APPEL A PROJETS "LA REPARATION DU DOMMAGE"

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Transcription:

APPEL A PROJETS "LA REPARATION DU DOMMAGE" La procédure d'appel à projets est l'un des moyens auxquels a recours la Mission de recherche Droit et Justice pour mettre en œuvre la politique scientifique de recherche qu'elle a définie dans les domaines du Droit et de la Justice. Le texte suivant est destiné à guider la réflexion de tous ceux qui, quelle que soit leur discipline, souhaitent répondre au présent appel d'offres. Il est complété par une note rappelant les modalités de soumission des projets ainsi que par une fiche de renseignements administratifs et financiers, également disponibles sur le site de la Mission (rubrique "présenter un projet"). Date limite de réception des projets : 13 OCTOBRE 2006 Durée maximale de la recherche : 24 mois Mission de recherche Droit et Justice 30, rue du Château des Rentiers 75013 Paris Téléphone : 01.44.77.66.60 Télécopie : 01.44.77.66.70 Courriel : mission@gip-recherche-justice.fr Site Internet : www.gip-recherche-justice.fr Créé par l'arrêté du 11 février 1994, le Groupement d'intérêt Public (GIP) Mission de recherche Droit et Justice est composé des membres statutaires suivants : Ministère de la Justice, Centre National de la Recherche Scientifique, Ecole Nationale de la Magistrature, Conseil National des Barreaux, Conseil Supérieur du Notariat. Sont également associés trois membres avec voix consultative : Ministère de l'education Nationale, de l'enseignement Supérieur et de la Recherche, Institut des Hautes Etudes sur la Justice, Association Française pour l'histoire de la Justice.

La réparation du dommage La réparation du dommage, et notamment celle du dommage corporel, retenue ici à titre principal et sous sa double dimension, judiciaire et administrative, pose, aujourd hui encore, de nombreuses difficultés. La principale, le rapport Lambert-Faivre de juillet 2003 sur l indemnisation du dommage corporel l avait relevée, est le manque de cohérence et de transparence des pratiques d indemnisation en raison, notamment, de l absence d une claire définition des différents préjudices. Motif auquel s ajoute, à l évidence, l incertitude entourant à la fois la notion de «réparation» et celle de «victime indemnisable». En effet, au-delà des modes pratiques d action en cessation d activités ou de situations dommageables se pose la question, fondamentale, du sens même de la réparation. Les dommages-intérêts ont-ils pour objet essentiel, voire unique, la «remise en état», initial ou non, dans toutes ses composantes : matérielles, physiques, morales, esthétiques ou autres, ou visent-ils, dans le même temps, un effet de sanction, cette dimension punitive étant habituellement réservée au droit pénal? La définition même de la «victime indemnisable» reste, la pratique le montre, très liée au fait du législateur. Celui-ci peut reconnaître ce statut à certaines catégories de personnes ayant subi des dommages et, dans le même temps, se montrer plus réticent envers d autres, dont le profil semble, a priori, comparable. Ce qui pourrait passer pour une inégalité de traitement n est pas sans conséquences sur le plan de l indemnisation. Il conviendrait donc de voir si, tant du côté du législateur que de celui du juge et, également, des opérateurs, publics et privés, des constantes se font jour dans les décisions ouvrant - ou non - l accès au statut de victime indemnisable, qui permettraient d en dégager une définition, le plus possible commune. De multiples éléments peuvent, à l évidence, entrer dans une telle définition, qui doivent être prioritairement recherchés du côté du fait générateur du dommage, mais aussi du côté de la personne qui l a subi, voire des modalités possibles d indemnisation. La notion de victime admet-elle une gradation (notamment en fonction de l intensité du dommage)? Si oui, le droit de la responsabilité doit-il - et comment? - tenir compte d une telle échelle? Diverses mesures ont été régulièrement proposées afin d améliorer les méthodes d évaluation des dommages et des indemnités de réparation. Le rapport Lambert-Faivre avait, entre autres, préconisé l établissement d une nomenclature des composantes du dommage corporel et d une table de concordance entre les postes de préjudices et les prestations versées par les Caisses de sécurité sociale. Il insistait également sur la nécessaire harmonisation des méthodes d indemnisation, par la mise en place d une base nationale de données recensant les décisions rendues par les cours d appel et les transactions des fonds spécialisés et des compagnies d assurance, grâce à un «Référentiel Indicatif National Statistique et Evolutif». Si certaines améliorations sont constatables, il reste que des questions demeurent. Ainsi, si les fonds d indemnisation spécifiques (victimes du SIDA, de l amiante, de l hormone de croissance, du terrorisme, des aléas médicaux ) témoignent de l engagement croissant de la solidarité nationale vis-à-vis des victimes, s ils permettent une réparation sans nécessité d établir une faute et s ils proposent une complémentarité entre cette solidarité et le système assurantiel, ils n en posent pas moins divers problèmes. Leur multiplication, qui ne devrait que s accentuer, parallèlement aux risques générés par certains progrès des sciences et des techniques, se heurtera rapidement aux

