LICENCIEMENT DES REPRESENTANTS DU PERSONNEL



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INTRODUCTION Dans un contexte de crise économique émaillée par diverses mesures de réorganisations au sein des entreprises, la question du licenciement des représentants du personnel se pose de manière encore plus aigüe. Il s agira, dans la cadre de la présente contribution, de revenir sur certaines questions épineuses pouvant se poser à l occasion du licenciement des travailleurs dits «protégés» en raison de leur qualité de membres effectifs ou suppléants ou candidats non élus au sein du conseil d entreprise (ciaprès «CE») et/ou du comité pour la prévention ou la protection au travail (ci-après «CPPT») ou en raison, dans certains cas, de leur qualité de membre de la délégation syndicale en l absence de CPPT au sein de l entreprise. Sans prétendre à l exhaustivité, nous reviendrons sur certaines questions pratiques pouvant se poser lors du licenciement de ces travailleurs pour des motifs économiques. Dans le cadre limité qui nous est imparti, nous ne développerons donc pas la question du licenciement pour motif grave des délégués du personnel, ni celle de la protection plus limitée dont disposent les délégués syndicaux en présence d un CPPT dans l entreprise. I. BENEFICIAIRES, DUREE ET TENEUR DE LA PROTECTION CONTRE LE LICENCIEMENT 1.1. Bénéficiaires de la protection A. Généralités La loi du 19 mars 1991 portant un régime de licenciement particulier pour les délégués du personnel aux conseils d entreprise et aux comités de sécurité, d hygiène et d embellissement des lieux du travail, ainsi que pour les candidats délégués du personnel 1 (ci-après «la loi du 19 mars 1991») prévoit des procédures particulières de licenciement à respecter pour : 1) Les membres effectifs et suppléants représentant le personnel au sein du CE et ou du CPPT 2 ; 2) Les candidats aux élections du personnel pour ces mêmes organes 3 ; 3) Les membres de la délégation syndicale lorsqu un CPPT n a pas été institué au sein de l entreprise. En effet, en vertu de l article 52 de la loi du 4 août 1996 relative au bien-être des travailleurs lors de l exécution de leur travail 4, M.B., 18 septembre 1996, art. 52 (ci-après «loi du 4 août 1996»), la délégation syndicale est chargée d exercer les missions du CPPT lorsqu un comité n est pas institué dans l entreprise et les délégués syndicaux bénéficient, dans ce cas, de la même protection que les délégués du personnel au sein du CPPT telle que prévue par la loi du 19 mars 1991. 1 M.B., 29 mars 1991. 2 Loi du 19 mars 1991, art. 1er. 3 Ibid. 4 Loi du 4 août 1996 relative au bien-être des travailleurs lors de l exécution de leur travail, M.B., 18 septembre 1996, art. 52 (ci-après «loi du 4 août 1996»). 2

B. Cas particulier : extension conventionnelle de la protection contre le licenciement Dans l hypothèse où les parties auraient conventionnellement prévu d octroyer la protection prévue par la loi du 19 mars 1991 à un travailleur qui n en est pas titulaire en vertu de la loi 5, la question se pose de savoir si une telle convention entre parties peut réellement étendre la protection de la loi du 19 mars 1991 à un travailleur qui n en est normalement pas bénéficiaire. Il convient de rappeler que la protection spéciale prévue par la loi du 19 mars 1991 a été instituée dans l'intérêt général et, en conséquence, est d'ordre public 6 : - En ce sens, il a été décidé qu une convention collective de travail sectorielle accordant aux membres de la délégation syndicale la même protection que celle accordée aux membres du conseil d entreprise ne peut étendre la compétence d attribution du président du tribunal du travail 7. - De même, la jurisprudence considère que la convention par laquelle l employeur octroie au travailleur protégé, au-delà de la perte de son mandat, une protection contre le licenciement identique à celle du (candidat) représentant du personnel est nulle parce que contraire à l ordre public, de sorte que le travailleur ne peut pas prétendre à une indemnité de protection 8. - Il en est de même d une convention collective de travail conclue avec une organisation représentative de cadres étendant aux représentants des cadres la protection prévue par la loi du 19 mars 1991, cette extension, sauf stipulation contraire, ne portant pas seulement sur l indemnité de protection, mais sur l ensemble du système de protection, y compris la procédure et les conditions d octroi 9. - Une C.C.T. sectorielle qui accorde aux membres de la délégation syndicale la même protection contre le licenciement qu'aux membres du conseil d'entreprise ne peut avoir pour conséquence que la procédure judiciaire exceptionnelle de licenciement fixée par la loi, qui est de la compétence exclusive du président du tribunal du travail et des tribunaux du travail, puisse être rendue conventionnellement applicable 10. Au vu de ce qui précède, il n est donc pas possible d étendre conventionnellement le champ d application de la loi à d autres travailleurs non visés par la loi et dès lors de prévoir, par exemple, les mêmes procédures que celles prévues dans la loi du 19 mars 1991. Toutefois, nous verrons plus loin, dans le volet indemnitaire de la protection, que le caractère d'ordre public dont la protection contre le licenciement prévue par la loi est revêtue n'a pas pour effet que 5 Voy. supra point A. Généralités. 6 Voy. notamment Cass., 16 mai 2011, J.T.T., 2011, 301, note D. VOTQUENNE et A. VOTQUENNE, R.A.B.G., 2012, 151, note M. DEMEDTS et R.W., 2011-12, 1904, note L. ELIAERTS. 7 C. trav. Anvers, 14 juillet 1992, Chron. D.S., 1994, p. 395. 8 C. trav. Bruxelles, 28 juin 2006, Chron. D.S., 3, 138 9 C. trav. Bruxelles, 29 juin 1994, Chron. D.S., 1997, p. 44. 10 C. trav. Anvers, 14 juillet 1992, Chron. D.S., 1994, 395; C. trav. Anvers, 5 juillet 2011, R.W., 2012-13, 432; Trib. trav. Bruxelles, 13 septembre 1995, Chron. D.S., 1997, 44. 3

