Préanalytique. La préanalytique commence chez le patient. Bien préparé et c est à moitié gagné. G. Togni, C. Volken, G. Sabo



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CURRICULUM Forum Med Suisse N o 6 6 février 2002 113 Préanalytique G. Togni, C. Volken, G. Sabo Correspondance: Dr phil. II Giovanni Togni Institut Dr. Viollier Spalenring 145/147 CH-4002 Basel g.togni@viollier.ch Figure 1. Différences en fonction du sexe et de l âge pour la phosphatase alcaline (PA) et le cholestérol (total, LDL et HDL) (modifié d après [1]). Bien préparé et c est à moitié gagné La fiabilité des résultats de laboratoire ne dépend pas uniquement d une technique d analyse correcte, une préparation dans les règles de l art doit précéder la phase analytique. Cette phase est appelée préanalytique. Elle comporte la préparation du patient, le choix du bon moment du prélèvement de l échantillon, son identification irréprochable, les coordonnées du patient et le formulaire de demande d examens, le choix du bon tube (avec stabilisateur ou autres additifs), le prélèvement lui-même, la conservation adéquate jusqu au moment de l analyse, sans oublier le transport, la stabilité des échantillons pour les analyses demandées ultérieurement, l examen de la qualité des prélèvements à la recherche d éléments particuliers, et la préparation à l analyse. Le médecin et son assistante doivent connaître les facteurs d influence et d erreur les plus importants de la préanalytique, pour garantir un diagnostic de laboratoire optimal. Voici quelques points importants de la préanalytique, surtout pour les analyses clinico-chimiques et hématologiques. La préanalytique commence chez le patient La pré-analyse débute chez le patient. On distingue entre des paramètres influents se manifestant in vivo et les artefacts se manifestant in vitro. Les paramètres influents peuvent être classifiés entre: données (non modifiables) comme sexe, race, âge, grossesse et facteurs génétiques et variables (modifiables) comme variations d horaire, alimentation, poids, activité corporelle, produits stimulants, médicaments, la position corporelle lors de la prise de sang, etc. Il faut tenir compte de ces paramètres lors de l interprétation des résultats (fig. 1). Les artéfacts comprennent la contamination des échantillons, l hémolyse in vitro due aux secousses de l échantillon, la contamination des échantillons par les solutions de perfusion, la centrifugation trop rapide ou trop lente des échantillons, l emploi de tubes inadéquats, la non-observance de la période de jeûne avant la prise de sang, etc. Une instruction précise des patients et du personnel infirmier est essentiel pour éviter ces artéfacts. L influence des aliments se manifeste souvent par une lipémie, capable de perturber certaines réactions in vitro. D autres paramètres sont directement influencés par la prise de nourriture. L importance de cette perturbation dépend de la composition de la nourriture et du délai avant la prise de sang. Une nourriture riche en graisses fait augmenter la concentration de triglycérides. La consommation d aliments riches en protéines et en nucléotides fait augmenter les concentrations d urée et d acide urique (fig. 2). D autre part, des concentrations abaissées de préalbumine et de protéine vectrice du rétinol se voient dans l alimentation insuffisante ou le jeûne. La consommation de café ou d alcool, et fumer, peuvent avoir une influence à plus ou moins long terme sur les résultats de laboratoire. La fumée de 1 à 5 cigarettes augmente après un temps de latence d une heure la concentration d acides gras libres, d adrénaline, d aldostérone et de cortisol. Le tabagisme augmente le nombre de leucocytes, les lipoprotéines, l activité de certains enzymes, d hormones, de vitamines, de marqueurs tumoraux et de métaux lourds (oligo-éléments). D autres paramètres,

