Introduction Conseils méthodologiques 1 CONSEILS GÉNÉRAUX ET PROPRES À LA DISSERTATION Les épreuves de dissertation ou de commentaire en Licence III durent généralement trois heures. Un découpage précis de cette période doit être opéré, afin de toujours savoir si l on est ou pas dans les temps. Il est recommandé de découper cette durée en trois : la première heure doit comporter les étapes suivantes : lecture attentive des sujets, réunion d éléments de connaissance sur les deux sujets puis choix définitif du sujet (5/10 minutes) ; mobilisation des connaissances sur le sujet (15 minutes) et organisation de celles-ci dans un plan (20 minutes) ; rédaction au brouillon de l introduction puis recopiage au propre (20 minutes). Cette première étape peut être portée à une heure et demie si le plan est détaillé au maximum et qu il ne reste plus qu à recopier en rédigeant ; la deuxième heure (voire ¾ d heures) doit être consacrée à la rédaction de la première partie (une demie heure ou 20 minutes par sous-partie) ; la troisième et dernière heure (voire ¾ d heures) doit être consacrée de la même façon à la rédaction de la deuxième partie ; n oubliez pas de relire l ensemble au moins une fois pour corriger les fautes et incohérences. A - La mobilisation des connaissances pertinentes et l élaboration d une problématique La mobilisation des connaissances pertinentes nécessite évidemment une connaissance précise du cours, et un certain recul sur celui-ci, notamment pour les sujets transversaux. Il est conseillé d apprendre le cours mais aussi de lire plusieurs manuels pour s en imprégner du cours. Plus les connaissances seront nombreuses et précises, plus l élaboration du plan sera aisée. Il est conseillé d écrire au brouillon toutes les idées qui viennent à l esprit sur le sujet, puis de les organiser. Par ailleurs, dans tout exercice, il vous faut absolument travailler la problématique, autrement dit déterminer l intérêt du sujet. Pour cela, il convient d identifier les raisons qui ont poussé l enseignant à vous soumettre telle question. La problématique n est rien d autre qu un problème, comme vous en rencontrez tous les jours (j ai deux rendez-vous à la même heure, comment dois-je procéder?). Ainsi, souvent, vous vous apercevrez que le sujet contient un paradoxe qu il vous appartient de mettre en lumière
12 EXERCICES CORRIGÉS DROIT DES LIBERTÉS FONDAMENTALES et de développer. Le paradoxe est une opposition de deux thèses, idées ou faits : par exemple, la Déclaration des droits de l homme est proclamée en 1789, pourtant les droits de l homme ne sont pas protégés juridiquement. Pour découvrir cette problématique, posez-vous les questions basiques : quoi? comment? pourquoi? qui? quels effets? B - La construction du plan Une attention toute particulière devra également être accordée à la confection du plan dont la qualité et la rapidité d exécution s avéreront souvent déterminants pour la réalisation d une bonne copie : n oubliez pas que le plan doit répondre directement à la problématique, et suivre les étapes d un raisonnement ; «penser libertés fondamentales» : votre plan devra refléter la nature de l épreuve, que ce soit dans la problématique ou dans l intitulé et le contenu des parties et sous-parties ; un schéma traditionnel mais non exclusif : si le plan type n existe pas, on constate que la structure d une bonne copie correspond souvent à 1. A. éléments de contexte ; 1. B. état des lieux du sujet ou apport immédiat d une décision (plutôt descriptif) ; 2.A. problèmes ou limites (dimension critique) ; 2. B ouverture et perspectives ; un titre, une idée : Il vous incombe de soigner vos titres. Le correcteur doit pouvoir comprendre votre argument d un simple coup d œil. Pour cette raison, vos titres doivent être de préférence analytiques plutôt que descriptifs. Notamment, ils doivent être qualifiés (c est-à-dire comprendre un adjectif qui porte une appréciation sur l objet de vos développements. Par exemple : préférez «La protection efficace des droits par le Parlement» à «La protection des droits par le Parlement»). Par ailleurs, il est fort recommandable de ne pas s arrêter aux parties et aux sous-parties. Vous devez être en mesure de vous laisser guider par votre plan pour canaliser la rédaction. Plus votre plan sera détaillé (I. A. 1, voire I. A. 1. a), plus vous serez à l aise et rapide dans la rédaction ; l équilibre des parties : votre devoir doit être équilibré dans les parties et sous-parties. Si l on ne saurait évidemment exiger un équilibre parfait, on vous reprochera cependant une copie de type «un tiers, deux tiers». C-L introduction La qualité de l introduction est déterminante et vous devez donc lui réserver un soin particulier. Elle doit permettre au correcteur de saisir la problématique d ensemble. C est donc dès l introduction que vous devez mettre le sujet en perspective et en déterminer les enjeux. Construite selon la technique dite de l entonnoir, elle doit aller du plus général au plus spécifique, du thème au sujet proprement dit. Pour cela, votre introduction comportera quatre temps et, dans l idéal, autant de paragraphes : l accroche, la définition des termes, la problématique et l annonce du plan.
