RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 6 - Chambre 8 ARRÊT DU 11 Septembre 2014 (n, pages) Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/04794 - MEO Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 Mars 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section encadrement RG n 10/12270 APPELANTE Madame Irma CORONADO GOUPIL représentée par Me François DIESSE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1676 INTIMEES Me PELLEGRINI Gilles - Mandataire ad'hoc de l' Association BACONGO ET FAMILLES représenté par Me Pascal GOURDAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1205 substitué par Me Thierry BLAZICEK, avocat au barreau de PARIS, toque : C.44 UNEDIC AGS- CGEA IDF OUEST représenté par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T10 substitué par Me Guillaume TEBOUL, avocat au barreau de PARIS, toque : T10 COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Juin 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marthe- Elisabeth OPPELT- RÉVENEAU, Conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Catherine METADIEU, Présidente Mme Marie- Elisabeth OPPELT- RÉVENEAU, Conseillère Mme Marie- Antoinette COLAS, Conseillère Greffier : Mme Anne- Marie CHEVTZOFF, lors des débats ARRET : - CONTRADICTOIRE - prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile. - signé par Mme Catherine METADIEU, présidente et par Mme Anne- Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. FAITS ET PROCÉDURE : Mme Irma Coronado Goupil a été embauchée le 6 décembre 2005, en qualité de psychologue, à temps partiel (86,30 h), par l'association Bacongo et Familles, moyennant une rémunération brute mensuelle de 1 800 euro. L'entreprise compte moins de 11 salariés. La convention collective applicable est celle des associations. Estimant ses droits compromis par l'employeur, Mme Coronado Goupil a saisi le conseil des Prud'Hommes de Paris d'une demande tendant en dernier lieu à obtenir le paiement d'un rappel de salaire, la résiliation judiciaire de son contrat de travail ainsi que les indemnités de rupture en découlant, outre une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la remise des documents sociaux conformes, l'exécution provisoire, une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile. Par décision en date du 19 mars 2012, le conseil des Prud'Hommes a débouté Mme Coronado Goupil de ses demandes et l'a condamnée aux dépens. L'association a été mise en liquidation judiciaire le 25 mars 2010. Mme Coronado Goupil a fait appel de cette décision dont elle sollicite l'infirmation. Elle demande à la cour de résilier le contrat de travail la liant à l'association et de fixer au passif de la procédure collective relative à l'association, les sommes suivantes qu'elle estime dues :
Sur le complément de salaires de décembre 2005 à décembre 2006 Fixer la créance de Mme GOUPIL sur le passif de l'association à ce titre à la somme de 2120,41euro. Sur les salaires de janvier 2007 et février2007 Fixer la créance de Mme GOUPIL sur le passif de l'association à la somme de 3600euro brute et de 360euro de congés payés afférents. Sur l'indemnité de congés pavés de décembre 2005 à décembre 2006 Fixer la créance de Mme GOUPIL à 4743,37euro. Sur les dommages et intérêts pour non paiement des salaires complets de décembre 2005 à février 2007 Fixer la créance de Mme GOUPIL à 50006 Sur les rappels ou indemnités compensatrices de salaires de mars 2007 au jugement (subsidiairement à l'arrêt) et congés pavés afférents. Fixer la créance de Mme GOUPIL à 108.000euro et à 10800euro de congés de payés afférents. Rappeler la garantie des AGS dans la limite légale et dire que le surplus sera inscrit au passif de la liquidation. Sur les manquements de l'employeur à ses obligations essentielles et la résiliation judiciaire du contrat Vu tes articles L. 1221-1 ; L. 1221-2 ; L. 1221-3 et L. 1222-1 du code du travail Vu les articles 1134, 1135 et 1184 du code civil Constater que l'employeur est coupable de manquements graves à ses obligations principales de fournir le travail promis au salarié, payer ses salaires, lui délivrer les bulletins de paie et exécuter le contrat de bonne foi. Prononcer la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur. Fixer la date de la résiliation au jour du jugement.