CURRICULUM Forum Med Suisse N o 6 6 février 2002 114 Figure 2. Variations (en %) de la concentration sérique de certains paramètres après absorption d un repas standard (700 kcal) (modifié d après [1]). Figure 3. Effets aigus et chroniques de l absorption d alcool sur certains paramètres de laboratoire. comme l ECA (enzyme de conversion de l angiotensine), la prolactine et le sélénium sont abaissés sous l effet de la fumée. En l espace de 2 à 4 heures après l absorption d alcool, la glycémie chute, le lactate et l acétate augmentent, les bicarbonates diminuent et il peut y avoir une acidose métabolique. Les effets à long terme se manifestent par une augmentation progressive des tests hépatiques et des modifications de la formule sanguine (fig. 3). L activité physique du patient avant la prise de sang peut également modifier les résultats de certaines analyses. Des variations aiguës des analyses sont surtout le fait du déplacement des liquides entre les compartiments interstitiel et intravasculaire, de la perte de volume par la transpiration et de variations de l équilibre hormonal (p.ex. ascension de l adrénaline, de la noradrénaline, du glucagon, de l hormone de croissance, du cortisol et de l ACTH, et diminution de l insuline). Ces variations hormonales peuvent provoquer une leucocytose et une augmentation de la glycémie. Les personnes non entraînées présentent après une activité musculaire minime déjà une augmentation nette de la concentration de créatine(-phospho)-kinase. Celles qui sont bien entraînées présenteront après une activité semblable des concentrations plus basses de CPK et une augmentation de la fraction CK-MB (fig. 4). Un effort physique intense provoque une élimination urinaire d érythrocytes et de leucocytes. Dans l interprétation des résultats, il faut toujours penser à l influence de certains médicaments que prend le patient. De nombreux médicaments peuvent provoquer des augmentations enzymatiques par induction ou effet pathologique (tabl. 1). Lors de la préparation du patient à la prise de sang, la position corporelle joue un rôle important, car la position debout, assise ou couchée peut influencer de nombreux paramètres. Le passage de la position couchée à la position debout abaisse le volume plasmatique d environ 12%. L influence de plusieurs analyses par la position du corps est présentée à la figure 5. Quel est le meilleur moment pour une prise de sang? Plusieurs paramètres de laboratoire, surtout clinico-chimiques, passent par des variations circadiennes dont il s agit de tenir compte dans l interprétation de leurs résultats (tabl. 2). Comme les valeurs de référence sont souvent données dans les études pour lesquelles les prélèvements se font à des heures standardisées, les examens diagnostics doivent se faire dans des conditions semblables (p.ex. le matin entre

CURRICULUM Forum Med Suisse N o 6 6 février 2002 115 7 et 9 heures). En plus de ces variations circadiennes, il en existe aussi des saisonnières et périodiques. La tri-iodothyronine (T3) est environ 20% plus basse en été qu en hiver, le 25- OH-colécalciférol (25-OH-vitamine D3) est plus élevé en été qu en hiver. La concentration d aldostérone est deux fois plus élevée à la phase préovulatoire qu à la phase postovulatoire du cycle menstruel. La concentration de rénine suit des variations semblables. Identification méticuleuse du patient, de l échantillon et de la demande d examen Les erreurs administratives, d organisation, sont l un des facteurs d erreur les plus importants concernant les résultats de laboratoire. L indication complète du nom, du prénom, de la date de naissance sur la demande d examen et le tube est la condition sine qua non d une attribution sans erreur possible au patient, de valeurs de référence spécifiques et d anciens résultats le concernant. D autres précisions, comme le sexe ou les traitements en cours, contribuent souvent à une bonne interprétation des résultats. L identification