des ressources naturelles de la région (intensification des cultures et de la pression sur la faune.) Face à cette situation, l alternative consiste en la diversification des activités source de revenus, ainsi qu à l introduction d une exploitation durable de ces ressources. Le gouvernement tanzanien, favorable à cette approche, a mis en place un nouveau type d aire protégée, les Bee Reserve, dédiées à l apiculture et gérée par les villageois. Quelques villageois d Inyonga, regroupés en association, ont défini une zone pour mettre en action ces principes, la Beekeeping Zone, portion de la Mlele Forest Reserve. Néanmoins, la législation concernant les ressources naturelles n étant pas encore harmonisée, cette zone possède trois statuts qui autorisent l exploitation de bois, la chasse sportive et l apiculture. Ceci provoque de nombreux conflits d utilisation du territoire, et ne permet pas à la communauté d Inyonga de bénéficier de manière adéquate des ressources naturelles de sa région. Un mode de gestion de la BKZ intégrant les volontés et les besoins de chaque protagoniste permettra de diversifier les activités sources de revenus, et se rendra compatible à la nécessité d une gestion durable de l environnement. Le présent plan de gestion a donc été élaboré avec la collaboration de tous les acteurs impliqués dans le futur de la Beekeeping Zone, et présente diverses mesures permettant à chacun de bénéficier de cette aire protégée, tout en assurant durablement les qualités de l écosystème de Mlele.

TABLE DES MATIERES 1. INTRODUCTION... 1 2. PROBLEMATIQUE... 2 3. CONTEXTE... 3 3.1. Perspectives de planification... 3 3.2. Processus de planification... 3 3.3. Contraintes de planification... 4 4. DIAGNOSTIC... 5 4.1. Histoire... 5 4.2. Situation géographique... 6 4.3. Morphologie... 7 4.4. Géologie et Pédologie... 7 4.5. Climat... 8 4.6. Végétation... 8 4.6.1. Causes de dégradation - Feux... 10 4.6.2. Causes de dégradations- Divers... 13 4.7. Faune... 14 4.8. Utilisations et revenus générés... 15 4.8.1. Apiculture... 15 4.8.2. Chasse sportive... 17 4.8.3. Exploitation du bois... 19 4.8.4. Récolte de nourriture... 19 4.8.5. Culte traditionnel... 20 4.8.7. Ecotourisme... 21 4.9. Accès et infrastructures... 22 4.10. Situation socio-économique de la communauté d Inyonga... 22 4.10.1. Historique... 22 4.10.2. Population... 23 4,10.3. Ethnies et religions... 23 4.10.4. Activités économiques... 23

4.11. Gestion actuelle de la BKZ... 25 4.12. Ressources exceptionnelles... 26 4.13. Potentiel de développement et contraintes... 27 4.13.1. Apiculture :... 27 4.13.2. Chasse sportive... 28 4.13.3. Récolte de nourriture... 28 4.13.4. Ecotourisme :... 29 4.14. Contraintes de gestion... 32 4.14.1. Problèmes liés à la conservation... 32 4.14.2. Problèmes administratifs et opérationnels... 33 5. VISION... 34 6. OBJECTIFS... 34 7. OBJECTIFS PARTICULIERS... 35 7.1. Objectifs d utilisation... 35 7.2. Objectifs de conservation... 42 7.3. Objectifs administratifs... 49 8. ORGANISATION DE L ORGANE DE GESTION... 58 9. ROLE DES DIFFERENTS ACTEURS... 59 10. RESSOURCES FINANCIERES NECESSAIRES... 60 11. EVALUATION... 61 12. CONCLUSION ET PERSPECTIVES... 70 13. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES... 71 14. LISTE DES ANNEXES... 75

1. INTRODUCTION La Tanzanie, pays d Afrique de l Est, compte 37 millions d habitants, dont la moitié vit en dessous du seuil de pauvreté. Depuis son accession à l indépendance en 1961, le gouvernement tanzanien a pour objectif de lutter contre la pauvreté de sa population, notamment au travers de l agriculture, qui fait vivre une grande partie de la population et dont l économie est fortement dépendante. La nécessité de développer durablement ce secteur s avère indispensable, ce qui implique une certaine diversification de la production, afin de poursuivre les objectifs de conservation durable des écosystèmes. L approche de ce type de gestion s effectue au travers des catégories de l IUCN et plus particulièrement, pour la zone étudiée, sous la dénomination de Community Conservation Area (CCA), qui correspond à la catégorie VI (annexe 1.) Elle présente un des enjeux majeurs de la conservation de la biodiversité au XXIème siècle, s adressant au problème de la conservation en dehors des aires protégées classiques. Cela permet de redonner leur place légitime aux communautés locales, tant au niveau de la propriété, de l utilisation que de la gestion des ressources naturelles du territoire sur lequel elles vivent. Le gouvernement, favorable à cette approche, a entrepris cette dernière décennie des réformes législatives et institutionnelles pour permettre l implantation de ce type de gestion. 1

