ALCOOL, CANCER ET IMAGE DE SOI

Documents pareils
Les aspects psychologiques de la paralysie cérébrale : répercussions et enjeux dans le parcours de vie.

A - Nomenclature des préjudices de la victime directe

2È JOURNÉE NATIONALE DE FORMATION DES PHARMACIENS CANCER ET ACCOMPAGNEMENT DU PHARMACIEN : UN PREMIER PAS VERS LA RÉSILIENCE.

Sommaire. Sommaire. L Entreprise Page 3. Qu est-ce que la PNL? Page 4. Thérapie PNL et hypnose ericksonienne Page 7

Semaine de la sécurité des patients: novembre 2012

Quelqu un de votre entourage a-t-il commis un suicide?

Maladie d Alzheimer Que faire?

Plan de la présentation

L'œsophage L'œsophage est un tube musculaire qui traverse de la bouche à l'estomac. Causes

Association «La vie entre les mains»

POURQUOI RESSENTONS-NOUS DES ÉMOTIONS?

Aider une personne atteinte de cancer

LE GRAND LIVRE Du. Pr Jean-Jacques Altman Dr Roxane Ducloux Dr Laurence Lévy-Dutel. Prévenir les complications. et surveiller la maladie

«La capacité à être seul», WINNICOTT

Maurene McQuestion, IA, BScN, MSc, CON(C) John Waldron, MD, FRCPC

Troubles psychiques de la grossesse et du post-partum Q19. Psychiatrie adulte Module D Pr Jean Louis Senon Année universitaire

Apprenez à votre enfant la Règle «On ne touche pas ici».

Le Modèle Conceptuel de Virginia Henderson. P. Bordieu (2007)

Approche centrée e sur le patient

SOIXANTE-SEPTIÈME ASSEMBLÉE MONDIALE DE LA SANTÉ A67/18 Point 13.5 de l ordre du jour provisoire 21 mars Psoriasis. Rapport du Secrétariat

droits des malades et fin de vie

DIU Soins Palliatifs et d Accompagnement.

Les soins infirmiers en oncologie : une carrière faite pour vous! Nom de la Présentatrice et section de l'acio

L infirmier exerce son métier dans le respect des articles R à R et R à du code de la santé publique.

Quand la peur nous prend, qu est-ce qu elle nous prend? Vivre la crainte, l inquiétude, la panique, l affolement ou la terreur; la peur est

A healthy decision LA DOULEUR

ASSURANCE COLLECTIVE RÉSUMÉ DES GARANTIES. Régime d assurance collective multi-employeur RAPNQ-RBA

TROUBLES ENVAHISSANTS DU COMPORTEMENT (TEC)

ANNEXE IIIB NOTICE : INFORMATION DE L UTILISATEUR

Comprendre les différentes formes de communication

Guide à l intention des familles AU COEUR. du trouble de personnalité limite

La prise en charge d un trouble dépressif récurrent ou persistant

Psoriasis & Sport. Pour un meilleur accès des personnes psoriasiques aux activités sportives. Qui le psoriasis touche-t-il?

LA SOUFFRANCE DU MALADE EN FIN DE VIE. LES COMPORTEMENTS FACE A LA PERTE : vécu de la mort

Les problèmes de dépendance ont toujours une histoire. Il y a des histoires qui finissent bien.

L aide aux aidants. Psychologue clinicienne. Capacité de gériatrie mars 2009

Questions / Réponses. Troubles du sommeil : stop à la prescription systématique de somnifères chez les personnes âgées

Comment la proposer et la réaliser?

GUIDE PRATIQUE N 1 HERPES ASSOCIATION HERPES. Agissons contre l herpès

Formation analyse des accidents du travail avec l arbre des causes

Les renseignements suivants sont destinés uniquement aux personnes qui ont reçu un diagnostic de cancer

Conseil canadien de la magistrature Voies de fait et autres infractions contre la personne n entraînant pas la mort

L arthrose, ses maux si on en parlait!