INTRODUCTION Conseils méthodologiques 13 par l accroche, vous êtes censés susciter la curiosité du correcteur. À cet effet, vous pourrez commencer soit par une citation, soit par un élément d actualité ou d histoire, soit par une décision récente. Cette accroche doit vous permettre d introduire le thème, les enjeux et l intérêt du sujet. Elle est ainsi liée directement au sujet. L accroche révèle bien souvent si l étudiant a compris le sujet ; vous devez ensuite définir les termes importants du sujet ; en vous appuyant sur l accroche et la définition des termes, vous devez habilement amener une problématique qui, de facto, prendra souvent la forme d un paradoxe. Demandez-vous quel est l apport du sujet et mettez-le en perspective. Une fois votre problématique décidée, vous ne devez en aucun cas la perdre de vue. Votre développement sera une démonstration tendue vers la résolution de la problématique (dans le cas du commentaire, voir plus loin) ; l annonce du plan : évitez la lourdeur dans l annonce avec des formules comme «dans un premier temps... dans un second temps». Préférez les structures concessives du type «alors que... (I), on constate... (II)» ou «si... (I), on s aperçoit que... (II)». Accordez une importance toute particulière à l introduction, qui révèle bien souvent les qualités et défauts de la copie. C est pour cela que nous recommandons de la rédiger au brouillon, puis de la recopier. D - Le développement Le développement doit être une démonstration tendue vers la résolution de la problématique. Un raisonnement juridique est un raisonnement logique présentant plusieurs étapes. Dès lors, ces dernières doivent être reliées les unes aux autres au moyen de connecteurs logiques (tout d abord, ensuite, enfin ; en premier lieu, en second lieu ; d une part, d autre part ; cependant, pourtant, néanmoins...) et de transitions. «La copie de droit, combien de citations?» Les étudiants en droit public pensent souvent qu une bonne copie est truffée de références jurisprudentielles. Certes, on ne saurait occulter le fait que le droit des libertés fondamentales est un droit largement jurisprudentiel. Il vous faut naturellement connaître les «grandes décisions» du Conseil constitutionnel, de la CEDH, du Conseil d État et de la CJUE. Comment citer? Par convention, vos références jurisprudentielles doivent être sous la forme «juridiction, date (même si les corrigés donnent la date exacte, la mention de l année suffira), nom de la décision». Nous vous suggérons également de mettre en valeur vos références par un mode graphique approprié (par exemple, CJCE, 2004, Omega) E - La conclusion Les opinions divergent souvent quant à l opportunité de conclusions en droit. Pour notre part, nous jugeons qu une conclusion ou une phrase conclusive est sinon nécessaire du moins conseillée. Cependant, à la conclusion-répétition, nous préférons la conclusion-bilan et, surtout, la conclusion-ouverture. Pour donner une impression d achèvement, vous pouvez également vous essayer à revenir sur votre accroche, «bouclant ainsi la boucle».
