VIOLENCE, HARCELEMENT MORAL OU HARCELEMENT SEXUEL AU TRAVAIL : INTRODUCTION A VOS DROITS ET VOS OBLIGATIONS



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VIOLENCE, HARCELEMENT MORAL OU HARCELEMENT SEXUEL AU TRAVAIL : INTRODUCTION A VOS DROITS ET VOS OBLIGATIONS Bruxelles, le Olivier LENGLEZ Avocat Vanden Eynde Legal Avenue de la Toison d'or, 77 1060 Bruxelles Tél : + 32 / (0)2.290.04.00 Fax : +32 / (0)2.290.04.10 contact : ol@vdelegal.be Web site : www.vdelegal.be 1

Cette fiche d information a pour objectif de vous familiariser avec les concepts et les procédures introduits par la loi du 11 juin 2002 relative à la protection contre la violence et le harcèlement moral ou sexuel au travail. Vu la portée générale de cette fiche, certaines questions plus particulières ou plus techniques ne seront qu évoquées. Ω La loi du 11 juin 2002 relative à la protection contre la violence et le harcèlement moral ou sexuel au travail insère dans la loi du 4 août 1996 relative au bien être des travailleurs lors de l exécution de leur travail, un nouveau chapitre Vbis, intitulé «Dispositions spécifiques concernant la violence et le harcèlement moral ou sexuel au travail». La loi vise avant tout un objectif de prévention, essentiellement en mettant à charge de l employeur l obligation de prendre diverses mesures, allant de l information des travailleurs, à l aménagement des lieux de travail, en passant par la désignation d une personne de confiance et d un conseiller en prévention. La loi a également pour objectif d encadrer au mieux la victime de faits de violence ou de harcèlement, par des mesures d accompagnement. Enfin, elle vise bien entendu à aboutir à la cessation, l arrêt des faits de violence ou de harcèlement, et à leur indemnisation. A cet effet, la loi laisse le choix à la victime de recourir à des procédures internes ou externes à l entreprise, et notamment l introduction de procédures en justice, au civil et au pénal. Afin d éviter qu un travailleur ne renonce à faire état des faits de violence ou de harcèlement dont il aurait été victime, de crainte de subir, en raison de sa plainte, des pressions voire un licenciement, la loi prévoit que le travailleur qui formule une plainte motivée bénéficie d une certaine protection contre le licenciement. Cette protection bénéficie également aux travailleurs qui interviennent comme témoins dans le cadre des procédures mises en place par la loi. 2

DEFINITIONS VIOLENCE AU TRAVAIL Chaque situation de fait où un travailleur ou une autre personne à laquelle le présent chapitre est d'application, est persécuté, menacé ou agressé psychiquement ou physiquement lors de l'exécution du travail. Concrètement des coups, des insultes, des bousculades, des brimades sont susceptibles de constituer des faits de violence ; par exemple, le client mécontent qui lance un objet en direction du travailleur, en vue de l atteindre, etc. HARCELEMENT MORAL AU TRAVAIL Les conduites abusives et répétées de toute origine, externe ou interne à l'entreprise ou l'institution, qui se manifestent notamment par des comportements, des paroles, des intimidations, des actes, des gestes et des écrits unilatéraux, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à la personnalité, la dignité ou l'intégrité physique ou psychique d'un travailleur ou d'une autre personne à laquelle le présent chapitre est d'application, lors de l'exécution de son travail, de mettre en péril son emploi ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant. Concrètement intrusion dans la vie privée (lire les e-mails, submerger la personne chez elle de coups de fils intempestifs, etc. ), provocation, intimidation, dénigrement répété du travailleur et discrédit auprès des autres, falsification de l information, rétention d information, menaces verbales, cris, injures, remarques blessantes ou désobligeantes (se moquer du physique, humour déplacé, utilisation de surnoms), etc. HARCELEMENT SEXUEL AU TRAVAIL Toute forme de comportement verbal, non-verbal ou corporel de nature sexuelle, dont celui qui s'en rend coupable, sait ou devrait savoir, qu'il affecte la dignité de femmes et d'hommes sur les lieux de travail. Concrètement remarques dénigrantes à caractère sexuel sur le physique, l habillement, la vie privée, téléphoner pour faire une déclaration d amour, gestes déplacés, obscènes, propositions malhonnêtes, répandre des mensonges à propos d une prétendue liaison, forcer à embrasser, se mettre dans le cadre de la porte et bloquer le passage, dégrafer le soutien gorge, etc. 3

