ÉLECTIONS MUNICIPALES ET CANTONALES DE MARS 2008 CONSEILS ET PRÉCAUTIONS À PRENDRE COMMENT PRÉVENIR ET GÉRER LES CONTENTIEUX ÉLECTORAUX?



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Transcription:

ETUDE Hors série Association des Maires de Grandes villes de France ÉLECTIONS MUNICIPALES ET CANTONALES DE MARS 2008 CONSEILS ET PRÉCAUTIONS À PRENDRE COMMENT PRÉVENIR ET GÉRER LES CONTENTIEUX ÉLECTORAUX? Dominique DEPORCQ Docteur en droit public Ancien Maître de conférence à l Institut d Etudes Politiques de Lyon Ancien conseil juridique Avocat au Barreau de la Guadeloupe

Introduction Dans la perspective des prochaines élections municipales et cantonales, les élus locaux sortants qui se présenteront en mars 2008 doivent porter une attention toute particulière aux contraintes juridiques incombant en matière de communication tant aux «collectivités intéressées par le scrutin» qu aux candidats eux-mêmes. Le dispositif issu des articles L. 52-1 alinéa 2 et L. 52-8 du code électoral ayant un effet direct sur la communication des collectivités publiques, ces dernières doivent intégrer cette contrainte juridique dans leurs plans de communication, sauf à prendre le risque pour leurs exécutifs d encourir l inéligibilité dès lors que ceux-ci seraient candidats aux élections en cause. Il est essentiel pour la sécurité des exécutifs des collectivités concernées par les scrutins de 2008, de veiller à encadrer leur communication au regard des leçons tirées de la jurisprudence électorale. Afin d exclure tout risque d inéligibilité, d annulation de scrutin, voire même de poursuites pénales, il est indispensable que les élus sortants, les candidats, leurs équipes administratives, de cabinet et de campagne soient à même de prendre en considération les règles du jeu imposées pour les compétitions électorales. La succession des textes mis en place depuis 1988 en vue d organiser les procédures de contrôle et les sanctions ayant pour objet de clarifier et de moraliser les rapports de la vie politique à l argent a établi un carcan légal et réglementaire ainsi qu un arsenal répressif conférant au droit une place prééminente dans la compétition électorale, inconnue jusqu ici. Au départ, les intentions du législateur étaient triples, à savoir : - Mettre un terme à la débauche de propagande qu occasionnaient les campagnes électorales et aux inégalités des candidats ; - Limiter le phénomène de la «prime au sortant», en sanctionnant toute tentative d association entre l image d une collectivité locale et la campagne du candidat ou de la liste de candidats sortants ; - Eviter que le coût de la campagne d un candidat soit supporté par la (ou les) collectivité(s) publique(s) qu il représente, et en dernier ressort par les contribuables locaux. Avec quinze ans de recul, l appréciation que l on peut porter sur ce dispositif doit être nuancée. La démocratie française a effectivement tourné le dos aux campagnes électorales «à l américaine» et la compression drastique des dépenses du fait des plafonds a contribué à mettre sur un relatif pied d égalité économique les candidats ; d une manière générale les objectifs de moralisation, de transparence et de mis en œuvre du principe d égalité entre les candidats ont été atteints. L interprétation radicale des dispositions de l article L. 52-1 alinéa 2 faite par le juge électoral, notamment dans la jurisprudence «élections municipales de Bassens» (CE, 2 oct. 1996), prohibant toute campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d une collectivité intéressée par le scrutin, y compris lorsque cette campagne était réalisée par le candidat à ses frais, a conduit le législateur à assouplir le mécanisme en autorisant désormais les «bilans de mandat», dès lors que leur coût est intégré au compte de campagne (loi n 2001-2 du 03 janv. 2001). Il n empêche qu aujourd hui nombre de candidats estime que cette disposition, destinée à enrayer le phénomène de «prime au sortant», a en pratique conduit à favoriser les candidats d opposition au sein des collectivités locales et à instaurer en quelque sorte «une prime à l entrant». Notre droit électoral repose depuis 1990 sur une fiction qui consiste, au nom du principe d égalité entre les candidats, «faire comme si» l élu sortant ou l élu titulaire d un autre mandat se trouvait placé dans les mêmes conditions de départ qu un candidat dépourvu de mandat et donc de notoriété. L élu sortant était jusqu il y a peu condamné au silence sur son action passée. Cette fiction a fort heureusement été atténuée depuis 2001 avec les dispositions de l alinéa 5 de l article L.52-1 et la jurisprudence a levé l essentiel des ambiguïtés qui ont longtemps caractérisé le nouveau dispositif électoral pour opérer la distinction essentielle entre communication institutionnelle (I) et communication du candidat (II) et appréhender les différentes sanctions encourues en cas de confusion entre ces deux types de communication (III). 2

I- Les risques et les précautions à prendre en matière de communication institutionnelle En période pré-électorale, la communication des collectivités n est pas condamnée au mutisme mais elle doit être sensée, pour éviter d être accusé par des adversaires et en particulier par les élus de l opposition, de parti pris au profit des élus sortants. La communication institutionnelle et toutes les actions qui s y rattachent (magazines municipaux, réunions quartier, réception, manifestation, inauguration, vœux annuels, site internet, utilisation de fichiers, ) constituent, comme l a admis depuis longtemps le Conseil d Etat, une activité de service public. La circonstance qu il y ait des élections ne signifie pas que ce service public d information des administrés doive être mis entre parenthèse. Mais ce service public, régi par le principe de continuité doit également respecter le principe de la neutralité. La communication institutionnelle ne doit pas permettre de rompre le principe d égalité entre les candidats et notamment entre l élu sortant et ses adversaires. Concernant le cas d un maire nouvellement élu précisément dans la période pré-électorale de l année qui précède le mois où le scrutin sera acquis, c est-à-dire un maire désigné par son conseil municipal en mars 2007, le principe de continuité trouve bien sûr à s appliquer. Il convient de se référer strictement à la pratique du maire précédent ou à celle des adjoints du secteur concerné pour chaque type d actions de communication envisagées. Certes, le juge ne sanctionne généralement pas la forme, mais essentiellement le fond. Toutefois, au regard des principes qui régissent la communication institutionnelle en période électorale, évoqués ci-dessous (neutralité, antériorité, régularité, identité), il convient de ne pas s affranchir compte tenu de ce que nous sommes en période électorale des pratiques établies par votre prédécesseur en matière d actions de communication, hors période électorale. Je ne peux donc que vous suggérer de vous écarter le moins possible des pratiques en matière d actions de communication dont vous avez hérité de votre prédécesseur, qu ils s agissent de la forme, du rythme, des volumes des actions engagées avant votre élection qu ils s agissent notamment de magazines, de réunions de quartier, de manifestations et d inaugurations. Votre élection en tant que premier magistrat de la commune de Boulogne-Billancourt a une date correspondant précisément à l ouverture de la période pré-électorale telle que prévue par l article L. 52-8 du code électoral, vous contraint à ne pas innover en matière d actions de communication, sauf à prendre le risque de voir vos adversaires vous attaquer à l issue du scrutin municipal de mars 2008. Les actions de communication d une commune se doivent d être neutres et objectives et un maire sortant candidat doit constamment avoir en tête la question qui suit : s il n y avait pas d élection, serais-je amené, oui ou non, à entreprendre une telle action? Si la réponse est négative cela signifie qu il n est pas raisonnable d engager en période électorale une telle action. Le législateur a voulu faire en sorte que l élu sortant ne bénéficie pas de la prime que lui confère l exercice de son mandat dans le cadre de la campagne. Cela signifie qu en matière de communication l élu sortant candidat doit constamment avoir comme préoccupation de dissocier de manière pertinente : - ce qui relève de l exercice normal de sa fonction de maire, ce qu il sera jusqu au jour de l élection et qui constitue le champ de la communication institutionnelle ; - de ce qui relève de la propagande électorale et qui répond à son légitime souhait de se faire réélire, ce qui constitue le champ de la communication du candidat. Cette distinction, aisée en théorie, soulève de nombreuses difficultés pratiques sur le terrain, dans la mesure où elle exige, dans le cas spécifique d un maire sortant candidat à sa réélection, un comportement quasi schizophrénique dans un langage plus modéré, le maire doit veiller à ne pas mélanger les genres, c est-à-dire à ne pas confondre l intérêt général dont il est le dépositaire et l intérêt particulier, privé, qui est le sien en sa deuxième qualité de candidat. Il doit constamment veiller à ce que le «dédoublement fonctionnel» que lui impose ses deux rôles de maire et de candidat soient constamment respecté. En toute hypothèse il faut que le maire sortant candidat 3