pour le matériel à examiner, et surtout pour les biopsies, ponctions ou frottis du lieu de prélèvement, est indispensable surtout pour le diagnostic microbiologique. Le choix de la bonne technique de culture et l interprétation en dépendent. Choix du récipient: l embarras du choix Le choix du bon récipient est très critique, car des interférences peuvent survenir en fonction de l additif. Tous les récipients ne sont pas bons pour toutes les analyses. De nombreux tubes pour le sang contiennent des stabilisateurs, des substances coagulantes ou des gels de séparation, et sont ainsi optimisés pour certaines analyses. Les anticoagulants souvent utilisés dans cette intention peuvent se répartir dans deux classes: 1. substances captant le calcium, dont EDTA, citrate, oxalate; 2. substances inhibant des enzymes, comme l héparine. Tableau 1. Médicaments pouvant influencer les activités enzymatiques. Enzyme Phosphatase alcaline (PA) Transaminases (ALT, AST) Créatine(-phospho)-kinase (CK ou CPK) γ-glutamyltransférase (γ-gt) Lactate-déshydrogénase (LDH) Effet du médicament Allopurinol, stéroïdes anabolisants, carbamazépine, cotrimoxazole, cyclophosphamide, disopyramide, érythromycine, isoniazide, kétoconazole, mercaptopurine, méthotrexate, α-méthyldopa, oxacilline, papavérine, pénicillamine, phénobarbital, phénylbutazone, phénytoïne, propylthiouracil, triméthoprime/ sulfaméthoxazole, sulfasalazine, acide valproïque Diminution Clofibrate, contraceptifs oraux Amiodarone, carbamazépine, disopyramide, oxacilline, papavérine, paracétamol (acétaminophène), pénicillamine, phénylbutazone, phénytoïne, acide salicylique, streptokinase, acide valproïque Diminution Allopurinol Clofibrate, digoxine, phénothiazine, succinylcholine (suxaméthonium), théophylline Carbamazépine, érythromycine, contraceptifs oraux (sauf micropilule), phénytoïne Diminution Clofibrate Stéroïdes anabolisants, acide acétylsalicylique/salicylés, chlorpromazine, kétoconazole, pénicillamine, propylthiouracil, acide valproïque Diminution Antiépileptiques

CURRICULUM Forum Med Suisse N o 6 6 février 2002 116 Figure 4. de différents paramètres après un marathon. Le sang a été prélevé avant et 45 minutes après la course (modifié d après [1]). Les substances captant le calcium ne sont pas indiquées pour le dosage du calcium, des électrolytes, ni des enzymes dont le calcium est cofacteur (p.ex. phosphatase alcaline, α-amylase). L héparine comme anticoagulant peut se trouver sous plusieurs formes, comme sel d ammonium, de lithium ou de sodium. Le sel d ammonium n est pas indiqué pour le dosage de l urée, le sel de lithium pour celui du lithium et le sel de sodium pour celui du sodium. Toutes les forme d héparine inhibent la «polymerase chain reaction» (PCR) et ne sont donc pas indiquées pour de telles analyses; il faut alors utiliser du sang ou du plasma EDTA. Les récipients les plus courants sont présentés dans le tableau 3. Le code-couleur uniformisé de ces récipients n est pas garanti par tous les fabricants sur le marché. Figure 5. en pourcentage de certains paramètres plasmatiques après passage de la position couchée à la position debout (modifié d après [1]). Prélèvement Lors d une prise de sang, il faut veiller à ce que le garrot ne reste pas trop longtemps en place, et ne soit pas trop serré, vu qu une stase peut fausser les résultats d analyses (fig. 6). Pour l urine, l agent de conservation approprié doit se trouver dans le récipient avant de recevoir l urine. La collecte d urine sur 24 heures commence d habitude le matin. La 1 re urine du matin est jetée, ensuite toutes les mictions sont recueillies jusqu à et y compris la 1 re urine du matin suivant. La durée de la collecte et son volume doivent être précisés. Si l analyse ne se fait pas sur place, 10 20 ml sont généralement suffisants, mais il faut bien mélanger toute l urine collectée. Qu est-ce qui peut encore fausser les choses après le