Sur les conséquences de la résiliation judiciaire Vu la jurisprudence (Cass. Soc. 17.03.1998, Bull Civ. V.n 149; Cass. Soc. 20.01.1998, Bull Civ, V.n 21) a) Surl'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse Vu les articles L. 1235-3 et L. 1235-5 du code du travail : Fixer la créance de Mme GOUPIL à 18.000euro. b) Sur l'indemnité de licenciement Vu l'article L. 1234-9 du Code du Travail Fixer la créance de Mme GOUPIL à 975euro c) Sur l'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement Vu les articles L. 1232-2 à L1232-4 et R. 1232-1 à R1232-3 du code du travail. Fixer la créance de Mme GOUPIL à 1800euro d) Sur l'indemnité compensatrice de préavis Vu l'article L. 1234-1, 3 du code du travail Fixer la créance de Mme GOUPIL à 3600euro et de 360euro de congés payés afférents. Sur les bulletins de salaires de décembre 2006. janvier et février 2007 et de mars 2007 au jugement (avril 2011) et documents sociaux Ordonner la remise des bulletins de salaires, de l'attestation Pôle Emploi, du certificat de travail. Sur l'indemnité de transport Fixer la créance à ce titre à 393,75euro Sur l'article 700Code de procédure civile et les dépens Fixer à la somme de 2500euro et aux entiers dépens
Dire que les condamnations porteront intérêts au taux légal. Me Pellegrini, es- qualités de liquidateur de l'association, conclut à la confirmation du jugement déféré, en conséquence, au débouté de Mme Coronado Goupil et à sa condamnation aux dépens. Se prévalant de l'article L3253-8, 4 les Ags rappellent qu'elles ne couvrent pas les créances de nature salariale et celles résultant de la rupture du contrat de travail que dans la limite des 15 jours suivants le jugement de liquidation, soit, en l'espèce jusqu'au 9 avril 2010, ce dont elles déduisent que les sommes éventuellement allouées par la décision à intervenir ne lui seront pas opposables. En tout état de cause, elles rappellent les limites de leur garantie légale. Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier le 20 juin 2014, reprises et complétées à l'audience. MOTIVATION : Il ressort des débats que les parties ont conclu ensemble un contrat à durée indéterminée, lequel s'est inscrit dans le cadre d'un contrat d'accompagnement dans l'emploi, dit 'contrat aidé' conclu entre l'etat et l'association, pour la période du 6 décembre 2005 au 6 décembre 2006. Ce dernier élément joint à la demande adressée aux Assedic relative à une attestation de paiement couvrant la période du 1er janvier 2007 au 31 mai 2007, et au tableau des rémunérations dues à Mme Coronado Goupil jusqu'au mois de décembre 2006, montre bien que le contrat de travail s'est interrompu au terme prévu par le contrat aidé. Toutefois, compte- tenu de ce que Mme Coronado Goupil n'est pas intervenue à la signature de ce contrat, conclu exclusivement entre l'association et l'etat, et qu'elle a elle- même signé un contrat à durée indéterminée, le terme du 6 décembre 2006 ne lui est pas opposable. Aucun élément sérieux et notamment pas les attestations de Mme Cissé produites aux débats sans être accompagnées de la photocopie des documents d'identité du témoin ne permettent de conclure que Mme Coronado Goupil a continué à travailler pour l'association après le 6 décembre 2006. Il en résulte de ce qui précède que Mme Coronado Goupil a fait l'objet d'un contrat à durée indéterminée et que l'employeur ne lui a plus fourni de travail à compter du 6 décembre 2006, ce qui constitue un manquement de sa part à ses obligations résultant du contrat de travail. En outre, il apparaît que pour faire valoir ses droits auprès des Assedic à compter du mois de janvier 2007, Mme Coronado Goupil avait reçu ses documents de fin de contrat. Il s'en déduit que l'employeur a rompu le contrat de travail le liant à Mme Coronado Goupil. S'agissant d'un contrat à durée indéterminée et en l'absence de motifs écrits, la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse datée du 6 décembre 2006.