2. PROBLEMATIQUE L augmentation démographique et la pauvreté qui lui est liée ont conduit à des pratiques dommageables d un point de vue environnemental. Beaucoup d agriculteurs se tournent vers des cultures intensives plus rentables (tabac) alors que d autres optent pour le braconnage à des fins commerciales. La culture du tabac présente un grand danger pour l écosystème forestier, et la région d Inyonga est menacée de déforestation si des alternatives ne sont pas trouvées à court terme. En effet, cette culture intensive appauvrit rapidement le sol, ce qui nécessite de déplacer les cultures régulièrement, et demande donc de grandes surfaces, prises sur la forêt. La perte de ce type d habitat s avérera fatale pour une grande partie de la faune qui en dépend. Une alternative à l accroissement de la surface des terres cultivées consiste en l augmentation de production de ces terres déjà en place, qui est rendue possible suite à l amélioration de certains paramètres culturaux : amélioration de la qualité des sols par la mise en place d intercultures favorisant la fixation de l azote dans le sol, amélioration du système de rotations des cultures, diversification de la production agricole, augmentation de la pollinisation par la présence d abeilles mellifères. Une autre alternative serait de favoriser la diversification des activités de la population, et donc de la rendre moins dépendante des activités agricoles ou de l utilisation illégale des ressources naturelles. Une des solutions émane du gouvernement tanzanien, au travers du Ministry of Natural Resources and Tourism, qui a mis en place un concept nouveau, la Bee Reserve, qui permettrait une gestion intégrée et durable des ressources naturelles. Les villageois de la division d Inyonga, à qui il a été proposé de participer à cette nouvelle approche, se sont montrés enthousiasmés. Une zone pilote a été définie par l ensemble des villageois pour mettre en action ces principes, la Beekeeping Zone. Cette zone a été identifiée comme favorable au classement en Bee Reserve par les communautés locales (12 villages), et a été acceptée au niveau du District et du Ministry of Natural Resources and Tourism. Ce statut intermédiaire est rendu nécessaire par le processus de classement de la Bee Reserve, qui implique le déclassement de la Forest Reserve sur laquelle elle se trouve. Il est donc indispensable de s assurer de la réussite de la gestion intégrée de la BKZ avant d entamer ce processus. Malgré ces dispositions encourageantes, des conflits d intérêt subsistent et ne permettent pas un développement satisfaisant de cette activité. En effet, l apiculture étant largement dépendante des zones forestières, elle entre en conflit avec d autres utilisateurs (chasse sportive, exploitation de bois, cueillette.) Afin de diminuer cette pression sur la faune et la forêt en général, un mode de gestion de la BKZ intégrant les volontés et les besoins de chaque protagoniste permettrait de diversifier les activités sources de revenus, et se rendrait compatible à la nécessité d une gestion durable de l environnement. 2

3. CONTEXTE 3.1. Perspectives de planification Ce plan de gestion est l aboutissement d un processus de planification incluant la participation de tous les acteurs concernés par le classement de la Bee Reserve, dans une optique d intégration et de participation active de ces derniers. Les différents acteurs (IBA, TBGS, ADAP, DBO, DNRO, DFO, District Land Tenure Officer, Goldapis Ltd, IEA, botanistes, membres de l administration des villages de la division) se sont préalablement rencontrés au cours d ateliers, afin de partager leurs opinions sur l implantation de la BKZ, recueillir les commentaires de chacun sur les propositions de gestion et de parvenir à des accords sur la gestion de la zone. Les mesures décrites dans ce rapport sont issues de discussions menées avec les acteurs locaux (IBA, TBGS, DNRO.) (annexe 33.) 3.2. Processus de planification Processus Phase initiale Commentaire En 2001, l'adap a conduit une enquête villageoise afin de recenser les problèmes rencontrés par la communauté dans ses activités, et plus particulièrement les apiculteurs. Les coopératives existantes dans la région regroupaient essentiellement des agriculteurs, laissant peu de place à l'apiculture. La volonté de créer une association d'apiculteurs a donc vu le jour et Inyonga Beekeepers Association a débuté en 2002. Deuxième phase-projet Les apiculteurs d'iba pratiquant sur différentes réserves de la région, de nombreux conflits survenaient avec la Wildlife Division notamment. De plus, la politique tanzanienne, introduisant le concept de CBC dans ses nouvelles lois, donnait alors la possibilité aux communautés de gérer certaines portions de territoire. IBA a alors émis la volonté de créer une Bee Reserve pour faciliter la pratique de l'apiculture. Le processus de classement d'une portion de Forest Reserve en Bee Reserve étant long, le projet consistait en la mise sur pied d'un Joint Forest Management. En 2004, le MNRT propose alors la mise sur pied d'une Beekeeping Zone, qui permettrait d'apprécier l'efficacité de cette nouvelle approche sans nécessité une procédure compliquée. Troisième phase-atelier Quatrième phase- Autorisation Phase finale - Transmission des droits de gestion En 2004, l'adap a organisé un atelier réunissant tous les acteurs afin d'identifier les problèmes présents sur la BKZ et aboutir à des propositions et des accords de gestion de la BKZ. En octobre 2005, IBA reçoit un accord de principe quant-à leur utilisation et gestion de la BKZ. Préparation d'un accord formel par le MNRT, qui devra être signé par IBA, TBGS et le MNRT en début 2006. Cet accord comprendra le plan de gestion de la BKZ. 3