A QUI LA LOI S APPLIQUE-T-ELLE? La loi vise des personnes qui doivent s abstenir des faits prohibés, et des personnes victimes de ces faits, qu elle protège. Doivent s abstenir de tout acte de violence ou de harcèlement les employeurs les travailleurs les personnes assimilées aux travailleurs : (1) les personnes qui, autrement qu en vertu d un contrat de travail, exécutent des prestations de travail sous l autorité d une autre personne ; (2) les personnes qui suivent une formation professionnelle dont le programme de formation prévoit une forme de travail qui est effectué ou non dans l établissement de formation ; (3) les personnes liées par un contrat d apprentissage ; (4) les stagiaires ; (5) les élèves et étudiants qui suivent des études pour lesquelles le programme d étude prévoit une forme de travail qui est effectué dans l établissement d enseignement sont assimilées aux employeurs les personnes qui occupent ces personnes assimilées aux travailleurs La loi vise également les personnes externes à l entreprises ou l institution : les personnes qui se trouvent sur les lieux de travail, à savoir toute personne qui entre en contact avec les travailleurs lors de l exécution de leur travail (exemples : clients, fournisseurs, prestataires de services, élèves, étudiants, bénéficiaires d allocations, etc.) Personnes protégées les travailleurs et les personnes assimilées aux travailleurs (voir point précédent) les témoins : la loi prévoit que les travailleurs qui interviennent comme témoins dans les litiges auxquels l application de la loi pourrait donner lieu, bénéficient de la même protection contre le licenciement que celle accordée aux travailleurs qui ont déposé une plainte motivée 4

OBLIGATIONS DES EMPLOYEURS La loi met à charge de l employeur des obligations importantes en vue d assurer le respect de ses dispositions. En les incitant à adopter les mesures de prévention adéquates, le législateur espère limiter les cas de violence ou harcèlement, et améliorer en toutes hypothèses le traitement de cette problématique. Parmi ses obligations figure notamment l obligation de désigner la personne de confiance et le conseiller en prévention. La loi prévoit également des sanctions contre l employeur qui ne respecterait pas les obligations mises à sa charge par la loi, sanctions civiles et pénales. Mesures de prévention générales La politique de prévention peut être résumée en trois points : 1. Prévenir la survenance du risque 2. Si le risque survient, éviter le dommage 3. Si dommage il y a, limiter le dommage En vue de réaliser ces objectifs, l employeur est tenu de prendre des mesures portant notamment sur : - l aménagement matériel des lieux de travail - la définition des moyens mis à la disposition des victimes pour obtenir de l aide et s adresser à la personne de confiance ou au conseiller en prévention (voir ci-après) - l accueil, l aide et l appui des travailleurs victimes de faits de violence au travail, de harcèlement moral ou sexuel (VTHMS) - la prise en charge et la remise au travail des victimes - les obligations des dirigeants et de la ligne hiérarchique dans la prévention des faits de VTHMS - l information et la formation des travailleurs - l information du comité de prévention et de protection au travail (CPPT) La loi prévoit spécifiquement l obligation pour l employeur de veiller «à ce que les travailleurs qui sont victimes d actes de violence ou de harcèlement moral ou sexuel 5

