LA CHIRURGIE DE LA CATARACTE Comment se déroule la chirurgie de la cataracte? Une intervention de routine En France, plus de 500 000 chirurgies de la cataracte sont réalisées chaque année. L intervention de la cataracte se fait le plus souvent en ambulatoire. La durée moyenne d une intervention est de 10 à 20 minutes, avec une présence dans la salle opératoire de 30 minutes environ et dans la clinique de 2 à 3 heures. Préparation avant l intervention? Le patient est à jeun Une antisepsie corporelle (douche à la bétadine) est recommandée. Avant l intervention : - la pupille est dilatée à l aide de 3 collyres (4 instillations de chaque en 1 heure) - l anesthésie est le plus souvent locale, et est réalisée grâce à l instillation de collyres anesthésiques. - Rarement, pour des gestes associés plus complexes (chirurgie du glaucome ou de la rétine) cette anesthésie par gouttes peut être complétée par une ou deux injections indolores autour de l œil. - L anesthésie générale est exceptionnelle (sujet non coopérant, enfant) Important : l intervention doit en général être reportée en cas de maladie aigue nécessitant un traitement (infection dentaire, ORL, pulmonaire ou urinaire par exemple) L intervention, étape par étape Etape 1 : une incision de 1.8 à 2.2 mm est réalisée au niveau de la cornée pour permettre l accès au cristallin. Une deuxième incision de 1.0 mm, appelée contre-incision est réalisée pour permettre l accès à un instrument manipulateur. Etape 2 : un gel visco-élastique est injecté dans la chambre antérieure de l œil afin de protéger la face interne de la cornée (endothélium) pendant la durée de la chirurgie, maintenir les espaces intraoculaires pendant l intervention, et favoriser la manipulation des instruments et de l implant
Etape 3 : une fois ce visco-élastique injecté, le chirurgien réalise une fenêtre circulaire dans la capsule avant du cristallin Etape 4 : La phase suivante est appelée phacoémulsification, permettant de détruire le cristallin par l émission d ultrasons. Les fragments produits sont aspirés par une sonde irrigante qui permet également de polir la face interne du sac cristallinien avant implantation du cristallin artificiel Etape 5 : une fois cette phase terminée, le sac capsulaire vidé du cristallin est rempli de produit visqueux, pour conserver le volume Etape 6 : le maintien de ce volume va permettre l injection de l implant intra oculaire. L implant est positionné dans une cartouche de compression qui permet de l injecter de façon contrôlée dans l œil sans agrandir l incision puis de le positionner dans le sac capsulaire. Etape 7 : une fois l implant en place, le viscoélastique est aspiré et le chirurgien vérifie l étanchéité de l œil.. Après l intervention Etape 8 : Une suture peut être réalisée par sécurité (moins de 1% des cas), notamment lorsque la taille de l incision est supérieure à 3 mm dans le cas d implant particuliers. On utilise pour cela un fil nylon très fin (1/10 du diamètre d un cheveu), qui sera retiré 1 à 6 semaines plus tard. Le patient retourne le plus souvent à son domicile, accompagné d un proche. Une coque de protection fournie au bloc opératoire doit être portée les 4 premières nuits. Pendant la journée, de simples lunettes solaires suffisent, aucun pansement n est nécessaire. Le patient instille 3 fois par jour les gouttes de collyres anti-inflammatoires et antibiotiques prescrites pendant 2 à 4 semaines.