3.3. Contraintes de planification Statut légal de la zone : Actuellement, la zone étudiée possède trois statuts légaux différents, régis chacun par une politique propre, dont les objectifs sont décrits à l annexe 2: Forest Reserve : La Beekeeping Zone se situe sur Mlele Forest Reserve, elle dépend donc de la Forestry Division du Ministry of Natural Resources and Tourism (MNRT). Ce type de réserve est géré directement par le parlement tanzanien, et est réglementé par la Forest Policy. Game Controlled Area : Ce type de zone est géré par la Wildlife Division du MNRT, et est réglementé par la Wildlife Policy. Beekeeping Zone : Ce statut est un statut transitoire avant son classement en Bee Reserve. La Beekeeping Policy la réglemente. La politique tanzanienne en matière de ressources naturelles souffre d un manque de cohérence entre les différentes lois, de même que de mécanismes d application de ces lois et de coordination inter-secteurs. Les activités de chasse, par exemple, entrent en conflit avec d autres utilisations nonconsommatrices de ressources naturelles (apiculture et écotourisme), bien que ces activités engendrent plus de revenus pour les communautés que ne le ferait la chasse. Cette activité continue pourtant à prévaloir, ce qui ne laisse que peu de place à la diversification des activités pour les communautés (HAUSSER et al., 2004), et plus particulièrement sur les GCA, puisque les compagnies de chasse, exploitant des blocs dont le statut est mal défini, profitent des droits qui leur ont été accordés de manière préférentielle pour exclure les autres utilisateurs. 4

4. DIAGNOSTIC 4.1. Histoire Jusqu au XVème siècle, l Afrique de l Est est habitée par des chasseurs-cueilleurs et des pasteurs nomades, divisés en différents groupes linguistiques : khoisans, couchites, nilotes et bantous 1, entretenant des liens commerciaux. Au XVème siècle, quelques royaumes se forment dans la région des Grands Lacs : Bunyoro 2, Buganda 3, Rwanda, Burundi. Vers la fin du XVIIIème siècle, les Massaïs, venus du nord de l Afrique de l Est et en mouvement vers le sud, sont confrontés à deux autres ethnies déjà implantées dans la région de l actuelle Tanzanie : les Gogo (occupant une zone proche du lac Tanganika) et les Hehes (vivant au centre du pays.) Parallèlement, au XIème siècle, une vague de navigateurs marchands de la péninsule arabique arrive sur les côtes africaines. Le littoral entre alors dans le domaine des sultans d Oman, avec pour capitale Zanzibar. Une culture unique voit alors le jour, la culture swahilie, syncrétisme de croyances arabes et de coutumes africaines. En 1750, les marchands arabes parviennent au lac Tanganyika. Des entrepôts sont implantés à Tabora ainsi que sur les plaines centrales. Par la suite, les caravanes ramèneront sur la côte ivoire et esclaves. Un grand nombre d entre eux ne parviendront pas à destination. Les historiens estiment à dix millions le nombre de victimes de ce trafic. Les esclaves sont envoyés sur les îles de Zanzibar et Pemba, où ils travailleront dans les plantations. Le port de Zanzibar devient le plus grand marché d esclaves de tout le continent, chaque année, près de 15'000 esclaves y débarquent. A la fin du XVIIIème siècle, l intérêt de l Europe pour l Afrique se manifeste, et les Etats européens se partagent la carte du continent (annexe 3.) L Allemagne renforce alors sa présence au Tanganyika, et en prend officiellement possession en 1888. Zanzibar et Pemba tombent aux mains des Anglais, ainsi qu une bande côtière. Les Allemands entreprennent la mise en valeur de leurs nouveaux territoires, et construisent routes, chemins de fer, écoles et hôpitaux. Pendant la première guerre mondiale, l Afrique de l Est devient elle aussi le théâtre de combats entre Allemands et Anglais. Défaites en Europe, les troupes allemandes se voient retirer le contrôle du Tanganyika. En 1922, la Société des Nations confie le mandat à la Grande-Bretagne. De la colonisation allemande, le pays garde quelques mots (Schule), un certain goût pour le chou dans l alimentation, deux lignes de chemin de fer et quelques vestiges guerriers. 1 Khoisans : Famille linguistique d Afrique australe. Couchites : Famille linguistique du nord du Kenya. Nilotes : Famille linguistique parlée au Soudan, Niger, Ethiopie et Tchad. Bantous : Famille linguistique du Cameroun et du sud-est du Nigeria. 2 Ancien royaume à l ouest du lac Victoria, couvrant le territoire de l actuel Ouganda. 3 Ancien royaume de la rive nord du lac Victoria, situé dans le sud de l actuel Ouganda 5

