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Transcription:

1 REPUBLIQUE FRANCAISE COUR NATIONALE DE LA TARIFICATION SANITAIRE ET SOCIALE Contentieux n A.2007.015 Président : M. DURAND-VIEL Rapporteur : Mme WOLF Commissaire du gouvernement : Mme ESCAUT Séance du 23 octobre 2009 Lecture du 20 novembre 2009 Affaire : Président du conseil général de Seine-et-Marne c/ Mme G. et autres Au nom du peuple français, La Cour nationale de la tarification sanitaire et sociale, Vu la requête, enregistrée le 28 juin 2007 au greffe de la Cour nationale de la tarification sanitaire et sociale sous le n A. 2007.015, présentée pour le département de la Seine-et-Marne, représenté par le président de son conseil général en exercice ; Le département de Seine-et Marne demande à la Cour nationale de la tarification sanitaire et sociale d annuler le jugement n 04-033 en date du 14 octobre 2005 par lequel le tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale de Paris a déclaré recevable la demande présentée par Mme G. et autres tendant à la réformation de l arrêté en date du 30 juillet 2004 par lequel le président du conseil général de Seine-et-Marne avait fixé les tarifs journaliers d hébergement et de dépendance applicables à la maison de retraite «résidence du parc aux chênes», située à Cesson et ordonné un supplément d instruction, et le jugement n 04-033 en date du 30 mars 2007 en tant qu il a écarté de la base de calcul du tarif hébergement une somme de 30 400 euros et réformé ce tarif pour 2004 et l a condamné à verser une somme de 1 000 euros aux requérantes au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

2 Le département de Seine-et-Marne soutient que le courrier adressé au tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale était non pas un recours contentieux mais un recours gracieux qui aurait dû lui être adressé ; que ce recours ne comportait pas d exposé des faits et aucun moyen, les signataires se bornant à dénoncer une augmentation jugée excessive des tarifs ; qu à supposer que ce courrier pût être regardé comme un recours contentieux, ses signataires ne justifiaient d aucun mandat écrit ni d aucune qualité pour agir au nom des résidents qu ils affirmaient représenter ; qu à supposer que le mémoire enregistré le 6 mars 2005 puisse être regardé comme la demande contentieuse des intéressés, il était tardif ; que les causes de progression du tarif ont été justifiées devant le tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale de Paris ; que, notamment la convention d assistance et de gestion conclue entre le centre communal d action sociale de Cesson et l association AGEPAH 77 retrace avec précision le montage juridique de la création et du fonctionnement de l établissement ; que ce document prévoit la prise en charge par l association de l organisation, du fonctionnement, de la comptabilité de l assistance en matière financière, sociale et administrative ; qu un avenant à la location prévoit que la location par l AGEPAH au centre communal d action sociale d un équipement mobilier pour une redevance annuelle de 30 400 euros, laquelle a une incidence de 4 euros sur le tarif ; Vu le jugement attaqué ; Vu enregistré comme ci-dessus le 9 novembre 2007, le mémoire en défense présenté pour Mesdames G., L. et C., représentées par Me Lara qui conclut au rejet de la requête, par la voie de l appel incident à la réformation du jugement et à la condamnation du département de Seine-et- Marne à verser à Mme G. la somme de 3 000 euros en application de l article 75-1 de la loi du 10 juillet 1991 ; Madame G., et autres, soutiennent que l arrêté de tarification est intervenu en période estivale sans information ou consultation antérieure des contribuables ; que Mme G. a néanmoins introduit un recours devant le tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale de Paris dénonçant l absence d information et de consultation des familles et l augmentation exorbitante et inexpliquée des tarifs ; que le département de Seine-et-Marne est tardif à contester le jugement avant dire droit, en date du 14 octobre 2005, notifié en novembre 2005 qui s est prononcé sur la recevabilité de leur demande ; que les dépenses relatives aux reliquats de congés payés, non conformes aux règles de la comptabilité hospitalière doivent être écartées de la base de calcul du tarif ; qu en l absence de convention tripartite les bases de calcul du tarif hébergement ne peuvent inclure les dépenses relatives au personnel de soins d un montant de 60 027 euros ; l indemnité de gestion au titre du «recrutement et suivi du personnel» n a aucune justification et n a pas à être incluse dans les bases de calcul du tarif ; que le loyer de 89 738 euros est abusif et indu dès lors que la construction de la maison de retraite a été financée par l argent public sur un terrain appartenant à la commune de Cesson ; qu en l absence d inventaire des mobiliers, le département a produit un tableau d amortissements dépourvu de valeur et des factures qui n établissent pas que les achats en cause auraient bénéficié à la maison de retraite ; Vu enregistré comme ci-dessus le 12 décembre 2007 le mémoire présenté par le département de Seine-et-Marne qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ; il ajoute qu il était recevable à contester en appel le jugement en date du 14 octobre 2005, ainsi que le prévoit en matière de contentieux général l article R. 811-6 du code de justice administrative ; qu il ne peut être reproché à l établissement de disposer d un effectif suffisant alors que la convention tripartite signée en 2005 a confirmé la validité de cet effectif et la nécessité de l accroître de