prélèvement? Une bonne conservation joue un très grand rôle, surtout pour l envoi d échantillons ou les analyses demandées après coup. En général, le sang total pour formule sanguine sans répartition leucocytaire automatisée doit être examiné dans les 24 heures. Pour la répartition automatisée, la fiabilité des résultats dépend généralement du principe de travail de l appareil. La conservation de sang total pour le dosage de la glycémie donne des résultats faux, vu que des cellules continuent à métaboliser le glucose. Les échantillons pour les paramètres clinico-chimiques et de la coagulation doivent être centrifugés dans les 45 minutes. Pour le potassium, le phosphate, la LDH, l AST (GOT), l homocystéine, il est recommandé de séparer le sérum. Pour les analyses de paramètres photosensibles comme la bilirubine, les vitamines, les porphyrines et la créatinekinase (CK), les tubes

CURRICULUM Forum Med Suisse N o 6 6 février 2002 117 Une hémolyse in vitro entraîne la libération d éléments intraérythrocytaires. Cela se reconnaît à une coloration rougeâtre du plasma ou du sérum après centrifugation du sang. L abdoivent être à l abri de la lumière sitôt après la prise de sang. Les récipients doivent rester bien fermés. Tous les prélèvements biologiques représentent d une part un risque de contamination, et il faut d autre part éviter toute contamination des échantillons par d autres échantillons, ou par des micro-organismes extérieurs. Les composants sanguins peuvent être oxydés par la présence d oxygène, et l évaporation de l eau en provoque la concentration. Le sang total ne doit pas être conservé au réfrigérateur, car les éléments cellulaires peuvent être lysés à basses températures. Si l urine est conservée au réfrigérateur, des sels peuvent cristalliser (phosphate de calcium et de magnésium, acide urique). Le froid complique également les examens morphologiques, car il lyse les cellules. Le tableau 4 présente les recommandations générales sur la stabilité et les conditions de conservation des échantillons pour analyses. Appréciation de la qualité des échantillons: le résultat des efforts passés Tableau 2. Rythme circadien de quelques paramètres de laboratoire (S = sérum; U = urine) (modifié d après [1]). Paramètre Maximum Minimum Amplitude (heure) (heure) (% de la moyenne journalière) ACTH 6 10 0 4 150 200 Cortisol 5 8 21 3 180 200 Testostérone 2 4 20 24 30 50 TSH 20 2 7 13 5 15 T 4 8 12 23 3 10 20 Somatotropine 21 23 1 21 300 400 Prolactine 5 7 10 12 80 100 Aldostérone 2 4 12 14 60 80 Rénine 0 6 10 12 120 140 Adrénaline (S) 9 12 2 5 30 50 Noradrénaline (S, U) 9 12 2 5 50 120 Hémoglobine 6 18 22 24 8 15 Eosinophiles 4 6 18 20 30 40 Fer 14 18 2 4 50 70 Potassium (S) 14 16 23 1 5 10 Phosphate (S) 2 4 8 12 30 40 Sodium (U) 4 6 12 16 60 80 Phosphate (U) 18 24 4 8 60 80 Volume (U) 2 6 12 16 60 80 Température corporelle 18 20 5 7 0,8 1,0 C S = sérum, U = urine Tableau 3. Prises de sang pour examens de laboratoire de routine. Paramètre Technique de prise de sang/matériel à examiner Couleur du bouchon Chimie clinique, sérologie sang veineux sans additif rouge Chimie clinique dans le plasma plasma hépariné vert Glucose (à jeun) sang veineux avec fluorure de sodium (NaF) gris comme inhibiteur de la glycolyse Hématologie sang veineux ou capillaire EDTA lilas Coagulation sang citraté (non capillaire) bleu clair

