Par une requête et un mémoire enregistrés le 29 mars 2016 et le 24 novembre 2016, Mme S., représentée par Me Andrieux, demande à la Cour :

Documents pareils
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE CAEN F D

REPUBLIQUE FRANCAISE. Contentieux n A et A

REPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS. LA COUR DES COMPTES a rendu l arrêt suivant :

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, premier décembre deux mille onze.

SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat(s) REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Décrets, arrêtés, circulaires

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS. LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l arrêt suivant :

Titre I Des fautes de Gestion

SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, avocat(s) REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Le stationnement irrégulier de véhicules appartenant à la communauté des gens du voyage.

M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat(s) REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

SCP Thouin-Palat et Boucard, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, avocat(s) REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS. LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l arrêt suivant :

M. Petit (conseiller doyen faisant fonction de président), président REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AUDIENCE PUBLIQUE DU 30 OCTOBRE 2014

Traitements : retard de paiement, demandez le versement des intérêts légaux!

COUR DE CASSATION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E. Audience publique du 16 janvier 2014 Cassation Mme FLISE, président. Arrêt n o 47 F-P+B

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DENICE

REGLEMENT INTERIEUR TITRE I : DISPOSITIONS GENERALES

Docteur François KOMOIN, Président du Tribunal ;

M. Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président), président

Cour de cassation de Belgique

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE LILLE N Mme Dejana R M. Dzibrail R RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

CONSEIL D'ETAT statuant au contentieux N RÉPUBLIQUE FRANÇAISE. UNION NATIONALE DES ASSOCIATIONS DE SANTÉ A DOMICILE et autre

AUDIENCE PUBLI~UE ORDINAIRE DU 11 DECEMBRE Madame FlAN A. ROSINE MOTCHIAN Président; Messieurs BAGROU B. Isidore" Assesseurs,

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Rôle n A - Exercices d imposition 2001 et Intérêts sur un compte courant créditeur et requalification en dividendes

L Assemblée Nationale a délibéré et adopté en sa séance du 14 décembre ;

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS. LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l arrêt suivant :

Madame TOURE AMINATA épouse TOURE, Président du Tribunal ;

Barème indicatif des honoraires

TROISIÈME SECTION. AFFAIRE MATTEONI c. ITALIE. (Requête n o 42053/02)

LA COUR DES COMPTES a rendu l arrêt suivant :

Mme Renard-Payen, assistée de Mme Sainsily-Pineau, greffier en chef, conseiller apporteur REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LOI N DU 7 MARS 1961 déterminant la nationalité sénégalaise, modifiée

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

BAREME INDICATIF DES HONORAIRES

Tribunal de Ière Instance de Bruxelles

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS. LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l arrêt suivant :

comparante par Maître MILLIARD, avocat au barreau de NOUMÉA,

E n t r e : appelante aux termes d un exploit de l huissier de justice Jean-Lou THILL de Luxembourg du 14 août 2009,

Arrêt n CAISSE DE CREDIT MUNICIPAL DE LYON

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, dix-neuf mai deux mille onze.

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS. b) a annulé ce jugement rendu le 7 avril 2006 par le tribunal administratif de Nice (article 1er) ;

BULLETIN OFFICIEL. Cahiers de jurisprudence de l aide sociale. Sommaire. N o 11/06

PROTECTION DES DROITS DU TRADUCTEUR ET DE L INTERPRETE

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS. LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l arrêt suivant :

N Section du Contentieux Publié au recueil Lebon M. Stirn, président M. Bernard Stirn, rapporteur SCP BOUZIDI ; BLONDEL, avocats

Décision du Défenseur des droits n MLD

T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 1. JUGEMENT rendu le 12 Mai ème chambre 2ème section N RG : 12/09334 N MINUTE : 1

Décrets, arrêtés, circulaires

(1re chambre - formation à 3)

FICHE N 8 - LES ACTIONS EN RECOUVREMENT DES CHARGES DE COPROPRIETE

Décision du Défenseur des droits MDE-MSP

AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 27 MARS 2015

Cour de cassation Chambre commerciale Cassation partielle 30 mars 2010 N

Code civil local art. 21 à 79

I. OUVERTURE D UNE PROCEDURE COLLECTIVE SUR ASSIGNATION DU CREANCIER

REGLEMENT FINANCIER ET CONTRAT DE PRELEVEMENT AUTOMATIQUE (POUR LE REGLEMENT DES FACTURES D'EAU)

Corrigé BTS Banque E32 Session 2014

AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 26 juillet 2013

Le champ d application de l article 1415 du code civil

Décrets, arrêtés, circulaires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANçAIS

Cour de cassation. Chambre sociale

Syndicat des Producteurs de Miel de France. STATUTS MODIFIES ( édition de janvier 2015) TITRE I (Fondation)