Cette situation donne droit à Mme Coronado Goupil à percevoir une indemnité compensatrice de préavis correspondant à 2 mois de salaire, soit 3 600 euro, outre 360 euro au titre des congés payés afférents, une indemnité de licenciement du montant réclamé et non contesté de 975 euro. Mme Coronado Goupil a également droit à une indemnité pour licenciement abusif que, compte- tenu des éléments de la cause, notamment ceux relatifs à l'ancienneté de la salariée et à ses difficultés financières résultant de la perte de son emploi, la cour est en mesure d'évaluer à la somme de 3 600 euro. En revanche, Mme Coronado Goupil ne peut qu'être déboutée de sa demande d'indemnité pour irrégularité de procédure, laquelle ne se cumule pas avec l'indemnité pour licenciement abusif, en application de l'article L1235-2 du code du travail. Par ailleurs, Mme Coronado Goupil se plaint de n'avoir pas été payée intégralement de ses salaires sur la période de décembre 2005 à décembre 2006, pour un montant de 7 120,41 euro, en précisant que les Ags, sur la base d'une ordonnance de référé lui a réglé la somme de 5 000 euro. Elle ne réclame donc plus que la somme de 2 120,41 euro. Dès lors la preuve du paiement du salaire incombe à l'employeur et que celui-ci en la personne de son liquidateur n'est pas en mesure de rapporter la preuve de sa libération, il convient de faire droit à la demande de Mme Coronado Goupil à hauteur du montant de 2 120,41 euro, outre 712,04 euro au titre des congés payés afférents, compte- tenu du paiement déjà réalisé par les Ags. En revanche, compte-tenu de la fin de la relation contractuelle à la date du 6 décembre 2006, Mme Coronado Goupil ne peut qu'être déboutée de sa demande de rappel de salaire pour la période postérieure à cette date. De la même manière, l'employeur ne rapporte pas la preuve qui lui incombe d'avoir payé à Mme Coronado Goupil le montant de son indemnité de transport, laquelle s'élève sur la période du mois de décembre 2005 au mois de décembre 2006 (12 mois), à la somme de 315 euro. Enfin, Mme Coronado Goupil a nécessairement souffert des retards de paiement de son salaire, qui a un caractère alimentaire. Ce préjudice distinct doit être réparé par l'allocation d'une indemnité que la cour compte-tenu des éléments produits aux débats évalue à la somme de 700 euro. Compte-tenu de ce qui précède, il convient d'ordonner à Me Pellegrini à remettre à Mme Coronado Goupil les documents sociaux conformes. Le jugement déféré est en conséquence infirmé. PAR CES MOTIFS, La cour, Infirme le jugement déféré
Statuant à nouveau et y ajoutant : Dit que la rupture de la relation de travail est datée du 6 décembre 2006 Dit que cette rupture s'analyse en un licenciement abusif Fixe au passif de la procédure collectif relative à l'association Bacongo les sommes suivantes au profit de Mme Irma Coronado Goupil : - 3 600 euro, à titre d'indemnité compensatrice de préavis -360 euro au titre des congés payés afférents - 975 euro à titre d'indemnité de licenciement - 3 600 euro à titre d'indemnité pour licenciement abusif - 2 120,41 euro à titre de rappel de salaire sur la période du mois de décembre 2005 au mois de décembre 2006-712,04 euro au titre des congés payés afférents - 315 euro à titre d'indemnité de transport - 700 euro à titre d'indemnité pour le non paiement intégral des salaires sur toute la durée de la relation de travail Ordonne à Me Pellegrini à remettre à Mme Coronado Goupil les documents sociaux conformes. Déboute Mme Coronado Goupil pour le surplus Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile. Déclare la présente décision opposable aux Ags, dans la limite de leur garantie légale Met les dépens à la charge du passif de la procédure collective. LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,