3 quatre aides-soignants et deux agents de nuit ; que l application du statut de la fonction publique aurait conduit à une masse salariale supérieure ; que la construction de l établissement a été financée par l AGEPAH par emprunt auprès du Crédit foncier de France, dans le cadre d un bail emphytéotique consenti pour 55 ans par la commune ; que la redevance versée par la commune d un montant de 89 738 euros n est pas excessive ; que les factures mobilières de l AGEPAH atteignent un total de 182 000 euros, dont 57 543 euros pour le gros équipement de cuisine, d un montant de 57 543 euros, et 6 910,27 euros pour l équipement téléphonique ; que le solde, correspondant au meubles meublants et divers accessoires (matériel de bureau, voilages, informatique, équipement audiovisuel) s élève à 117 000 euros ; que le coût à la place de 5 850 euros est comparable à celui observé pour d autres maisons de retraite (de 4 000 à 7 000 euros à la place) ; que ces équipements ont été loués à l établissement pour 10 ans pour un loyer de 30 400 euros et selon la convention de location deviendront sa propriété la onzième année ; Vu le courrier en date du 19 août 2009, par lequel les parties ont été informées que la solution du litige était susceptible d être fondée sur un moyen relevé d office ; Vu, enregistré comme ci-dessus le 4 septembre 2009 le nouveau mémoire présenté pour Mmes G., L. et C., tendant aux mêmes fins que leur précédent mémoire par les mêmes moyens et, en outre, par le motif que l arrêté tarifaire contesté est illégalement intervenu en l absence de convention tripartite ; que la «redevance de gestion» de 14 640 euros versée n a aucune justification ; Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ; Vu le code de l action sociale et des familles ; Vu le code de la famille et de l aide sociale ; Vu la loi n 91-647 du 10 juillet 1991 ; Les parties étant dûment convoquées, Après avoir entendu en audience publique, Mme WOLF, vice-président du tribunal administratif de Nancy, rapporteur en son rapport, Maître LARA, représentant Mme G. et autres, en ses observations, Mme ESCAUT, maître des requêtes au Conseil d Etat, commissaire du gouvernement, en ses conclusions ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 octobre 2009, à 13 heures 02, présentée pour Mmes G., L. et C. ; Après en avoir délibéré :