CURRICULUM Forum Med Suisse N o 6 6 février 2002 118 Figure 6. Variation en pourcentage de la concentration sérique de certains paramètres après 6 minutes de garrot (modifié d après [1]). sence de coloration n exclut pas une hémolyse, car l œil ne perçoit que des concentrations d hémoglobine supérieures à 0,3 g/l environ (0,03 g/dl). Et une hémolyse ne s accompagne pas que d une libération d hémoglobine. Si le sang est conservé à des températures trop basses, des éléments intracellulaires peuvent également être libérés (potassium, phosphate, LDH, etc.). Il peut également y avoir des interférences suite à la lyse des thrombocytes ou des granulocytes. Les conséquences d une hémolyse sont: augmentation des éléments intracellulaires dans le liquide extracellulaire (potassium, phosphate, AST, LDH, etc.); interférences optiques de l hémoglobine avec des méthodes travaillant aux mêmes longueurs d ondes; interférence des éléments intracellulaires avec les réactions chimiques. après une pose de 6 minutes L examen des échantillons à la recherche d une lipémie, d une hémolyse ou d autres dyscolorations doit être signalé dans le protocole de laboratoire, et mentionné sur le résultat, pour que l interprétation des résultats en soit facilitée. Tableau 4. Conservation des échantillons pour examens de laboratoire courants. Recommandations générales. Analyse Matériel Durée de conservation Température Groupes sanguins sang total EDTA 1 1 semaine frigo Coagulation sang citraté jusqu à 1 jour 2 température ambiante Hématologie sang total EDTA 1 jour 3 température ambiante Chimie clinique plasma hépariné, sérum 1 semaine frigo Sérologie sérum 6 semaines frigo Toxicologie sérum 6 semaines frigo 1 Valable pour détermination automatique des groupes sanguins. Pour la détermination manuelle, possibilité d utiliser un tube sans additif (même sans gel de séparation). 2 Valable pour examens de dépistage tels que Quick, TPT et fibrinogène dans tube citraté non ouvert et non centrifugé. 3 Valable pour la formule sanguine sans répartition leucocytaine. Tableau 5. Conditions de centrifugation. Matériel Force centrifuge (x g) Temps (minutes) Sérum ou plasma 1000 1300 10 15 Coagulation 2000 15 Urine 400 5

CURRICULUM Forum Med Suisse N o 6 6 février 2002 119 Figure 7. Nomogramme et formule de calcul de la vitesse de rotation en rpm à partir du rayon de la centrifugeuse (cm) et de la force centrifuge relative (x g). Préparation des échantillons: quels travaux sont urgents? La préparation des échantillons est la dernière étape avant l analyse. Le sang total pour formule sanguine doit être incliné plusieurs fois immédiatement après avoir été transféré dans le tube, pour que l anticoagulant empêche toute coagulation. Les mélangeurs mécaniques sont faits pour cela, ils balancent constamment les tubes sur leur axe ou les font tourner jusqu à l analyse. L inclinaison est également indiquée pour d autres analyses; et ensuite la centrifugation. Pour le plasma, les tubes peuvent être centrifugés sitôt après la prise de sang et le mélange. Pour le sérum, il faut attendre entre 20 et 45 minutes avant que la coagulation soit terminée. Chez les patients sous anticoagulants, cela peut prendre plus longtemps. Il est alors recommandé de prendre du plasma hépariné (exception: électrophorèse des protéines) au lieu de sérum. La vitesse de centrifugation des échantillons est très importante pour obtenir un surnageant sans cellules (tabl. 5). Si la vitesse de rotation est insuffisante, des cellules (érythrocytes ou thrombocytes) peuvent rester dans la phase liquide et s y lyser. Les thrombocytes non séparés après une centrifugation insuffisante libèrent du potassium, du phosphate, la LDH, la phosphatase acide, etc.). Et une centrifugation trop énergique ou prolongée peut lyser les cellules. Comme les centrifugeuses n ont pas un rayon de centrifugation uniforme, il faut indiquer la force centrifuge relative (x g) en rotations par minute (rpm). Des nomogrammes basés sur des formules facilitent cette conversion de la bonne rotation en rpm. Il faut pour cela le rayon de la centrifugeuse, mesuré par la distance entre l axe de rotation et le fond du tube dans sa position de centrifugation (fig. 7). Points importants spécifiques Hématologie Pour les examens hématologiques tels que numération érythrocytaire, hémoglobine, hématocrite, leucocytes (avec répartition), thrombocytes, l EDTA (K 2-EDTA; sel dipotassique) est l anticoagulant qui convient le