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE MONTREUIL RÉPUBLIQUE FRANÇAISE. N o Mme Audrey G. AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS. M. Buisson Rapporteur

Numéro du rôle : Arrêt n 121/2002 du 3 juillet 2002 A R R E T

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Jurisprudence. COUR D'APPEL Lyon CH mai 2014 n 13/01422 Sommaire : Texte intégral :

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PARIS. Pôle 1 - Chambre 1 ARRET DU 26 AOUT (n, 5 pages)

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BOBIGNY -=-=-=-=-=-=-=-=-=-=- Chambre 1/Section 5 N/ du dossier : 13/ Le quatre février deux mil treize,

Sur le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT :

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS. LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l arrêt suivant :

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu l ordonnance n du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

R E P U B L I Q U E F R A N C A I S E

COUR DE CASSATION R E P U B L I Q U E F R A N C A I S E. Audience publique du 21 septembre 2011 Rejet M. LACABARATS, président. Arrêt n o 1054 FS-P+B

COUR DU TRAVAIL DE LIEGE Section de Liège. ARRÊT Audience publique du 17 décembre 2008 AH/SC

Association pour l Expérimentation de Nouvelles Structures d Accueil Pour Exclus (E.N.S.A.P.E.)

Quelles sont les conséquences d une mention erronée des délais de recours dans l affichage du permis de construire?

Compte rendu du conseil municipal du 16 décembre 2011

Me Balat, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Boulloche, SCP Odent et Poulet, SCP Ortscheidt, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat(s)

REGLEMENT FINANCIER ET CONTRAT DE PRELEVEMENT MENSUEL AUTOMATIQUE. relatif au paiement de la facture d eau et d assainissement. Entre..

LA COUR DES COMPTES a rendu l arrêt suivant :

CEDH FRANGY c. FRANCE DU 1 ER FEVRIER 2005

Quel cadre juridique pour les mesures d investigation informatique?

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS N , , , , M. Olivier Yeznikian Rapporteur

ARRETE n 333 CM du 10 avril 2006 portant fixation du tarif des huissiers en matière civile et commerciale. (JOPF du 20 avril 2006, n 16, p.

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TOULOUSE. ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU 01 Juillet 2014

conforme à l original

SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat(s) REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

CONTRAT OBSEQUES ET TUTELLE : UN ARRET* PRECISE LES MODALITES D APPLICATION

Transcription:

COUR ADMINISTRATIVE D APPEL DE PARIS SG N 16PA01136 Mme S. M. Bernard Even Président Mme Perrine Hamon Rapporteur RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS La Cour administrative d appel de Paris (4 ème chambre) Mme Christelle Oriol Rapporteur public Audience du 6 juin 2017 Lecture du 28 juin 2017 135-02-01-02-03-04 C+ Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme Alexandrine S. a demandé au Tribunal administratif de Melun de condamner la commune de Bonneuil-sur-Marne à lui verser la somme de 51 137,88 euros représentant ses indemnités d adjointe au cours de la période allant de mars 2008 à décembre 2012, ainsi qu une somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi. Par un jugement n 1402821 du 27 janvier 2016, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire enregistrés le 29 mars 2016 et le 24 novembre 2016, Mme S., représentée par Me Andrieux, demande à la Cour :

N 16PA01136 2 1 ) d annuler le jugement du Tribunal administratif de Melun n 1402821 du 27 janvier 2016 ; 2 ) de condamner la commune de Bonneuil-sur-Marne à lui verser la somme totale de 61 137,88 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date d exigibilité pour ses indemnités d adjointe, et de la date de sa réclamation préalable pour son préjudice moral ; 3 ) de mettre à la charge de la commune de Bonneuil-sur-Marne le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est irrégulier dès lors que la procédure a été communiquée à un avocat qui n était pas le sien ; - le jugement est entaché d une contradiction dès lors qu il mentionne son engagement à l égard de son parti et le fait que la commune ne pouvait se prévaloir de cet engagement ; - le versement par la commune de son indemnité d adjointe à un tiers constitue une faute ; - elle n a pas donné son accord au versement de ses indemnités à son parti ; - les statuts du parti communiste français ne lui sont pas opposables par la commune ; - la perception d avantages fiscaux liés au versement au parti de ses indemnités est sans incidence sur ses droits ; - elle a subi un préjudice équivalent au montant de ces indemnités, ainsi qu un préjudice moral distinct du fait des difficultés financières résultant de la privation de cette indemnité ; - sa créance n est pas prescrite, dès lors que ce n est qu en 2012, lorsque la commune a confirmé son refus de régulariser sa situation, qu elle a pu acquérir la certitude de l existence de sa créance. Par des mémoires en défense enregistrés le 29 avril 2016 et le 1 er juin 2017, la commune de Bonneuil-sur-Marne, représentée par Me Seban, conclut au rejet de la requête et à ce qu une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme S. sur le fondement de l article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement n est pas entaché d irrégularité, l instruction ayant été rouverte par le tribunal administratif aux fins de permettre le respect du contradictoire ; - la commune ne peut être condamnée à verser à Mme S. des indemnités qu elle a déjà payées ; - Mme S. a pris l engagement de respecter les statuts du parti communiste français prévoyant le reversement à son profit des indemnités des élus ; - Mme S. a bénéficié pour les années en cause des remises fiscales correspondant au versement de ses indemnités à son parti ; - les indemnités ont été versées à Mme S. elle-même, dès qu elle en a fait la demande ; - les indemnités correspondant à la période allant d août à décembre 2012 ont déjà été reversées à Mme S. ; - les difficultés financières et le préjudice moral allégués ne sont pas établis ; - les sommes correspondant aux indemnités versées en 2008, 2009 et 2010 sont prescrites ; - cette prescription a déjà été soulevée en première instance.

