Cancer du sein HER2+ Le point sur les thérapeutiques ciblées



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Transcription:

Sénologie Cancer du sein HER2+ Le point sur les thérapeutiques ciblées Pr Nicole Tubiana-Mathieu*, Sophie Leobon* La prise en charge du cancer du sein a été transformée depuis la mise en évidence et le ciblage de la protéine HER2. Cette protéine est surexprimée dans 15 à 2 % des cancers, ce qui est un facteur de mauvais pronostic mais prédictif de réponse aux anticorps anti- HER2 en phase adjuvante et métastatique. De nouvelles recommandations de 213 permettent d harmoniser les résultats du marquage HER2 et de mieux évaluer son impact sur la réponse thérapeutique. *Oncologie médicale, CHU de Limoges LE TRASTUZUMAB (HERCEPTIN ) Il s agit du premier anticorps monoclonal humanisé ciblant le récepteur HER2 (entrant dans la dimérisation des autres récepteurs HER1, HER3 et HER4). Il est le traitement de référence des cancers du sein en situation adjuvante et métastatique en association avec la chimiothérapie. EN SITUATION ADJUVANTE Les essais utilisant le trastuzumab ont conclu à un bénéfice en survie, avec une diminution des rechutes de 5 %. Ce qui a fait dire qu il s agissait d une révolution dans la prise en charge du cancer du sein HER2+. L analyse conjointe des deux essais NCCTG N9831 (Alliance) et NSABP B-31 après un suivi de 8,4 ans confirme un bénéfice sur la survie sans progression et la survie globale de 4 et 37 % respectivement (1). La toxicité décrite est principalement une toxicité cardiaque. Une méta-analyse sur 11 991 patientes recevant du trastuzumab en adjuvant (2) retrouve une cardiopathie sévère dans 2,5 % des cas par rapport à,4 % sans trastuzumab (HR = 5,11 ; p =,1) et une diminution de la fraction d éjection ventriculaire (FEV) (HR = 1,83 ; p <,1). Son utilisation plus récente en sous-cutanée à la dose de 6 mg, quel que soit le poids de la patiente, injectée en 2 à 5 min toutes les 3 semaines, a été validée depuis avril 214 à la suite de l étude HannaH, avec un profil de tolérance équivalent à l intraveineux (étude PrefHer). Par ailleurs, peu de petites tumeurs T1 ont été incluses dans les essais de traitement adjuvant, or de plus en plus de petites tumeurs sont diagnostiquées et la question est de savoir s il est possible de réduire la chimiothérapie dans ce groupe de patients. Certes, il est préférable d utiliser une chimiothérapie, mais une étude de phase II du Dana Farber chez 46 patientes porteuses de tumeurs T1 (T1A 19 % ; T1B 31 % ; T1C 42 % ; T2 3 cm 9 % ; RH + ou -) a proposé un essai avec des taxanes (paclitaxel en hebdomadaire) sans anthracycline. Les résultats sont séduisants avec une survie à 3 ans de 98,7 %. La durée du traitement adjuvant est de 1 an. EN SITUATION MÉTASTATIQUE La première étude à l origine de l AMM remonte à 21 avec une phase III sur 469 patientes porteuses de tumeurs HER2+ (3) comparant paclitaxel utilisé seul versus paclitaxel + trastuzumab ou un schéma avec anthracycline AC (adriamycine-cyclophosphamide) plus ou moins trastuzu- onko+ Octobre 215 vol. 7 numéro 55 1511

mab suivant le traitement adjuvant reçu au préalable. Dans les deux bras, il a été obtenu une amélioration de la survie globale (2,3 vs 25,1 mois ; p =,46), mais une toxicité majeure cardiaque (25 %) a été mise en évidence dans l association anthracycline et trastuzumab. Cette association a donc été récusée depuis cette étude. Une étude française de phase II, randomisée, confirmait l apport du trastuzumab au docétaxel en première ligne chez 188 patientes, avec une amélioration de la survie de 8,5 mois (4). Il est admis d associer la thérapie ciblée et la chimiothérapie dès le diagnostic de l atteinte métastatique. De plus, en première ligne pour les tumeurs RH+, l apport du trastuzumab est confirmé en association avec une hormonothérapie que ce soit l anastrozole (essai TanDEM) (5) avec une amélioration de la survie sans