tous les droits découlant de la protection intéressent l'ordre public 11, notamment, sous certaines conditions, l indemnité de protection. Il n est donc pas exclu qu un employeur puisse garantir une indemnité similaire à celle prévue par la loi du 19 mars 1991 à certains travailleurs non visés par la loi du 19 mars 1991. Toutefois, dans ce cas, les parties se devront d être très précises dans la rédaction de leur clause de stabilité d emploi en ne garantissant pas une «protection» mais plutôt une «indemnité» dont le montant est calculé de manière identique à ce qui est prévu dans la loi du 19 mars 1991 12. 1.2. Durée de la protection A. Début de la protection (i) Délégués du personnel et candidats délégués du personnel La protection contre le licenciement débute le trentième jour précédant l affichage de l avis fixant la date des élections (X-30) 13. Compte tenu du déroulement de la procédure des élections sociales, pendant une période dite de «protection occulte», une certaine incertitude plane quant au fait de savoir si un travailleur est protégé. En effet, l employeur a connaissance du nom des travailleurs le 35 ème jour au plus tard qui suit celui de l affichage de l avis fixant la date des élections sociales 14 (X+35). Cette période occulte peut donc durer jusqu à 65 jours. L employeur devra donc prendre en considération cette période de protection occulte lorsqu il veut procéder à des licenciements puisqu un travailleur qui n est pas officiellement connu comme étant protégé peut se révéler être bénéficiaire de la protection contre le licenciement. (ii) Membres de la délégation syndicale en l absence de CPPT La protection étendue de la loi de 1991 commence à la date de début de la mission de délégué syndical. Selon la Cour de cassation, la protection est automatique : il n est donc pas requis que le délégué syndical démontre exercer effectivement les missions du CPPT pour pouvoir bénéficier de la protection 15. L employeur ne pourra donc pas se reposer sur l absence d exercice effectif des missions du CPPT pour conclure à l absence de protection telle que visée par la loi du 19 mars 1991. Dès la désignation en tant que membre de la délégation syndicale et en l absence de CPPT, le délégué syndical sera protégé contre le licenciement comme un délégué du personnel au sein du CPPT. 11 Cass., 16 mai 2011, J.T.T., 2011, 301, note D. VOTQUENNE et A. VOTQUENNE, R.A.B.G., 2012, 151, note M. DEMEDTS et R.W., 2011-12, 1904, note L. ELIAERTS 12 En ce sens voy. H.-F. LENAERTS et O. WOUTERS, Het onstlag van beschermde werknemers, Kluwer, 2012, p. 33. 13 Loi du 19 mars 1991, art. 2, 2-3. 14 Loi du 4 décembre 2007 relative aux élections sociales, M.B., 7 décembre 2007, art. 33, 1 er. 15 Cass., 17 mars 2003, Chron. D.S., 2003, p. 431. 4

B. Fin de la protection (i) Délégués du personnel élus Les délégués du personnel bénéficient de la protection jusqu'à la date d'installation des candidats élus lors des élections suivantes 16. Lorsque l'effectif minimum du personnel prévu pour l'institution d'un conseil ou d'un comité n'est plus atteint et que, dès lors, il n'y a plus lieu à renouvellement de ces organes, les candidats élus lors des élections précédentes continuent à bénéficier de la protection pendant 6 mois à dater du premier jour de la période des élections fixées par le Roi. Il en est de même lorsque les nouvelles élections ne sont pas organisées à défaut de candidatures nécessaires 17. Le bénéfice de la protection contre le licenciement n'est plus accordé aux délégués du personnel qui atteignent l'âge de 65 ans, sauf s'il est de pratique constante dans l'entreprise de maintenir en service la catégorie de travailleurs à laquelle ils appartiennent 18. (ii) Candidats délégués du personnel non élus Les candidats délégués du personnel présentés lors des élections qui réunissent les conditions d'éligibilité, bénéficient de la protection comme suit 19 : - lorsqu'il s'agit de leur première candidature : la durée de la protection est la même que pour les délégués élus - lorsqu'ils ont déjà été candidats et qu'ils n'ont pas été élus à l'occasion des élections précédentes : pendant une période se terminant 2 ans après l'affichage du résultat. Ce cas vise donc la non-élection à l occasion de deux candidatures consécutives. Il est à noter que la jurisprudence considère qu un travailleur qui a présenté sa candidature plus de deux fois et qui n a pas été élu continue à bénéficier de la protection contre le licenciement pendant la période raccourcie de deux ans 20. En bref, un candidat délégué du personnel non élu bénéficie, lors de sa première candidature, d'une protection égale à celle des délégués du personnel élus. La protection raccourcie prévue dans la loi du 19 mars 1991 signifie que lorsqu un candidat délégué du personnel a été élu lors d une élection ultérieure avec le bénéfice de la période de protection qui y est liée, il bénéficiera de la même protection en cas de non-réélection à l occasion de l élection suivante, mais que dans tous les autres cas de non-réélection à l occasion de candidatures ultérieures, seule la période de protection raccourcie lui sera acquise 21. 16 Loi du 19 mars 1991, art. 2, 2, al. 1er. 17 Loi du 19 mars 1991, art. 2, 2, al. 2 18 Loi du 19 mars 1991, art. 2, 2, al. 3. 19 Loi du 19 mars 1991, art.2, 3. 20 C. trav. Liège, 25 février 2009, J.T.T., 2009, p. 330. 21 Cass., 5 mars 2007, R.W., 2007-2008, p. 983, note L. ELIAERTS et J.T.T., 2007, p. 258. 5