ne puisse pas se voir reprocher d avoir utilisé sa «casquette» de maire pour se faire réélire. Pour autant, si les textes et notamment les deux articles essentiels du code électoral en la matière, à savoir les articles L. 52-8 et L. 52-1 alinéa 2 ont pendant longtemps conduit à penser que par application du principe de précaution, on ne pouvait plus rien faire en période électorale, la jurisprudence, au cours des quinze dernières années d application et d interprétation de ces dispositions, a sensiblement assoupli le cadre de la communication institutionnelle en période électorale. A titre d exemple et notamment dans la période critique des six mois pendant lesquels les campagnes de promotion publicitaire de la réalisation ou de la gestion d une collectivité intéressée par le scrutin sont prohibées (article L. 52-1 aliéna 2 du code électoral), certains élus sortants candidats, adoptant une position de type «risque zéro», ont renoncé à publier tout éditorial du maire, toutes photos d élu et toutes tribunes libres, ont renoncé à porter leur nom sur les cartons d invitation et cartes de vœux, etc. Or, la jurisprudence du Conseil d Etat, comme celle du Conseil constitutionnel ont depuis longtemps démontré qu une telle attitude relève de l extrémisme juridique et se trouve dépourvue de tout bon sens, le juge étant totalement indifférent à ce type d auto-sanction par les élus sortants et n ayant jamais sanctionné le fait de maintenir un éditorial avec une photo du maire sortant ou encore le fait que le maire sortant candidat ait porté son nom accompagné de sa qualité de maire sur un carton d invitation ou sur une carte de vœux. Ce qui importe, ce n est pas forme de l action de communication qui, lorsqu elle est justifiée n est jamais mis en cause par le juge de l élection, c est en revanche le contenu, l importance normale ou anormale des moyens mis en œuvre au cours de la manifestation. Dès lors que l élu ne provoque pas une action de communication à des seules fins électoralistes, celle-ci ne pourra pas lui être reprochée, hormis le cas particulier des campagnes de promotions publicitaires de la gestion communale financées sur fonds communaux dans la période des six mois. Le juge ne sanctionne pas l organisation d une inauguration, dès lors que celle-ci se justifie, même en période électorale, par l ouverture au public d un nouvel équipement communal. Ce qui peut-être reproché, c est une inauguration provoquée pour la circonstance des élections et ce alors même que l équipement fonctionne déjà depuis longtemps ou encore une inauguration organisée avec des moyens matériels et financiers communaux d une importance très sensiblement supérieure à ceux qui sont mobilisés d ordinaire, dans des circonstances semblables. Autrement dit, toute action, toute manifestation organisée par la commune ne doit en aucun cas pouvoir être considérée par le juge de l élection comme ayant été déviée, «récupérée» par le maire sortant qui serait candidat, à des fins électoralistes, soit pour promouvoir sa personne, soit, dans les six mois critiques pour promouvoir son action en faisant financer cette promotion sur deniers communaux. Pour autant, afin de bien identifier les risques et les précautions à prendre lorsque, en période électorale, une commune met en œuvre une action de communication institutionnelle, il convient de s interroger successivement sur ce qu est une collectivité intéressée par le scrutin (1-1), sur les dispositions régissant la communication constitutionnelle dans cette période (1-2) et sur les critères utilisés par le juge de l élection pour distinguer la communication institutionnelle de la propagande électorale (1-3). A partir de là, un certain nombre de recommandations doivent être prescrites à l élu sortant candidat dans la conduite de la communication de la ville (1-4) afin de ne pas s exposer aux sanctions encourues pour des actions de communication illicites (1-5). 1.1. QU EST QU UNE COLLECTIVITÉ INTÉRESSÉE PAR LE SCRUTIN? Selon l article L. 52-1 alinéa 2 du Code électoral : «( ) A compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales, aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin».

Sont concernés : Les collectivités intéressées Leurs établissements publics Leurs satellites publics ou privés Etat Régions Départements Communes Etablissements publics nationaux Établissements publics locaux Syndicats intercommunaux Communautés d Agglomération ou de Communes Communautés urbaines SEM SEML Associations Entreprises privées délégataires de service public etc. Par exemple : - Interdiction pour un conseil municipal d assurer la promotion de ses élus, candidats aux municipales ou aux cantonales. - Une commune ne doit pas assurer la promotion de son maire candidat aux élections cantonales, un OPHLM ou une SEM ne peut organiser la promotion personnelle du maire candidat à l une des élections de 2007, président de l OPHLM ou de la SEM ou des réalisations de la collectivité. L article L. 52-1 s applique à toute campagne de promotion publicitaire des réalisations et de la gestion d une collectivité quelle que soit l origine de son financement, à l exception, depuis l entrée en vigueur de la loi du 3 janvier 2001, des bilans de mandat réalisés sur les finances du candidat, dans les limites du plafond des dépenses autorisées. 1.2. QUELLES DISPOSITIONS RÉGISSENT LA COMMUNICATION INSTITUTIONNELLE EN PÉRIODE ÉLECTORALE? Depuis 1990, l article L. 52-8 du Code électoral interdit tout don ou avantage en nature de la part de personnes morales de droit public. Cette disposition pose un problème particulier pour la communication institutionnelle des collectivités intéressées par les deux prochains scrutins. En effet, si une campagne favorise un candidat, et notamment un élu sortant, ce dernier risque l invalidation. Il convient donc d analyser les critères utilisés par le juge de l élection pour faire la distinction entre communication institutionnelle et électorale. Le cadre juridique mis en place en 1990, et renforcé en 1995, empêche les élus sortants de profiter de leur position pour les avantager auprès des électeurs. Toutefois, les critères utilisés par le juge de l élection pour distinguer, dans la communication institutionnelle, l éventuelle part électoraliste lui laissent une large marge d appréciation. Cette part d incertitude est d autant plus préjudiciable que les sanctions encourues par les élus sont importantes. Deux dispositions principales régissent la communication institutionnelle en période électorale : L article L. 52-8 du Code électoral indique que «les personnes morales, à l exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués». Cet article interdit à toutes personnes morales, et donc aux collectivités publiques, de financer une campagne électorale. L interdiction comprend bien évidemment les apports financiers, mais aussi les avantages en nature, qui peuvent prendre la forme d une campagne de communication institutionnelle. En somme, une campagne qui valoriserait directement un élu sortant est prohibée. L article L. 52-1 alinéa 2 du même code dispose qu «à compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales, aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin». Pris à la lettre, cet article interdit toutes les actions de promotion visant les réalisations et la gestion des collectivités. En fait, le juge de l élection a interprété les termes «promotion publicitaire» non selon leur sens commercial (nature du message, type de support) mais plutôt comme interdisant toute valorisation indirecte de l action des élus. En définitive, aucun article du Code électoral n interdit les actions de communication institutionnelle en période électorale. En revanche, ces actions ne doivent en aucun cas influer sur la campagne électorale en cours et procurer un avantage aux élus sortants. Toutefois, la loi du 3 janvier 2001 a levé toute ambiguïté en autorisant un candidat à faire un bilan de mandat, sous 5