progression ou le létrozole (6) associé à un autre anti-her2 : le lapatinib, que nous développerons plus loin. Le lapatinib montre une amélioration de la survie sans progression, mais pas de la survie globale. Cette stratégie n existe que s il existe une contre-indication à la chimiothérapie. HERCEPTIN : LIBELLÉ DE L AMM. Cancer du sein métastatique : Herceptin est indiqué dans le traitement du cancer du sein métastatique, avec surexpression tumorale de HER2 : a) En monothérapie, chez les patients déjà prétraités par au moins deux protocoles de chimiothérapie pour leur maladie métastatique. Les chimiothérapies précédentes doivent au moins inclure une anthracycline et une taxane, à moins que ces traitements ne conviennent pas aux patients. Les patients répondeurs à l hormonothérapie doivent également être en échec à l hormonothérapie, à moins que ces traitements ne leur conviennent pas. b) En association avec le paclitaxel, chez les patients non prétraités par chimiothérapie pour leur maladie métastatique et chez lesquels le traitement par anthracyclines ne peut pas être envisagé. c) En association avec le docétaxel, chez les patients non prétraités par chimiothérapie pour leur maladie métastatique. d) En association à un inhibiteur de l aromatase, chez les patientes ménopausées ayant des récepteurs hormonaux positifs, non traitées précédemment par trastuzumab. Cancer du sein en situation adjuvante : Herceptin est indiqué en traitement adjuvant du cancer du sein avec surexpression tumorale de HER2, après chirurgie, chimiothérapie (néoadjuvante ou adjuvante) et radiothérapie (si indiquée). Herceptin a l AMM dans le traitement du cancer du sein précoce HER2 positif localement avancé (y compris inflammatoire) ou mesurant plus de 2 cm de diamètre, en association à une chimiothérapie néoadjuvante suivie d un traitement adjuvant avec Herceptin. Des résistances primaires et acquises ont été décrites avec cet anticorps, il a donc été développé d autres molécules ciblant HER2. TYVERB : LIBELLÉ DE L AMM. Le Tyverb est indiqué dans le cancer du sein avec surexpression des récepteurs HER2 (ErbB2), en association à un inhibiteur de l aromatase, chez les patientes ménopausées ayant une maladie métastatique avec des récepteurs hormonaux positifs et pour lesquelles la chimiothérapie n est actuellement pas envisagée. Une des questions concerne la poursuite du trastuzumab après progression sous cette thérapie. Après progression à la première ligne, l association trastuzumabcapécitabine ou trastuzumab-lapatinib permet une survie sans progression meilleure qu avec capécitabine seule ou lapatinib seul. LE LAPATINIB (TYVERB ) Le lapatinib, molécule orale, est une anti-tyrosine kinase anti-her1 (EGFR) et anti-her2, qui se lie de manière réversible au domaine intracellulaire de HER1 et/ou HER2. L association du lapatinib (1 25 mg/j) à une chimiothérapie comme la capécitabine 1 mg/m 2 deux fois/jour pendant 14 jours (cycle de 21 jours) a été comparée à de la capécitabine seule (1 25 mg/m 2 deux fois/jour pendant 14 jours) en deuxième ligne métastatique (7) avec une amélioration de la survie sans progression de 4,4 mois 152 onko+ Octobre 215 vol. 7 numéro 553

Cancer du sein HER2+ à 8,4 mois (HR =,47 ; IC 95 %,32-,67 ; p <,1) et de la survie globale de 56,4 mois à 75 mois (HR =,78 ; p =,22), mais avec une toxicité digestive (diarrhée) et un syndrome main-pied. Le lapatinib et le trastuzumab ont un effet synergique, d où leur utilisation en seconde ligne métastatique. L association augmente le bénéfice clinique et la survie sans progression comparée au lapatinib seul chez 296 patients progressifs après plusieurs lignes (médiane = 3) utilisant du trastuzumab (8), d où son AMM dans les tumeurs RH-. Ce double blocage a été testé en situation néoadjuvante. L essai Neo-ALTTO de phase II randomisait 455 patientes entre lapatinib, trastuzumab ou l association 6 semaines puis 12 semaines de paclitaxel avec la