N 16PA01136 3 Les parties ont été informées, par application de l article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l arrêt de la Cour était susceptible d être fondé sur un moyen relevé d office, tiré du caractère nouveau en appel du moyen relatif à la prescription de la créance. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - la loi n 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l Etat, les départements, les communes et les établissements publics ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l audience. Ont été entendus au cours de l audience publique : - le rapport de Mme Hamon, - les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public, - et les observations de Me Ben Ayed, pour la commune de Bonneuil-sur-Marne. 1. Considérant qu à la suite de l élection, au mois de mars 2008, de Mme S. en qualité de conseiller municipal de la commune de Bonneuil-sur-Marne, le maire de la commune a procédé au versement direct de l intégralité de son indemnité d élue à l association départementale de financement de la fédération du parti communiste français du Val-de-Marne, dont elle est adhérente ; qu après avoir obtenu le versement direct, à son profit, de cette indemnité à compter du mois de janvier 2013, Mme S. a demandé à la commune de lui reverser le montant total des indemnités lui étant dues entre les mois de mars 2008 et décembre 2012 ; qu elle relève appel du jugement du 27 janvier 2016 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Bonneuil-sur-Marne à lui verser le montant de ces indemnités, ainsi qu une indemnité au titre de son préjudice moral ; Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Considérant que si l instruction a été rouverte par le tribunal administratif après que la requérante l eut informé que les pièces de la procédure avaient été, par erreur, adressées à un autre avocat que son défenseur, il ressort du dossier de première instance que Me Andrieux, avocat de Mme S. en première instance, n a pas été rendu destinataire de l intégralité des mémoires produits par la commune de Bonneuil-sur-Marne ; que, par suite, et sans qu il soit besoin d examiner l autre moyen de régularité, le jugement attaqué, qui a été rendu en méconnaissance du principe du contradictoire, doit, pour ce motif, être annulé ; 3. Considérant qu il y a lieu pour la Cour d évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme S. devant le Tribunal administratif de Melun ; Sur la responsabilité de la commune : 4. Considérant qu aux termes de l article L. 2123-20-1 du code général des collectivités territoriales : «Lorsque le conseil municipal est renouvelé, la délibération fixant les indemnités de ses membres en application de la présente sous-section intervient dans les trois mois suivant son

N 16PA01136 4 installation. / ( ) / II.- Sauf décision contraire des membres de la délégation spéciale, les présidents et membres de délégations spéciales faisant fonction d adjoint perçoivent l indemnité fixée par délibération du conseil municipal pour le maire et les adjoints. / Toute délibération du conseil municipal concernant les indemnités de fonction d un ou de plusieurs de ses membres est accompagnée d un tableau annexe récapitulant l ensemble des indemnités allouées aux membres du conseil municipal.» ; 5. Considérant qu il est constant qu en sa qualité d adjointe au maire, Mme S. avait droit au versement, à son seul profit, de l indemnité versée aux élus fixée par une délibération du conseil municipal de la commune de Bonneuil-sur-Marne ; que la circonstance que l intéressée avait souscrit avant son élection, en qualité de membre du parti communiste français, un engagement de reverser à ce parti l intégralité de son indemnité, par un acte auquel la commune n était pas partie, est sans incidence sur l obligation légale pour cette municipalité de verser cette indemnité entre les mains de Mme S. ; que, dès lors, en procédant au versement direct de l indemnité due à la requérante au parti communiste français, entre les mois de mars 2008 et décembre 2012, la commune de Bonneuil-sur-Marne a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; que la circonstance que cette commune a déjà versé les sommes litigieuses au parti communiste français ne lui permet pas de s exonérer de sa responsabilité envers Mme S. ; 6. Considérant, toutefois, qu il est également constant que Mme S. a, en exécution de l engagement qu elle avait souscrit à l égard du parti communiste français, consenti sans équivoque au versement direct de son indemnité à ce parti jusqu au mois d août 2012, date à laquelle elle a réclamé le versement direct à son profit de cette indemnité ; qu il est tout aussi constant qu elle a bénéficié, pour chacune des années en litige, des avantages fiscaux attachés au versement de dons à un parti politique ; que, dans les circonstances de l espèce, ces faits imputables à la victime sont de nature à exonérer la commune de 80% de sa responsabilité ; Sur la prescription de la créance de Mme S. : 7. Considérant qu aux termes de l article 1 er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l Etat, les départements, les communes et les établissements publics modifiée : «Sont prescrites, au profit de l Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis» ; qu aux termes de l article 2 de la même loi : «La prescription est interrompue par : / Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que l administration saisie n est pas celle qui aura finalement la charge du règlement. / (...) Toute communication écrite d une administration intéressée, même si cette communication n a pas été faite directement au créancier qui s en prévaut, dès lors que cette communication a trait au fait générateur, à l existence, au montant ou au paiement de la créance» ; qu enfin l article 3 de cette loi dispose : «La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par luimême ou par l intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l existence de sa créance ou de la créance de celui qu il représente légalement» ;