(iii) Membres de la délégation syndicale en l absence de CPPT La loi du 19 mars 1991 précise que la protection des membres de la délégation syndicale, en l absence de CPPT, se termine à la date à laquelle les candidats élus aux élections suivantes sont installés comme membre du CPPT. Selon la jurisprudence en la matière, le délégué sera couvert jusqu à la fin de son mandat de délégué syndical et non jusqu à la fin théorique du mandat de délégué au CPPT 22. 1.3. Teneur de la protection : mesures interdites A. Interdiction de licencier sauf pour certains motifs et selon une procédure spécifique (i) Généralités Les délégués du personnel et les candidats délégués du personnel ne peuvent être licenciés que pour un motif grave préalablement admis par la juridiction du travail ou pour des raisons d'ordre économique ou technique préalablement reconnues par l'organe paritaire compétent 23. Le licenciement fondé sur l un de ces motifs doit respecter une procédure strictement définie dans la loi du 19 mars 1991. Dans le cadre de la présente contribution, nous nous concentrerons sur certains aspects du licenciement pour motifs économiques. Selon les termes utilisés par la Cour de cassation, la protection contre le licenciement instaurée par la loi du 19 mars 1991 a pour but, d'une part, de permettre aux délégués du personnel d'exercer leur mission dans l'entreprise et, d'autre part, d'assurer l'entière liberté des travailleurs de se porter candidats à cette mission. Cette protection a été instaurée dans l'intérêt général et intéresse, en conséquence, l'ordre public. Dès qu'il est établi que l'employeur n'a pas respecté la procédure de licenciement et que l'éventuelle réintégration, ressortissant à la protection en cas de licenciement, ne peut plus être demandée ou n'a pas été accordée, il est manifeste que la protection contre le licenciement n'a pas atteint son but et que seuls les intérêts particuliers du travailleur licencié restent protégés 24. (ii) La notion de licenciement La loi du 19 mars 1991 considère comme licenciement 25 : 1) toute rupture du contrat de travail par l'employeur, avec ou sans indemnité, avec ou sans respect d'un préavis, notifiée pendant la période de protection ; 2) toute rupture du contrat de travail par le travailleur en raison des faits qui constituent un motif imputable à l'employeur; 3) le non-respect par l'employeur de l'ordonnance du président du tribunal du travail décidant de la poursuite de l'exécution du contrat de travail pendant la procédure en cours devant les juridictions du travail. 22 C. trav. Bruxelles, 5 septembre 2001, J.T.T., 2002, p. 84. 23 Loi du 19 mars 1991, art. 2, 1 er. 24 Cass., 16 mai 2011, J.T.T., 2011, p. 301, op. cit., voy. supra. 25 Loi du 19 mars 1991, art. 2, 1er, al. 2. 6

Aucun autre mode de cessation du contrat de travail que le licenciement pour motif grave préalablement admis par la juridiction du travail ou pour des raisons d'ordre économique ou technique préalablement reconnues par l'organe paritaire compétent ne peut être invoqué, à l'exception: 1) de l'expiration du terme; 2) de l'achèvement du travail en vue duquel le contrat a été conclu; 3) de la rupture unilatérale de ce contrat par le travailleur; 4) du décès du travailleur; 5) de la force majeure; 6) de l'accord entre l'employeur et le travailleur (iii) Modification unilatérale des fonctions par l employeur Au vu de l interdiction de licencier décrite ci-avant, l employeur devra également éviter toute modification de fonction qui pourrait être interprétée comme un acte équipollent à rupture 26. En effet, le fait que ce soit le travailleur protégé qui invoque l acte équipollent à rupture n altère pas le fait qu il s agit bien d une de rupture du contrat de travail en raison des faits qui constituent un motif imputable à l'employeur, mesure interdite au sens de la loi du 19 mars 1991 et non pas une rupture du contrat de travail par le travailleur 27. A cet égard, la jurisprudence souligne que lorsqu un travailleur rompt unilatéralement le contrat de travail sans pouvoir établir l'existence d'un acte équipollent à rupture ou d'un motif grave dans le chef de l'employeur, ce dernier n est pas redevable d une indemnité de protection 28. Il conviendra donc d éviter toute rétrogradation du travailleur protégé ou modification de fonction non concertée qui pourrait être interprétée comme un acte équipollent à rupture, en violation de la procédure prévue par la loi du 19 mars 1991. B. Limitation du droit de transférer les travailleurs protégés Nous rappellerons également que les délégués du personnel et les candidats-délégués du personnel ne peuvent être transférés d'une unité technique d'exploitation à une autre d'une même entité juridique qu'en cas d'accord écrit de leur part au moment de la décision ou pour des raisons d'ordre économique ou technique préalablement reconnues par la commission paritaire compétente 29. 26 Voy. Cass., 25 mars 1991, J.T.T., 1991, P ; 429, note C. WANTIEZ (concernant une rétrogradation infligée à une travailleuse protégée et les conséquences en termes d indemnité de protection sous l empire de l ancienne législation et de la loi de 1991). 27 Cass., 25 mars 1991, J.T.T., 1991, P ; 429, note C. WANTIEZ. Voy. également sur le sujet: L. ELIAERTS et I. VAN HIEL, Beschermde werknemers. Ondernemingsraad en comité voor preventie en bescherming op het werk, Larcier, 2013, p. 86. 28 C. trav. Mons, 13 février 2008, J.L.M.B., 2008, p. 1829. 29 Loi du 19 mars 1991, art. 2, 5, al. 1 er. 7

Par ailleurs, un transfert d'une division d'une unité technique d'exploitation à une autre de la même unité technique d'exploitation est considéré comme inexistant, pour l'application de la loi du 19 mars 1991, s'il est intervenu dans les six mois qui précèdent la fermeture de cette nouvelle division 30. Comme le soulignent C. Wantiez et D. Votquenne, si le transfert vers une autre unité technique d exploitation implique une modification d un élément essentiel du contrat de travail, il s agira bien d une rupture par l employeur 31. Si tel n est pas le cas, le travailleur peut rompre le contrat de travail pour motif grave, ce qui est considéré comme une rupture du fait de l employeur par la loi du 19 mars 1991. Les travaux parlementaires de la loi du 19 mars 1991 prévoient qu un transfert en violation des dispositions précitées doit être considérée comme un licenciement interdit au sens de l article 2, 1 er de la loi du 19 mars 1991 32. Le travailleur protégé a donc le droit de refuser un tel transfert. C. Interdiction de discriminer Il est à noter qu en vertu de l article 2, 4 de la loi du 19 mars 1991, le mandat des délégués du personnel ou la qualité de candidat délégué du personnel ne peut entraîner ni préjudices ni avantages spéciaux pour l'intéressé 33. II. REFLEXIONS SUR LA PROCEDURE DE LICENCIEMENT POUR MOTIFS ECONOMIQUES 2.1. Unanimité de la commission paritaire sur les motifs économiques Les travailleurs visés par la protection de la loi du 19 mars 1991 peuvent être licenciés pour des raisons d ordre économique ou technique reconnues par la commission paritaire. Ces raisons doivent être approuvées, à l unanimité, par la commission paritaire 34 l employeur ressort. La commission doit se prononcer endéans un délai de 2 mois. à laquelle A cet égard, la Cour de cassation souligne que la commission paritaire ne se prononce que lorsqu elle reconnait l existence de motifs économiques ou techniques ou lorsqu elle constate l absence de tels motifs : en l absence de délibération dans le délai ou si l unanimité n est pas atteinte, il faut considérer que la commission paritaire ne s est pas prononcée 35. Puisqu elle est composée paritairement, de représentants des travailleurs et de représentants d employeur, la Commission ne parvient le plus souvent pas à prendre une décision à l unanimité, à moins qu il y ait un accord au niveau de l entreprise. En pratique, en cas de restructuration, le 30 Loi du 19 mars 1991, art. 2, 5, al. 2. 31 C. WANTIEZ et D. VOTQUENNE, Beschermde werknemers. 10 jaar toepassing van de wet van 19 maart 1991, Larcier, 2001, p. 25. 32 Doc. Parl., Sén., sess. 1990-1991, n 1105/2, p. 40. 33 Voy. aussi la même interdiction figurant dans la loi du 20 septembre 1948 portant organisation de l économie, M.B., 27-28 septembre 1984, art. 21, 5loi du 4 août 1996 relative au bien-être des travailleurs lors de l exécution de leur travail, M.B., 18 septembre 1996, art. 64. 34 Loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires, M.B., 15 janvier 1969, Err., M.B., 4 mars 1969, art. 47 et 48. 35 Cass., 30 avril 2001, J.T.T., 2001, p. 364. 8