thérapie du bras de randomisation. Après chirurgie, les patientes recevaient trois cycles de FEC puis la thérapie ciblée du bras. Aucune différence de réponse n a été montrée entre les bras lapatinib et trastuzumab. En revanche, il a été mis en évidence une augmentation de la réponse complète anatomopathologique (RCp) avec l association (46,8 vs 27,6 %) (HR = 2,39 ; p =,7). La corrélation entre RCp et la survie a été montrée dans cette population de patientes avec une amélioration de la survie quel que soit le bras en fonction de cette réponse. Le meilleur résultat était obtenu dans la population HER2+ et RH-. Une grande proportion de patientes recevant le lapatinib présentait une diarrhée, une neutropénie, un rash et des altérations des enzymes hépatiques, ce qui n a pas permis d obtenir l AMM dans cette indication. PERJETA : LIBELLÉ DE L AMM. Le Perjeta a l AMM en association au trastuzumab et au docétaxel dans le traitement des patients adultes (hommes ou femmes) atteints d un cancer du sein métastatique ou localement récidivant non résécable, HER2 positif et n ayant pas reçu au préalable de traitement anti- HER2 ou de chimiothérapie pour leur maladie métastatique. Survie sans progression (%) 1 9 8 7 6 5 4 3 2 1 LE PERTUZUMAB (PERJETA ) Le pertuzumab est un anticorps monoclonal humanisé qui cible un épitope de HER2 impliqué dans la dimérisation de HER2, donc différent de celui ciblé par le trastuzumab. Les études précliniques ont mis en évidence une synergie des deux anticorps pertuzumab et 5 1 15 Pertuzumab (médiane 18,5 mois) Contrôle (médiane 12,4 mois) 2 Patients à risque Pertuzumab 42 345 267 139 83 32 1 Contrôle 46 311 29 93 42 17 7 FIGURE 1 - Survie sans progression étude CLEOPATRA (1). Survie globale (%) 1 9 8 p =,8 7 6 5 4 3 2 1 25 3 Hazard ratio,62 (95 % CI,,51-,75) p <,1 35 trastuzumab. Son AMM a été obtenue à partir de l étude de phase III CLEOPATRA. Cette étude randomisait 88 patientes, porteuses de cancers du sein métastatiques RH + ou -, HER2+, entre docétaxel et trastuzumab vs docétaxel, trastuzumab et pertuzumab, avec une amélioration de la survie dans le bras association (9-11). 4 Pertuzumab, trastuzumab, docétaxel Placebo, trastuzumab, docétaxel 5 1 15 2 25 3 35 4 45 5 FIGURE 2 - Survie globale étude CLEOPATRA (1). 55 onko+ Octobre 215 vol. 7 numéro 55 1531

TABLEAU 1 - TOXICITÉS DE L ESSAI EMILIA. Toxicités Capécitabine + lapatinib T-DM1 Tout grade % Grade 3 % Tout grade % Grade 3 % Diarrhée 79,7 2,7 23,3 1,6 Syndrome main-pied 58, 16,4 1,2 Neutropénie 8,6 4,3 5,9 2, Vomissement 29,3 4,5 19,,8 Hypokaliémie 8,6 4,1 8,6 2,2 Fatigue 27,3 3,5 35,2 2,4 Anémie 8, 1,6 1,4 2,7 Augmentation ASAT 8,8 1,4 16,9 2,9 Augmentation ALAT 9,4,8 22,4 4,3 Thrombopénie 2,5,2 28 12,9 L étude CLEOPATRA a montré un bénéfice significatif en termes de survie sans progression (18,5 mois vs 12,4 mois ; HR,62 ; p <,1) et plus récemment en termes de survie globale (56,5 mois vs 4,8 mois ; HR =,68 ; IC,5 (,56 -,84) ; p =,2). Ces résultats ont conduit à l approbation du pertuzumab en association avec le docétaxel en première ligne métastatique (Fig. 1 et 2). Les principales toxicités décrites dans le bras association des deux anticorps étaient la survenue de diarrhée dans 8 % des grades 3-4, de rash, de neutropénie fébrile (13,8 %) et d inflammation des muqueuses (3 %). Le double blocage trastuzumab et pertuzumab a été évalué en néoadjuvant. L essai ayant permis d obtenir l AMM est l étude NEOSPHERE, phase II randomisée sur 417 patients avec quatre bras : docétaxel + trastuzumab vs docétaxel + pertuzumab versus docétaxel + trastuzumab + pertuzumab versus trastuzumab + pertuzumab, avec l obtention d une rémission complète pathologique dans 45,8 % des cas dans le bras association, KADCYLA : LIBELLÉ DE L AMM. Kadcyla a l AMM en monothérapie, chez les adultes atteints d un cancer du sein HER2 positif métastatique ou localement avancé non résécable, ayant reçu au préalable du