Pourtant, les Anglais se montrent peu enthousiasmés par leur nouvelle acquisition et négligent le Tanganyika. Parallèlement, un mouvement d émancipation se propage à travers l Afrique et atteint le Tanganyika, quelques structures politiques apparaissent alors sous forme de syndicats agricoles ou de coopératives. Au début des années 50, l émergence de deux groupuscules politiques, le TAA (Tanganyika African Association) et le TANU (Tanganyika African National Union) coalise les forces indépendantistes, avec à leur tête Julius Nyerere. L indépendance est concédée sans regret le 9 décembre 1961. Un an plus tard, la république est proclamée, Julius Nyerere à sa tête. Le nouveau chef d Etat, influencé par la Chine communiste, engage son gouvernement sur une voie radicale. L éducation devient la priorité, l économie est nationalisée. Le domaine de l agriculture est lui aussi réformé : des centaines de communautés villageoises (ujamaa) sont organisées sur le modèle collectiviste, les parcelles sont regroupées et des subventions sont distribuées pour la création de coopératives. Le résultat n est pas à la hauteur des espérances. Le 30 novembre 1985, après 24 ans au pouvoir, Nyerere se retire et cède la place à un membre de son parti, le CCM 4. Se démarquant de son prédécesseur, le nouveau dirigeant libéralise l économie et autorise le multipartisme en 1992. Néanmoins, le parti au pouvoir est toujours le CCM à ce jour. 4.2. Situation géographique La Tanzanie, pays d Afrique de l Est est bordé au nord par le Kenya, le Rwanda et le Burundi, à l ouest par le Zaïre et la Zambie, au delà des lacs Tanganika et Rukwa, ainsi que par le Malawi sur l autre rive du lac du même nom, et au sud par le Mozambique, au-delà du fleuve Ruvuma. La Tanzanie est baignée à l est par l océan indien, au large duquel se situent les trois îles de Zanzibar, Pemba et Mafia, territoire tanzanien depuis 1961, date à laquelle le Tanganika et Zanzibar se sont réunis pour former la Tanzanie. La division d Inyonga se situe dans la région de Rukwa, à l ouest de la Tanzanie. Cette région compte trois districts : Mpanda, Nkansi et Sumbawanga (centre administratif.) Cette région, composée de 68'635 km 2 de terre et 6'605 km 2 de lac, représente environ 8% de la surface du pays (annexe 4.) Le village d Inyonga est le chef lieu de la division du même nom. La division compte 12 villages : Inyonga, Nsenkwa, Kamisisi, Mtakuja, Kaulolo, Utende, Mgombe, Kanoge, Wachawaseme, Mapili, Ipwaga, Masigo (annexe 5.) La Beekeeping Zone, se situe à une vingtaine de kilomètres à l ouest d Inyonga, elle couvre une surface de 850 km 2. Elle est bordée à l est par les villages du ward d Utende (Utende, Mgombe, Kanoge, Wachawaseme), au sud par la Game Reserve de Rukwa-Lukwati, à l ouest et au nord par la Mlele Forest Reserve. Le Katavi National Park jouxte la Game Reserve sur sa limite ouest (annexe 6.) 4 CCM : Chama cha Mapinduzi Le Parti de la Révolution. 6

4.3. Morphologie La vallée du Rift, faille dans l écorce terrestre, s étend du Proche-Orient à l Afrique australe en passant par la mer Morte, la mer Rouge, la dépression éthiopienne des Afars 5, le lac Turkana (Kenya) et la Tanzanie jusqu au lac Malawi, sur une distance de 6'500 km. De part et d autre de la vallée, les plaques continentales, la plaque africaine à l ouest et la plaque arabique à l est partent en direction opposées, provoquant l apparition d une ligne de fracture. Sa largeur oscille autour de 40 km, sa profondeur peut dépasser 2500 mètres. Sur les franges surélevées de la vallée s érigent quelques volcans, à l instar du mont Kilimandjaro et du mont Meru. La morphologie de la BKZ est directement influencée par cette faille : en effet, elle est bordée au sud par les escarpements de Mlele et est traversée en son centre par les escarpements de Kanono, à l est desquels se trouve une zone d altitude, le haut plateau d Uruwira (annexe 7.) 4.4. Géologie et Pédologie La région d Inyonga se situe sur le Dodoman System, formé durant l éon archéen (2.5 millions d années, fin de l ère précambrienne.) Ces roches archéennes sont composées de vastes ensembles granitiques dans lesquels sont insérées des formations plus anciennes de roches volcaniques et sédimentaires, les roches vertes (suite de laves différenciées, du basalte aux andésites, qui ressemblent à la fois aux volcanites de dorsale et aux volcanites de zones de subduction.) Elles forment le socle sur lequel se déposeront des roches sédimentaires. Ce socle, formant un bouclier rigide, constitue l ossature du continent, qui a été plissé, témoignant de la superposition de plusieurs cycles orogéniques. Il est donc affleurant dans cette région. Le démantèlement des chaînes de montagnes a alimenté le dépôt des premiers sédiments. Les roches du Dodoman forment une bande le long de la partie sud du craton tanzanien (nucléus de croûte continentale qui est resté préservé depuis les temps archéens, annexe 8.) Elles sont composées de gneiss, quartzites, migmatites et schistes. La combinaison de roches cristallines, de climat humide et de températures élevées a permis la formation d un sol profond (plus de 3 mètres), drainant, pauvre en nutriments. Acide, il ne contient qu une faible portion organique. 5 Fossé d effondrement entre les hauts plateaux du Yémen, d Ethiopie et de Somalie. 7