mieux. Le K 3- EDTA (sel tripotassique) n est plus recommandé, car il a un effet sur le volume cellulaire (et donc l hématocrite). Les tubes de sang total doivent être inclinés plusieurs fois après leur remplissage, mais pas secoués. Une bulle d air permet un mélange optimal (remplir le tube à 80% environ). L agitation trop frénétique provoque une hémolyse pouvant fausser les résultats. Le sang total doit être analysé dans les 6 heures suivant la prise de sang (mieux dans les 1 2 heures). Si cela n est pas possible, il faut faire un frottis dans les 2 heures suivant la prise de sang pour la répartition, car après ce délai des altérations morphologiques apparaissent. Chimie clinique Sang Pour la plupart des paramètres de routine, le sérum est valable. Le transfert du sang dans un tube avec gel de séparation est autorisé si le sérum est entièrement séparé des éléments cellulaires après coagulation complète. L analyse sur plasma hépariné est certes plus chère, mais elle présente l avantage sur le sérum que: la centrifugation des tubes peut se faire immédiatement après la prise de sang; les résultats sont plus fiables que dans le sérum; il n y a pas d hémolyse in vitro. Coagulation Pour les examens de la coagulation, les tubes citratés sont parfaitement indiqués. La bonne concentration de citrate est de 3,8% (0,129 mmol/l). Il faut respecter la proportion idéale entre anticoagulant et sang (1:9). Il faut donc remplir les tubes jusqu à la marque. Incliner plusieurs fois les tubes, sans les secouer. S il faut plusieurs tubes, il ne faut prélever le sang dans les tubes citratés qu après avoir rempli les tubes sans additif. Faute de quoi la cascade de la coagulation est activée par la thromboplastine tissulaire, ce qui fausse le TCA. Chez des patients connus pour avoir un hématocrite bas ou élevé (<20% ou >50%), il faut adapter la quantité de citrate pour obtenir une proportion optimale.

CURRICULUM Forum Med Suisse N o 6 6 février 2002 120 Quintessence Le respect consciencieux des conditions préanalytiques diminue le nombre des résultats ininterprétables, à refaire, et la perte inutile de temps. Conditions importantes pour une prise de sang optimale: à jeun (aucune nourriture depuis au moins 12 14 heures), tôt le matin (entre 7 et 9 heures), atraumatique, si possible toujours dans la même position, jamais sur un bras porteur d une perfusion. Pour éviter toute confusion des échantillons et des patients: inscrire le nom, le prénom et la date de naissance du patient sur la demande d examen et sur l échantillon. Autres remarques importantes: bonne vitesse et bonne durée de centrifugation, ne pas secouer les tubes, choisir les bons agents de conservation et de stabilisation, protéger de la lumière, surveiller les températures. Urine L examen d urine peut donner plusieurs informations selon la technique de récolte. Les urines spontanées donnent des résultats qualitatifs. L examen du sédiment doit se faire au plus tard 1 heure après la récolte. Pour les examens bactériologiques, il faut l urine du milieu du jet, prélevée par sonde ou par ponction. Le patient doit parfaitement connaître la technique de récolte du milieu du jet. Pour les examens qualitatifs, il faut une simple collecte d urine (résultat rapporté au taux de créatinine). Pour les examens quantitatifs, la préférence est donnée aux urines de 24 heures. Le patient doit être parfaitement instruit en la matière. Références 1 WG Guder, S Narayanan, H Wisser, B Zawta. Samples: from the patient to the laboratory. Darmstadt: GIT Verlag; 2001. 2 DS Young. Effects of drugs on clinical laboratory tests. Washington DC: AACC Press. 5th edition; 1999. 3 Beck EA, Mertz E, Gianella M, Dall Acqua A, Vallet V, Sabo G, Knecht H (Lugano, Basel). Stability of coagulation factors VIII an V in a one day public transportation system: whole citrate blood is superior to plasma. Schweiz Med Wochenschr 2000;130(Suppl 115).