réserve que l opération soit retracée dans son compte de campagne. 1.3. LES CRITÈRES UTILISÉS PAR LE JUGE DE L ÉLECTION POUR DISTINGUER LA COMMUNICATION INSTITUTIONNELLE DE LA COMMUNICATION ÉLECTORALE Quatre critères sont utilisés par le juge de l élection pour déterminer si une campagne institutionnelle a un caractère électoral. Parmi eux, celui du contenu est déterminant. Le critère de l objectivité et de la neutralité Le critère de fond reste le paramètre déterminant dans l appréciation du juge. L information d une collectivité intéressée par le scrutin, délivrée dans les campagnes de communication, ne doit comporter que des messages politiquement neutres à caractère purement informatif. Ainsi, les campagnes d inscription sur les listes électorales, sur les transports collectifs, l aide aux personnes âgées est toujours possible en période électorale. Mais il faut éviter toute personnalisation du message valorisant les élus (cf. «le journal cantonal de décembre 1992 contient pour l essentiel des informations générales ; cependant, certaines des pages de ce numéro comportent des éléments rédactionnels et des photographies consacrés à la promotion de l action du candidat ; trois pages sur seize revêtant un caractère de propagande électorale, doivent figurer dans les dépenses du compte à hauteur de 8 437,50 francs» - CC, 25 novembre 1993, n 93-1327, AN, Yvelines, 5 ème circ., rec. p. 483). Le critère de l antériorité L antériorité d une action de communication (manifestation, commémoration, inauguration) permet de s assurer que celle-ci n a pas été créée spécifiquement en vue des élections. Ce principe exclut donc la création de tout nouveau support. Il est à noter que publier un nouveau magazine quelques mois avant l entrée en vigueur de l article L. 52-8 du Code électoral n est pas suffisant pour justifier d une antériorité («Considérant qu il résulte de l instruction que la commune de Villeurbanne a financé la publication, à compter du mois d avril 1994, de la lettre mensuelle «objectif» ; que, compte tenu de son contenu et de la date de son lancement, «objectif» présente, pour partie, le caractère d un document de propagande dont M. Chabroux, maire sortant, a tiré bénéfice pour sa campagne électorale ; que le compte de campagne de M. Chabroux doit être rejeté, eu égard à l importance des avantages consentis par la commune de Villeurbanne en violation des dispositions de l article L. 52-8 du code électoral précité» - CE, 15 janvier 1997, Elections municipales de Villeurbanne, n 176828). Les critères de la régularité et de l identité de la forme du support Le principe de régularité indique qu il n est pas possible de modifier la périodicité des manifestations et publications (magazines municipaux d informations, lettre du maire aux administrés, etc.). Le juge s assure ainsi qu il n y a pas eu augmentation de la fréquence des actions à l approche des échéances électorales. Le principe de l identité de la forme du support est complémentaire du précédent. La forme des supports de communication des collectivités intéressées par le scrutin (pagination, maquette, périodicité...) ne doit pas être modifiée. Le juge de l élection contrôle fréquemment le respect de ces critères. Ainsi, il a été jugé que «Considérant qu il résulte de l instruction que la périodicité et la présentation du bulletin municipal «Champs-sur-Marne Info Service» n ont pas été modifiées dans la période précédant l élection et que le contenu de cette publication est resté essentiellement informatif et consacré à des projets ou manifestations intéressant la vie locale ; qu ainsi, même s il fait apparaître Mme Y... fréquemment et présente l action de la municipalité sous un jour favorable, ce bulletin n a pas constitué un moyen de propagande électorale» (CE, 29 juillet 2002, Elections municipales de Champs-sur-Marne, n 239846 ). 1.4. LES RECOMMANDATIONS À FAIRE AUX COLLECTIVITÉS INTÉRESSÉES PAR LE SCRUTIN EN MATIÈRE DE COMMUNICATION INSTITUTIONNELLE Veiller à ce qu aucun moyen de la collectivité ou de ses satellites ne soit utilisé au profit de tel ou tel élu candidat : Photos, supports graphiques, moyens à disposition des groupes d élus, etc. 6

Isoler strictement la communication institutionnelle de la collectivité et de ses satellites et la communication du ou des élus candidats en campagne. Sur le fond, cette séparation exige une coordination claire entre les deux types de communication, permettant de créer des domaines réservés à la communication électorale des élus, candidats aux scrutins à venir. Les responsables de la communication institutionnelle doivent renoncer à communiquer sur les thèmes choisis par les candidats pour leur(s) campagne(s). Sur la forme, il est recommandé aux personnes chargées de la communication des candidats de faire un effort systématique de changement de style rédactionnel et d établir toutes les ruptures visuelles et de styles propres à écarter toute continuité ente communication institutionnelle et communication électorale. Centraliser toute information en direction de l extérieur par la mise en place d une procédure d autorisation pour toute action d information pour éviter des dérapages du type «excès de zèle» ou «action pirate» et pour détecter toute action de promotion à l insu des candidats, la loi exige l accord express du candidat pour qu une dépense lui soit imputable. Ne pas hésiter à agir contre les auteurs des actions non souhaitées en s adressant : - au juge pénal sur la base des articles L. 52-16 et L. 113-1 paragraphe III du Code électoral, qui, respectivement, interdisent et répriment les dépenses faites en dehors de la demande d un candidat ou sans son accord exprès ; - au Tribunal de grande instance par la voie du référé pour faire cesser l action de promotion «pirate». Comment distinguer communication institutionnelle et communication de l élu candidat? Les critères jurisprudentiels Les recommandations pour les collectivités intéressées par le scrutin Antériorité L action de communication (publication, inauguration, etc.) ne doit pas avoir été lancée spécifiquement en vue des élections pour soutenir un candidat. Régularité Impossible de modifier la périodicité des manifestations, publications, dans la période pré-électorale. Identité Interdiction de modifier les supports de communication utilisés par la collectivité (pagination, rubrique, ). Sobriété et neutralité L information de toute collectivité intéressée ne doit comporter que des messages politiquement neutres à caractère purement informatif. 4 4 4 4 1- Séparation stricte entre la communication institutionnelle de toutes collectivités intéressées et la communication électorale du candidat. Les responsables de la communication de la collectivité intéressée doivent : renoncer à communiquer sur les thèmes de campagne du candidat ; adopter un style rédactionnel propre à écarter toute confusion entre la communication de la collectivité intéressée et la communication électorale du candidat. 2- Aucun moyen de toutes collectivités intéressées ou de ses satellites (photos, personnels, moyens mis à disposition des groupes) ne devra être utilisé par le candidat 3- Centraliser toute information en direction de l extérieur par la mise en place d une procédure d autorisation pour toute action d information 7

1.4.1- Les précautions a prendre concernant les bulletins et magazines institutionnels Ce que la collectivité peut faire Ce que la collectivité ne doit pas faire Conserver le bulletin municipal, départemental, régional dans son état habituel. Continuer à publier des numéros spéciaux si cela existait déjà, avec la même périodicité et en prenant garde de ne pas adopter un ton élogieux. Modifier la présentation si cela n a pas pour objet de mettre en valeur l élu et les réalisations de la collectivité. Conserver l éditorial accompagné de la photo de l élu s il existait auparavant, en prenant garde au texte et au contenu du bulletin (ton neutre, aucune allusion à la campagne, aucune valorisation de son auteur et de l édito). Maintenir les «Tribunes libres» si elles ne sont pas détournées de leur objet. Réaliser des interviews dans lesquelles le candidat se met en valeur. Publier un numéro spécial comportant un bilan des actions qu il a menées en tant qu élu. Créer une publication uniquement pour promouvoir son image et les réalisations de la collectivité. Modifier la présentation de la publication et sa diffusion (augmentation du nombre de numéros, titres «accrocheurs», etc.) de manière excessive, avec pour but une mise en valeur des élus et des réalisations. Faire voisiner des articles vantant les réalisations et la gestion de la collectivité avec la photo de l élu. Créer un événement avec une photographie de l élu quelques mois avant l élection. Adopter dans les articles un style laudateur pour décrire les réalisations de la ville. Applications jurisprudentielles - «Considérant qu il résulte de l instruction que ni le format ni la périodicité de la revue municipale Dijon notre ville n ont été modifiés pendant la période prévue à l article L. 52-4 du code électoral ; que les extraits à caractère local de cette revue mentionnés par Mme Williams dans sa protestation se bornent à traiter, sous forme d éditoriaux du maire, ou d articles, de la situation de la commune et des réalisations de la municipalité, sans excéder l objet habituel d une telle publication et sans faire référence aux élections cantonales ; que la circonstance que les éditoriaux et plusieurs autres passages soient accompagnés de photographies de M. Rebsamen ne suffit pas par elle-même à conférer à ces extraits un caractère de propagande électorale ; que les passages de la revue relatifs à des sujets de politique nationale ne peuvent, eu égard aux thèmes abordés et au ton employé, être regardés comme ayant un tel caractère ; que les numéros de la revue Grand Dijon, qui contiennent une description principalement technique des réalisations et projets de la communauté d agglomération, et ceux de la revue Entre nous, destinée aux seuls agents de la commune, ne peuvent, eu égard à leur contenu ou à leur diffusion, être regardés comme des documents de propagande électorale ; qu il suit de là que la diffusion de différents numéros des trois revues susmentionnées ne peut être regardée comme un avantage procuré à M. Rebsamen dont le coût devrait être réintégré dans son compte de campagne» (CE, 20 mai 2005, Rebsamen, n 274400) - Le fait que le nom et la photographie d un conseiller général apparaissent dans diverses rubriques d un bulletin municipal durant l année qui a précédé l élection n est pas une circonstance suffisante pour contrevenir aux dispositions de l article l. 52-1 du Code électoral (CE, 16 novembre 2005, Elect. cantonales de Gravelines, n 274797). - La diffusion d un bulletin municipal qui dressait un bilan avantageux de l action menée par la municipalité s analyse comme une campagne de promotion publicitaire par conséquent, comme un avantage consenti au sens des dispositions de l article l. 52-8 du Code électoral (CE, 6 février 2002, Elections municipales de Pont-de-Chéruy, n 234903). 8