licenciement régulier des représentants des travailleurs au CE ou au CPPT ne sera possible que moyennant l accord des syndicats. En l absence d accord des syndicats par rapport à la mesure de restructuration prise par l employeur, les chances d obtenir une décision unanime sur la levée de la protection des travailleurs protégés pourraient s avérer plus limitées. A défaut de décision de l'organe paritaire dans le délai, l'employeur ne peut licencier le délégué du personnel ou le candidat délégué du personnel que pour les motifs suivants : (i) fermeture de l'entreprise ou d'une division de l'entreprise ou (ii) en cas de licenciement d'une catégorie déterminée du personnel 36. S il s agit d une fermeture de division, l employeur pourra licencier, sans passer préalablement par une procédure devant le tribunal du travail. En revanche, s il s agit du licenciement d une catégorie déterminée du personnel, l employeur ne pourra pas procéder immédiatement au licenciement 37. L'employeur ne peut procéder au licenciement avant que les juridictions du travail n'aient reconnu l'existence des raisons d'ordre économique ou technique. Pour obtenir cette reconnaissance, l'employeur est tenu de saisir, par citation, le président du tribunal du travail d'une demande de reconnaissance des raisons d'ordre économique ou technique justifiant le licenciement du délégué du personnel ou du candidat délégué du personnel. La procédure, sur laquelle nous nous abstiendrons de revenir en détails, est régie par les règles fixées aux articles 8, 10 et 11 de la loi du 19 mars 1991. 2.2. Portée du recours contre la décision de la commission paritaire La loi du 19 mars 1991 ne prévoit en tant que tel aucun recours contre la décision de la commission paritaire, ce qui a été jugé comme contraire aux articles 10 et 11 (anciennement 6 et 6bis) de la Constitution 38. Il est à présent admis que la décision de l organe paritaire peut faire l objet d un appel auprès des juridictions du travail 39. Si l employeur obtient un avis positif de la commission paritaire, par exemple, dans le cadre d un licenciement collectif, il n est donc pas à l abri d un recours ultérieur d un des travailleurs concernés à l encontre de la décision prise par la commission paritaire au sujet des motifs économiques. On peut s interroger sur la portée du contrôle des juridictions du travail dans le cadre d un recours contre la décision de la commission paritaire. A notre estime, la juridiction du travail doit, bien entendu, pouvoir contrôler la régularité du processus décisionnel de la commission paritaire. En effet, les décisions de la commission paritaire doivent respecter les règles applicables au processus décisionnel de cet organe, notamment en termes de quorum et d unanimité des voix. En ce sens, le Tribunal du travail de Charleroi a considéré qu à défaut de production des convocations des membres et du procès-verbal de la réunion de la commission paritaire compétente pour connaître de la demande de levée de la protection des délégués et candidats délégués au conseil d'entreprise et 36 Loi du 19 mars 1991, art. 3 1 er. 37 Loi du 19 mars 1991, art. 3, 1 er. 38 C. Const., arrêt n 57/93, 8 juillet 1993, Chron. D. S., 1993, p. 424. 39 Dans un arrêt du 3 juin 1996, le Conseil d état a estimé qu il n était pas compétent pour un tel recours: C.E., 3 juin 1996, n 59.841, J.T.T., 438. 9