trastuzumab et un taxane, séparément ou en association. Les patients doivent avoir reçu un traitement antérieur pour la maladie localement avancée ou métastatique ou avoir présenté une progression de la maladie pendant un traitement adjuvant ou dans les 6 mois suivant sa fin. alors que dans les autres bras la réponse n était obtenue que dans 24 et 29 % des cas (la RCp correspondant à l absence de carcinome invasif et in situ dans le sein et les ganglions). Les résultats sont équivalents à ceux obtenus dans l étude TRYPHAENA utilisant le carboplatine. La toxicité du double blocage est la neutropénie fébrile, mais avec un impact de la chimiothérapie. Les facteurs prédictifs de réponse sont l intensité du marquage HER2 et l absence de récepteurs hormonaux. Grâce à cet essai, le Perjeta a obtenu une extension d indication en néoadjuvant dans le traitement du cancer du sein HER2+ fin juin 215. LE TRASTUZUMAB- EMTANSINE (T-DM1) : KADCYLA Le T-DM1 est un anticorps conjugué associant le trastuzumab à un agent cytotoxique, la maytansine, inhibiteur de la polymérisation des microtubules présentant une toxicité neurologique et digestive qui ne permettait pas une utilisation seule. La liaison du T-DM1 au récepteur HER2 induit une internalisation du complexe, suivie d une dégradation dans les lysosomes. Le cytotoxique libéré entraîne la mort cellulaire. L étude de phase III (EMILIA) a comparé le T-DM1 (3,6 mg tous les 21 jours) à l association lapatinib (1 25 mg/jour) et capécitabine 1 mg/m 2 deux fois/jour 154 onko+ Octobre 215 vol. 7 numéro 553

Cancer du sein HER2+ pendant 14 jours) chez 991 patientes présentant un carcinome mammaire surexprimant HER2, localement avancé ou métastatique, progressant sous trastuzumab et taxane en situation métastatique ou dans les 6 mois après un traitement adjuvant (12). Le T-DM1 est perfusé à la dose de 3,6 mg/kg toutes les 3 semaines, la première perfusion dure 9 min avec 9 min de surveillance puis 3 min avec 3 min de surveillance. La survie sans progression était significativement augmentée dans le bras T-DM1 (9,6 mois vs 6,4 mois ; p <,1) et la survie globale également (3,9 mois vs 25,1 mois ; HR =,682 ; p =,6). Les toxicités décrites dans l essai EMILIA sont résumées dans le tableau 1. La toxicité hépatique significative était transitoire avec effet cumulatif et retour à la normale après arrêt du traitement. Il faut également noter une dysfonction ventriculaire de grades 1-2 dans 2 % des cas et de grades 3-4 dans,3 % des cas. L étude THeRESA est une étude de phase III comparant le T-DM1 (3,6 mg/kg toutes les 3 semaines) au traitement du choix du médecin, chez 62 patientes porteuses de cancers du sein métastatiques ayant reçu taxanes, anthracycline et lapatinib (Fig. 3 et 4). Une amélioration de la survie sans récidive était obtenue (6,2 mois vs 3,3 mois ; p <,1), avec une tendance à l amélioration de la survie et une toxicité moindre dans le bras T-DM1 (13). La toxicité du T-DM1 a été étudiée sur 884 patientes par Dieras et al. (14) avec confirmation de la toxicité au niveau plaquettaire et des transaminases. Survie sans progression (%) 1 8 6 4 2 2 4 6 8 1 12 14 16 18 Le T-DM1 ayant été négatif dans un essai le testant en première ligne, l indication actuelle est donc la seconde ligne. L ÉRIBULINE (HALAVEN ) Peu de nouvelles chimiothérapies ont été développées ces dernières années, on peut citer dans le cancer du sein l éribuline (Halaven ). Il s agit d un inhibiteur des microtubules différent des taxanes et non cross resistant avec ces drogues. En mai 214, Halaven a bénéficié Médiane Nombre (mois) d événements Lapatinib-capécitabine...6,4...34 T-DM1...9,6...265 Lapatinib-capecitabine FIGURE 3 - Survie sans progression étude THeRESA (12). Survie globale (%) 1 8 6 4 2 85,2 % (95 % CI, 82,-88,5) 78,4 % (95 % CI, 74,6-82,3) 2 4 6 8 1 12 14 16 18 64,7 % (95 % CI, 59,3-7,2) 51,8 % (95 % CI, 45,9-57,7) FIGURE 4 - Survie globale étude THeRESA (12). Hazard ratio stratifié,65 (95 % CI,,55-,77) p <,1 T-DM1 2 22 24 26 28 3 Médiane (mois) Lapatinib-capécitabine... 