4.5. Climat Précipitations : Le climat de la Mlele BKZ est influencé par les courants d air chaud provenant du lac Rukwa au sud. La forêt de Mlele se trouvant en altitude (1500 mètres), ces courants se refroidissent et provoquent des pluies, de novembre à mai, alors que l autre partie de l année est sèche. Les précipitations moyennes de la région de Rukwa oscillent entre 800 et 1200 mm par an. Températures : Des variations de température saisonnières sont observées. En effet, la saison des pluies est accompagnée de températures élevées (elles oscillent entre 22 C et 33 C), alors que durant le reste de l année, les températures varient entre 19 C et 28 C. 4.6. Végétation Mlele Forest, sur laquelle se situe la BKZ, est comprise dans un des plus grands biomes d Afrique, la forêt tropicale semi-décidue (miombo) du Zambèze Central, qui s étend d Angola jusqu aux côtes du lac Victoria en Tanzanie (annexe 9.) La flore typique du miombo est représentée dans cette région, avec toutefois une diversité plus élevée, concernant notamment les arbres à feuilles persistantes. Cette région est constituée de plaines et de collines couvertes par des massifs forestiers, ainsi que de zones temporairement humides. Ces surfaces forestières sont dominées par des essences de la sous-famille des Caesalpinioideae (espèces appartenant aux genres Brachystegia, Julbernardia et Isoberlinia.) Les arbres ont généralement une hauteur de 15 à 20 mètres, les strates inférieures sont constituées d arbustes à feuilles larges et de hautes herbes. Bien que la strate arborescente soit composée en majorité d arbres à feuilles caduques, elle possède une certaine proportion d arbres à feuilles persistantes (environ un quart.) Les feux de forêt sont un facteur écologique important jouant un rôle dans la dynamique du miombo. Les précipitations saisonnières laissent la végétation sèche durant de longues périodes, et les orages accompagnés de foudre du début de la saison des pluies provoquent fréquemment des feux, qui permettent de régénérer la végétation. De plus, ce biome est une souche d endémisme pour diverses espèces du genre Brachystegia. La végétation présente au sein de la BKZ est influencée par le type de sol de la région. En effet, le sol étant très minéral (sable pour la majeure partie, roche sur les reliefs), et l eau n étant pas retenue, il ne permet pas un développement important de la strate arborescente. Le sol ne joue pas son rôle de support physique, et les arbres de taille importante s effondrent, ce qui permet un renouvellement fréquent de la végétation. Quelques secteurs, aux abords des cours d eau, sont couverts par une végétation riveraine bénéficiant de meilleures conditions hydriques et d un sol plus organique. 8

Méthodologie appliquée : Un relevé de la végétation arborescente comprenant les essences mellifères (15 cadrats de 100m*100m, 15 cadrats de 50m*50m) a été effectué par un botaniste en 2004 en vue d un monitoring sur les impacts de l utilisation humaine et des changements climatiques (liste d espèces, annexe 32.) Quatre milieux ont été identifiés (auxquels ont été ajoutées les plaines d inondation, qui présentent une morphologie différente), pour lesquels une description succincte est donnée dans ce chapitre. La cartographie de ces différents milieux se trouve en annexe (annexe 10), ainsi que la représentation de la proportion de quadrats dégradés (annexe 11.) La proportion de quadrats dégradés représente 60% des relevés, ces derniers ne semblent pas liés à la proximité des pistes ou des villages. Toute la zone est donc exploitée, indépendamment des conditions d accès. De plus, des espèces ont été collectées de manière à enrichir l herbier d Inyonga et l herbier national de Tanzanie à Arusha. 1. Végétation des reliefs : La plupart des reliefs (1500 mètres) et escarpements sont dominés par Julbernardia globiflora qui forment une canopée relativement dense, d une hauteur de 15 mètres. La strate herbacée est composée en majorité d espèces non comestibles par la faune (Fimbristylis dichotoma, Fuirena bachyrriza, Fuirena umbellata, Cyperus pulchellus.) 2. Végétation de type Miombo mixte : Photo 1 : Escarpements de Mlele (WEBER, 2005) Ce type de végétation recouvre les trois quarts de la BKZ, en altitude (1200 mètres.) La strate arborescente forme une couverture discontinue composée d essences caduques, d une hauteur de 20 mètres. La strate arbustive comporte quelques essences persistantes. La strate herbacée présente le taux de recouvrement le plus important, avec des espèces ne dépassant pas 1.5 mètres. Photo 2 : Mlele Forest, miombo mixte (WEBER, 2005) Ces espèces sont vivaces ou annuelles. Ce type de milieu est utilisé par la faune durant la journée car la densité de la végétation lui offre des sites de cache. 9