3 limites de cette socialisation du risque. Des limites financières : les charges d indemnisation peuvent être énormes, autant que, parfois, imprévisibles, mais aussi des limites éthiques : doit-on prendre en charge les dommages consécutifs à une prise de risque délibérée (tabagisme, alcoolisme, pratique de sport extrêmes ) ou, autre exemple, les préjudices liés à un objectif subjectif, essentiellement d agrément personnel (aléa médical suite à certaines opérations de chirurgie esthétique, non absolument «indispensables»)? Plus généralement, quelle est l influence du fait de la victime sur la décision d indemnisation? Un bilan de l activité des organismes d indemnisation serait certainement à faire. Par ailleurs, la nécessité n étant plus d une responsabilité pour faute, n y a-t-il pas un risque de déresponsabilisation, tant au niveau de la prévention, de la survenance que de la réparation des dommages? Dès lors, faut-il encourager la création de fonds d indemnisation spécifiques à chaque (nouvelle) catégorie de victimes? Autre question récurrente, celle de l imputation des recours subrogatoires des tiers payeurs. Alors qu ils n indemnisent pas tous les chefs de préjudice, les recours des tiers payeurs s imputent sur la totalité de l indemnisation versée. Il conviendrait certainement de concilier les droits de la victime et des tiers payeurs sur la dette du responsable. Le recours du tiers-payeur diminue-t-il l indemnisation de la victime? En d autres termes, a- t-il une incidence sur l indemnisation? Semblable question pourrait être posée à propos des assurances de personnes ou de choses. Parmi les interrogations qui se rapportent tant à l évaluation du préjudice qu à sa réparation, deux semblent émerger : celle soulignée - mais non résolue par le rapport Lambert-Faivre- de l harmonisation de l évaluation du dommage et de son indemnisation et celle de la prise en charge du préjudice dans la durée. L harmonisation des méthodes d évaluation du dommage et de calcul de son indemnisation Parce qu elle relève de l appréciation souveraine des juges du fond, l évaluation du dommage peut conduire à des inégalités d indemnisation, selon les Cours d appel. Le recours à des barèmes a souvent été proposé, dans le but d une harmonisation. Cette méthode est, le plus souvent, fortement contestée au nom du principe d intégralité de la réparation et en raison de la singularité manifeste de chaque cas, accessible, est-il dit, au seul magistrat, lequel dispose d un libre pouvoir d appréciation, notamment à l égard des conclusions des experts. En l absence de barème «officiel», comment le juge procède-til à l évaluation tant du préjudice que de son indemnisation? Existe-t-il des barèmes ou des grilles utilisés par d autres instances d indemnisation, par exemple les assureurs, auxquels le magistrat se réfèrerait? Si oui, selon quelles modalités? En fonction des réserves que semblent susciter les barèmes, quels pourraient être les outils susceptibles d établir une cohérence au sein de la réparation du dommage? Une voie possible - suggérée par certains et fortement contestée par d autres - pourrait être, en matière judiciaire, l extension d un contrôle de la Cour de cassation, qui se doublerait de la nécessité, pour le juge, de détailler ses pratiques et critères d évaluation, ce, un peu sur le modèle de la Cour suprême canadienne. Mais est-il pertinent de confier le contrôle de l évaluation du dommage à une seule cour, qui plus est de cassation? Laquelle serait alors amenée à procéder à une véritable appréciation des faits. N y a-t-il pas, par ailleurs, risque d une uniformisation, dans les limites d une fourchette qui se réduirait de plus en plus autour des décisions de la chambre compétente de la Cour de