au comité de sécurité et d'hygiène, il ne peut être considéré comme établi avec une certitude suffisante qu'une réunion de ladite commission s'est effectivement tenue à la date indiquée, ni qu'il a été valablement délibéré de la demande de levée de protection. En l espèce, seules trois personnes auraient participé aux délibérations comme membres représentants les travailleurs et les employeurs alors que chacune des délégations devait être composée de quatorze membres. Dans ce contexte, le Tribunal a considéré qu'il n'y a pas eu de décision de la commission paritaire 40. En termes d opportunité, l on pourrait défendre que le contrôle de la juridiction se limite à ce contrôle formel de la procédure au sein de la commission paritaire et que le juge s abstienne de se substituer à cet organe paritaire et n examine pas le fond de la décision prise par l organe paritaire. Toutefois, sur le plan strictement juridique, au vu de l arrêt de la Cour constitutionnelle, le travailleur, tout comme l employeur, doivent pouvoir disposer d un véritable recours à l encontre de la décision de la commission paritaire. Selon les termes utilisés par le Tribunal du travail de Bruxelles, «Dans l esprit de la Cour [constitutionnelle], il semble ainsi que la contestation portant sur la décision de la commission paritaire est une contestation de nature civile portant, selon le cas, sur le droit subjectif de l employeur à licencier pour motif économique ou technique ou sur le droit subjectif du travailleur à ne pas être licencié pour un autre motif qu un motif économique ou technique.» 41 Cette question ayant été tranchée par la jurisprudence, demeure encore la question controversée des pouvoirs du tribunal du travail en cas de décision de reconnaissance ou de refus des motifs économiques ou techniques. Certains plaident, en cas de recours contre la décision de la commission paritaire, pour une interprétation restrictive selon laquelle le tribunal du travail ne pourrait conclure à l existence de motifs économiques ou techniques qu en cas de fermeture d entreprise ou d une division de celle-ci ou en cas de licenciement d une catégorie du personnel 42. Seules ces trois hypothèses pourraient être examinées par les juridictions du travail pour établir l existence d un motif économique ou technique. Une autre partie de la doctrine, à laquelle nous nous rallions, considère que les juridictions du travail, en cas de recours contre la décision de la commission paritaire, disposent d une pleine juridiction et pourront donc se prononcer sur l existence de motifs économiques ou techniques même en dehors des trois hypothèses précitées 43. En effet, à partir du moment où la Cour Constitutionnelle a consacré l existence d un recours plein et entier à l encontre de la décision de la commission paritaire, le tribunal devra réexaminer l existence de motifs économiques même en dehors des trois hypothèses précitées. Ce n est que dans le cas où la commission paritaire ne se prononce pas que le travailleur ne peut être licencié qu en cas de fermeture de l entreprise ou d une division de celle-ci ou en cas de licenciement d une catégorie déterminée du personnel. En revanche si la commission paritaire s est prononcée, la saisine du tribunal dans le cadre d un recours n est pas limitée et il pourra examiner l existence de motifs 40 Trib. trav. Charleroi (2 ème ch.), 8 mai 2000, Chron. D.S., 2003, p. 87. 41 Trib. trav. Bruxelles, 2 octobre 2007, inédit, R.G. n 14.416/06, cité dans H. BARTH et D. BARTH, «Questions spéciales de procédure», in H. DECKERS et L. DEAR (dir.), La protection des représentants du personnel, Anthemis, 2011, p. 352. 42 D. LAGASSE, obs. sous C.A., arrêt n 57/93, 8 juillet 1993, Chron. D. S., 1993, p. 426 ; PH. DE KEYSER et S. FABRY, «La protection contre le licenciement des délégués du personnel et des candidats Chronique de jurisprudence», J.T.T., 1994, p. 349. 43 F. LAGASSE, Le licenciement des travailleurs protégés (II), Ors., 1995, p. 181. 10

économiques ou techniques au sens large comme le considère d ailleurs le Tribunal du travail de Bruxelles 44. Cette pleine juridiction ne signifie, à notre estime, pas pour autant que le juge dispose du pouvoir de se substituer à l appréciation par l employeur du bilan économique de l entreprise et de revenir sur le bienfondé de sa décision de restructuration impliquant le licenciement de travailleurs protégés. En effet, il convient de revenir à la ratio legis de la protection contre le licenciement. Il ne faut, en effet, pas perdre de vue que le but de la loi de 1991 est de prévenir toute discrimination défavorable au travailleur protégé 45. A cet égard, la Cour du travail de Bruxelles, dans un arrêt du 9 mars 2010 46, est très claire sur les limites de l examen par le juge du travail dans le cadre d un recours contre la décision de la commission paritaire. La Cour souligne que Le travailleur concerné, et le juge en cas de recours, doit être en mesure de vérifier que la décision de licenciement est motivée par des raisons d'ordre économique ou technique et n'est pas motivée par sa qualité de délégué (ou de candidat délégué) du personnel ou par l'exercice de ses fonctions en cette qualité. Selon la Cour, dans le cadre de son pouvoir de contrôle, pour vérifier s'il existe des raisons d'ordre économique ou technique justifiant le licenciement d'un travailleur protégé, il n'appartient pas au juge d'apprécier si la décision de licenciement collectif était bien financièrement et économiquement justifiée. Et la Cour d ajouter qu une telle appréciation n'est d'ailleurs pas indispensable pour atteindre le but visé par la loi, à savoir prévenir toute discrimination préjudiciable aux travailleurs protégés 47. En se référant à C. Wantiez et D. Votquenne 48, la Cour ajoute que dès que le juge a la conviction que ce but est atteint, dès lors qu'il a constaté que la mesure de licenciement envisagée par l'employeur pour des raisons d'ordre économique ou technique ne contenait aucune discrimination défavorable aux travailleurs protégés, le juge n'a pas à en examiner la pertinence économique. La juridiction du travail doit examiner concrètement si la décision de la commission paritaire qui admet la raison d'ordre économique ou technique suffit pour établir que le licenciement du travailleur est étranger à sa qualité de candidat ou de membre d'un organe représentatif. A cet égard, la Cour de cassation souligne également qu en cas de licenciement d un délégué du personnel en cas de cessation de l activité de l entreprise et en cas de licenciement d un groupe bien précis du personnel qui en résulte, il n appartient pas au juge d apprécier la justification financière, économique et technique de la cessation et du licenciement de ce groupe de personnel pour décider si le travailleur a été licencié pour des raisons d ordre économique ou technique 49. Dans le contexte d éventuels recours à l égard de la décision de reconnaissance des motifs par la commission paritaire, il parait recommandé, de se prémunir contre de tels recours des travailleurs, dans la mesure du possible, en amont, en obtenant l accord écrit desdits travailleurs sur la reconnaissance des 44 Trib. trav., Bruxelles, 6 juin 1995, J.T.T., 1995, p. 497 ; Trib. trav. Bruxelles, 2 octobre 2007, inédit, R.G. n 14.416/06 et 14.434/06, op. cit. 45 Voy. not. Cass., 11 juin 1990, R.G. no 8832, R.W., 1990-1991, p. 638-639. 46 C. trav. Bruxelles (4 ème ch.), 9 mars 2010, 47 Cass., 4 mai 1992, J.T.T, 1992, p. 433. 48 C. WANTIEZ et D. VOTQUENNE, «Le licenciement et le transfert pour raisons d'ordre économique ou technique : notion, preuve et procédure», J.T.T., 2001, p. 354. 49 Cass., 19 avril 1993, Pas., 1993, I, p. 372. 11