Hélène Weber 3. Végétation de type Miombo mixte avec prairies : Ce milieu de transition entre la forêt Miombo mixte et les forêts riveraines présente une couverture discontinue, avec des arbres atteignant 15 mètres en mosaïque de milieux prairials. Ces arbres, à feuilles caduques, perdent leurs feuilles en saison sèche. Photo 3 : Mlele Forest, miombo mixte avec prairies (WEBER, 2005) 4. Forêts riveraines : La Beekeeping Zone comprend de nombreuses rivières permanentes ou saisonnières (Iloba river, Msima river, etc.) Les forêts qui les bordent sont composées d arbres atteignant 20 mètres, la canopée est dense, et les states de végétation sont difficilement discernables. Certaines essences sont persistantes. La strate herbacée est luxuriante lorsque le taux de recouvrement permet le passage de la lumière, on observe beaucoup de lianes, de fougères et d orchidées. Photo 4 : Iloba River (WEBER, 2005) 5. Prairies ouvertes inondées de manière saisonnière (mbuga) : Ce type de milieu, inondé pendant la saison des pluies, est dominé par la strate herbacée. Les essences arborescentes sont isolées. Ce type de prairie est fréquenté par toutes les catégories de faune qui y trouvent une nourriture abondante. Photo 5 : Mbuga (WEBER, 2005) 10

4.6.1. Causes de dégradation - Feux La BKZ est sujette à des incendies fréquents qui menacent le couvert boisé. Bien que les feux de brousse fassent partie intégrante de l écologie du miombo, les mises à feu d origine anthropique augmentent la fréquence de ces derniers bien au-delà du seuil naturel toléré par la végétation. Cette pratique est très largement utilisée pour des objectifs divers : Dégagement des chemins et des abords des camps d apiculteurs et ruches pour prévenir les attaques de faune. Enfumage des abeilles pour faciliter le prélèvement du miel. Régénération des pâturages pour la pratique de la chasse. Dégagement des pistes à la fin de la saison des pluies. Feux coutumiers. Feux d'assainissement: destruction des animaux et parasites indésirables (mouches tsé-tsé, serpents, etc.) Cependant, le feux ne sont en aucun cas planifiées et coordonnées sur la BKZ, chacun utilise le feu pour ses besoins propres, bien souvent sans tenir compte des réglementations en la matière (le brûlage est autorisé en mai et juin, période à laquelle il a le moins d impacts.) La compagnie de chasse TBGS assure n utiliser que rarement cette pratique, puisque lorsqu elle arrive sur son bloc de chasse, la plupart des secteurs propices à la faune sont déjà brûlés (REDDING-JONES, communication personnelle, 2006.) Néanmoins lorsqu elle l utilise, c est dans un but de reverdissement des graminées pérennes pour l'alimentation du gibier. Les emplacements sont choisis au hasard. Les apiculteurs quant-à eux brûlent les secteurs utilisés pour leur activité (théoriquement un rayon de 5 mètres autour des camps d apiculteur, et de 1 mètre autour des ruches, de même que les abords des chemins qu ils empruntent) deux fois par an, en juin-juillet pour la récolte principale et en novembre-décembre pour la récolte secondaire. Ceci est effectué dans un but de nettoyage qui permet d'accroître la distance de vision afin de diminuer les risques de rencontres avec la faune. Par ailleurs, les braconniers sont souvent mentionnés lorsqu il s agit de feux de brousse, qui sont utilisés pour la pratique de la chasse collective par feu encerclant. De manière naturelle, le feu est déclenché au niveau de la strate herbacée, et n épargne pas les ligneux. Les formations végétales peuvent être parcourues par le feu si elles comportent une strate herbacée continue et assez dense, et si celle-ci atteint un degré de siccité suffisant. Le miombo atteint cet état de siccité après 6 à 10 semaines de sécheresse. Ainsi le degré de combustibilité d'une strate herbacée dépend de sa situation (ombrage, microrelief), de sa composition floristique et du pourcentage de sa biomasse desséchée. L'état moyen de siccité de la végétation basse s'accroît durant le début de la saison sèche mais évolue également au cours de la journée (l'humidité 11