4 cassation, si ce n est de son Président? Un rôle symétrique du Conseil d Etat poserait, dans le domaine administratif, des problèmes assez comparables à ceux qui viennent d être relevés. Quelle que soit l issue d une éventuelle réflexion sur le rôle du juge de cassation en ce domaine, une analyse des pourvois ainsi que des appels, (nombre, motifs et effets de la décision ) reste à faire, sur un plan statistique et, également, par enquête auprès des magistrats. En dehors de cette proposition de contrôle, existe-t-il d autres moyens d harmoniser l évaluation du dommage corporel? Des réponses pourraient être fournies par l analyse des procédures mises en œuvre dans d autres domaines (par exemple celui de la concurrence) et, surtout, dans d autres pays. Une analyse comparative est, à cet égard, essentielle. Il serait également intéressant de procéder à une étude comparative des jurisprudences du juge judiciaire et du juge administratif. Les comparaisons portent habituellement sur la question du fondement de la responsabilité. En revanche, elles sont moins fréquentes sur le sujet de la réparation du préjudice. Y a-t-il des différences d'approches? Quels sont les points de convergence? Les catégories juridiques employées pour définir le type de préjudice indemnisable sont-elles les mêmes? Les méthodes d'évaluation sont-elles comparables? Il est parfois dit que le juge judiciaire serait plus "généreux" que le juge administratif Cette assertion se vérifie-t-elle? L évolution du dommage et la révision de son indemnisation L éventualité du caractère évolutif d un dommage pose la question de l intangibilité de son indemnisation. Les juges sont, certes, tenus de prendre en compte les conséquences futures du dommage, mais celles-ci peuvent, finalement, être autres que prévu. Dans le cas d une aggravation du préjudice, une nouvelle action peut être introduite, visant à la réévaluation de la réparation. Dans le cas d une diminution du dommage (amélioration de l état de la victime en raison d une évolution naturellement favorable ou due aux progrès de la médecine) le principe d autorité de la chose jugée est à apprécier en fonction de deux situations : - celle où un capital a été versé à la victime : est-il envisageable d en recalculer le montant et de demander, éventuellement, un remboursement à la victime? Le risque serait, alors, d inciter la victime à ne pas tout mettre en œuvre pour favoriser sa guérison. - celle où la victime bénéficie d une rente, indexée ou non : doit-on la réduire? Dès le départ la question se pose donc au juge, du choix entre une indemnisation en capital et une réparation sous forme de rente, éventuellement d un système mixte. En conséquence, la réflexion pourrait porter sur les possibilités et méthodes, juridiques et comptables, de révision de l indemnisation, en fonction de l évolution du dommage. Faut-il prévoir une révision périodique des jugements pour tenir compte de l évolution de la situation de la victime? Dans quelle mesure pourrait-on contraindre la victime à adapter son projet de vie (choix d un domicile, d un établissement de soins ) pour minimiser le coût de la prise en charge de son handicap?

5 Si les deux ensembles de questions qui viennent d être présentés sont autant de demandes fortes de connaissances, d autres intérêts de recherche peuvent être retenus. Ainsi en est-il de la réparation en nature. Dans quels cas se justifie-t-elle, se concilie-telle avec des dommages-intérêts? Quelles en sont les modalités, de quelle marge d initiative le magistrat dispose-t-il? Les mêmes questions se posent à l égard de ce qui relève de la justice dite «restaurative», à laquelle est attachée une dimension fortement symbolique de rétablissement du lien entre l auteur d une infraction et sa victime. Cette forme de remise en état pourrait venir en complément d une indemnisation. Quelles en seraient les modalités et conditions de mise en œuvre (existence d une proximité entre auteurs et victimes, nature spécifique des délits )? La question de la responsabilité de l Etat en tant que législateur conscient et défaillant se pose. La condamnation de celui-ci par le Conseil d Etat (décision du 3 mars 2004), au nom de la responsabilité des autorités publiques dans la prévention des risques professionnels et au motif que l Etat n avait pas pris les mesures nécessaires à la protection des travailleurs en matière d utilisation de l amiante, pourrait, en effet, ouvrir la voie à une argumentation similaire concernant le tabac, les antennes relais de téléphonie mobile, l éther de glycol Existe-t-il ou peut-on clef de répartition de la responsabilité entre employeurs et Etat ne semble pas avoir trouvé de réponse. Peut-on et si oui, comment? - envisager un partage de responsabilité entre les opérateurs privés et l Etat? Une doctrine unifiée estelle envisageable en la matière? Sur quelles bases? L accent a été fortement mis sur les dommages corporels qui, s ils constituent la très grande majorité des dommages indemnisés, ne sont pas les seuls à l être. Comment, par exemple, objectiver la réparation des dommages moraux? Faut-il maintenir la distinction dommage moral / dommage patrimonial? Peut-on parler de «dommages intermédiaires»? Autre question : comment distinguer les préjudices individuels des préjudices collectifs? Doit-on établir une différence entre action de groupe, action collective et action des associations? Comment procéder à la réparation des dommages de masse? Les actions collectives sont elles compatibles avec la réparation de préjudices individuels? Une analyse pourrait également être faite des clauses limitatives d indemnisation : nombre, contenu, forme, effets Sont-elles contestées? Quelle efficacité, encore, des clauses d évaluation forfaitaire? Dispensent-elles d un recours au juge? La dimension de comparaison avec des systèmes étrangers a été explicitement mentionnée pour la partie concernant l harmonisation des méthodes d évaluation des dommages et de leur indemnisation. Plus généralement, elle éclairerait utilement toute question ici posée ou qui pourrait l être par les chercheurs. La présentation, ici faite, du thème de la réparation du dommage ouvre sur la multiplicité des modes de son traitement. La définition de la victime indemnisable, le bilan des organismes d indemnisation, la comparaison des méthodes d évaluation du préjudice des juges administratifs et judiciaires, pour ne citer que ces exemples, sont autant de sujets particuliers de recherche, participant tous à une meilleure connaissance du thème général. Ils peuvent faire l objet d études spécifiques, être regroupés par proximité thématique, aux fins d une analyse transversale En revanche, il ne serait guère réaliste, pour un projet, d ambitionner de répondre à l ensemble des questions posées.