motifs économiques ou techniques, même si nous concédons que dans la pratique, une telle reconnaissance individuelle ne sera pas toujours aisée à obtenir. III. VOLET INDEMNITAIRE 3.1. Partie fixe et partie variable En cas de licenciement irrégulier, à savoir, un licenciement en violation de la loi du 19 mars 1991, l employeur devra payer au travailleur protégé l indemnité de protection contre le licenciement. A défaut de levée de la protection conformément aux options décrites ci-avant, l employeur devra payer l indemnité de protection aux travailleurs protégés. Cette indemnité de protection se substitue intégralement à l indemnité de rupture ordinaire. Cette indemnité comprend deux parties : (a) une partie forfaitaire égale à deux, trois ou quatre ans de rémunération selon que l'ancienneté du travailleur est inférieure à 10 ans, comprise entre 10 et moins de 20 ans ou égale ou supérieure à 20 ans 50, et (b) une partie variable correspondant à la rémunération restant à courir jusqu'à la fin du mandat des représentants à l'élection desquels il a été candidat. Si le travailleur ne demande pas sa réintégration, il n'a droit qu'à la partie forfaitaire de l'indemnité. Si, en revanche, la demande a eu lieu et n'a pas été acceptée dans le délai légal, il a droit à l'indemnité complète. 3.2. Renonciation à l indemnité de protection A. Caractère d ordre public de la protection et controverses sur la renonciation Il est établi que la protection des délégués du personnel et des candidats non-élus est instituée dans l intérêt général et touche à l ordre public 51. La question de savoir si ce caractère d ordre public de la protection contre le licenciement implique l impossibilité de renoncer à l indemnité de protection à fait l objet de controverses jusqu à l arrêt de la Cour de Cassation du 16 mai 2011 sur lequel nous reviendrons ci-après. Une certaine partie de la jurisprudence estimait qu on ne pouvait renoncer à l indemnité de protection 52. La Cour du travail de Liège considérait, par exemple, qu un travailleur protégé ne pouvant renoncer à sa protection, l'acquiescement à un jugement qui le déboute de la demande visant à obtenir une indemnité de protection particulière serait sans valeur. La possibilité de 50 Loi du 16 mars 1991, art. 16. 51 Cass., 1 er décembre 1997, Chron. D.S., 1998, p. 292; Cass., 15 mai 2000, J.T.T., 2000, p. 371 et Cass., 16 mai 2011, J.T.T., 2011, 301, note D. VOTQUENNE et A. VOTQUENNE. 52 Trib. trav. Bruxelles, 20 décembre 2005, Chron. D.S., 2006, p. 405, note H.F. 12

poursuivre par la voie de l'appel, la reconnaissance du droit à cette indemnité, ferait, selon cet arrêt, partie du système de protection lui-même 53. En revanche, d autres juridictions considéraient que le caractère d ordre public n empêchait pas pour autant de pouvoir renoncer à l indemnité de protection. La Cour du travail de Gand a ainsi décidé que le fait que la protection est d'ordre public n'empêche pas que le travailleur protégé puisse renoncer entièrement ou partiellement à l indemnité de protection au moment où il est licencié et où il est établi qu il a droit à cette indemnité 54. La Cour du travail d Anvers partageait le même avis 55. Les partisans de cette seconde thèse estimaient que la renonciation était certainement possible pour un travailleur qui a demandé à être licencié 56. Dans un arrêt du 16 mai 2011, la Cour de cassation a définitivement tranché la controverse relative à la possibilité pour un représentant du personnel au conseil d entreprise et/ou au comité de prévention et de protection au travail de renoncer à son indemnité de protection. Cet arrêt qui confirme l arrêt rendu par la Cour du travail d Anvers du 14 décembre 2009 57 a des conséquences directes sur les modalités de renonciation d un travailleur protégé à son indemnité de protection. B. Renonciation à l indemnité de protection : incidence de l arrêt de la Cour de cassation du 16 mai 2011 (i) Contexte factuel : les faits à l origine de l arrêt de Cassation du 16 mai 2011 En l occurrence, il s agissait d une travailleuse qui avait été élue lors des élections sociales de l'année 2000 comme déléguée du personnel au conseil d'entreprise et au comité pour la prévention et la protection au travail. Les faits litigieux se déroulent le 2 octobre 2003 et peuvent être synthétisés comme suit : (1 ) dans un premier temps, l employeur communique oralement à la travailleuse qu il souhaite entamer la procédure de licenciement pour motif grave ; (2 ) dans un second temps, la travailleuse démissionne de ses mandats de déléguée du personnel ; (3 ) ensuite l employeur licencie la travailleuse avec effet immédiat ; (4 ) enfin, les parties concluent une convention transactionnelle dans laquelle la travailleuse renonce expressément à toute indemnité et tout droit qu elle pourrait puiser sur base de la loi du 19 mars 1991. Au grand étonnement de son employeur, la travailleuse revient par la suite sur les termes de la convention transactionnelle. En effet, dans le délai de 30 jours suivant la rupture du contrat, elle a introduit une demande de réintégration par courrier recommandé. Son employeur a refusé de faire droit à sa demande de réintégration, dans le délai légal de 30 jours suivant la demande de réintégration. Face au refus de son employeur, la travailleuse a réclamé en justice le paiement de son indemnité de protection sur base de la loi du 19 mars 1991. 53 C. trav. Liège, 25 septembre 1996, Chron. D.S., 1997, p. 31. 54 C. trav. Gand, 12 novembre 2003, Chron. D.S., 2004, p. 444; Trib. trav. Gand, 28 septembre 2001, T.G.R., 2002, p. 192. 55 C. trav. Anvers, 20 février 2007, Chron. D.S., 2007, p. 295. 56 C. trav. Bruxelles, 11 mai 2010, J.T.T., 2010, p. 362; Trib. trav. Bruxelles, 20 décembre 2005, Chron. D.S, 2006, p. 405, note H.F. 57 C. trav. Anvers, 14 décembre 2009, R.W., 2010-2011, liv. 25, p. 1058. 13