captée pendant la nuit se perd au cours de la journée au fur et à mesure que l'air s'échauffe; en fin d'après-midi, la plante s'humidifie à nouveau.) Indépendamment de l'activité physiologique du végétal, d'autres facteurs peuvent activer considérablement l'incendie, le plus important étant le vent. La pente du terrain est également favorable à la progression de l'incendie. Cet ensemble de circonstances liées au couvert végétal et aux conditions topographiques et climatiques permet de distinguer deux grands types de feux de brousse: Le brûlage tardif, violent, souvent renforcé par un vent soutenu, qui consume la quasi-totalité de la strate herbacée et atteint les ligneux plus ou moins gravement; il a lieu en fin de saison sèche. Le brûlage précoce, généralement allumé volontairement ; il a lieu en début de saison sèche. Installé et maintenu grâce au feu, le miombo réagit davantage à la violence du feu qu'à sa simple existence. S'il est accidentel, le feu tardif survient le plus souvent par temps chaud et sec et par grand vent. Les arbres ne subissent de dégradation directe qu'au niveau des plaies basses (cicatrices d'écorçage.) Mais survenant après la reprise de la végétation, en fin de saison sèche, le feu tardif détruit la jeune feuillaison et parfois la floraison. Obéissant à son rythme saisonnier, l'arbre produira de nouvelles feuilles avant même le retour des pluies, épuisant ainsi ses réserves. Si l'accident se répète plusieurs années de suite, l'épuisement ira en s'accentuant jusqu au déperissement. Le résultat le plus sensible du passage régulier d incendie est la destruction de la litière qui protège le sol du soleil et des intempéries et est destinée à lui fournir les matières humiques. De plus, le passage du feu découvre le sol et l'expose aux rayons du soleil et aux intempéries. Or cette élimination de l'écran végétal s'amplifie lorsque l'incendie sévit plus tard en saison. Certaines parties des végétaux imparfaitement brûlés lors des feux précoces gisent sur le sol, l'ombrageant quelque peu. La couronne de la strate ligneuse n est pas atteinte, mais la chute des feuilles est accélérée par la chaleur. Celles-ci, ayant perdu toute activité chlorophyllienne, tombent et protègent le sol. Plus tardif, l'incendie brûlera les feuilles déjà tombées aussi bien que celles qui tiennent encore aux branches. En fin de saison sèche, non seulement les feuilles jonchant le sol seront éliminées mais également la nouvelle feuillaison. Le sol sera donc très peu recouvert lorsque reviendront les premières pluies. L'exposition prolongée à l'insolation et au vent aurait pour effet immédiat de colmater la surface du sol. Aux premières pluies, l'eau s'infiltre mal et les particules fines déposées par le vent, ainsi que celles arrachées par l'impact direct des gouttes de pluie, forment une pellicule boueuse qui gêne davantage l'infiltration des eaux. Ceci provoque le phénomène de ruissellement qui en transportant les particules fines mises en suspension, déclenche l'érosion. Cette eau perdue contribue à réduire la recharge de la nappe. 12

Malgré son effet réduit en profondeur, le feu provoque la destruction des matières organiques et la modification de la microfaune et de la microflore dans les horizons supérieurs du sol. Or c'est à ce niveau que se déroulent les processus les plus actifs de l'érosion et que débutent le lessivage et l'entraînement des éléments solubles. L'azote qui fait souvent défaut dans les sols tropicaux est fortement influencé par l'incendie, qui diminue la densité des bactéries fixatrices. Ceci implique qu un sol nettoyé par le feu en début de saison sèche aura principalement à souffrir de l'insolation directe mais peu de la pluie puisque la végétation basse aura eu le temps de se reformer avant le retour de la saison des pluies. S il est parcouru par un incendie de mi-saison, il sera exposé aussi bien au soleil qu'aux premières averses. Si le brûlage a lieu en fin de saison sèche, le sol sera soustrait à l'ensoleillement intense mais fortement exposé aux pluies directes, avant que la nouvelle repousse ne puisse le couvrir efficacement. Au vu des dégradations actuelles affectant la BKZ, il est important de considérer les impacts causés par un brûlage incontrôlé, d une part pour protéger ces couverts boisés pour leur valeur biologique, mais aussi pour l importance qu ils représentent pour les activités apicoles, fortement dépendante de la qualité de la végétation. 4.6.2. Causes de dégradations- Divers La menace la plus importante touchant la forêt est l exploitation illégale du bois à des fins diverses : Ecorçage pour construction de ruches, abattage pour construction de ruches et recherche de colonies d abeilles ou de miel, abattage pour exportation, bois de construction ou bois de feu. Les essences utilisées pour le bois d œuvre sont essentiellement Pterocarpus angolensis, Bobgunnia madagascariensis, Afzelia quanzensis et Sterculia quiqueloba. L essence la plus touchée par cette activité est Pterocarpus angolensis, exploitée de manière intensive et au bord de l extinction dans cette région. Actuellement, les exploitants se tournent vers des arbres de dimensions inférieures, et les planches issues de ce bois n atteignent plus les dimensions standards. Ceci les conduit aussi à utiliser d autres essences (Afzelia quanzensis et Sterculia quiqueloba) pour parer à l absence de grumes intéressantes. Les essences utilisées pour la confection de ruches sont Julbernardia globiflora, Brachystegia spiciformis, Brachystegia glaucescens et Brachystegia boemii. Ces essences sont surtout utilisées pour leur écorce qui entre dans la fabrication des ruches traditionnelles. Pterocarpus angolensis, Isoberlinia angolensis, Albizia versicolor et Vitex doniana sont quant-à eux utilisés pour leurs grumes, qui sont utilisées dans la confection de ruches en tronc. 13

