INTERNATIONAL - EUROPE LA SOLIDARITÉ À L ÉCHELLE DES ÉCHANGES INTERNATIONAUX DE CELLULES SOUCHES HÉMATOPOÏÉTIQUES



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Transcription:

Cette session est animée par le Pr Éliane GLUCKMAN, hématologue, directrice des groupes de recherche Eurocord et Monacord, et le Dr Fabienne POUTHIER - La place des registres de donneurs dans la recherche de greffons de cellules souches hématopoïétiques : exemple du registre France Greffe de Moelle - Dr Federico GARNIER - Le logiciel EMDISCORD : un exemple de mutualisation de données au service des patients - M. Amar BAOUZ - L information des familles sur le don de sang placentaire à l échelle de l Europe - Dr Catherine FAUCHER La place des registres de donneurs dans la recherche de greffons de cellules souches hématopoïétiques : exemple du registre France Greffe de Moelle Dr Federico GARNIER, responsable du pôle registre France Greffe de Moelle : coordination / évaluationbiostatistique, direction du prélèvement et de la greffe de cellules souches hématopoïétiques, Agence de la biomédecine Cette session est consacrée aux échanges inscrits dans la solidarité internationale et notamment à l exemple du registre français France Greffe de Moelle. Pourquoi un tel registre? Il est connu aujourd hui que 30 % des patients pour lesquels existe une indication de greffe de cellules souches hématopoïétiques ont un donneur génétiquement compatible au sein de leur fratrie. Le registre s adresse aux 70 % restant. Les grandes étapes de sa mise en œuvre sont les suivantes. Il a été créé en 1986 à l initiative de deux grandes personnalités scientifiques, les professeurs Jean BERNARD et Jean DAUSSET. En 1992, il a connu une évolution majeure en s associant à d autres registres européens pour mettre en place un réseau informatique hautement sécurisé, EMDIS. En 2004, après 18 mois de préparation, il a été le premier registre à recevoir une accréditation de l association mondiale des registres, la WMDA. Entre 2003 et 2004, il a mis en place un système national de recherche de donneurs, dont le logiciel maintient en contact en temps réel les différents acteurs du prélèvement d un donneur non apparenté. Enfin, il a rejoint l Agence de la biomédecine en 2006. Quel est, en quelques phrases, le rôle d un registre national? Il est tout d abord de recevoir les inscriptions des patients ne disposant pas de donneur apparenté, pour pouvoir amorcer les recherches de donneurs compatibles. Il est ensuite de procéder à ces recherches à travers différents fichiers, nationaux et internationaux. Aujourd hui, les recherches se font à 95 % sur les fichiers internationaux, ce qui représente un travail considérable. Jeudi 28 mai 2015, Université Paris Descartes 1

Les recherches sont menées par une équipe qui coordonne l ensemble des étapes qui vont aboutir au prélèvement. Nous concevons le registre comme une interface privilégiée entre plusieurs acteurs : les centres donneurs, les centres greffeurs, les banques de sang placentaire, les unités de thérapie cellulaire, certaines agences, les sociétés de transports Nous le concevons également comme le garant de la qualité des transmissions d un centre à l autre. Enfin, il a été moteur dans l optimisation de ces échanges et dans la création d outils informatiques ad hoc. Notre organisation en France fait que nous sommes en lien en temps réel avec les centres receveurs et greffeurs, les centres donneurs et les laboratoires HLA, qui inscrivent les donneurs non apparentés, ainsi que les banques de sang placentaire et les réseaux de maternités qui leur sont associés. Le premier réseau dans lequel nous allons chercher un donneur compatible est le système national de recherche, que beaucoup d entre vous connaissent pour l utiliser régulièrement. Son logiciel permet d accéder aux donneurs et aux receveurs nationaux. Notre deuxième système de recherche se situe au niveau mondial. C est le BMDW, couramment appelé le Book. Il contient les caractéristiques HLA, c est-à-dire les phénotypes, des donneurs volontaires. À travers la fusion des registres nationaux, il regroupe 25 millions de personnes dans le monde entier. Notre troisième système est le réseau EMDIS. Né en Europe, il a été étendu à d autres pays comme l Australie ou les États-Unis. Au 31 décembre 2014, il englobait 36 registres internationaux. Je voudrais à présent vous parler des grandes étapes de l activité du registre France Greffe de Moelle. Commençons par notre activité relative aux donneurs non apparentés. Elle commence par l inscription de nouveaux donneurs. Nous en avons actuellement 240 000. Ils ont bénéficié à 95 % d un typage HLA en classe 1 et 2. Mais ce typage ne suffit pas. Il faut que cette base de données soit entretenue pour que chaque donneur reste joignable à tout moment en cas de besoin. En 2014, le nombre de jeunes donneurs inscrits a beaucoup augmenté. On voit que 65 % des donneurs sont des femmes. Le choix préférentiel des médecins greffeurs aujourd hui va plutôt à des donneurs jeunes et, si possible, à des hommes. La population globale des donneurs dits «jeunes» représente 49 % des donneurs inscrits. Environ 50 % des femmes et 40 % des hommes ont moins de 40 ans. Sur 240 000 donneurs inscrits, la médiane d âge est de 43 ans chez les hommes et de 40 ans chez les femmes. Elle est tombée à 28 ans pour les 20 000 donneurs inscrits en 2014, hommes et femmes confondus, ce qui est une excellente nouvelle. Passons aux unités de sang placentaire. Entre 2008-2009 et 2013-2014, l Agence de la biomédecine a entamé un projet de développement de son stock d unités de sang placentaire, grâce à l activité du Réseau français de sang placentaire. La première étape a consisté à augmenter le nombre des greffons de sang placentaire disponibles, en passant d un stock de 8 000 cordons à plus de 34 000 à ce jour. Jeudi 28 mai 2015, Université Paris Descartes 2