Des consultations postopératoires sont prévues le lendemain et 7 jours après l intervention avec le chirurgien, et 1 mois après l intervention avec l ophtalmologiste traitant qui peut à ce stade prescrire une éventuelle correction optique définitive. Le deuxième œil est en général opéré 7 jours après le premier, mais ce délai peut être augmenté sans inconvénient. Quel implant choisir? L implant intraoculaire est une lentille optique remplaçant le cristallin naturel qui a été extrait pendant l intervention. Cette lentille est placée dans la fine capsule naturelle du cristallin. Les implants utilisés aujourd hui sont parfaitement biocompatibles et bien tolérés à long terme. Ils sont le plus souvent souples, pour permettre leur pliage ou leur injection par des micro-incisions autoétanches ne nécessitant pas de suture (1.8 à 3.2 mm) Il est possible de choisir entre différents types d implants selon les défauts optiques de l œil et le type de correction souhaitée par le patient en fonction des ses activités quotidiennes. Ce choix est le plus souvent guidé et prescrit par le chirurgien. Les implants monofocaux standards Ce sont aujourd hui les plus utilisés. Il s agit d implants intraoculaires fixes (qui ne bougent pas dans l œil), calculés le plus souvent pour corriger la vision de loin sans lunettes, sur l œil dominant (œil droit directeur pour un droitier, celui que l on utilise pour «viser») Souvent, l implant destiné à l œil non dominant (œil gauche chez un droitier) est calculé pour permettre une correction assez efficace de la vision intermédiaire (écran d ordinateur à 70 cm par exemple) ou de la vision de près (lecture à 40 cm par exemple). Ce système de bascule (ou encore «monovision») introduit donc une légère différence entre les deux yeux permettant un gain très appréciable d indépendance par rapport à une correction complémentaire en lunettes (un œil pour la vision de loin et l autre pour la vision rapprochée). Cette petite différence est très bien supportée. Il existe de nombreux modèles d implants monofocaux qui diffèrent sur le plan technique : - par le matériau (acrilique hydrophile, acrilique hydrophobe, silicone, PMMA) - par le dessin (monobloc ou à «anses») - par les propriétés optiques (les implants asphériques améliorent légèrement la vision nocturne chez les sujets plus jeunes) - par le filtre jaune coloré éventuel (destiné à protéger en théorie la rétine et la macula de la toxicité des rayons UV et de la lumière bleue)
Tous les implants modernes donnent cependant des résultats visuels équivalents. Les implants toriques pour corriger l astigmatisme L astigmatisme est un défaut optique de l œil lié le plus souvent à la différence de puissance optique de la cornée sur ses axes principaux (par exemple la myopie est plus importante sur l axe horizontal que sur l axe vertical). Les implants toriques permettent de corriger l astigmatisme cornéen préexistant à l intervention, lorsque ce lui ci est significatif (supérieur à 1.5 Dioptries) et ainsi de réduire la dépendance en lunettes pour la vision de loin après l intervention. Lorsque des lunettes sont nécessaires après l intervention, celles ci sont en général, grâce à l utilisation d un implant torique, plus légères, plus esthétiques, plus confortables et moins couteuses Les implants multifocaux pour compenser la presbytie La compensation de la presbytie nécessite d intégrer dans l implant intraoculaire multifocal 2 corrections différentes, l une pour la vision de près l autre pour la vision de loin. On utilise pour cela deux approches différentes - les optiques multifocales diffractives (les plus utilisée aujourd hui) - les optiques multifocales réfractives (les plus anciennes) Les implants multifocaux diffractifs AT-Lisa (Zeiss) et Restor (Alcon) L optique des implants multifocaux diffractifs comporte un microrelief de marches concentriques similaire à celui des lentilles de Fresnel utilisée dans les loupes plates souples ou dans les optiques des phares côtiers. Ce microrelief partage la lumière en deux partiee, l une pour la vision de loin (de 1 mètre à l infini) et l autre pour la vision de près à 35 cm. Ce sont donc des implants à «double foyer» concentriques corrigeant surtout la vision principalement de loin et de près. La vision intermédiaire (notamment entre 45 cm et 1 m) est satisfaisante mais parfois légèrement insuffisante pour un bon confort en cas de travail intensif (par exemple sur écran informatique) Il en existe 2 types : - Les implants réfractifs (ReZoom d AMO par exemple) sont constitués de plusieurs zones concentriques de puissance réfractive différentes (en général
2 puissances pour la vision de loin et de près). L efficacité de ces implants dépendant du diamètre de la pupille et ils sont moins utilisés aujourd hui. - Les implants diffractifs (AT-Lisa de Zeiss, Restor d Alcon par exemple) utilisent la diffraction de la lumière (séparation de la lumière en deux faisceaux) obtenue par la création d un relief apparenté aux optiques de Fresnel sur l une des surfaces de l optique de l implant. Cet effet est moins dépendant du diamètre de la pupille et du centrage correct de l optique que pour les optiques multifocales réfractives. Ce sont les plus utilisés aujourd hui. Dans les deux cas, le sujet implanté perçoit deux images simultanées dont l une est beaucoup moins nette en fonction de la distance. Ce système implique quelques inconvénients le plus souvent mineurs qui ne créent par de limitation visuelle significative et disparaissent en général en 2 à 3 mois: - Cette deuxième image «fantôme» doit être neutralisée l adaptation cérébrale, ce qui peut nécessiter un certain «apprentissage» de quelques jours à quelques mois selon les sujets (neuro-adaptation). - En cas de lumière vive (phare de voiture par exemple) le sujet implanté peut percevoir des halos lumineux. - La vision dans l obscurité peut être plus difficile (attention en particulier à la conduite nocturne) - La vision de près nécessite un éclairage suffisant Dans les études récentes, quatre patients sur cinq implantés avec une lentille multifocale diffractive ont indiqué avoir une vision de qualité, une amélioration de leur qualité de vie et ont déclaré n'avoir jamais porté de lunettes après l'opération de la cataracte dans les deux yeux, contre seulement 1 sur 10 chez les patients porteurs de lentilles monofocales. Cette indépendance au port de lunettes a été prouvée quelle que soit l'activité réalisée, aussi bien en vision de près (pour lire par exemple), qu'en vision intermédiaire (pour travailler sur ordinateur par exemple) ou en vision de loin (pour pratiquer un sport ou pour conduire par exemple). C'est le plus haut degré de liberté à l'égard des lunettes qui n ait jamais été démontré dans un essai clinique sur les implants de cataracte. Au total 94% des sujets ont indiqué qu'ils accepteraient à nouveau d'être implantés avec l implant multifocal diffractif, si c'était à refaire. Les implants multifocaux réfractifs Re-Zoom (AMO) Le concept optique de ces implants, plus ancien, est basé sur la juxtaposition de plusieurs zones concentriques de puissances différentes. Ces implants offrent des résultats visuels qui sont plus dépendant du diamètre de la pupille, de l éclairage ambiant et d un bon centrage de l optique à intérieur du globe. Dans les études comparatives récentes les effets visuels indésirables lumineux (éblouissement, halos) étaient 2 à 3 fois plus fréquents qu avec les implants diffractifs.