Depuis la loi du 27 février 2002, les bulletins d information générale sur les réalisations et la gestion du conseil municipal, général ou régional, sous quelque forme que ce soit, doivent contenir une tribune libre réservée aux membres de l opposition. Ce droit d expression est accordé aux membres de l opposition des conseils municipaux, dans les communes de 3 500 habitants et plus (art. L. 2121-27-1 du Code général des collectivités territoriales) et aux groupes d élus des conseils généraux (art. L. 3121-24-1 du code précité) et des conseils régionaux (art. L. 4132-23-1 du code précité), selon des modalités définies dans le règlement intérieur. Il s applique à toutes les formes de supports, qu il s agisse d un support papier ou de bulletins d information mis en ligne sur le réseau internet. Les magazines, qu ils soient périodiques ou non, sont concernés, dès lors qu ils sont relatifs à l information générale, ce qui renvoie aux limites en matière d information pour la collectivité : informer ses administrés sur les actes de sa gestion. En effet, un bulletin d information de la collectivité ne peut en aucun cas constituer un moyen de promotion politique au profit de la majorité, pas plus que de l opposition, ce qui nous renvoie à une hypothèse infiniment moins probable, à l exception du cas des mairies d arrondissement d opposition de Paris, Lyon et Marseille. En période électorale, le droit à l expression de l opposition ne peut pas contrevenir aux dispositions de l article L. 52-8 du Code électoral prohibant les dons des personnes morales aux candidats et aux dispositions de l article L. 52-1 du même Code visant à empêcher toute campagne de promotion publicitaire bénéficiant à un élu local candidat dans les trois mois précédant le scrutin et toute campagne portant sur les réalisations ou la gestion de la collectivité dans les six mois précédant celui du scrutin. Cependant, parmi les mesures destinées à améliorer les conditions dans lesquelles les élus exercent leur mandat, la loi démocratie de proximité du 27 février 2002 a rendu obligatoire la pratique consistant à réserver aux membres de l opposition pris individuellement (et non pas au groupe des élus de l opposition) une tribune libre dans les bulletins d information générale pour les communes de 3 500 habitants et plus, sans distinguer les périodes pré-électorales de celles qui ne le sont pas. Chaque membre de l opposition peut prétendre à s exprimer individuellement. En effet, l article L. 2121-27-1 du Code général des collectivités territoriales codifiant l article 9 de la loi précitée est ainsi rédigé : «Dans les communes de 3 500 habitants et plus, lorsque la commune diffuse, sous quelque forme que ce soit, un bulletin d information générale sur les réalisations et la gestion du conseil municipal, un espace est réservé à l expression des conseillers n appartenant pas à la majorité municipale. Les modalités d application de cette disposition sont définies par le règlement intérieur». Si les campagnes de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d une collectivité sont prohibées dans les six mois précédents celui du scrutin, il ne faut pas pour autant en déduire que les administrés-citoyens-électeurs doivent être privés de toute information et de toute action de communication en période électorale. C est d ailleurs pourquoi le législateur a tempéré la règle posée par l article L. 52-1 alinéa 2 en précisant que l interdiction des campagnes de promotions publicitaires de des réalisations et/ou de la gestion d une commune ou d un de ses satellites «ne s applique pas à la présentation, par un candidat ou pour son compte, dans le cadre de l organisation de sa campagne, du bilan de la gestion des mandats, qu il détient ou qu il a détenu (article L. 52-1 alinéa 3 du code électoral / article 23-1 de la loi du 03 janvier 2001)». Une tribune libre, comme un éditorial, n est pas en soi répréhensible en période électorale. Ce qui importe, dans le respect d une compétition à armes égales entre élus sortants et opposition, c est que les moyens communaux, dont font partie les magazines municipaux, ne soient pas dévoyés à des fins électoralistes. 9

1.4.2. Les précautions à prendre concernant les relations avec la presse Ce que la collectivité peut faire Ce que la collectivité ne doit pas faire Maintenir les conférences de presse mensuelles ou la transmission mensuelle d informations sur la vie communale qui existaient auparavant. Les publi-reportages. 1.4.3. Les précautions à prendre concernant les manifestations et inaugurations Ce que la collectivité peut faire Organiser les manifestations, réunions habituelles dans les mêmes conditions que les années précédentes. Créer un nouvel événement si celui-ci est justifié par une date ou un acte symbolique, par une circonstance particulière. Les conditions d organisation devront être identiques à celles mises en œuvre pour une manifestation équivalente. Distribuer des places gratuites si cela est coutumier. Un compte-rendu en termes neutres de la manifestation dans le bulletin municipal (texte purement informatif, éviter de multiplier les photos mettant les élus en situation, décrire en termes neutres la réalisation). L exécutif peut prononcer des discours en évitant de personnaliser le texte (les pronoms personnels «je», «nous» et les adjectifs possessifs «nos», «ma» sont à éviter) et en l axant sur l objet de la manifestation ou l ouvrage à inaugurer. Ce que la collectivité ne doit pas faire Augmenter en période pré-électorale ou électorale le nombre de manifestations. Augmenter les dépenses par rapport à celles engagées ordinairement pour des manifestations comparables. Avancer ou reculer la date d une inauguration pour la faire coïncider avec la campagne électorale ou les scrutins. Augmenter le nombre d invitations. Créer ou financer la communication d une manifestation nouvelle uniquement dans le but de promouvoir l image de l élu (photos en situation publiées dans le journal municipal). L exécutif ne peut rappeler dans les discours les réalisations effectuées au cours du mandat écoulé ou présenter ses projets et la candidature aux scrutins de 2004 (risque de reprise du texte dans le bulletin municipal). Effectuer un compte-rendu mettant en valeur les élus (photos les mettant en situation à côté d un texte élogieux, etc.), faisant une description de l ouvrage réalisé en termes élogieux. Indiquer le nom patronymique de l élu sur les invitations alors que cela n avait jamais été fait. Inviter massivement la presse. Applications jurisprudentielles - TA Versailles, 5 décembre 1995, Elections municipales de Doudan, n 95.2977 et 95.2985) : «Aucune disposition du Code électoral n interdit à un Maire de participer à des inaugurations durant les mois précédant une élection municipale ; toute manifestation courante de la vie locale, ne peut être considérée comme une opération électorale». - Dans la mesure où un maire sortant a procédé à plusieurs inaugurations sans que ces manifestations ne fasse l objet de commentaires politiques dans la presse, et dès lors qu elles n ont pas été avancées ou anticipées pour influencer le vote des électeurs, ces inaugurations ne sauraient être considérées comme une campagne de promotion publicitaire au sens de l article l. 52-1 du Code électoral (CE, 29 juillet 2002, Elections municipales de Dunkerque, n 239142). 10

