Décision du Défenseur des droits n MSP-MLD/

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Transcription:

Décision du Défenseur des droits n MSP-MLD/2013-57 RESUME ANONYMISE DE LA DECISION Recommandations relatives au respect des droits des personnes âgées vulnérables avant et pendant leur séjour en établissement spécialisé Domaine(s) de compétence de l Institution : Droits des usagers des services publics ; Lutte contre les discriminations Thème «Droits des usagers des services publics» : Accès aux services publics Santé Thème «Lutte contre les discriminations» : domaine de discrimination : services publics critères de discrimination : Age, Handicap, Etat de santé Consultation préalable du collège en charge de la lutte contre les discriminations Synthèse : Le Défenseur des droits formule sept recommandations visant à protéger les droits des personnes âgées vulnérables avant et pendant leur séjour en établissements spécialisés. Ces recommandations portent sur l anticipation de la prise en charge, du consentement et de la gestion des conflits.

Paris, le 11 avril 2013 Décision du Défenseur des droits n MSP-MLD/2013-57 Le Défenseur des droits, Vu l article 71-1 de la Constitution du 4 octobre 1958 ; Vu la loi organique n 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits ; Vu le décret n 2011-904 du 29 juillet 2011 relatif à la procédure applicable devant le Défenseur des droits ; Vu le code de l action sociale et des Familles ; Vu le code civil ; Vu la loi n 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l action sociale et médico-sociale ; Vu la loi n 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ; Vu la Charte des droits et des libertés de la personne âgée en situation de handicap ou de dépendance de la Fondation nationale de gérontologie et du ministère du travail affaires sociales, révisée en 2007; Après consultation du collège compétent en matière de lutte contre les discriminations et de promotion de l égalité ; Le Défenseur des droits est régulièrement saisi de difficultés rencontrées par les personnes âgées dont l état requiert un hébergement en établissement spécialisé. Le Défenseur des droits formule sept recommandations ci-après détaillées, visant à protéger les droits des personnes âgées vulnérables avant et pendant leur séjour en établissements spécialisés. Ces recommandations portent sur l anticipation de la prise en charge, du consentement et de la gestion des conflits et sont adressées au Premier ministre, à la ministre des affaires sociales et de la santé, à la ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l autonomie ainsi qu à la ministre déléguée chargée de la famille. Le Défenseur des Droits, Dominique BAUDIS 1

Recommandations sur le respect des droits des personnes âgées vulnérables avant et pendant leur séjour en établissement spécialisé Le Défenseur des droits est régulièrement saisi de difficultés rencontrées par les personnes âgées dont l état requiert un hébergement en établissement spécialisé (notamment dans un établissement d hébergement pour personnes âgées dépendantes -EHPAD). La vulnérabilité particulière de ces personnes âgées, porteuses d un ou plusieurs handicap(s) et dont la situation personnelle est souvent détériorée, impose de veiller tout particulièrement au respect de leurs droits et libertés. Le Défenseur des droits rappelle la responsabilité morale et matérielle des familles envers leurs âgés ainsi que, de façon plus globale, la nécessité pour la société d engager une réflexion sur la place donnée aux personnes âgées aujourd hui. Après avoir effectué des visites et conduit des entretiens, en complément des enseignements tirés des réclamations individuelles dans ce domaine traitées par l institution, le Défenseur des droits formule des recommandations visant à assurer une prise en charge de la personne âgée plus cohérente, à préciser une éthique du consentement de la personne âgée, ainsi qu à renouveler la gestion des conflits dans le secteur du médico-social. A. Anticiper la prise en charge Les situations de ruptures conduisent à annihiler la liberté du choix et peuvent toucher à des exigences élémentaires de dignité : hospitalisations évitables ou inadéquates, stress en résultant, notamment aux urgences, hébergements mal expliqués, etc. Recommandation n 1 Le Défenseur des droits recommande que soit identifié, au sein de chaque Département, un parcours de soins et d accompagnement visant à créer les conditions d une filière gérontologique. Impulsée par un établissement de soin de référence et s appuyant sur une «unité d évaluation et d orientation gérontologique» elle rendrait à des établissements d hébergement partenaires (notamment les EHPAD) leur vocation de «lieu de vie» au sein d un dispositif intégrant pleinement d autres institutions, tournées vers un objectif de maintien à domicile qui doit rester fondamental. Cette unité pourrait jouer un rôle indispensable de pivot et d évaluation non seulement dans ses implications médicales immédiates mais également dans d autres domaines : social, économique, juridique, si ce n est patrimonial et familial. Cette approche, qui intégrerait les difficultés propres à ces publics, s inscrit dans la logique d une prise en charge adaptée en vue de restaurer une égalité effective des droits. 2