Comportements addictifs

Le VIH et votre foie

PROGRAMME VI-SA-VI VIvre SAns VIolence. Justice alternative Lac-Saint-Jean

Les compétences émotionnelles au cœur de la performance individuelle et collective

Insuffisance cardiaque

Vivre pendant et après un cancer

La santé. Les établissements de l entité Mutualité Santé Services

COUPLE ET PROBLÈMES SEXUELS

La politique de l entreprise (esprit et incitation au challenge) implique :

Le référentiel professionnel du Diplôme d Etat d Aide Médico-Psychologique

G U I D E - A F F E C T I O N D E L O N G U E D U R É E. La prise en charge de votre mélanome cutané

COMMENT AIDER LES ENFANTS EN BAS ÂGE A SURMONTER UN TRAUMATISME

La migraine : quelle prise de tête!

MERCI DE RETOURNER LE BON DE PRISE EN CHARGE ET/OU LA FICHE RÉCAPITULATIVE DANS L ENVELOPPE T

De la détresse émotionnelle à l actualisation du potentiel des membres de l entourage. La vision familiale. Série 1, numéro 1

Attachement et adolescence Compte-rendu de la conférence de Johanne Lemieux, Lausanne, CHUV, 19 avril 2012 par Elisabeth Fierz

Le référentiel RIFVEH La sécurité des personnes ayant des incapacités : un enjeu de concertation. Septembre 2008

Diabète Type 2. Épidémiologie Aspects physiques Aspects physiologiques

Définition. Recherche sur Internet. Quelques chiffres. Stress et enseignement. Symptômes 3 catégories de causes Le burn out Gestion du stress

Le psoriasis est une maladie qui touche environ 2 à 3 % de la population et qui se

Avec un nouveau bébé, la vie n est pas toujours rose

Statistiques sur les assurances collectives de l Université du Québec

GARANTIE D ASSISTANCE 2015

Qu est-ce qu un sarcome?

Le guide s articule autour de quatre thèmes, qui sont incontournables pour bien documenter une situation d aliénation parentale ou de risque:

La prise en charge d un trouble bipolaire

Le Profiling SwissNova

ANNEXE I REFERENTIEL PROFESSIONNEL AUXILIAIRE DE VIE SOCIALE CONTEXTE DE L INTERVENTION

ANNEXE I REFERENTIEL PROFESSIONNEL AUXILIAIRE DE VIE SOCIALE CONTEXTE DE L INTERVENTION

Diplôme d Etat d infirmier Référentiel de compétences

Maladies neuromusculaires

Amputations partielles traumatiques de la main. Colette Gable - Ergothérapeute CDS - IRR Nancy

Principales causes de décès selon le groupe d âge et plus

testez-vous! Préparez vos partiels en toute sénérité!

DEBAT PHILO : L HOMOSEXUALITE

Mieux informé sur la maladie de reflux

Traiter la Fausse Couche avec des pilules: ce que vous devez savoir

PREMIERS SECOURS EN ÉQUIPE DE NIVEAU 1

CATALOGUE DE FORMATION

PIL Décembre Autres composants: acide tartrique, macrogol 4000, macrogol 1000, macrogol 400, butylhydroxyanisol.

LA RECONNAISSANCE AU TRAVAIL: DES PRATIQUES À VISAGE HUMAIN

Savoir préparer sa consultation avec son médecin

La fibromyalgie Mieux l'évaluer pour mieux la traiter

JE NE SUIS PAS PSYCHOTIQUE!

Parent avant tout Parent malgré tout. Comment aider votre enfant si vous avez un problème d alcool dans votre famille.