1.4.4. Les précautions à prendre concernant les lettres de soutien Ce que la collectivité peut faire Ce que la collectivité ne doit pas faire Les lettres relatives à la situation personnelle des administrés peuvent continuer à être envoyées sous la forme habituellement utilisée : aucune allusion aux scrutins, ni promesses liées à la réélection. Adresser des lettres contenant des propositions électorales (cela concerne toutes les actions qui dépassent le cadre du mandat en cours). Les lettres d accompagnement signées de l élu annonçant et expliquant la mise en oeuvre d une opération d intérêt général dès lors qu il y a antériorité de cette pratique. Applications jurisprudentielles - Le simple envoi aux abonnés du service des eaux de la commune d une lettre d explication non signée, faisant état de la baisse de la prise en charge communale du prix de l eau, ne saurait être analysé comme contrevenant aux dispositions de l article L. 52-1 du Code électoral (CE, 20 mai 2005, Elections cantonales de Saint-Gervais, n 273749). - A l inverse, constitue une irrégularité susceptible d altérer la sincérité du scrutin l intervention de l autorité municipale par la distribution aux électeurs d une lettre avec l entête et l écusson de la mairie et invitant ceux-ci à ne pas mettre de bulletin dans l enveloppe du second tour (CE, 27 juin 2005, Elections cantonales de Thorigny sur Marne, n 273690). 1.4.5 Les précautions a prendre concernant les visites de quartier Ce que la collectivité peut faire Ce que la collectivité ne doit pas faire Si elles constituent une pratique antérieure à la période électorale, elles sont autorisées dans les mêmes conditions: ne pas augmenter la fréquence et elles doivent avoir pour objet l information des administrés. Instaurer des visites de quartiers qui n existaient pas avant la période électorale avec un objectif électoral. 1.4.6 Les précautions à prendre concernant les numéros verts et le site internet de la commune Ce que la collectivité peut faire Ce que la collectivité ne doit pas faire La création ou le maintien d un numéro vert uniquement pour l information des administrés est possible. Les sites Internet peuvent rester ouverts si les informations diffusées ne changent pas de nature. La création d un site Internet est possible si elle a pour but d informer la population. La création d un numéro vert ou sa transformation en moyen de promotion des réalisations de la collectivité. Modifier les informations présentes sur le site Internet de la collectivité pour effectuer une valorisation des élus sortants ou des réalisations de la collectivité. Applications jurisprudentielles : - le site internet de la mairie, dès lors qu il se contente de donner des informations d ordre administratif et ne présente aucune information pouvant s apparenter à de la propagande électorale, ne constitue pas un avantage direct ou indirect consenti par la collectivité 11

au candidat (TA de Melun, 22 mai 2001, n 011179, M. Michel Boutin c/ élus au 1 er tour des élections municipales dans la commune de Saint-Pathus) ; - l utilisation par la liste conduite par le candidat du service gratuit d hébergement de sites Internet, proposé de manière indifférenciée à tous les sites licites par une société se réservant le droit d inclure un bandeau ou des fenêtres publicitaires sur les sites hébergés, ne constitue pas un avantage spécifique accordée au candidat et n est pas considéré comme un don d une personne morale au sens de l article L. 52-8 du Code électoral, dès lors qu il résulte de l instruction que la gratuité de l hébergement du site Internet ouvert par le candidat est accordée en contrepartie de la diffusion de messages publicitaires (CE, 18 octobre 2002, n 240048, Elections municipales de Lons) ; - l association «Réseau européen pour une politique de vie» a pris en charge une partie des dépenses de création du site Internet utilisé par la liste «Politique de vie pour l Europe» durant sa campagne électorale. L association ne pouvant être regardée comme un «parti ou groupement politique», au sens de l article L. 52-8 du Code électoral, le candidat doit donc être regardé comme ayant bénéficié d un avantage de la part d une personne morale (CE, 29 décembre 2000, n 213349, Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques c/ M. Cotten). - Le site internet de la ville de Nice consacrait une page unique à la présentation du maire de la ville sur un total de plusieurs milliers de pages et n avait pas été utilisé par le candidat sortant pour les besoins de sa campagne électorale. En conséquence, ce site ne saurait être considéré comme une campagne de promotion publicitaire ni comme un avantage indirect consenti par la collectivité au candidat (CE, 9 octobre 2002, Elections municipales de Nice, n 240166). Le juge apprécie au cas par cas si l intervention a le caractère de propagande électorale et si elle est de nature à influencer le résultat des votes. Attention : le contenu du site de la collectivité doit rester neutre et ne pas présenter un bilan excessivement positif des élus en place, à peine de constituer une campagne de promotion publicitaire illicite, selon l article L. 52-8. 1.4.5. Les précautions à prendre concernant les photos, les livres et l affichage institutionnel Ce que la collectivité peut faire Ce que la collectivité ne doit pas faire Les photos Mettre à la disposition de tous les candidats les photos de la collectivité (la photographie doit être vendue au prix du marché). Les livres La publication d un ouvrage sans aucune mise en valeur des réalisations de la collectivité (par exemple, purement historique) est possible. Utiliser sans les payer les photos de la collectivité pour confectionner une brochure diffusée pendant la campagne constitue un avantage en nature prohibé par l article L. 52-8 du Code électoral. La réalisation d un ouvrage visant à promouvoir le candidat sur les fonds de la collectivité. L affichage institutionnel L achat d espaces publicitaires par la commune sur des panneaux d affichage en vue de promouvoir les réalisations et/ou la gestion de la commune est totalement prohibé à compter du premier septembre 2007. Seuls des messages purement informatifs relatifs à l accès aux services publics communaux et au bénéfice des administrés peuvent faire l objet d achat d espace publicitaire. Délivrer, par un affichage financé par la collectivité, un message de nature électorale. 12

Applications jurisprudentielles : Les photos La mise à disposition gracieuse de clichés photographiques appartenant à la commune, considérée comme un avantage indirect, est sanctionnée par le juge (CE, 29 janvier 1997, Elections municipales de Caluire-et-Cuire, n 176796). «La reprise dans le journal électoral de 4 photos qui avaient déjà été publiées dans le bulletin municipal [ ] alors que cette reprise a donné lieu à facturation incluant l achat des droits de reproductions et le coût d impression des documents repris et intégrés dans le compte ne saurait constituer de la part de la commune un don d une personne morale prohibé» (TA Paris 15 décembre 1995, Elections municipales d Antony, n 95.09865) Les livres La publication d un ouvrage qui contient des considérations générales et des réflexions critiques sur les orientations à mettre en œuvre pour la gestion communale, implique la réintégration des dépenses de promotion de l ouvrage dans les comptes du candidat (CE, 29 juillet 2002, Elections municipales de Béthune, n 239151 et 239152). Une publication qui n a pas reçu, entre sa date de mise en vente et le jour du scrutin, une diffusion suffisante pour influencer le vote des électeurs et dont les assertions n ont pas été reprises dans les tracts diffusés par la liste conduite par Monsieur de Boishue n est pas de nature à vicier les résultats du scrutin, compte tenu même de l assez faible écart des suffrage séparant les deux listes (CE, 30 octobre 1996, Elections Municipales Brétigny-sur-Orne, n 177364). L affichage institutionnel L autorité municipale a pour obligation de réserver des emplacements spéciaux pour l apposition des affiches électorales et donc le pouvoir de constater les infractions au Code électoral et de les dénoncer au Procureur de la République compétent pour que des poursuites pénales soient engagées mais ne peut se substituer à un candidat éventuellement lésé pour agir en justice dès lors qu elle ne justifie pas avoir subi un préjudice personnel (Cour d appel de Versailles, 14 ème chambre, 14 février 2001, Commune de Sartrouville c/ M. Nicolas Bay). Le troisième alinéa de l article L. 51 du Code électoral interdit, pendant les trois mois précédant le premier tour du mois d une élection, tout affichage en dehors des emplacements spéciaux réservés par l autorité municipale pour l apposition des affiches électorales. Néanmoins et, de manière générale, le juge de l élection refuse de sanctionner les violations dès lors que des abus analogues ont été commis par les listes adverses (CE, 8 juillet 2002, Elections municipales d Asnières-sur-Seine, n 239993). 1.4.8 Les précautions à prendre concernant les sondages Ce que la collectivité peut faire Ce que la collectivité ne doit pas faire Un sondage dont l objet est de connaître l appréciation que porte la population sur l image de la Ville et de ses services peut être réalisé, s il n est pas destiné à être exploité pendant la campagne électorale par les élus candidats. Un sondage d opinion ou destiné à orienter la campagne des élus candidats sur leurs propres fonds. Commander un sondage qui sera réalisé avec les fonds de la collectivité sur les intentions de vote de la population ou destiné à orienter la campagne électorale. Il s agit : - des sondages qui portent sur les attentes des électeurs et permettent de choisir les thèmes de la campagne du candidat en fonction de leurs préoccupations ; - des sondages qui, dans leur exploitation, peuvent servir de support électoral : sondages dont les résultats pourraient faire l objet d une publicité, voire d un affichage ; - les sondages qui sont effectués en vue de déterminer les chances de succès des candidats. 13