B. Anticiper le consentement éclairé La situation de vulnérabilité d une personne âgée, ses déficits, sa dépendance ne peuvent aucunement justifier des initiatives malmenant le respect de sa volonté : nature, contenu et signature insuffisamment réfléchie et préparée des «contrats de séjour» (conclus entre chaque résident, ou son représentant légal, et l'établissement dès lors que le séjour continu ou discontinu est supérieur à 2 mois), pressions sociétales, y compris familiale à la «protection» Recommandation n 2 Le Défenseur des droits recommande que le consentement soit éclairé avec une rigueur à la mesure de la vulnérabilité de la personne. Ce consentement doit être recherché, dans la mesure du possible, par l élaboration d un contrat type de séjour, clair et complet harmonisé et signé dans les règles et facilitant la résolution d éventuels contentieux. Ce contrat de séjour devrait être revisité sous l angle, non seulement médico-social, mais aussi sous celui du droit des patients, des usagers, du consommateur, et du citoyen. Ceci implique, sans délai, une réflexion transversale, à caractère interministériel en vue de prévoir des clauses protectrices renforcées. Recommandation n 3 Le Défenseur des droits recommande que soit mieux défini, dans le domaine du consentement, le cadre éthique devant exister entre liberté, sécurité et droits fondamentaux de la personne. C. Anticiper la gestion des conflits L insuffisance des règles applicables et leur méconnaissance est une source importante de conflits : ignorance de certains personnels, préjugés, discriminations, absence d institution de médiation, d écoute et (ou) de recours, etc... Cet état de fait pousse à la détérioration des situations conflictuelles. Recommandation n 4 Le Défenseur des droits recommande de veiller à la prévention de ces conflits. A cet effet, il rappelle la possibilité, trop peu utilisée, de recourir à un mandat de protection future, qui permet à chacun d anticiper son avenir. Recommandation n 5 Le Défenseur des droits recommande d étendre au secteur médico-social la désignation d une «personne de confiance» prévue par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Recommandation n 6 A l instar du dispositif d agrément existant pour les associations désirant représenter les intérêts des usagers du système de santé et donnant ainsi un cadre légal et réglementaire à leur représentativité, le Défenseur des droits recommande d étendre ce mécanisme aux associations œuvrant dans le champ du médico-social. Recommandation n 7 Le Défenseur des droits recommande que le travail de médiation au profit des usagers du secteur médico-social puisse être renforcé et confié, soit à une «personne qualifiée» dont le statut prévu par la loi du 2 janvier 2002 rénovant l action sociale et médico-sociale aura été revisité, soit à des 3

groupements de médiation réunissant des médiateurs intervenant déjà en établissements et intéressés par un élargissement de leur mission. Enfin, le Défenseur des droits recommande qu une émanation adaptée de l actuel conseil de vie sociale (CVS), organe de participation collective des usagers à la vie de l établissement, puisse, en étant reconnue et renforcée, jouer le rôle des Commissions des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge (CRUQPC), dans le domaine de la santé, dans le traitement des plaintes afin d en garantir la qualité et la dimension éthique. Le Défenseur des Droits, Dominique BAUDIS 4