(ii) Décision attaquée : arrêt de la Cour du travail d Anvers du 14 décembre 2009 C est la Cour du travail d Anvers qui, saisie du litige avant la Cour de Cassation, va considérer que l indemnité de protection est en l espèce bel et bien due et que la renonciation de la travailleuse à son indemnité de protection n était pas valable 58. Tout d abord, la Cour du travail d Anvers rappelle que bien que la protection contre le licenciement en faveur de délégués du personnel au conseil d'entreprise et au comité de prévention relève en soi de l'ordre public, les dispositions qui définissent les indemnités de protection sont de droit impératif à compter du moment où le délégué du personnel possède un droit certain à cette indemnité et que cette indemnité est acquise individuellement parce que ces dispositions protègent à ce moment des intérêts purement privés. C est uniquement à compter de ce moment que le délégué du personnel peut valablement renoncer à son droit à une indemnité de protection. La Cour du travail d Anvers va considérer que le travailleur irrégulièrement licencié n'acquiert définitivement le droit à une indemnité de protection qu'au moment où il est établi qu'il ne sera pas réintégré, c.-à.-d. : - soit parce que le travailleur ne demande pas sa réintégration dans le délai légal de 30 jours suivant la date de la notification du préavis ou la date de la rupture de son contrat de travail sans préavis 59, - soit parce que l'employeur n'accepte pas sa réintégration à temps (à savoir dans le délai légal de 30 jours suivant l envoi de la demande de réintégration 60 ) - ou soit parce que l employeur refuse expressément de réintégrer le travailleur. En l espèce, la travailleuse a renoncé à son indemnité de protection immédiatement après son licenciement, à savoir à un moment où son droit à l indemnité de protection n était pas définitivement acquis de sorte que sa renonciation n était pas valable. Par conséquent, la travailleuse est en droit de réclamer son indemnité de protection. (iii) Position de la Cour de Cassation : arrêt du 16 mai 2011 La Cour de Cassation va confirmer l arrêt de la Cour du travail d Anvers du 14 décembre 2009. A l instar de la Cour du travail d Anvers, la Cour de Cassation rappelle que la protection contre le licenciement prévue par la loi du 19 mars 1991 a pour but, d'une part, de permettre aux représentants du personnel d'exercer leur mandat au sein de l'entreprise et, d'autre part, d'assurer l'entière liberté des travailleurs de présenter leur candidature à un tel mandat. La Cour précise également que cette protection, qui implique la possibilité de la réintégration dans l'entreprise visée à l'article 14 de la loi précitée, a été instituée dans l'intérêt général et, en conséquence, est d'ordre public. 58 Pour un commentaire de cet arrêt, voy. J. Buelens, «Het moment van de opeisbaarheid bij afstand van de beschermingsvergoeding van beschermde werknemers», R.W., 2010-20111, liv. 25, p. 1062-1065. 59 Loi du 19 mars 1991, art. 14. 60 Loi du 19 mars 1991, art. 17. 14

La Cour confirme que le caractère d ordre public de la protection des délégués du personnel n a pas pour conséquence que l ensemble des droits découlant de cette protection touchent à l ordre public et qu on ne puisse pas y renoncer. A partir du moment où la procédure de licenciement n a pas été respectée et que la réintégration ne peut plus être demandée dans les délais légaux ou est refusée et que dès lors la protection contre le licenciement n a pas atteint son objectif, alors l indemnité de protection protège uniquement les intérêts particuliers du travailleur. Il s en suit que le travailleur protégé peut valablement renoncer à son indemnité de protection à partir du moment où son droit à l indemnité de protection est définitivement acquis. Le travailleur ne peut renoncer à son indemnité de protection immédiatement après la rupture du contrat de travail puisque le droit à cette indemnité n est pas définitivement acquis à ce moment. Il ne le sera qu à partir du moment où il est certain que le travailleur ne sera pas réintégré dans les délais prévus par la loi. La Cour confirme donc la position de la Cour du travail d Anvers et rejette le pourvoi en cassation. La Cour de Cassation a déjà par le passé considéré que la protection contre le licenciement a pour but, d'une part, de permettre aux représentants du personnel de remplir leur mission au sein de l'entreprise et d'autre part, de veiller à ce que les travailleurs disposent d'une totale liberté pour se porter candidat à ces fonctions. Il est de jurisprudence constante que cette protection est instituée dans l'intérêt général et touche à l'ordre public 61. Il a également déjà été largement admis que le caractère d ordre public de la protection contre le licenciement n'empêche pas que le travailleur protégé puisse renoncer entièrement ou partiellement à l indemnité de protection au moment où il est licencié et où il est établi qu il a droit à cette indemnité. On relèvera notamment, les arrêts de la Cour du travail de Gand du 12 novembre 2003 de la Cour du travail d Anvers du 20 février 2007 62. La Cour du travail de Bruxelles a également confirmé ce point de vue dans un arrêt du 11 mai 2010 63. Dans cette dernière affaire, le travailleur avait notifié sa démission à son employeur. La renonciation a été considérée comme valable. Cette possibilité de renonciation après la rupture du contrat était d ailleurs déjà largement soutenue par la doctrine 64. En l occurrence, l arrêt de la Cour du travail d Anvers de 2009 et l arrêt de la Cour de Cassation commenté viennent préciser le moment précis à partir duquel le droit à l indemnité de protection est définitivement acquis. (iv) Incidence pratique de l arrêt de la Cour de Cassation du 16 mai 2011 L arrêt de la Cour de Cassation du 16 mai 2011 qui confirme l arrêt rendu par la Cour du travail d Anvers du 14 décembre 2009 a des conséquences pratiques directes en ce qui concerne la possibilité de renoncer à l indemnité de protection. 61 Voy. not. Cass.,1 er décembre 1997, Chr. D.S., 1998, p. 292 ; Cass., 15 mai 2000, J.T.T., 2000, p. 371. 62 C. trav. Gand, 12 novembre 2003, Chron. D.S., 2004, p. 444 ; jugement a quo Trib. trav. Gand, 28 septembre 2001, T.G.R., 2002, p. 192 ; C. trav. Anvers, 20 février 2007, Chron. D.S., 2007, p. 295. 63 C. trav. Bruxelles, 11 mai 2010, J.T.T., 2010, p. 362 ; Ors., 2010, liv. 8, p. 25, I. PLETS ; J.T.T., 2010, p. 362. 64 Voy. par exemple J. PANNUS, Renonciation d un représentant du personnel à l indemnité de protection, Licenciement et démission, Claeys & Engels, nr. 6, 2010 ; V. VANNES, Le conseil d entreprise ou comité de sécurité et d hygiène conventionnels. Protection des travailleurs Ordre public, J.T.T., 1995, p. 485. 15