Applications jurisprudentielles : Un sondage sur le sentiment d insécurité ne peut pas être considéré, quelle que soit l importance prise par le thème lors de la campagne électorale, comme portant indirectement, sur le scrutin cantonal partiel (CE, 27 juillet 2001, M. Perruchot). De même, «Si dans le n d août 1994 figurent les résultats d un sondage portant sur les attentes des Saintenais à l égard de la municipalité et un commentaire de ces résultats par le maire, les informations ainsi diffusées, exemptes de toute polémique, et qui révèlent aussi bien des aspects positifs que négatifs de l image que suscitent auprès des habitants l action de la municipalité sortante ainsi que la personnalité de son maire, ne sauraient être regardées comme concourant à sa promotion personnelle.» 1.4.9 Les précautions a prendre concernant les moyens humains et matériels de la collectivité ou de ses satellites Ce que l élu sortant candidat peut faire Ce que l élu sortant candidat ne peut pas faire Acquérir au prix du marché des objets ou supports (clichés, ) appartenant à la collectivité. Utiliser les services de collaborateurs de cabinet et autres agents de la collectivité en dehors de leurs heures de service (mettre l agent position de congé ou de disponibilité ou hors horaires habituels de travail). Recevoir de la part de la collectivité ou de ses satellites des aides en nature ou en argent (subventions versées à des associations participant à la campagne du maire sortant). Utiliser les fonctionnaires et collaborateurs de cabinet pendant leur service pour les besoins de la campagne électorale. Risque d encourir l annulation du scrutin, voire des poursuites pénales au titre du détournement de biens publics, infraction prévue par l article 432-15 du code pénal (cf. condamnation du maire de Saint-Paul de la Réunion en 2002 pour avoir accorder des congés à 200 agents de la commune dans le mois précédent l élection puis avoir fait détruire lesdits congés par ses services pour pouvoir accorder de «vrais» congés l été suivant à ces 200 agents). Utiliser les téléphones portables de la collectivité. Utiliser les véhicules de fonction ou de service de la commune pour se rendre à des réunions électorales, à son local de campagne, seul est possible l usage de véhicules personnels ou loués et dont la dépense sera retracée dans le compte de campagne du candidat. Utiliser les photocopieurs de la commune pour confectionner des tracts, Utiliser les enveloppes et timbres de la commune, ainsi que le personnel de secrétariat pour adresser aux administrés-électeurs des courriers à contenu électoral. Applications jurisprudentielles : Ont été considérés comme des dépenses électorales et comme des avantages indirects et ont été sanctionnés par le juge électoral : - l utilisation, pendant le service, de personnel communal (CE, 10 juin 1996, élections cantonales de Metz III) ; - l envoi aux frais de la commune, d un document de propagande électorale (CE, 13 novembre 1996, élections municipales de Chennevières-sur-Marne) ; - l envoi de lettres circulaires à certaines catégories d électeurs en qualité de président du conseil régional ou général (CE, 30 décembre 14

1998, élections régionales d Auvergne, req. n 195141) ; - la mise à disposition des compétences et des services de plusieurs salariés de la commune pour organiser les différentes phases de la campagne électorale (CE, 08 novembre 1999, élections cantonales de Bruz) ; - le financement par la commune de frais d impression et d envois postaux (CE, 24 octobre 2001, Alaize, req. n 230441) ; - en revanche, les frais d impression des cartes de visite portant le nom du requérant avec la mention «chef de file des candidats communistes aux élections municipales» n ont pas été supportés par la commune puisque le candidat a remboursé à la commune la réalisation des cartes. Par ailleurs, la commune a très rapidement fait interrompre le fonctionnement des lignes de téléphone et de télécopie dont les numéros figuraient sur ces cartes et qui correspondaient à des abonnements qu elle avait souscrits (CE, 8 juillet 2002, n 240021, Elections municipales de Clichy). - En outre, le juge de l élection ne considère pas que la mise à disposition gracieuse d une salle municipale au profit d un candidat est un avantage indirect sanctionnable dès lors que le même avantage a été accordé à l autre candidat (CE, 20 mai 2005, Rebsamen, n 274400). 1.5. QUELLES SONT LES SANCTIONS ENCOURUES POUR DES CAMPAGNES DE COMMUNICATION INSTITUTIONNELLE ILLICITES? Les sanctions diffèrent sensiblement selon que l infraction porte sur l article L. 52-8 du Code électoral ou sur l article L. 52-1 alinéa 2 du même code. L atteinte à l article L. 52-8 du Code électoral La perception d un avantage en nature de la part d une personne morale conduit au rejet du compte, à la perte du remboursement forfaitaire et à l inéligibilité pour un an du candidat ou du candidat tête de liste pour les élections municipales. Toutefois, le juge de l élection a développé une jurisprudence plutôt souple. Il considère en effet que lorsque le montant de l avantage en nature est inférieur à 5 % du plafond des dépenses autorisées, l irrégularité ne justifie pas le rejet du compte de campagne. L atteinte à l article L. 52-1 alinéa 2 du Code électoral Cet article est sanctionné dans le cadre du contentieux électoral traditionnel. Dès lors, le juge possède le seul pouvoir d annuler les opérations électorales et de réformer les résultats. De surcroît, la jurisprudence montre qu il ne procède effectivement à l annulation que si l irrégularité constatée fausse la sincérité du scrutin. Ainsi, lorsque l élection est acquise avec un fort écart de voix, l annulation des opérations n est pas prononcée. II. La communication du candidat Le législateur de 1990 a voulu encadrer la communication des candidats notamment d un point de vue financier en imposant, dans les communes et cantons de plus de 9000 habitants la désignation d un mandataire financier et la tenue d un compte de campagne soumis à des règles inspirées du droit budgétaire et du droit de la comptabilité publique : principe d unité, un seul compte ; principe d universalité : toutes les recettes et toutes les dépenses doivent être retracées sur le compte de campagne ; principe de la séparation ordonnateur/comptable : le candidat décide des dépenses mais seul le mandataire est habilité à actionner le compte, c est-à-dire à encaisser les recettes (apports du candidat et de ses colistiers, dons des personnes physiques, dons des partis politiques) et à effectuer le paiement des dépenses de campagne. Là encore, ces règles ont été établies afin de rendre concret le principe d égalité entre les candidats, qu ils soient fortunés ou non. Cet encadrement financier strict comporte notamment l interdiction absolue de dons ou concours en nature de personnes morales parmi lesquelles la commune et l ensemble de ses satellites publics ou privés. Le risque essentiel réside dans la possibilité de reproche à un 15