La deuxième étape a consisté à travailler sur la qualité. J évoque cette question de l amélioration de la qualité parce que l un des paramètres pour analyser la qualité d un greffon est sa richesse en cellules. Un greffon riche est un greffon qui présente une concentration en cellules nucléées totales égale ou supérieure à 150 x 107 cellules. Un autre paramètre important est la concentration en cellules CD34. Notre stock comprend également des cordons de richesse moyenne ou médiocre. Notre stratégie aujourd hui est de pratiquer quasi-exclusivement le stockage des cordons riches. En 2014, 319 cordons ont été utilisés. Dans tous les cas, qu il s agisse de patients nationaux ou internationaux, enfants ou adultes, que le greffeur ait choisi d utiliser un seul cordon ou deux cordons partiellement compatibles, bref, quelle que soit la stratégie adoptée, les cordons utilisés sont toujours des cordons riches. La médiane des cordons utilisés est à 199 x 107 cellules et 75 % des cordons proviennent des 30 % les plus riches de notre stock. Le message est clair : les greffeurs veulent des cordons riches et nous devons les leur fournir. La troisième activité qu assure le registre est la gestion du fichier des patients nationaux. En 2014, nous avons inscrit 1 900 patients, dont 1 650 inscriptions entièrement nouvelles. Quand on s intéresse au diagnostic des patients inscrits en vue de la recherche d un donneur compatible, on constate que les leucémies aiguës, lymphoblastiques et myéloblastiques, sont fortement représentées parmi la population pédiatrique, mais aussi les aplasies médullaires et les syndromes congénitaux du système immunitaire ou les pathologies liées aux globules rouges. Chez les patients adultes, ce sont les pathologies malignes, leucémies aiguës, lymphoblastiques et myéloblastiques, qui dominent nettement. Chez les patients internationaux, on a observé que l âge limite envisagé pour la greffe était repoussé de plus en plus loin. Nous nous sommes penchés sur la question en France. L âge médian actuel est supérieur à 53 ans. Dans 14 centres de greffe en France, on trouve des patients de plus de 65 ans pour lesquels une indication de greffe a été posée. Dans 99 % des pathologies malignes, il existe une très forte augmentation des inscriptions dans cette tranche d âge sur les cinq dernières années. La quatrième activité est liée à l inscription des patients internationaux qui viennent consulter les fichiers français des donneurs ou des unités de sang placentaire. Leur nombre est particulièrement important pour l interrogation du fichier des donneurs. Si l on s intéresse au nombre des donneurs étrangers prélevés au bénéfice de patients greffés en France, on constate que l activité de prélèvement se fait majoritairement en Europe et aux États-Unis. Si l on se concentre sur l Europe, ce sont l Allemagne, la Pologne, la Grande-Bretagne et le Portugal qui arrivent en tête des fournisseurs. Le nombre des greffons nationaux prélevés pour greffer des patients nationaux ne cesse de s élever dans tous les pays. Les échanges internationaux progressent également. La proportion d échanges internationaux atteint 46 %, ce qui est précieux. Jeudi 28 mai 2015, Université Paris Descartes 3