4 Considérant que par un premier jugement en date du 14 octobre 2005, le tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale de Paris a écarté les fins de non recevoir soulevées par le président du conseil général de Seine-et-Marne, rejeté les conclusions en annulation dirigées contre l arrêté du préfet de Seine-et-Marne du 30 juillet 2004 et divers moyens tendant à sa réformation et, avant-dire-droit, a ordonné un supplément d instruction ; que, par son second jugement, en date du 30 mars 2007, le tribunal a écarté de la base de calcul du tarif hébergement de la maison de retraite de Cesson une somme de 30 400 euros, réformé ce tarif pour 2004, condamné le département de Seine-et-Marne à verser à Mme G. et autres une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens et rejeté le surplus des conclusions des requérantes ; que le président du conseil général de Seine-et-Marne relève appel des deux jugements en tant qu ils ont fait droit à certaines des demandes présentées par Mme G. et autres ; que ces dernières relèvent appel incident du même jugement en tant qu il a rejeté le surplus de leurs conclusions ; Sur l appel principal : Sur les conclusions dirigées contre le jugement en date du 14 octobre 2005 : Considérant qu en application de l article R. 351-16 du code de l action sociale et des familles le délai pour interjeter appel d un jugement d un tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale est d un mois à compter de sa notification ; qu aucune disposition de ce code prolonge le délai d appel contre un jugement avant-dire-droit jusqu'à l'expiration du délai d'appel contre le jugement qui règle définitivement le fond du litige ; que le code de justice administrative n est pas applicable devant le juge du tarif ; qu il suit de là que les conclusions de la requête du département de Seine-et-Marne, enregistrées le 28 juin 2007, tendant à l annulation du jugement du tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale de Paris en date du 14 octobre 2005 sont tardives et, par suite, irrecevables ; Sur les conclusions dirigées contre le jugement en date du 30 mars 2007 : Considérant que le recours de Mme G. et autres présenté devant le tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale de Paris a été jugé recevable par le jugement du 14 octobre 2005, devenu définitif, ainsi qu il a été dit ci-dessus ; Considérant qu'il résulte de l'instruction que la commune de Cesson a mis à disposition de l'agepah 77, par bail emphytéotique d une durée de cinquante-cinq ans, moyennant une redevance annuelle de 1 euro, un terrain aux fins d'édification d'un bâtiment à l'usage de maison de retraite par l'association ; que la gestion de l'établissement, ouvert en 2001, après la construction des bâtiments devait revenir au centre communal d'action sociale de Cesson ; que, toutefois, celui-ci a rétrocédé à l'agepah cette gestion par une convention d'assistance et de gestion moyennant versement d'une redevance annuelle de 14 640 euros ; que deux autres conventions en date des 21 décembre 2000 et 29 novembre 2001, portant, l une, sur la location pour une redevance annuelle de 89 738 euros des bâtiments édifiés sur le terrain à usage de maison de retraite et, l autre, sur la mise à disposition d'équipements et mobiliers garnissant le bâtiment pour une redevance annuelle de 30 400 euros pendant sept ans puis la même somme diminuée de la charge des emprunts expirés à la fin de la septième année durant trois ans ;

5 Considérant que le budget de la maison de retraite, dont il n est pas contesté qu elle contient tous les agencements et mobiliers répondant à sa vocation, ne comporte aucune charge d amortissement ; qu il ne résulte pas de la convention en date du 21 décembre 2000 que la location des locaux à usage de maison de retraite incluait celle d agencements et mobiliers spécifiques ; que si le président du conseil général n a pas produit l inventaire de ces agencements et mobiliers visé par la convention en date du 29 novembre 2001, il résulte des factures payées par l AGEPAH, dont la plupart mentionnent la maison de retraite comme lieu de livraison, ainsi que des tableaux d amortissements par l AGEPAH desdits agencements et mobiliers, que cette association a acquis ces matériels pour un montant global de l ordre de 182 000 euros, et qu elle a prévu de les amortir sur une durée de 10 ans, à l exception du matériel informatique et téléphonique amorti sur 5 ans ; qu en outre, il résulte des termes de la convention de mise à disposition desdits matériels que ceux-ci ont été financés par un emprunt contracté par l AGEPAH et remboursable en sept ans ; que, dans ces conditions, la redevance annuelle de 30 400 euros n apparaît pas excessive au regard de l amortissement, pendant les sept premières années, du capital emprunté ; que si Mme G. et autres allèguent que certains matériels (canapés, ordinateurs) auraient pu ne pas bénéficier à l établissement, ils l établissent d autant moins que la maison de retraite comporte des salons, que les canapés mentionnés sur les factures ont été livrés à la maison de retraite et qu il n apparaît pas injustifié que l établissement soit équipé d une installation informatique, au demeurant modeste ; que, par suite, le président du conseil général de Seine-et-Marne est fondé à soutenir que c est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale de Paris a écarté de la base de calcul du tarif hébergement la redevance de 30 400 euros due à raison de la mise à disposition des équipements et a, par voie de conséquence, condamné le département à verser à Mme G. et autres, une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; Sur l appel incident de Madame G. et autres : En ce qui concerne les dépenses relatives aux reliquats de congés payés : Considérant qu il résulte de la convention de gestion et d assistance signée entre le centre communal d action sociale de Cesson et l AGEPAH que le personnel de la maison de retraite est recruté par l association, et mis à sa disposition moyennant remboursement par le centre communal d action sociale de la masse salariale ainsi engagée ; que l employeur étant l AGEPAH, personne de droit privé, le code du travail qui prévoit des indemnités pour les congés du personnel qui n ont pu être pris, était applicable ; que, par suite, ces indemnités ont été à bon droit prises en compte pour la fixation des tarifs ; En ce qui concerne les dépenses relatives au personnel soignant : Considérant qu il est constant que lors de l habilitation au titre de l aide sociale, en 2003, par le département de la maison de retraite de Cesson, accordée de manière à favoriser l accueil des personnes âgées modestes d origine locale et de pérenniser la structure, l établissement, qui n avait pas de section de cure médicale, n a fait l objet d aucune convention tripartite et ne disposait donc pas d une section tarifaire afférente aux soins ; que la convention tripartite n a, en effet, été signée qu en 2005 ; que si Mme G. et autres soutiennent que les frais de personnel sont exorbitants, ils ne l établissent pas, eu égard, d une part, à l état de dépendance importante des