élu sortant candidat d avoir utilisé des moyens communaux, notamment en matériel et en personnel en vue de sa réélection. Dans une telle hypothèse, la sanction sera radicale, l existence d une recette irrégulière entraine le rejet à bon droit du compte de campagne par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, d où la perte du droit au remboursement forfaitaire de l Etat et le risque de voir le juge de l élection, c est-à-dire le Tribunal administratif (et en cas d appel, le Conseil d Etat) déclarer inéligible pour un an le candidat tête de liste (élections municipales) ou le candidat (élections cantonales). Après s être interrogé sur les possibilités de financement des dépenses de communication du candidat, il conviendra d examiner successivement les différentes formes de propagande autorisées et les différentes formes de propagande prohibées. 2.1 QUELLES SONT LES POSSIBILITÉS DE FINANCEMENT DES DÉPENSES DE COMMUNICATION? Les dépenses de communication doivent être financées par des recettes de campagne, au même titre que les autres dépenses électorales. Ces recettes ne doivent en aucun cas provenir d une personne morale. Si le candidat décide de ne pas recourir à un mandataire, c est-à-dire s il ne reçoit pas de dons de personnes physiques, il lui revient la charge de régler directement ces dépenses. S il a nommé un mandataire, ce dernier doit payer l ensemble des factures des actions de communication. Dans les deux cas, les partis politiques conservent la possibilité de prendre en charge directement des dépenses de communication (article L. 52-4 alinéa 2 du Code électoral). Cependant, ces dépenses sont également à inscrire dans le compte de campagne et sont soumises au plafonnement instauré par l article L. 52-11 du Code électoral. 2.2 Quelles sont les différentes formes de propagande autorisées? 2.2.1 La diffusion de tracts La distribution de tracts est un des moyens les moins coûteux pour communiquer. Il reste que l utilisation des tracts n est pas libre. Outre leur contenu qui doit rester dans les limites de la polémique électorale, la période de distribution est circonscrite. En effet, dès l ouverture de la campagne officielle, c est-à-dire à compter du jour où le dépôt des candidatures peut être effectué, la distribution de tracts est interdite par les articles L. 165, L. 211, L. 240 et L. 356 du Code électoral mais cette interdiction est peu sanctionnée par le juge de l élection. En fait, ce dernier utilise plusieurs critères afin de déterminer si la distribution de ces tracts a pu avoir une influence sur la sincérité du scrutin à savoir : - l importance de la diffusion des tracts (CE, 08 mars 2002, élections municipales de Poligny, req. n 235796) - l écart de voix entre les candidats (CE, 22 février 2002, élections municipales de Sainte-Anne, req. n 236226) ; - la possibilité pour l adversaire de répondre et donc la date de diffusion (CE, 29 juillet 2002, n 239 844, élect. mun. Chelles) ; - la nature des propos tenus qui ne doit pas excéder les limites de la polémique électorale (CE, 11 février 2002, élections municipales de Nant, req. n 235819). 2.2.2 Le recours à l affichage Les candidats peuvent, dans le respect du plafond des dépenses qui leur est imparti, concevoir et faire fabriquer des affiches. En revanche, la période d exposition des affiches est encadrée par le Code électoral. 16

La diffusion des affiches soulève des problèmes juridiques autrement plus compliqués que leur simple conception et fabrication. Jusqu au 30 novembre 2007 (pour les élections municipales et cantonales), les affiches des candidats et listes peuvent être diffusées sur les panneaux commerciaux, à condition de payer cette prestation au prix du marché. De plus, les candidats peuvent bénéficier, gratuitement, des panneaux de libre expression, réservés à l affichage d opinion et aux activités des associations sans but lucratif, que les maires sont tenus d installer (article 12 de la loi du 29 décembre 1979 relative à la publicité, aux enseignes et pré-enseignes). A partir du 1 er décembre 2007 (pour les élections municipales et cantonales), tout affichage relatif à l élection, même par affiches timbrées, est interdit en dehors des panneaux de la campagne officielle (article L. 51 alinéa 3 du Code électoral). Les alinéas 1 et 2 de ce même article précisent que pendant la durée de la période électorale, dans chaque commune, des emplacements spéciaux sont réservés, par l autorité municipale, à l apposition des affiches électorales. Dans chacun de ces emplacements, une surface égale est attribuée à chaque candidat ou à chaque liste de candidats. Ainsi, aux termes des dispositions de l article L. 51, il existe une période durant laquelle tout affichage est interdit. Du 1 er décembre jusqu à la date de mise en place des emplacements spéciaux, il est impossible d afficher. Par la suite, la seule possibilité réside dans l affichage, réglementé, sur les panneaux officiels. 2.2.3. La campagne d affichage par un parti politique en période électorale Un parti politique peut parfaitement procéder à une campagne d affichage pendant la période électorale. Toutefois, les conséquences sur le compte de campagne des candidats diffèrent selon les affiches. S il s agit d affiches générales, sans lien direct avec la campagne au niveau local et les problèmes de la circonscription, alors ces dépenses échappent au plafonnement des dépenses électorales. S il s agit d éléments de propagande qui concernent directement le scrutin, le parti peut les financer sans passer par le mandataire du candidat (article L. 52-4 alinéa 2 du Code électoral). Cependant, le coût de cette communication devra être intégré dans le compte de campagne du candidat ou de la liste qui en a bénéficié. 2.2.4. La gestion d un journal de campagne Il est possible de communiquer grâce à un journal de campagne. Le coût de la conception, de la réalisation et de la distribution du journal doit être intégré dans le compte de campagne du candidat. S il s agit d une publication périodique, le journal doit satisfaire à un certain nombre de formalités, issues de la loi du 29 juillet 1881. Outre le nom et le domicile de l imprimeur, la publication doit comprendre le nom du directeur de la publication (art. 11). De plus, une déclaration de paraître est à effectuer auprès du Procureur de la République du lieu d impression (art. 7). De même, il doit être satisfait aux exigences des dépôts avant la mise en distribution : dépôts légal, administratif et judiciaire. La jurisprudence laisse subsister la possibilité de financer un journal de campagne entièrement par des recettes publicitaires (CE, 15 mars 1996, élect. canton. Bourg en Bresse, req. n 167 509). Toutefois, cette possibilité semble directement contraire à l interdiction du financement de la vie politique par des personnes morales. En effet, la publicité peut être un moyen pour les entreprises de soutenir un candidat, et détourner la prohibition qui leur est faite de participer au financement des campagnes électorales (article L. 52-8 du Code électoral). Comme l indique le Ministre de l Intérieur : «Ces considérations incitent donc à la prudence et il est sans doute plus sûr, pour un candidat, de s abstenir d avoir recours à la publicité commerciale durant la période définie par l article L. 52.4 du code électoral» (Rép. min. J.O. Ass. nat, [Q], 24 juin 1997, p. 3432). 17