La conclusion de cette présentation succincte est que le registre est avant tout une interface opérationnelle facilitatrice au service des patients. La WMDA regroupe actuellement 73 registres nationaux, ce qui nous permet de nous rencontrer, de mieux connaître les standards développés par cette association et d être pleinement assurés de la qualité des greffons proposés aux patients nationaux. La coopération avec les registres internationaux est indispensable, car aucun registre national n est autosuffisant. Elle facilite la localisation des greffons et permet à un maximum de patients d avoir accès à la greffe de CSH. Le logiciel EMDIScord : un exemple de mutualisation de données au service des patients M. Amar BAOUZ, chef de projet système d information du registre France Greffe de Moelle, direction des systèmes d information, Agence de la biomédecine EMDIScord est un projet développé par le cadre d EMDIS et qui concerne les cordons, les unités de sang placentaire. EMDIS regroupe un certain nombre de registres. En tant que registre français, nous sommes connectés à 28 registres dans le cadre de ce réseau ce qui signifie que nous ne sommes pas connectés à tous les registres. Cela nous donne accès, à ce stade, à 90 % des donneurs inscrits dans le monde et à 75 % des unités de sang placentaire. Notons que certains pays ont plusieurs registres, comme la République tchèque. Depuis 1995, ce réseau EMDIS permet un échange sous forme de demande et de réponse. Un patient qui cherche des donneurs va envoyer sa demande via EMDIS à tout ou partie des registres étrangers au choix du centre greffeur et attendre que les registres consultés renvoient la liste des donneurs ou des cordons compatibles. Les messages sont prédéfinis. Le message de base contient les caractéristiques du patient. C est ce que nous appelons le message patupd. EMDIS repose sur un envoi de mails cryptés, pour assurer la confidentialité des données transmises. Les registres destinataires traitent la demande dans leurs propres fichiers et renvoient les résultats compatibles. Le centre greffeur peut alors passer à l étape suivante. Le but du projet EMDIScord a été d améliorer les informations reçues pour les unités de sang placentaire. Initialement, on cherchait surtout des greffons de donneurs. Les cordons passaient au second plan. Quand ils ont pris de l importance, on s est contenté de rajouter aux messages conçus pour les donneurs quatre ou cinq items spécifiques aux cordons : les cellules nucléées totales, les cellules CD34, le volume, etc. Puis, les besoins ont continué d augmenter et le besoin d informations supplémentaires s est accru. Jeudi 28 mai 2015, Université Paris Descartes 4