4.7. Faune Il n a pas été possible d obtenir des données concernant les populations de faune présentes sur Mlele Forest (les autorités ou institutions tanzaniennes ne procèdent à aucun comptage d espèces.) Les données suivantes sont donc issues de la littérature, et ne présentent qu un aperçu de la faune potentielle qui peut coloniser ce type de milieu forestier. Le miombo, bien qu il présente un potentiel d accueil important dû à son étendue, n abrite qu une densité limitée de grands mammifères. Ceci est attribué à la saison sèche qui s étend sur une grande partie de l année et ses sols pauvres, qui produisent une végétation de peu de valeur nutritionnelle. L éléphant (Loxodonta africana), le rhinocéros noir (Diceros bicornis), et le buffle d Afrique (Syncerus caffer), qui sont capables de s alimenter de fourrage pauvre mais qui en consomment une grande quantité sont présents. Les herbivores sont communs, il s agit surtout d espèces spécialisées dans la consommation de jeunes pousses appétantes, et utilisant différents habitats jouxtant le miombo tout au long de l année, tels que l antilope sable (Hippotragus niger), l antilope rouanne (Hippotragus equinus), le bubale (Alcelaphus buselaphus), le cobe des roseaux (Redunca arundinum), l élan du Cap (Taurotragus oryx), et le grand koudou (Tragelaphus strepsiceros). Toutes ces espèces sont liées aux zones de lisière du miombo. De nombreuses espèces colonisent les prairies ouvertes inondées de manière saisonnière réparties sur toute la zone couverte de miombo, comme le puku (Kobus vardoni), le cob de Lechwe (Kobus leche), le damalisque (Damaliscus lunatus), l ourébi à balais (Ourebia ourebi), le gnou bleu à barbe blanche (Connochaetes gnou) et le guib d eau (Tragelaphus spekii.) Le cob à croissant (Kobus ellipsiprymnus), le guib harnaché (Tragelaphus scriptus), et le céphalophe de Grimm (Cephalophus sylvicapra grimmia) colonisent des habitats plus boisés proches de sources d eau permanentes. La girafe massaï (Giraffa camelopardalis) et le zèbre de Burchell (Equus burchelli) sont des espèces plus ubiquistes. Les grands carnivores présents incluent le lion (Panthera leo), le léopard (Panthera pardus), la hyène tachetée (Crocuta crocuta), la hyène rayée (Hyaena hyaena), le chien sauvage d Afrique (Lycaon pictus) et le chacal à flancs rayés (Canis adustus.) Les prédateurs de taille inférieure sont la genette d Angola (Genetta angolensis), le lynx du désert (Caracal caracal) et le chat doré (Profelis aurata), qui fréquente ce milieu de manière périodique, étant plutôt lié aux forêts plus humides (forêt ombrophile sempervirente, située plus à l ouest du continent.) Les reptiles et amphibiens présentent un taux d endémisme élevé dans ce type de milieu. 14

4.8. Utilisations et revenus générés 4.8.1. Apiculture La BKZ est utilisée essentiellement par des membres d Inyonga Beekeepers Association (IBA.) Actuellement, leur nombre s élève à 451, répartis en groupes de 10 à 15 personnes en fonction de leur village de résidence pour faciliter les démarches administratives. IBA est soutenue financièrement par l ADAP, ce qui permet de fournir gratuitement à ses membres tous les services nécessaires à l amélioration des techniques apicoles (séminaires, construction de ruches, confection des équipements.) Néanmoins, les apiculteurs souhaitant s inscrire auprès d IBA doivent tout d abord lui fournir cinq bidons de 30 kg de miel, puis s acquitter d une taxe d inscription de 5'000 TSc par an (2'500 TSc pour les femmes, de manière à les encourager à pratiquer cette activité.) L accès à la Beekeeping Zone est réglementé par le Division Beekeeping Officer, qui délivre des permis annuels à chaque apiculteur (1'500 TSc.) De plus, il délivre une vingtaine de permis par an pour cette zone à des apiculteurs ne faisant pas partie d IBA (ce nombre doit d ailleurs être considéré avec précaution, car il ne semble pas que le Division Beekeeping Officer tienne un registre des permis délivrés.) Les activités des apiculteurs se répartissent comme suit au cours de l année (annexe 12): IBA: Calendrier des activités apicoles Construction des ruches Préparation des camps Mise en place des ruches Capture des colonies Vérification des ruches et colonies déjà en place Récolte principale (miel et cire) Récolte secondaire (miel et cire) Jan Fév Mars Avril Mai Juin Juillet Août Sept Oct Nov Déc Remise en place des ruches Transport de la production aux villages Vente Formation des apiculteurs La Beekeeping Zone est occupée durant tout le mois de février. La récolte principale commence le 15 juin, car les conditions d hygrométrie permettent la production d un miel de qualité, et se poursuit jusqu à fin juillet. La récolte secondaire est effectuée à partir du 15 octobre et se poursuit jusqu à fin novembre. 15