au travail, reçoivent un soutien psychologique approprié auprès de services ou d institutions spécialisés» (article 32quinquies). Mesures de prévention concernant les travailleurs en contact avec le public Les travailleurs en contact avec le public sont exposés non seulement aux risques de violence et de harcèlement de la part de leurs collègues ou de leur hiérarchie, mais également de la part des clients, visiteurs, etc. Dans les entreprises et institutions où les travailleurs entrent en contact avec le public, l employeur est tenu de tenir un registres des actes de violence, c est à dire qu il est tenu de noter de façon systématique les déclarations des travailleurs qui estiment être victimes d actes de violence, de harcèlement moral ou sexuel au travail d origine externe à l entreprise. Désignation d un conseiller en prévention Entreprises de moins de 50 travailleurs : L employeur doit faire appel à un service externe pour la prévention et la protection au travail (en abrégé SEPP), qui lui proposera les services d un conseiller en prévention (la liste de ces services est disponible à l adresse http://meta.fgov.be/pg/pgj/frgeep00.htm ). Entreprise de plus de 50 travailleurs : L employeur désigne après accord de l ensemble des membres représentant les travailleurs au sein du CPPT, un conseiller en prévention spécialisé dans les aspects psychosociaux du travail et de la violence et du harcèlement moral ou sexuel au travail. Le conseiller en prévention fait partie : - soit du service interne pour la prévention et la protection au travail de l entreprise ou de l institution - soit d un SEPP (obligatoire si l accord du CPPT n est pas obtenu) Ne peuvent être désignés comme conseiller en prévention que les personnes répondant aux conditions réglementaires de formation et de compétence (voir l arrêté royal du 11 juillet 2002 relatif à la protection contre la violence et le harcèlement moral ou sexuel au travail, articles 16 et suivants). A noter que le conseiller en prévention ne peut être le médecin du travail. 6

(voir également ci-après pour les tâches du conseiller en prévention) Désignation d une personne de confiance L employeur peut également désigner une personne de confiance. Cette désignation n est pas obligatoire. Il peut s agir d un membre du personnel ou d une personne externe à l entreprise, qui doit toutefois répondre également à certaines conditions de formations (voir également ci-après pour les tâches du conseiller en prévention) Sanctions Conformément à l article 81.1 de la loi du 4 août 1996, l employeur qui ne respecte pas ses obligations en matière de prévention, soit qu il ne prenne pas les mesures de prévention appropriées, soit qu il ne désigne pas de conseiller en prévention, peut être poursuivi pénalement. Les sanctions applicables sont les suivantes : - soit un emprisonnement de 8 jours à 1 an - soit une amende de 50 à 1.000 (250 à 5000 après application des décimes additionnels) - les deux peines Par ailleurs, l employeur ou le travailleur qui est condamné à mettre fin à la violence ou au harcèlement, et qui ne le fait pas dans le délai fixé par le juge, est passible des peines suivantes : - soit un emprisonnement de 8 jours à 1 mois - soit une amende de 26 à 500 (130 à 2.500 après application des décimes additionnels) - les deux peines Lorsque aucune poursuite pénale n est entamée, l employeur peut se voir infliger une amende administrative de 250 à 2500. 7

LA PERSONNE DE CONFIANCE, LE CONSEILLER EN PREVENTION Le système mis en place par la loi permet aux travailleurs qui s estimeraient victimes des faits VTHMS de trouver des interlocuteurs indépendants, qui auront pour tâche essentielle de les écouter, et de rechercher avec eux et avec l auteur des faits une éventuelle conciliation. Les tâches et missions de la personne de confiance et du conseiller en prévention sont précisées à l article 8 de l arrêté royal du 11 juillet 2002 relatif à la protection contre la violence et le harcèlement moral ou sexuel au travail. La personne de confiance qui assiste le conseiller en prévention compétent est chargée notamment des tâches suivantes : 1 elle participe à l'élaboration des procédures à suivre en cas de violence, de harcèlement moral ou sexuel au travail 2 elle dispense des conseils, accorde l'accueil, l'aide et l'appui requis aux victimes d'actes de violence, de harcèlement moral ou sexuel au travail 3 elle reçoit les plaintes motivées des victimes de violence, de harcèlement moral ou sexuel au travail et les transmet au conseiller en prévention compétent 4 elle transmet les plaintes motivées visées au 3 au conseiller en prévention compétent Outre les mêmes tâches que celles visées aux points 1 à 3 pour la personne de confiance, le conseiller en prévention est également chargé des tâches suivantes : 1 il collabore à l'analyse des risques visée aux articles 3 et 4 2 il examine les plaintes motivées et propose à l'employeur des mesures pour mettre fin à la violence et au harcèlement moral ou sexuel au travail 3 il procède aux démarches utiles visées à l'article 14 de sorte qu'il puisse être mis fin à la violence et au harcèlement moral ou sexuel au travail 4 il donne son avis sur les services ou institutions auxquelles l'employeur peut faire appel en application de l'article 32quinquies de la loi 5 il ouvre et tient à jour un dossier individuel de plaintes à propos des actes de violence et de harcèlement moral ou sexuel au travail 6 il établit régulièrement un rapport des plaintes motivées à propos des actes de violence et de harcèlement moral ou sexuel au travail, qui se sont produits dans l'entreprise ou l'institution. Ce rapport comporte uniquement des données collectives et anonymes 8