Q. QUELLE EST LA MISSION DU CENTRE DE CRISE POUR LES VICTIMES DE VIOL?

Les drogues POUR EN SAVOIR PLUS. 1. L avis du psychologue. 2. Les risques et leur prévention. Quelques chiffres

SÉMINAIRE INTELLIGENCE EMOTIONNELLE

La santé bucco-dentaire au cabinet OMS. Problèmes majeurs. Santé bucco-dentaire et santé générale. Santé. Déterminants sociaux et santé bucco-dentaire

Equipe de Direction : -Docteur Christine BOURDEAU Responsable médical. - Annie PAPON Cadre responsable

Psychologie de la Survie. Capt. Martin Rousseau CD

HARCÈLEMENT CRIMINEL. Poursuivre quelqu un, ce n est pas l aimer!

Ma vie Mon plan. Cette brochure appartient à :

La réadaptation après un implant cochléaire

DOSSIER DE PRESSE 27 AVRIL MILLIONS DE FRANÇAIS ONT UN PROBLEME AVEC L ALCOOL. ET SI LES AUTRES C ETAIT VOUS?

Stratégie d intervention auprès des élèves présentant des comportements et attitudes scolaires inappropriés

GENER'ACTION Formation

Transcription:

ALCOOL, CANCER ET IMAGE DE SOI Octobre 2014 Delphine Staquet

Alcool : intégré à la culture

LES FONCTIONS

Soulager la souffrance Diminuer/éliminer les angoisses Oublier les problèmes Eteindre la douleur Oublier la solitude

Recherche d une solution à l extérieur de soi Remède et poison Alcoolisme : symptôme qui a une fonction et derrière lequel, il y a de la souffrance, de la détresse psychologique

Cycle de l assuétude alcoolique Nécessité d augmenter les doses pour atteindre l effet souhaité Perte de plaisir liée à la consommation comme au début Perte de l envie de faire d autres choses appréciées auparavant pour se consacrer à la consommation qui occupe le temps (omniprésence) la seule «satisfaction» Procure un rituel rassurant et structure la vie

Cercle vicieux (recommence sans arrêt et n a pas de fin sans intervention) perte de la maîtrise de sa vie image de soi négative, estime de soi sentiment de honte, culpabilité sevrage ou diminution de la dose : source d une grande souffrance physique et psychologique + peur associée

CONSÉQUENCES Personnelles psychologiques (image de soi, estime de soi) émotionnelles (honte, tristesse) physiques (visage, DEG) Familiales-relationnelles-sexuelles Professionnelles

QUE FAIRE?

Relation d aide écouter entendre essayer de comprendre poser des questions

Combien de fois vous arrive-t-il de boire de l alcool? (jms/mois/sem/jours) Avez-vous ressenti le sentiment de ne plus être capable de vous arrêter de boire après avoir commencé? Votre entourage vous a-t-il déjà fait des remarques concernant votre consommation et cela vous a-t-il ennuyé? Avez-vous déjà eu l impression que vous buviez trop et est-ce que vous vous êtes senti coupable ou honteux au sujet de cette consommation?

Informer (transmission et prévention) Identifier et évaluer (ressources, difficultés, motivation) Rassurer (médication, sevrage, soutien, craintes) Reconnaître et valoriser les actes du patient

Evaluer le sens donné par le patient (situation vécue, attentes) Entendre l expression de l ambivalence et reconnaître les difficultés de la décision Principaux freins : peur du changement, du sevrage, de la perte des bénéfices éventuels

Continuer à rester vigilant à notre ressenti en tant qu intervenant et ne pas être dans le jugement «C est de sa faute si il a un cancer, il n avait qu à arrêter de boire/fumer» évince la notion de dépendance/addiction (aux produits ou aux comportements)

Les accompagner dans l invention d une solution personnelle et nouvelle plutôt que de tenter d éradiquer les conduites de dépendances des patients Attention : «ne pas vouloir à la place du patient»

«Tout être humain est dépendant de quelque chose et souvent de plusieurs choses à la fois. Mais à partir de quand une conduite devient-elle une pathologie? Quelle est la limite entre un comportement fréquent voire excessif et un comportement vraiment pathologique? Les critères objectifs et quantifiables (nombre de fois par jour, nombres d heures, ) ne suffisent pas pour parler de pathologie (et donc de soins). Il faut que la personne ressente une aliénation, qu elle exprime une souffrance, qu elle veuille arrêter mais n y parvienne pas sans aide». (Site internet de l Ulg)