Nous nous sommes réunis entre registres pour réfléchir à la meilleure manière de fournir cette information. C est là qu est née l idée de mutualiser les unités de sang placentaire pour faire l économie du mécanisme de demande / réponse. Une fois qu une unité de sang placentaire est stockée, ses caractéristiques n évoluent plus vraiment. Cela a permis un véritable changement de paradigme. Pour passer à la réalisation, nous avons créé un groupe pilote de six registres, les registres allemand, italien, espagnol, hollandais, français et le registre américain du NMDP. Nous avons cherché, à la fois, à mutualiser les unités de chacun des registres et à accroître la quantité d informations disponibles sur chacune d elles. Chaque unité était caractérisée par 54 items. Nous nous sommes demandés quels étaient les critères utilisés par un centre de greffe pour sélectionner une unité de sang placentaire et nous sommes passés à 120 items, c est-à-dire à une caractérisation beaucoup plus fine. Au niveau des marqueurs infectieux maternels, par exemple, nous n avions aucune information avant EMDIScord. Avec EMDIScord, nous en avons plus d une douzaine. Mutualiser les unités signifie le partage des données avec l ensemble des registres du groupe. Il suffit d imaginer, par exemple, que les 30 000 unités enregistrées en France sont immédiatement et directement disponibles en Allemagne ou aux États-Unis. Cela représentait un défi technique. Il fallait que les unités du registre A et du registre B se retrouvent à la fois dans les deux. Nous avons créé un nouveau message EMDIS qui permet au registre A de demander au registre B, non plus des résultats de recherche circonscrits, mais tout l inventaire de ses unités disponibles et de rapatrier ces données. Une difficulté tenait à ce qu EMDIS repose sur la messagerie. Un mail dépasse rarement quelques mégaoctets. La taille des fichiers à envoyer est considérablement supérieure. Nous avons dû adapter le système EMDIS pour morceler ces fichiers. Chaque registre a défini un paramètre pour indiquer le volume de données que son système de messagerie était capable d envoyer ou de recevoir dans un mail. Le système de communication découpe les gros fichiers en fonction de ce paramètre, les envoie et, bien entendu, les reconstitue après réception. L autre difficulté technique était de rester synchronisés et de mettre à jour les nouvelles inscriptions, les annulations, etc. Là aussi, nous avons défini un nouveau message qui communique automatiquement les caractéristiques de toute nouvelle unité enregistrée à tous les registres liés. Ensuite, il a bien sûr fallu s organiser au niveau de chaque registre. En France, par exemple, il a fallu que nous mettions en place des groupes de travail avec les banques de sang placentaire, vérifier avec chacune quelles étaient les données effectivement disponibles au niveau national, revoir le format des fichiers d échanges pour l envoi des inscriptions, adapter les écrans de notre application aux nouveaux items, sans oublier de valoriser les milliers d unités déjà stockées sous l ancien format, afin qu elles restent disponibles et puissent servir aux patients. En face des donneurs, il y a bien sûr les receveurs. Nous avons permis aux médecins greffeurs d exploiter au mieux ces données nouvelles, en modifiant les programmes de recherche pour intégrer les unités de sang placentaire des registres étrangers et en mettant à leur disposition des outils pour mieux sélectionner les unités. Pour un patient présentant un HLA assez commun, on pouvait autrefois trouver 300 unités compatibles dans le registre national. Jeudi 28 mai 2015, Université Paris Descartes 5

En ajoutant cinq ou six fichiers étrangers, on passait à plusieurs milliers. Comment effectuer un tri dans cette masse croissante? Il faut affiner la recherche, rechercher une adaptation de plus en plus précise au profil du patient. Sur l ancien modèle de fiche, pour caractériser une unité de sang placentaire, il n y avait que deux onglets. Après EMDIScord, nous sommes passés à sept ou huit onglets, ce qui représente un bond qualitatif important. Du côté des receveurs, nous avons créé un outil nommé BestCord, qui permet aux centres greffeurs de définir soit des critères HLA, soit des profils de cellularité. Chaque médecin greffeur peut ainsi procéder à sa recherche en fonction du profil du patient. En l utilisant sans aucun critère, on obtient évidemment des centaines de résultats. Il suffit de jouer sur quelques critères pour réduire considérablement le panel. Les bénéfices de ce projet sont les suivants. Nous sommes passés d un modèle demande / réponse à un modèle dans lequel toutes les unités sont regroupées dans la même base. Aujourd hui, en France, la connexion avec les États-Unis, l Italie, l Espagne et la Finlande nous permet d avoir à disposition 350 000 unités de sang placentaire, pour seulement 30 000 unités enregistrées sur le sol national. Nos données sont constamment réactualisées, pour toujours optimiser le choix du meilleur greffon. Le gain de temps par rapport au modèle demande / réponse est très important. Et nos propres unités de sang placentaire sont mieux valorisées à l étranger, ce qui représente des échanges précieux. Je ne sais pas s il existe d autres projets comparables dans le monde, mais je sais que ce projet renforce beaucoup les liens entre registres et peut servir d inspiration. Nous réfléchissons notamment à des améliorations comparables pour la partie «donneurs» des fichiers, qui regroupe 25 millions de personnes dans le monde. Discussion Question de la salle Je suis médecin de recherche clinique et je me demandais pourquoi l appellation de EMDIScord suggère une extension européenne, alors qu il s agit apparemment d un projet mondial. Amar BAOUZ EMDIS a été mis en place par la Communauté européenne en 1995. Les registres français, allemands et anglais ont présenté un projet qui a été accepté par la DG13 et financé à 50 % par l Union européenne, chacun des trois registres fondateurs parrainant trois registres européens plus petits. Depuis cette époque, des pays du monde entier ont rejoint le réseau et c est par pure convention que l appellation européenne est restée. Il importe de préciser qu EMDIS est ouvert à tout pays candidat : la solidarité est une valeur essentielle du projet. Jeudi 28 mai 2015, Université Paris Descartes 6