Si comme la personne de confiance, le conseiller en prévention assume une mission d écoute et de conciliation, il est toutefois seul compétent pour le traitement des plaintes motivées. PROCEDURE INTERNE Le travailleur qui s'estime victime de violence, de harcèlement moral ou sexuel dispose de différentes voies d'action internes à l entreprise (c est-à-dire indépendantes de tout recours judiciaire). Le travailleur peut saisir la personne de confiance ou le conseiller en prévention spécialisé dans les aspects psychosociaux du travail. Le conseiller ou la personne de confiance va d'abord assumer un rôle d écoute, et, éventuellement, moyennant l'accord de la victime, tenter une conciliation. A ce stade, aucun rapport n est fait à l employeur, et l on interroge ni les témoins éventuels, ni les personnes du service de la victime. L employeur n est informé que si la victime le demande expressément. En cas d'échec de la conciliation, ou si la conciliation paraît impossible, le travailleur peut déposer une plainte motivée soit auprès de la personne de confiance, soit auprès du conseiller en prévention. Toutefois, la personne de confiance qui reçoit une plainte doit la transmettre au conseiller en prévention, seul celui-ci étant habilité à la transmettre à l'employeur, et à faire des propositions relatives aux mesures adéquates à appliquer. La plainte motivée est la plainte dans laquelle une personne déclare qu elle est victime de faits précis et demande qu une procédure formelle soit engagée (c est-à-dire que la victime met l employeur en demeure de prendre des mesures pour mettre fin aux actes). La notion de plainte motivée n est pas définie par la loi. L article 13 de l arrêté royal du 11 juillet 2002 précise toutefois que cette plainte : - est inscrite dans un document daté - comprend les déclarations de la victime et les témoins éventuels - mentionne le cas échéant le résultat de la conciliation Il est indispensable que la victime indique les raisons pour lesquelles elle se considère victime de faits de violence ou de harcèlement (faits, personnes en cause, documents). Le dépôt de la plainte motivée active également la protection du travailleur contre le licenciement (voir ci-après) 9

Le conseiller en prévention transmet la plainte à l'employeur, qui devra prendre des mesures appropriées pour mettre fin à la violence ou au harcèlement. Si ces mesures s avèrent inefficaces ou inexistantes, le conseiller saisit le Contrôle du bien-être au travail, toujours en concertation avec la victime. Attention, la procédure interne n est en aucun cas un préalable obligé à une éventuelle procédure externe. Le travailleur est donc libre de s adresser directement aux inspecteurs du Contrôle du bien-être au travail, ou même d agir directement en justice. Ce choix dépend évidemment des circonstances (gravité des faits, existence d éléments de preuve, etc.). La procédure interne permet toutefois de se constituer un dossier qui, en cas d échec de la conciliation, s avérera très utile dans le cadre d une procédure judiciaire. PROCEDURES EXTERNES Procédure externe non judiciaire : plainte au Contrôle du bien-être au travail. En cas d échec de la conciliation tentée dans le cadre de la procédure interne, le travailleur peut s'adresser aux inspecteurs du Contrôle du bien-être au travail. Attention, le travailleur n est jamais tenu de recourir au préalable à la procédure interne. Il peur choisir de s adresser directement au Contrôle du bien être au travail. Lorsque le Contrôle reçoit une plainte par téléphone ou par écrit, il envoie un questionnaire au plaignant. Sur base des réponses données, il intervient auprès de l employeur. Si l'intervention du Contrôle du bien-être au travail ne met pas fin aux actes de violence, le Contrôle peut saisir l'auditeur du travail. La saisine de l auditeur est également possible pour la victime elle-même. Procédure externe judiciaire : plainte devant le tribunal du travail Le travailleur peut intenter directement une procédure devant le tribunal du travail. La victime peut demander que le tribunal ordonne à l employeur et à l'auteur de la violence ou du harcèlement de cesser ces comportements : c est l action en cessation. Un travailleur victime d actes de violence ou de harcèlement au travail peut donc assigner non seulement son employeur, mais également un collègue de travail, 10