N 16PA01136 5 8. Considérant que, par un courrier du 24 décembre 2013, Mme S. a demandé à la commune de lui reverser le montant total des indemnités d élue lui étant dues entre les mois de mars 2008 et décembre 2012 ; que ce courrier constituant une communication ayant «trait au fait générateur, à l existence, au montant ou au paiement de la créance» a eu pour effet d interrompre le délai de prescription applicable à sa créance se rapportant aux années 2009, 2010, 2011 et 2012 ; 9. Considérant, en revanche, que Mme S. doit être regardée comme ayant eu connaissance de l existence et du montant exact de sa créance sur la commune dès le mois d avril 2008, puis chaque mois suivant, dès lors que l indemnité, versée mensuellement, était mentionnée sur son bulletin de paie ; que, dès lors, le délai de prescription a commencé à courir, pour les indemnités versées au titre de l année 2008, à compter du 1 er janvier 2009 pour expirer le 31 décembre 2012 ; qu avant cette date Mme S., qui s était bornée à demander au mois d août 2012 le versement direct à son profit des indemnités à venir, n a pas valablement interrompu le délai de prescription relatif à sa créance afférente à l année 2008 ; que cette créance est dès lors prescrite ; Sur l évaluation des préjudices : 10. Considérant qu il est constant qu au titre des années non prescrites 2009, 2010, 2011 et 2012, le montant des indemnités de maire adjoint dues à Mme S. s élève à la somme totale de 40 347 euros ; que, par suite, compte tenu du partage de responsabilité retenu au point 6, le préjudice financier subi par Mme S. du fait de la faute commise par la commune doit être fixé à la somme de 8 069,40 euros, dont il y a toutefois lieu de déduire le montant de l avantage fiscal dont a bénéficié l intéressée en application du régime des dons versés à un parti politique ; établi ; 11. Considérant, en revanche, que le préjudice moral dont se prévaut Mme S. n est pas 12. Considérant que Mme S. a droit au versement des intérêts au taux légal sur le montant de son préjudice, à compter du 27 décembre 2013, date de sa première demande indemnitaire adressée à la commune ; Sur les conclusions présentées sur le fondement de l article L. 761-1 du code de justice administrative : 13. Considérant que les dispositions de l article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Mme S., qui n est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la commune de Bonneuil-sur-Marne demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Bonneuil-sur-Marne une somme de 1 500 euros à verser à Mme S. sur le fondement des mêmes dispositions ;

N 16PA01136 6 DECIDE : Article 1 er : Le jugement du Tribunal administratif de Melun n 1402821 du 27 janvier 2016 est annulé. Article 2 : La commune de Bonneuil-sur-Marne est condamnée à verser à Mme S. une indemnité de 8 069,40 euros, dont il y a lieu de déduire le montant de l avantage fiscal dont a bénéficié l intéressée en application du régime des dons versés à un parti politique. Cette indemnité sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2013. Article 3 : La commune de Bonneuil-sur-Marne versera à Mme S. une somme de 1 500 euros au titre de l article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : Les conclusions de la commune de Bonneuil-sur-Marne présentées sur le fondement des dispositions de l article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Alexandrine S. et à la commune de Bonneuil-sur-Marne. Délibéré après l audience du 6 juin 2017, à laquelle siégeaient : - M. Even, président de chambre, - Mme Hamon, président assesseur, - Mme d Argenlieu, premier conseiller. Lu en audience publique, le 28 juin 2017. Le rapporteur, Le président, P. HAMON B. EVEN Le greffier, S. GASPAR La République mande et ordonne au ministre d Etat, ministre de l intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l exécution de la présente décision.