Les implants accommodatifs pour corriger la presbytie Les implants accommodatifs monofocaux permettent de mimer l accommodation naturelle du cristallin jeune et de faire varier leur puissance lors de la contraction du muscle ciliaire à l intérieur du globe oculaire. Ceci permet à l œil implanté de faire la mise au point (focalisation) sur les objets à différentes distances, offrant une plage continue de vision : de près, de loin, intermédiaire. L implant accommodatif Crystalens HD (Bausch & Lomb) Cet implant a connu un grand succès aux USA et en 2009 il s est posé autant d implants accommodatifs que d implants multifocaux diffractifs dans ce pays. A la différence des implants multifocaux, l optique de l implant accommodatif est monofocale, offrant un point unique de focalisation permettant de percevoir 100 % des rayons lumineux, tout en étant indépendant aux conditions d éclairage, à la taille de la pupille et à l âge des patients. Le fait que l optique soit monofocale, permet de plus de réduire le risque de halos et d éblouissements. Comparativement aux implants multifocaux, la qualité de vision observée est meilleure avec l implant accommodatif (Crystalens ) : moins de halos, d éblouissements, meilleure vision des contrastes (d après résultat étude FDA). Les études récentes ont montré que le Crystalens HD offre une meilleure vision intermédiaire, et une meilleure vision en cas de faible éclairement que les implants multifocaux diffractifs. Par contre, la vision de près, quoique satisfaisante, n est pas toujours aussi performante avec ce type d implant. Environ 80% ont une acuité de près normale sans lunettes et 94% une acuité normale en vision intermédiaire (à 80 cm) contre 95% et 45% respectivement pour les implants multifocaux diffractifs actuels. L implant ajustable par la lumière (Calhoun Vision) L implant ajustable par la lumière (LAL, Light Adjustable Lens, Calhoun Vision, distribué par la société EBC en France) est un implant en matériau silicone
Les études cliniques portant sur le dernier modèle ont été présentées à partir de 2008, et plus récemment au congrès annuel de l European Society of Cataract and Refractive Surgeons(ESCRS), à Barcelone (12-16 septembre 2009) et de l American Society of Cataract & Refractive Surgeons à Boston (avril 2010), ainsi qu à la Socité Française d Ophtalmologie à Paris (mai 2010). Une correction optique quasi parfaite est obtenue dans plus de 9 cas sur 10. Quelles sont les suites habituelles de l intervention? Dans la très grande majorité des cas (95%), l'œil opéré de cataracte est indolore. La vision s'améliore très rapidement et une correction adaptée par lunettes peut être prescrite au bout de quelques semaines. Les soins locaux sont réduits à l'instillation de gouttes, à l'application d'une pommade et au port d'une protection oculaire selon des modalités et durant une période qui vous seront précisées par votre chirurgien. Il est parfois nécessaire de procéder à l'ablation de fils de suture. L'activité professionnelle, l'utilisation de machines ou d'instruments dangereux, la conduite automobile sont déconseillées pendant une période limitée qui sera définie par votre ophtalmologiste. Il est recommandé de porter des lunettes de soleil afin de protéger la rétine, malgré la présence d un filtre UV dans le matériau de l implant. Rarement, la présence d'autres lésions de l'œil (et en particulier, maladie de la cornée, glaucome, dégénérescence maculaire) peut limiter la récupération visuelle. Dans près de 30 % des cas, il se produit, au cours des années qui suivent l'intervention, une opacification de la capsule naturelle du cristallin dans laquelle est placé l implant: c'est la "cataracte secondaire" responsable d'une nouvelle baisse de vision. Le traitement simple, indolore et rapide (quelques secondes) consiste à réaliser au cabinet d ophtalmologie une ouverture de la capsule par laser YAG.