2.2.5. La publication d un ouvrage par un candidat S agissant d un ouvrage vendu, le coût de la réalisation et de la diffusion du livre n a pas à être intégré dans les dépenses de campagne, en revanche s il s agit d un document distribué gratuitement aux électeurs, dans le but de favoriser l élection du candidat, le coût devra être intégré dans le compte de campagne. Mais plus que la publication d un ouvrage, c est la promotion de celui-ci qui pose de réels problèmes en période pré-électorale. Lorsque le contenu de l ouvrage est politique, les dépenses liées à sa promotion doivent être intégrées dans le compte de campagne du candidat, en tout cas pour la part qui a favorisé son élection (CC, AN, Finistère, 2 ème circ.). Est considéré comme politique un ouvrage qui : - critique l action de la majorité (CC, 16 décembre 1993, AN, Alpes-Maritimes, 2 ème circ., rec. p. 551) ; - présente le programme du candidat (même décision) ; présente le candidat et son action politique sous un jour favorable (CC, 21 octobre 1993, AN, Paris, 18 ème circ., rec. p. 414). La publication d un ouvrage qui contient des considérations générales et des réflexions critiques sur les orientations à mettre en œuvre pour la gestion communale, implique la réintégration des dépenses de promotion de l ouvrage dans les comptes du candidat (CE, 29 juillet 2002, Elections municipales de Béthune, req ; n 239151 et 239152). Dans sa délibération en date du 7 juillet 2005, relative aux observations sur les échéances électorale de 2007, le Conseil Constitutionnel préconise «l obligation pour le candidat d éditer à compte d auteur les ouvrages publiés en vue de son élection : le mandataire financier engagerait les dépenses d édition de l ouvrage et encaisserait les recettes ; ces dépenses et ces recettes seraient imputées au compte de campagne pour leur montant brut ; la situation actuelle ne permet pas de respecter l interdiction législative de financement d une personne morale.» 2.2.6. L organisation des meetings et autres réunions électorales Les meetings font partie des manifestations qui ont un caractère électoral certain. Dès lors, leur organisation ne doit pas être financée par des personnes morales mais par les acteurs autorisés par le Code électoral : candidats et colistiers, partis et groupements politiques, mandataire financier ou association de financement électorale. Tous les frais afférents à la tenue du meeting doivent être intégrés, sauf deux exceptions : - le juge de l élection a indiqué que la mise à disposition gratuite de salles municipales, lorsqu elle est pratiquée pour tous les candidats, n a pas à être retracée comme avantage en nature dans le compte de campagne (CE, Ass., 18 décembre 1992, M. Sulzer, rec. p. 453) confirmé par CE, 20 mai 2005, Elec.cant. Dijon V, req. n 274 400. - ce même juge a considéré que les frais de déplacement et d hébergement des représentants des formations politiques venus soutenir un candidat n ont pas à figurer dans le compte de campagne de ce candidat (CC, 2 décembre 1993, AN, Bouches-du-Rhône, 10 ème circ., JO p. 16925), confirmé par CE, 10 août 2005, Elec. Rég. de Bretagne, req. n 275734. En revanche, les frais liés au déplacement de personnes venues de l extérieur et invitées dans la circonscription pour y participer à des débats publics organisés en vue de soutenir le projet de la liste candidate constituent une dépense électorale qui doit être inscrite dans ce compte ( même décision). Il conviendra, en cas d interférence entre élections présidentielles et élections législatives, de répartir le coût de l opération entre le bénéficiaire candidat à l élection présidentielle et celui candidat aux législatives. A la différence des meetings, certaines manifestations demandent une contribution financière aux participants, notamment lorsqu un repas est organisé. Dans ce cas, seul le solde du coût du banquet doit être intégré dans le compte de campagne, en dépenses ou 18

en recettes, selon que ce solde est négatif ou positif. Enfin des réunions chez l habitant peuvent être organisées pendant la campagne électorale. Les modalités de leur financement peuvent revêtir deux formes : - la première est de considérer le coût correspondant à la réunion (distribution d invitations, restauration, etc.) comme un avantage en nature de la part de l habitant. S il s agit d un colistier, le montant de l avantage est indifférent. S il s agit d une personne physique, ce montant est limité à 30 000 francs ; - la seconde consiste pour le candidat à rembourser, ou faire rembourser par son mandataire s il en a désigné un, cette dépense. 2.2.7. L organisation de «banquets républicains» A la différence des meetings, certaines manifestations demandent une contribution financière aux participants, notamment lorsqu un repas est organisé. Dans ce cas, seul le solde du coût du banquet doit être intégré dans le compte de campagne, en dépenses ou en recettes, selon que ce solde est négatif ou positif. 2.2.8. Les réunions «Tupperware» Des réunions chez l habitant peuvent être organisées pendant la campagne électorale. Les modalités de leur financement peuvent revêtir deux formes : - la première est de considérer le coût correspondant à la réunion (distribution d invitations, restauration, etc.) comme un avantage en nature de la part de l habitant. S il s agit d un colistier, le montant de l avantage est indifférent. S il s agit d une personne physique, ce montant est limité à 4 500 ; - la seconde consiste pour le candidat à rembourser, ou faire rembourser par son mandataire s il en a désigné un, cette dépense. 2.2.9. Le recours aux sondages Un candidat peut procéder ou faire procéder à des sondages, quel que soit le thème de ces sondages. Mais les incidences sur le compte de campagne ne sont pas les mêmes selon la nature des questions posées et l utilisation des résultats du sondage. Ainsi, un simple sondage de notoriété qui n est pas utilisé exclusivement pour orienter la campagne du candidat pour le compte duquel ce sondage a été effectué n a pas à figurer dans le compte. De même, lorsque le sondage est sans rapport avec la campagne électorale (cas, par exemple, d un sondage sur le projet Vulcania, CE, 30 déc. 1998, él. rég. d Auvergne). En revanche, si le sondage est exploité par le candidat, le coût des questions exploitées est considéré comme une dépense électorale. Cette exploitation résulte notamment de la diffusion des résultats par le candidat ou encore de la prise en compte de ces résultats dans le but d orienter sa campagne électorale (CE, 30 juil. 1997, él. mun. du Robert). 2.2.10. L utilisation par un candidat du téléphone Un candidat peut mettre en place un numéro vert pour sa propagande électorale. Les coûts de ce service doivent être retracés dans son compte de campagne. Toutefois, à partir du 1 er décembre 2007, pour les élections municipales et cantonales, et à partir du 1 er 19

mars 2007 pour les élections législatives), il ne pourra mentionner l existence de ce numéro vert aux électeurs, l article L50-1 du Code électoral prévoyant que «pendant les trois mois précédant le premier jour du mois d une élection et jusqu à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, aucun numéro d appel téléphonique ou télématique gratuit ne peut être porté à la connaissance du public par un candidat, une liste de candidats ou à leur profit». En revanche, le démarchage téléphonique ou télémarketing reste possible en période électorale (TA Rennes, 20 déc. 1995, n 95.1581, él. mun. juin 1995, Dinard). 2.2.11. Les interventions des candidats sur les chaînes locales et réseaux câblés et audiovisuels en général Contrairement aux dispositions applicables à la presse écrite, la communication audiovisuelle obéit à des exigences strictes du point de vue de l équilibre à donner entre les différentes formations politiques. Ainsi, l article 16 alinéa 2 de la loi de 1986 indique que «pendant la durée des campagnes électorales, le CSA adresse des recommandations aux exploitants des services de communication audiovisuelle autorisés en vertu de la loi». Cette disposition est d application large ; elle concerne les chaînes de télévision nationales, mais aussi les chaînes locales et les réseaux câblés ; elle concerne également la radio diffusion. Les recommandations du CSA insistent sur l équilibre nécessaire dans le temps d antenne a accorder à chaque tendance de l opinion. De ce fait, contrairement à la presse, le juge de l élection peut se servir de l absence de respect du pluralisme pour invalider une élection. 2.2.12. L e-communication : les sites internet et les blogs - L usage des sites par les candidats : un procédé de communication qui n exige pas, selon le juge, la mise en place de règles spécifiques La campagne référendaire sur la Constitution européenne a consacré l émergence d un véritable espace public sur internet, alimenté par des contributions tant militantes que citoyennes. La campagne présidentielle de 2007, bientôt suivie des campagnes législatives, municipales et cantonales, devrait constituer une étape supplémentaire dans le développement et la généralisation de cette nouvelle forme de propagande susceptible de toucher les près de 26 millions d internautes/électeurs que compte aujourd hui la France. Le recours croissant à internet a succité de nombreuses interrogations sur le soi disant vide juridique lié à l utilisation à des fins électorales de cette nouvelle technique de communication. Cependant, dès 2001, dans un jugement du Tribunal administratif de Toulouse en date du 25 septembre 2001 (Mme Herment c/préfet de l Aveyron ; n 01/1141) le juge a procédé à une analyse détaillée de l application des dispositions du Code électoral à l utilisation par un candidat d un site Internet et a estimé qu il n y avait pas lieu de considérer Internet comme un mode de communication substantiellement différent des autres supports de propagande électorale. Les dépenses correspondantes à ce support doivent figurer dans les comptes de campagne des candidats. Devront être intégrés dans le compte, par exemple, l acquisition d un nom de domaine, les coûts de développement et d administration quotidienne du site, ceux de la connection internet, de l hébergement du site par un prestataire technique Deux restrictions sont susceptibles de s appliquer aux propos diffusés sur un site Internet : - aucune injure ni diffamation ne doit être publiée en ligne ; - à partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est interdit de diffuser ou de faire diffuser tout message ayant le caractère de propagande électorale, ce qui nécessite la mise en sommeil du site (art. L49 al2 du Code électoral). 20