COUR DE CASSATION BURKINA FASO ------------------ Unité - Progrès - Justice CHAMBRE CIVILE ------------------ Dossier n 104/08 ---------- Arrêt n 24 du 07 juillet 2011 AUDIENCE PUBLIQUE du 07 juillet 2011 Prétention soulevée pour la première fois en cassation Demande n ayant pas fait l objet de débats par les juges du fond Moyen nouveau. Divorce pour faute Existence de torts mutuels Gravité requise de la faute Appréciation Pouvoir souverain des juges du fond Divorce aux torts partagés. Affaire : Y.E c/ O.J L an deux mille onze ; Et le sept juillet ; La Cour de Cassation, Chambre civile siégeant en audience publique à la Cour de Cassation composé de : Monsieur KONTOGOME O. Daniel, Président de Chambre à la Cour de Cassation, ---------------PRESIDENT Madame KOULIBALY Léontine,--------------Conseiller
Monsieur NIAMBEKOUDOUGOU P. Mathias,-- Conseiller ; En présence de Monsieur HIEN D. Etienne, Avocat Général, et de Maître BELEM R. Nathalie, Greffier ; A rendu l arrêt ci-après LA COUR Statuant sur le pourvoi en cassation formé le 4août 2008 par Maître Franceline TOE / BOUDA, avocate à la Cour, agissant au nom et pour le compte de Y. E, domicilié à Ouagadougou, contre l arrêt n 70/2008 rendu le 5 juin 2008 par la Cour d Appel de Ouagadougou, dans l instance opposant sa cliente à O. J Vu la loi organique N 13/2000/AN du 09 mai 2000 portant organisation, attributions et fonctionnement de la Cour de Cassation ; Vu la loi 022-99/AN du 18 mai 1999 portant code de procédure civile ; Vu le rapport de Monsieur le Conseiller ; Vu les conclusions écrites du Ministère Public ; Ouï Monsieur le Conseiller en son rapport et les parties et Monsieur l Avocat général en leurs observations orales ; Après en avoir délibéré conformément à la loi ; EN LA FORME Attendu que le pourvoi a été introduit selon les forme et délai prévus par les dispositions des articles 602 et suivants du Code de procédure civile ; qu il y a lieu de le déclarer recevable ; AU FOND Attendu que selon l arrêt attaqué, (Cour d Appel de Ouagadougou, chambre civile, 5 juin 2008), le Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou par jugement contradictoire daté du 8 décembre 1999 a prononcé le divorce d entre les époux O.Y aux torts partagés des époux, confié la garde de l enfant mineure commune à la mère et
condamné le père au paiement d une pension alimentaire mensuelle de vingt mille (20 000) francs au titre de sa contribution à l entretien et à l éducation de l enfant ; que par l arrêt dont pourvoi, la Cour d appel a réformé le jugement quant au montant de la pension alimentaire fixé désormais à trente mille (30 000) francs par mois et confirmé le jugement querellé en ses autres dispositions ; Sur le premier moyen pris de la violation des articles 295 et 296 du Code des personnes et de la famille ; Attendu que la demanderesse reproche à l arrêt attaqué la violation des articles 295 et 296 du Code des personnes et de la famille en ce que la Cour d appel, par motifs adoptés, a prononcé le divorce aux torts réciproques des époux alors selon le moyen que : - D une part l époux interdisait à sa femme l exercice de toute activité professionnelle en l absence de toute décision judiciaire ; Attendu cependant que ce moyen n a pas été soulevé devant les juges du fond mais l a été seulement pour la première fois devant la Cour de cassation alors qu aux termes de l article 621 du Code de procédure civile, «il ne peut être introduit de moyens nouveaux devant la Cour de cassation qui statue seulement sur les éléments soumis au juge du fond» ; qu il y a lieu de l écarter comme moyen nouveau ; - Et d autre part que le père n a pas payé la pension alimentaire et faisait obstacle à l exercice du droit de garde par la mère ; Mais attendu que le défaut de paiement de la pension alimentaire ou le refus de permettre à son épouse en séparation de corps d exercer un droit de garde n empêche pas le juge de partager les torts réciproques pourvu qu il constate l existence de fautes graves commises par chacun des époux justifiant le divorce ; que les juges d appel qui par motifs adoptés ont relevé à juste titre «que tout comme l épouse s est reconnue coupable d injures graves, le requérant reconnaît avoir plusieurs fois porté la main sur celle-ci et que ces faits constituent des fautes graves de part et d autre» pour prononcer le divorce aux torts partagés, n ont fait qu user de leur pouvoir souverain
d appréciation des faits et ont justifié leur décision ; qu il s ensuit que le moyen manque en fait et doit être rejeté ; Sur le second moyen tiré de la mauvaise interprétation ou de la mauvaise application de l article 292 du Code des personnes et de la famille Attendu que Madame Y. E reproche à l arrêt la mauvaise interprétation et la mauvaise application de l article 292 du Code des personnes et de la famille en ce que les juges du fond ont prononcé le divorce aux torts partagés des époux alors que les fautes commises par le mari sont plus graves que celles reprochées à l épouse et devaient entraîner le rejet de sa demande en divorce pour défaut de motif ou le prononcé du divorce aux torts exclusifs du mari ; Attendu cependant que l arrêt a relevé à juste titre «qu il résulte des débats en chambre du conseil que la vie du couple est émaillée de disputes suivies de coups, d injures graves et même des fugues de l épouse ; que tout comme l épouse s est reconnue coupable d injures graves le requérant reconnaît avoir plusieurs fois porté la main sur celle-ci et que les fautes commises par chacun des époux suffisent à justifier le prononcé du divorce aux torts partagés, la vie commune étant devenue intolérable et la poursuite de la vie conjugale inadmissible et ce conformément aux dispositions de l article 382 du même Code qui prévoient que «même en l absence d une demande reconventionnelle, le divorce peut être prononcé au torts partagés des époux si les débats font apparaître des torts à la charge de l un et de l autre» ; qu en s étant déterminés ainsi, les juges du fond n ont fait qu user de leur pouvoir souverain d appréciation et n ont pas violé l article 292 du Code précité ; qu il s ensuit que le moyen qui n est pas fondé doit être rejeté ; Sur le dernier moyen tiré de la non réponse à conclusion ou de l omission de statuer sur un chef de demande Attendu que la demanderesse reproche à l arrêt d avoir omis de se prononcer sur sa demande de paiement de dommages et intérêts ; Attendu cependant qu il ne ressort ni de l arrêt ni des pièces du dossier que la requérante ait formulé une telle demande dans ses conclusions d appel de sorte que la Cour
d appel n avait point à y répondre, la prétention étant inexistante ; que dès lors le moyen manque en fait et doit être rejeté ; Attendu que de ce qui précède il ressort qu aucun des moyens n est fondé ; d où le pourvoi doit être rejeté. PAR CES MOTIFS EN LA FORME Déclare le pourvoi recevable AU FOND Le déclare mal fondé et en conséquence le rejette ; Met les dépens à la charge de la requérante ; Ainsi fait, prononcé et jugé publiquement par la Chambre civile de la Cour de Cassation du Burkina Faso, les jour, mois et an que dessus ; Et ont signé, le Président et le Greffier.