A partir de la notification du préavis ou de la notification de la rupture sans préavis, le travailleur protégé (et son organisation syndicale) dispose d un délai de 30 jours pour demander sa réintégration (par courrier recommandé). L employeur dispose ensuite de 30 jours pour accepter ou refuser la réintégration. En pratique, le travailleur protégé ne pourra valablement renoncer à son indemnité qu à un moment précis, à savoir le moment où il est certain qu il ne sera pas réintégré par son employeur, à savoir : - soit s il n a pas demandé sa réintégration après l expiration du délai de 30 jours suivant la notification du préavis ou de la rupture sans préavis ; - soit s il a demandé sa réintégration 30 jours après sa demande de réintégration ; - soit s il demande sa réintégration lorsque l employeur n accepte pas sa réintégration dans le délai de 30 jours ou la refuse expressément. A notre estime, même dans l hypothèse d un refus exprès de l employeur dans le délai de 30 jours, il est recommandé d attendre l écoulement du délai de 30 jours avant de renoncer à son indemnité de protection. En effet, la jurisprudence a déjà considéré qu un employeur peut tout à fait dans un premier temps refuser la réintégration du travailleur puis l accepter dans le délai de 30 jours 65. Eu égard, à l existence de cette jurisprudence, il est plus prudent d attendre l expiration du délai de 30 jours pour être certain que le travailleur a définitivement acquis son droit à l indemnité de protection. Cet arrêt a donc pour conséquence que l employeur et le travailleur protégé doivent être beaucoup plus prudents en termes de délais lorsque le travailleur envisage de signer une transaction dans laquelle il renonce à son indemnité de protection. Une telle renonciation sera certainement valable si elle intervient soit (1 ) après l expiration du délai de 30 jours après la notification du préavis ou du congé sans préavis lorsque le travailleur ne demande pas de réintégration ou soit (2 ) 30 jours après la demande de réintégration. Dans cette seconde hypothèse, on ne recommandera que trop à l employeur de tenir compte du fait que le travailleur a jusqu au 30 ème jour suivant son licenciement pour faire une demande de réintégration par courrier recommandé. Jusqu à ce 30 ème jour, il demeure une incertitude quant à la demande ou non d une réintégration. C est la date d envoi du courrier recommandé qui détermine la date de demande de réintégration. Par exemple, si le 30 ème jour suivant le licenciement tombe un vendredi, ce n est que le lundi que l employeur saura avec certitude qu il n y a pas eu de demande de réintégration vu l absence de réception du courrier recommandé. La jurisprudence de la Cour de Cassation impose d être très attentif au timing à respecter : il n est, selon nous, plus admissible de conclure une convention transactionnelle avec clause de renonciation, immédiatement après la rupture du contrat. Cette pratique, fort rencontrée, doit laisser la place à une approche plus prudente, au vu des montants très élevés pouvant être réclamés par le travailleur. Ce respect orthodoxe des délais précités évitera certainement à l employeur de mauvaises surprises 65 Cass., 24 septembre 1984, J.T.T., 1984, p. 33. 16

CONCLUSION Dans un contexte de crise économique pouvant justifier des mesures de réorganisation et de licenciements, il n en demeure pas moins que le licenciement de délégués du personnel ou de candidats non élus demeure un parcours émaillé d obstacles liés à la protection instaurée par la loi du 19 mars 1991. Les particularités du licenciement de ces travailleurs protégés (période occulte, indemnité de protection, intervention de la commission paritaire ) ne peuvent échapper à la vigilance de l employeur, sous peine pour celui-ci de devoir payer de lourdes indemnités de protection. Si l on peut comprendre la ratio legis à l origine de l instauration d une telle protection, à savoir, permettre aux représentants du personnel de remplir leur mission au sein de l'entreprise et d'autre part, de veiller à ce que ces travailleurs disposent d'une totale liberté pour se porter candidat à ces fonctions, l on peut s interroger sur l adéquation d une telle protection avec l objectif poursuivi. La procédure demeure très stricte et les indemnités peuvent atteindre, dans le pire des cas, jusqu à 8 ans de rémunération. Si nous sommes convaincus qu une protection relève bien de l ordre public et s avère nécessaire pour l exercice paisible des mandats de délégués, de lege ferenda, il semble opportun, au vu de l évolution économique mondialisée marquée par différentes crises d assouplir quelque peu les conditions de licenciement des travailleurs protégés pour motifs économiques. La loi de 1991 ne parait plus correspondre aux réalités d un monde du travail flexible. Il nous semble que le débat devrait pouvoir s ouvrir à ce sujet, dans le respect, bien entendu, des intérêts tant du travailleur que de l employeur. 17

TABLE DES MATIERES Introduction... 2 I. Bénéficiaires, durée et teneur de la protection contre le licenciement... 2 1.1. Bénéficiaires de la protection... 2 A. Généralités... 2 B. Cas particulier : extension conventionnelle de la protection contre le licenciement... 3 1.2. Durée de la protection... 4 A. Début de la protection... 4 (i) Délégués du personnel et candidats délégués du personnel... 4 (ii) Membres de la délégation syndicale en l absence de CPPT... 4 B. Fin de la protection... 5 (i) Délégués du personnel élus... 5 (ii) Candidats délégués du personnel non élus... 5 (iii) Membres de la délégation syndicale en l absence de CPPT... 6 1.3. Teneur de la protection : mesures interdites... 6 A. Interdiction de licencier sauf pour certains motifs et selon une procédure spécifique... 6 (i) Généralités... 6 (ii) La notion de licenciement... 6 (iii) Modification unilatérale des fonctions par l employeur... 7 B. Limitation du droit de transférer les travailleurs protégés... 7 C. Interdiction de discriminer... 8 II. Réflexions sur la procédure de licenciement pour motifs économiques... 8 2.1. Unanimité de la commission paritaire sur les motifs économiques... 8 2.2. Portée du recours contre la décision de la commission paritaire... 9 III. Volet indemnitaire... 12 3.1. Partie fixe et partie variable... 12 3.2. Renonciation à l indemnité de protection... 12 A. Caractère d ordre public de la protection et controverses sur la renonciation... 12 B. Renonciation à l indemnité de protection : incidence de l arrêt de la Cour de cassation du 16 mai 2011 13 (i) Contexte factuel : les faits à l origine de l arrêt de Cassation du 16 mai 2011... 13 (ii) Décision attaquée : arrêt de la Cour du travail d Anvers du 14 décembre 2009... 14 (iii) Position de la Cour de Cassation : arrêt du 16 mai 2011... 14 (iv) Incidence pratique de l arrêt de la Cour de Cassation du 16 mai 2011... 15 Conclusion... 17 Table des matières... 18 18