auteur des faits, devant le tribunal du travail pour obtenir un jugement lui ordonnant de mettre fin à ces actes dans un délai fixé. L employeur ou l auteur des faits qui ne met pas fin au comportement incriminé dans le délai fixé par le juge est passible de sanctions pénales Le travailleur peut également réclamer des dommages et intérêts. Le travailleur qui introduit une procédure judiciaire bénéficie d un partage de la charge de la preuve. La loi prévoit en effet qu il suffit au travailleur d établir devant la juridiction compétente des faits qui permettent de présumer l'existence de violence ou de harcèlement moral ou sexuel au travail, la charge de la preuve qu'il n'y a pas eu de violence ou de harcèlement moral ou sexuel au travail incombe à la partie défenderesse. Le droit d'agir en justice en vue de faire cesser des faits VTHMS est également reconnu aux organisations représentatives des travailleurs (syndicats, organisations interprofessionnelles et professionnelles visées à l article 3 de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives du travail et les commissions paritaires) et aux établissements d utilité publique ou ASBL dont l objet statutaire consiste à assurer la défense des victimes de violence ou de harcèlement au travail. Ces organisations peuvent donc agir pour défendre les intérêts de la victime, sous réserve toutefois de l accord de celle-ci, qu elle ait ou non elle-même agit en justice. Procédure externe judiciaire : plainte devant le tribunal correctionnel La procédure pénale se déroule devant le tribunal correctionnel et a pour but d'infliger des sanctions pénales. Si la victime a porté plainte auprès de la police ou de l'auditeur du travail, une action judiciaire pourra être entamée : si c'est le cas, il n'est plus possible de faire appel au Contrôle du bien-être au travail. LA PROTECTION CONTRE LE LICENCIEMENT En vue de permettre à la personne victime d oser exposer sa situation sans crainte de représailles à l encontre de sa situation professionnelle, la loi prévoit une protection contre le licenciement. Cette protection est prévue dans les cas suivants : 11