Question de la salle Avez-vous envisagé d autres techniques d échange des données que le mail? Amar BAOUZ Envisager autre chose, ce serait refondre entièrement le mécanisme actuel. Nous ne l envisageons pas pour l instant. Le mail a le mérite de la simplicité. Une fois résolue la difficulté de l envoi des gros fichiers, il répond correctement à nos besoins. Il faut aussi rappeler que nous rassemblons des gros et des petits registres. Tous n ont pas les moyens d investir dans des systèmes sophistiqués. L information des familles sur le don de sang placentaire à l échelle de l Europe Dr Catherine FAUCHER, hématologue, département d onco-hématologie, unité de transplantation et de thérapie cellulaire (U2T), Institut Paoli-Calmettes, Centre régional de lutte contre le cancer, Provence-Alpes- Côte d Azur Médecin greffeur à l institut Paoli-Calmettes depuis de nombreuses années, dans l équipe du professeur BLAISE, j ai eu la chance de travailler à l Agence de la biomédecine de 2008 à 2014 et de participer à un projet piloté par l Agence, en collaboration avec le Conseil de l Europe. L objectif était de créer un document d information sur le don de sang placentaire à destination des familles. C est le projet que je souhaite vous présenter. Mais auparavant, un mot pour vous rappeler l importance de la greffe de sang placentaire, grâce au professeur Eliane GLUKMAN, pionnière de cette technique en 1989, qui s occupe toujours d Eurocord. Elle a présenté récemment, au congrès de mars 2015 de l European Blood and Marrow Transplantation Group, un bilan de l activité de greffe de sang placentaire étudiée par le groupe Eurocord : à ce jour, cette technique a bénéficié à plus de 10 000 patients. Pourquoi le Conseil de l Europe s est-il préoccupé d éditer un document d information sur le don de sang placentaire? Parce que le Conseil, qui regroupe 47 pays dans la défense des principes des droits de l homme, s intéresse depuis toujours au don solidaire et le promeut. Depuis plus de 10 ans, il surveille avec attention l évolution de cette thérapeutique. En 2004, il a édicté une recommandation sur le statut des banques de sang placentaire autologue, c est-à-dire à destination privée du patient ou de sa famille. Il a pris position en faveur du don volontaire et mis les États membres en garde contre le développement de banques à visées privées. Il a également mené une enquête pilotée par l Agence de la biomédecine auprès des agences et des ministères de la Santé de ses 47 pays membres. Elle a montré que de nombreux pays ne possédaient pas de registre de sang placentaire et n avaient, en outre, pas réellement organisé l information du public sur son don. Jeudi 28 mai 2015, Université Paris Descartes 7

Le Conseil a réuni un groupe d experts pour rédiger un document source en anglais, susceptible d être traduit et diffusé dans chaque langue. La version française est parue en 2014 sous l égide de la DEQM, direction du Conseil agissant dans le domaine de la santé. Elle s occupe également des transplantations d organes. Ce guide a été rédigé de manière simple et compréhensible, pour être distribué directement au public sous forme papier ou électronique. Il commence par définir ce qu est le sang de cordon, où il se trouve et ce qu il contient. Il indique ensuite la manière de le prélever, qui est simple puisqu il suffit de récupérer le cordon après l accouchement. Le document souligne le caractère altruiste du don, qui est encadré, contrôlé, réalisé en maternité, validé dans un laboratoire de thérapie cellulaire, enregistré et disponible pour tout patient dans le monde. Il rappelle à quoi sert actuellement et réellement le sang placentaire, c est-à-dire à la greffe de cellules souches hématopoïétiques dans le cadre du traitement des maladies graves du sang, qu elles soient surtout cancéreuses, chez l adulte, ou surtout génétiques, chez l enfant. Le vocabulaire est éclairé par des encarts. Le document identifie les établissements qui conservent les dons, et différencie clairement les banques de sang placentaire à usage public des banques à usage intrafamilial, ou autologue, ces dernières étant la plupart du temps des établissements commerciaux à but lucratif. Il souligne que toutes les banques qui conservent du sang placentaire à usage allogénique sont soumises à des réglementations nationales et internationales strictes, voire sévères, et qu elles rendent la greffe sûre pour les patients. C est la vocation de l Agence nationale des produits de santé en France. Au niveau international, ce rôle est joué par des accréditations auxquelles les banques se soumettent et qui sont des gages de qualité pour les greffons, mais aussi de transparence pour l information des équipes de greffe. Cette réglementation n est pas appliquée aux établissements à but lucratif. Cette brochure a enfin le courage de différencier l usage allogénique de l usage intrafamilial et de dire ce qu on ne dit pas assez, c est-à-dire qu en l absence de pathologie dans la famille de l enfant, la conservation familiale a très peu de chances de servir un jour et n a pas d efficacité démontrée! Cette information est donnée telle quelle. Rappelons que dans le cas d une conservation autologue ou intrafamiliale, la question de la qualité du greffon n est pas au premier plan des préoccupations, tandis qu elle est au centre de l activité des banques à vocation publique. Tel qu il est pratiqué, le stockage privé ne correspond donc à aucune utilité. Il est vrai que des études sont en cours, mais aucune n a encore montré d indication claire, comme c est le cas pour les maladies graves du sang. La brochure rappelle encore que le stockage privé fait l objet d informations tendancieuses, qui relèvent du marketing et jouent sur la culpabilité vis-à-vis de l enfant, alors que les sociétés savantes et les institutions comme le Conseil de l Europe œuvrent depuis toujours pour un don altruiste. Jeudi 28 mai 2015, Université Paris Descartes 8