Consommation alcool conséquences Cancer et traitements (chimio, radioth, chir.) conséquences corps (visage et cou) image de ce corps image de soi et estime de soi consommation alcool-tabac

IMAGE DE SOI Image de soi Image du corps Image du corps (Schilder, 1935) : représentation (consciente et inconsciente) de notre propre corps que nous formons dans notre esprit (dans ses dimensions physiologique, sensuelle, sexuelle et sociale)

Contexte sociétal (être et paraître): place de la mutilation corporelle?

«TÊTE ET COU» Le visage représentant de l identité siège du regard contact relationnel avec autrui lieu du langage Se regarder et être regardé Le regard des autres : facteur influençant les interactions sociales et la qualité de vie ; «s exposer» au regard des autres

«Le cancer et ses traitements contraignent l individu à penser différemment le corps face à l agression somatique (atteinte réelle du corps). Les conséquences sur ce corps atteignent le psychisme.» (Bacque, 2008; 2; 69-70)

ATTEINTES DU CORPS Somatique annonce de la maladie et de la potentielle mutilation destruction et ablation de l organe en partie ou totalement réintégration et reconstruction d un organe modifié ou de la prothèse Psychologie conscience de sa mortalité + (conscience de la/des mutilation(s)?) acceptation ou non de l irréversibilité du passé + processus du travail de deuil travail d incorporation de l organe modifié ou de la prothèse

Annonce du diagnostic Émotions intenses Sidération psychique, «choc» Pensées tournées vers un moyen de survie Attention: le patient peut ne pas exprimer son ressenti quant à l image et aux troubles provoqués par l intervention

Chirurgie : perte d un organe, défiguration, déformation, laryngectomie, pelvimandibulectomie prothèse : limitation? altération corporelle visible perception de l image de soi dépend de l intervention subie (Cremonese et al., 2000)

Radiothérapie : phase de repérage, troubles cutanés, modification texture peau, brûlures, son de la voix, alimentation, Chimiothérapie : atteinte du système pileux, brûlures, nausées,

CONSÉQUENCES Défiguration (mutilation, trou) et dysfonction Sécrétions, expectorations, odeurs Difficultés respiratoires, fausses routes, difficultés dans l alimentation Capacité à communiquer (perte de la voix : accepter une nouvelle voix, différente «d avant») et à interagir socialement Dépendance à autrui

CONSÉQUENCES Colère, tristesse, frustration, honte, culpabilité, peur Monstruosité, ridicule, dégoût, hostilité Sentiments de séduction, d attirance physique perturbés Corps qui trahit, mutilé, meurtri (renforce le sentiment de perte de contrôle) Retrait, isolement, réduction du cercle d amis Nouveau schéma corporel Image du corps Image de soi Estime de soi

Blessures physiques et psychologiques avec conséquences physiques, psychologiques et sociales Sources de souffrance pour le patient, son entourage et les soignants Troubles anxieux (PTSD) et dépressifs (Reich, 2008) Essai de reconstruction/appareil prothétique suppléant l ablation

Impact sur le fonctionnement : atteinte(s) (décalage entre le fonctionnement d un attribut corporel et la perception idéale de celui-ci) Ce décalage a des conséquences qui peuvent affecter le fonctionnement psychologique, social et relationnel

P R I S E EN COMPTE D ANS L ES S O I N S Aspects physiques, psychologiques et sociaux identification de l atteinte, des répercussions (fonctionnelles et psychol.) identifications du vécu et des émotions associés identification des besoins Qualité de vie Besoin d information des patients et de leur famille

EN BREF Contexte de travail dans la rencontre avec l autre Continuer à la singularité des patients et de leurs histoires personnelles Se préserver!!!