- le travailleur a déposé une plainte motivée soit au niveau de l'entreprise ou de l'institution qui l'occupe, soit auprès des fonctionnaires chargés de la surveillance ou pour lequel ces fonctionnaires sont intervenus ; - le travailleur intente une action en justice, ou une action est intentée pour lui, tendant à faire respecter les dispositions légales ; - le travailleur intervient comme témoin dans une procédure interne ou judiciaire relative à des faits de violence ou de harcèlement ; Dans ces cas, l employeur ne peut pas mettre fin à la relation de travail, ni modifier unilatéralement les conditions de travail, sauf pour des motifs étrangers à cette plainte ou à cette action. La charge de la preuve de ces motifs étrangers incombe à l'employeur lorsque le travailleur est licencié ou lorsque ses conditions de travail ont été modifiées unilatéralement dans les douze mois qui suivent le dépôt d'une plainte ou la déposition d'un témoignage. Cette charge incombe également à l'employeur en cas de licenciement ou en cas de modification unilatérale des conditions de travail intervenus après l'intentement d'une action en justice et ce, jusqu'à trois mois après que le jugement soit coulé en force de chose jugée. La loi prévoit également un droit à la réintégration. Lorsque l'employeur met fin à la relation de travail ou modifie unilatéralement les conditions de travail, sans motifs valables (c est-à-dire étrangers aux faits de harcèlement), le travailleur ou l'organisation de travailleurs à laquelle il est affilié, peuvent demander sa réintégration dans l'entreprise ou l'institution dans les conditions qui prévalaient avant les faits qui ont motivé la plainte. A défaut de réintégration ou de reprise dans sa fonction du travailleur dont le licenciement ou la modification unilatérale des conditions de travail ont été jugés contraires aux dispositions légales, l'employeur sera tenu de lui payer une indemnité égale, selon le choix du travailleur, soit à un montant forfaitaire correspondant à la rémunération brute de six mois, soit au préjudice réellement subi par le travailleur (dans ce cas, le travailleur devra prouver l'étendue de ce préjudice). L'employeur est tenu de payer la même indemnité, sans que le travailleur soit tenu d'introduire la demande de réintégration ou de reprise dans la fonction : 1 lorsque la juridiction compétente a considéré comme établis les faits de violence ou de harcèlement moral ou sexuel au travail 2 lorsque le travailleur rompt le contrat en raison de comportements de l'employeur contraires aux dispositions visées ci-avant (modification unilatérale des conditions de travail) qui dans le chef du travailleur constituent un motif de rompre le contrat sans préavis ou avant l'expiration du terme 3 lorsque l'employeur a licencié le travailleur pour un motif grave, à condition que la juridiction compétente ait jugé le licenciement non fondé et contraire aux dispositions de la loi (l employeur a mis fin à la relation de travail ou a modifié 12

unilatéralement les conditions de travail, sans justifier de motifs étrangers à la plainte ou à l action). NOS SERVICES EN TANT QU AVOCATS Préalablement à toute procédure, judiciaire ou non Vous êtes confronté dans votre vie professionnelle à des situations problématiques, vous vous sentez harcelé, mais vous n êtes pas certain que les faits pourraient être qualifiés de violence ou de harcèlement, et vous hésitez pour une raison ou une autre à faire appel d emblée à la personne de confiance ou au conseiller en prévention. Les services que nous pouvons offrir sont les suivants : Nous vous fournirons les explications détaillées et les éclaircissements quant à la portée de la loi du 11 juin 2002 relative à la protection contre la violence et le harcèlement moral ou sexuel au travail, en fonction de votre situation professionnelle particulière. Nous vous conseillerons utilement quant aux éventuelles démarches à entreprendre, et quant à la constitution de votre dossier. Il est par exemple important de conserver copie de tout échange de courrier électronique susceptible de révéler le comportement répréhensible, voire de provoquer une réaction écrite. L opportunité ou non de telles démarches peut être appréciée sereinement, dans le souci de préserver vos intérêts. De même, nous vous assisterons dans la formulation de vos griefs, et dans la rédaction de la plainte motivée. La rédaction de cette plainte est très importante, car elle seule donne droit à la protection légale contre le licenciement. Dans le cadre d une procédure judiciaire Après avoir apprécié l opportunité d une telle procédure, nous pouvons vous assister dans le cadre des démarches judiciaires que vous seriez amené à accomplir, que ce soit devant le tribunal du travail ou devant le tribunal correctionnel. 13

Dans l hypothèse où vous seriez vous-même assigné et vous vous verriez reprocher des faits de violence et harcèlement, nous pouvons assurer votre défense en justice. DOCUMENTATION COMPLEMENTAIRE Textes légaux et réglementaires Texte coordonné de la loi du 4 août 1996 relative au bien-être des travailleurs lors de l'exécution de leur travail (notamment les articles 32 bis à 32 tredecies). Arrêté royal du 11 juillet 2002 relatif à la protection contre la violence et le harcèlement moral ou sexuel au travail (Moniteur belge du 18 juillet 2002) Documentation Brochure "Clés pour... prévenir et lutter contre la violence et le harcèlement moral ou sexuel au travail"; Commentaire juridique de la loi et de l'arrêté royal d'exécution. Rapport d évaluation de la loi loi du 11 juin 2002 relative à la protection contre la violence et le harcèlement moral ou sexuel au travail (juillet 2004) http://meta.fgov.be/pdf/pd/frdd50.pdf 14