Les familles convaincues demandent souvent si tout le monde peut donner. La brochure rappelle que le don est une décision de la famille, mais qu il existe des contre-indications, notamment lorsque l accouchement est compliqué d une urgence vitale, et que lorsqu il existe un enfant malade dans la fratrie de l enfant à naître, la conservation du sang placentaire pour son usage est prioritaire sur le don altruiste. Il est également vrai que l organisation du don altruiste de sang placentaire est complexe et lourde et que toutes les maternités ne peuvent pas y être rattachées. Vous le voyez, cette brochure comble un vide et vient contrebalancer utilement le discours des sociétés commerciales, en faisant prévaloir la réalité médicale et scientifique. Je voudrais conclure en disant un mot de la situation actuelle de la greffe de sang placentaire. Le stock mondial approche maintenant les 700 000 greffons. En France, il a été considérablement augmenté, grâce à un financement issu du Plan cancer et à un projet de l Agence de la biomédecine. Les greffes de sang placentaire ont augmenté de manière très importante entre 2005 et 2010 puisqu on a pu les proposer aux patients adultes. Elles connaissent à présent une stagnation, voire une légère régression, selon les données de l European Blood and Marrow Transplantation Group, puisque des sources alternatives de greffons émergent. À l heure actuelle, elles représentent donc un pourcentage encore faible par rapport aux donneurs non apparentés. Le groupe NetCord s interroge donc surtout sur l amélioration de la qualité des greffons et des résultats des greffes. Au dernier congrès de mars 2015, le Dr Étienne BAUDOUX a présenté une étude en cours qui est destinée à améliorer cette qualité au niveau international. Elle est menée par NetCord et la WMDA. Ce même congrès a abordé la question de l amélioration des résultats des greffes de sang placentaire chez les adultes et les enfants. Améliorer la prise de greffe ou diminuer les complications est une préoccupation majeure. Un nouveau chapitre de l histoire de la greffe est en train de s ouvrir avec de nombreuses recherches. L Agence de la biomédecine devra continuer de s associer au Conseil de l Europe et aux institutions qui le souhaitent pour continuer d améliorer l information du public à ce sujet. Le public mérite une information juste et honnête sur l état de la science dans ce domaine. Discussion Question de la salle Une question de simple curiosité : le sang est-il stocké en entier, avec globules blancs, rouges et plaquettes, ou seulement les cellules extraites? Dr Catherine FAUCHER La question se pose surtout dans les banques à but privé, où l on n a pas de garantie sur la manière dont le sang est préparé. Jeudi 28 mai 2015, Université Paris Descartes 9

Question de la salle Pourquoi est-ce qu on ne stocke pas à la fois pour la personne et pour le don solidaire? Dr Catherine FAUCHER Parce qu il y a peu de cellules dans un greffon de sang placentaire et que lorsqu on en a besoin pour un patient, on utilise tout. Une expérience espagnole consistait à prévoir que les échantillons privés étaient intégrés dans l inventaire global et pouvaient être utilisés en cas de correspondance. Elle n a jamais fonctionné parce que les deux concepts étaient trop antinomiques. Jeudi 28 mai 2015, Université Paris Descartes 10