14 EXERCICES CORRIGÉS DROIT DES LIBERTÉS FONDAMENTALES F - Conseils pour la rédaction Toute copie est évaluée non seulement sur les connaissances et l organisation des idées mais également sur le style, l orthographe et la présentation. En droit, il est préférable de recourir aux phrases courtes et d utiliser un langage direct et précis. Évitez le lyrisme et les formules trop fleuries, évitez d avoir un style journalistique, grandiloquent ou pompeux. 2 CONSEILS SPÉCIFIQUES AU COMMENTAIRE DE TEXTE Le secret de la réussite d un commentaire est d avoir pris au préalable l habitude de lire des textes juridiques et notamment des décisions de justice. Ceci vous permettra de vous imprégner du style et de la composition. Vous n en identifierez que plus vite les apports. Pour une décision, repérez les visas, les motifs et le dispositif. C est une erreur de ne pas prêter attention aux visas. Les renvois qu ils opèrent ou qu ils n opèrent pas peuvent être particulièrement instructifs. Quand vous le pouvez, nous vous conseillons de lire les conclusions des rapporteurs publics. Elles sont souvent très éclairantes et bien écrites. L introduction comporte une présentation de l auteur et du contexte de l extrait, ou une analyse de la procédure ou des arguments des parties dans le cas d une décision juridictionnelle. S il s agit d un arrêt, préparez la fiche d arrêt au plus tôt. En cas de profusion de faits et de moyens soulevés, soyez sélectifs et apprenez à distinguer l essentiel de l accessoire («qu est-ce qui m est réellement utile pour le commentaire?»). De même, n hésitez pas à faire des paragraphes renvoyant respectivement aux faits, à la procédure ainsi qu au problème de droit et à sa solution. La problématique ne sera autre que le problème de droit, c est-à-dire le problème général résultant de la question concrète à laquelle le juge doit répondre pour résoudre le litige. Lors de la construction de votre plan, ayez le souci, dans chacune de vos sous-parties, de relier votre propos au texte commenté afin d éviter l écueil du hors sujet. Aussi, l objet de commentaire est de présenter principalement trois idées : le sens, la valeur et la portée d un texte : le sens d un texte doit être correctement compris et explicité. Imaginez que vous présentez le texte à une personne qui n a jamais fait de droit. Il faut citer les références essentielles, que ce soient des articles de la Constitution ou d un traité ou des décisions juridictionnelles. L écueil souvent partagé par les étudiants est la trop grande part accordée à l explication du sens du texte dans le commentaire, alors que celle-ci devrait être la plus réduite. Cet écueil est souvent symbolisé par une paraphrase (il est le plus souvent inutile de citer le texte ou alors seulement ses passages les plus révélateurs) suivie d une reformulation creuse, qui n apporte rien ; la valeur du texte est variable selon le sujet. Vous pouvez évoquer la valeur d une décision juridictionnelle, et sa situation dans la jurisprudence (est-ce un revirement,
INTRODUCTION Conseils méthodologiques 15 une confirmation?). Vous pouvez évoquer la nouveauté d un texte doctrinal, ou au contraire sa banalité etc. la portée du texte signifie ses conséquences : qu est-il arrivé ensuite? Par exemple, quelles ont été les suites de la Déclaration des droits de l homme, des ouvrages de Rousseau, de la décision du Conseil constitutionnel du 16 juillet 1971? S agissant du cas particulier du commentaire comparé de textes, il est évident qu il faut toujours joindre les analyses, et ne pas consacrer chaque partie à l un des textes sans évoquer l autre. L analyse doit toujours mêler les deux textes. En définitive, un commentaire est une mise en perspective du texte, dans le contexte juridique d un État ou d une organisation internationale. Il n est pas une reformulation d un texte sous une autre forme. Bonne lecture et bon courage!