6 usagers de la maison de retraite et aux contraintes de fonctionnement d une structure de capacité réduite ; que si, sans remettre en cause la nécessité d un personnel soignant, elles soutiennent que la masse salariale afférente à ce personnel, d un montant de 60 027 euros, ne devait pas entrer dans la base de calcul du tarif hébergement, elles n assortissent leur moyen d aucune précision permettant d en apprécier le bien fondé ; En ce qui concerne le loyer : Considérant que contrairement à ce que soutiennent les intimées, l immeuble à usage de maison de retraite, bien que construit sur un terrain communal, en application d un bail emphytéotique, n a pas été financé par des deniers publics ; qu il résulte, au contraire, du contrat de location souscrit entre le centre communal d action sociale et l AGEPAH que cette association a financé la construction par un emprunt auprès du Crédit foncier de France ; que, dans ces conditions, quelle que soit la légalité des contrats conclus entre la commune et l AGEPAH à l occasion de la construction de l immeuble, le principe même du versement d un loyer par le centre communal d action sociale de Cesson, à raison de l usage de la construction à vocation de maison de retraite est justifié ; qu il résulte, en outre, de l instruction, que la redevance d un montant de 89 738 euros a vocation, notamment, à permettre à l AGEPAH de rembourser les emprunts contractés pour la construction ; que, par suite, Mme G. et autres ne sont pas fondées à soutenir que le montant du loyer versé par le centre communal d action sociale de Cesson et inclus dans la base de calcul du tarif hébergement est excessif ; En ce qui concerne la redevance de gestion : Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les intimées, le versement à l AGEPAH par le centre communal d action sociale de la somme de 14 640 euros est justifié, dans son principe, par la convention de gestion et d assistance souscrite par ces deux personnes morales ; que, contrairement à ce que soutiennent les intimées, ladite convention ne se borne pas à prévoir le remboursement par le centre communal d action sociale de Cesson des salaires des personnels de la maison de retraite, mais, par l ensemble de ses stipulations, concède à l AGEPAH la gestion intégrale de la maison de retraite de Cesson ; que la redevance litigieuse qui n est pas étrangère, aux nécessités du fonctionnement de l établissement, doit s imputer dans la base de calcul de son tarif ; qu enfin, eu égard aux prestations mises à la charge de l AGEPAH, son montant n apparaît pas excessif ; Considérant qu il résulte de tout ce qui précède, d une part, que le président du conseil général de Seine-et-Marne est fondé à demander l annulation des articles 1 à 4 du jugement du tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale de Paris en date du 30 mars 2007 et que d autre part, Mme G. et autres ne sont pas fondées à demander l annulation dudit jugement en tant qu il a rejeté le surplus de leur demande présentée devant ce tribunal ; Sur les conclusions relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens: Considérant que les dispositions de l article 75-1 de la loi n 91-647 du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que le département de Seine-et-Marne, qui n est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à Mme G. une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

7 DECIDE : Article 1 er : Les articles 1 à 4 du jugement du tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale de Paris en date du 30 mars 2007 sont annulés. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête du président du conseil général de Seine-et- Marne et les conclusions présentées par Mme G. et autres sont rejetées. Article 3 : La présente décision sera notifiée au président du conseil général de Seine-et-Marne, à Mesdames Nicole G., Françoise L., Françoise C., au centre communal d action sociale de Cesson, et au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville. Copie de la présente décision sera communiquée pour information à Me Lara. Délibéré par la Cour nationale de la tarification sanitaire et sociale, en formation plénière, dans sa séance du 23 octobre 2009 où siégeaient M. DURAND-VIEL, président suppléant de ladite Cour, président, MM. CORMIER, COSTE, MÖLLER, ROSENAU, STASSE et Mme WOLF, rapporteur. Lu en séance publique le 20 novembre 2009. Le président, Le rapporteur, Le greffier, M. DURAND-VIEL A. WOLF V. GUILLOU La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l exécution de la présente décision.