25,1 T-DM1... 3,9 T-DM1 Lapatinib-capecitabine 2 22 24 26 28 3 32 34 36 Hazard ratio stratifié,65 (95 % CI,,55-,77) p <,1 d une extension d AMM. L AMM a été obtenue après l essai de phase III EMBRACE qui, chez 762 patientes en phase métastatique prétraitées par anthracyclines et taxane, a montré une amélioration de la survie globale comparé à un traitement laissé au choix de l investigateur (1,4 mg/ m 2 perfusé 2 à 5 min à J1 et J8 tous les 21 jours). En première ligne, dans les cancers HER2+, un essai a testé l association éribuline + trastuzumab. Il a permis d obtenir un taux de onko+ Octobre 215 vol. 7 numéro 55 1551

réponse de 71 % avec une survie sans récidive à 11,6 mois (15). RECOMMANDATIONS ACTUELLES DANS LE CANCER DU SEIN HER2+ HALAVEN : LIBELLÉ DE L AMM. Halaven est indiqué dans le traitement des patientes atteintes d un cancer du sein localement avancé ou métastatique, dont la maladie a progressé après au moins un protocole de chimiothérapie pour le traitement du stade avancé. Le traitement antérieur, en situation adjuvante ou métastatique, doit avoir comporté une anthracycline et un taxane, sauf chez les patientes ne pouvant pas recevoir ces traitements. EN PHASE PRIMAIRE (16) Dans les tumeurs HER2+, il est recommandé de proposer, en situation adjuvante, une chimiothérapie associée au trastuzumab (même dans les tumeurs de moins de 1 cm surtout si la tumeur est RH-) et hormonothérapie si la tumeur est RH+. Il est possible, s il existe une contreindication à la chimiothérapie, d utiliser l association hormonothérapie + trastuzumab. L association avec des anthracyclines n est pas recommandée en raison de la toxicité cardiaque. EN PHASE MÉTASTATIQUE (17) En première ligne, l association trastuzumab-pertuzumab-docétaxel est le traitement de référence. Si le pertuzumab n a pas été utilisé en première ligne, il est acceptable de l utiliser après cette ligne. À la progression d une première ligne utilisant le blocage HER2, il est recommandé d utiliser T-DM1. Dans les tumeurs RH+ et HER2+, s il est décidé d utiliser une hormonothérapie première, l association à un blocage HER2 est recommandée par trastuzumab ou lapatinib. À progression sous blocage HER2, il est recommandé de continuer le blocage HER2, mais le délai n est pas connu. n Les auteurs déclarent n avoir aucun lien d intérêts. Mots-clés Cancer du sein, HER2, Thérapeutique ciblée Bibliographie 1. Perez EA, Romond EH, Suman VJ et al. Trastuzumab plus adjuvant chemotherapy for human epidermal growth factor receptor 2-positive breast cancer: Planned joint analysis of overall survival from NSABP B-31 and NCCTG N9831. J Clin Oncol 214 ; 32 : 3744-52. 2. Moja L, Tagliabue L, Balduzzi S et al. Trastuzumab containing regimens for early breast cancer. Cochrane Database Syst Rev 212 ; 4 : CD6243. 3. Slamon DJ, Leyland-Jones B, Shak S et al. Use of chemotherapy plus a monoclonal antibody against HER2 for metastatic breast cancer that overexpresses HER2. N Engl J Med 21 ; 344 : 783-92. 4. Marty M, Cognetti F, Maraninchi D et al. Randomized phase II trial of the efficacy and safety of trastuzumab combined with docetaxel in patients with human epidermal growth factor receptor 2-positive metastatic breast cancer administered as first-line treatment: The M771 study group. J Clin Oncol 25 ; 23 : 4265-274. 5. Kaufman B, Mackey JR, Clemens MR et al. 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Cet événement réunira tous les acteurs de la lutte contre le cancer dans le but de valoriser les dernières innovations mondiales en oncologie. Un appel à communication scientifique est lancé. Date limite de dépôt d abstract : 15 novembre 215 Notification aux auteurs : début décembre 215 Date de changement de tarif : 15 décembre 215 Pour plus d informations : www.toulouse-onco-week.org 156 onko+ Octobre 215 vol. 7 numéro 553