Taxe CO 2 et hausse de la charge fiscale sur les carburants: Une catastrophe économique et sociale! OFA/GME, 10.08.2011 1. Conséquences économiques désastreuses a. Risque de hausse généralisée des coûts La hausse du prix des carburants générera une augmentation des coûts de transport, qui se répercuteront alors sur le prix d'autres biens, tels que les biens alimentaires par exemple. D'autre part, une éventuelle redistribution sociale des recettes par le biais de l'assurance maladie réduirait la pression sur les coûts de la santé, qui tendraient alors probablement à augmenter. b. Perte de recettes fiscales Une hausse de la charge fiscale sur les carburants placerait les prix en Suisse largement au-dessus des prix pratiqués par nos voisins européens. De plus, la récente appréciation du Franc face à l'euro renchérit déjà considérablement le carburant en Suisse, de sorte que le prix de l'essence est actuellement jusqu'à 20 centimes moins cher et celui du Diesel jusqu'à 40 centimes moins cher dans les pays limitrophes. 1 Le phénomène du tourisme à la pompe, dont les recettes fiscales sont évaluées à près de 340mio de francs par année 2, risque de diminuer fortement, voire même de s'inverser si les prix suisses sont trop élevés. Non seulement les consommateurs étrangers ne viendront plus faire le plein d'essence en Suisse, mais les consommateurs suisses, aussi bien les habitants des régions frontalières que les vacanciers par exemple, profiteront de s'approvisionner de l'autre côté de la frontière à des tarifs nettement inférieurs. Au total, les pertes de recettes pour la Confédération pourraient s'élever à plus d'un demi-milliard de francs par année. c. Le financement des transports mis en péril Environ 70% des recettes fiscales tirées des impôts sur les carburants servent à financer les besoins de la route et du rail, alors que 30% (environ CHF 1,5mia par an) sont versés dans le budget général de la Confédération. A l'heure actuelle, le compte routier est déficitaire, les réserves seront bientôt épuisées et les besoins financiers des transports ne cessent d'augmenter. Dans cette situation, l'introduction d'une taxe CO 2 sur les carburants constituerait une atteinte grave au système de financement de nos infrastructures routières et ferroviaires, car elle engendrerait une perte de recettes liées au tourisme à la pompe, en plus de réduire la marge de manœuvre de la Confédération pour d'éventuelles augmentations destinées à financer les infrastructures de transport. Il convient de rappeler que le besoin de financement pour la route à l'horizon 2020-1 Selon les données de la FIA du 25.07.2011 (voir annexe). 2 Selon le communiqué de presse de l'ofen du 22 juin 2010. Politique & Economie Chemin de Blandonnet 4 Case postale 820 1214 Vernier / Genève Tél.: 022 417 27 21 Fax: 022 417 27 22 E-mail: gmetrailler@tcs.ch
2030 a déjà été estimé à un supplément de taxe d'environ 22 centimes par litre de carburant. 3 d. Un cercle vicieux d'augmentations Contrairement aux grands pays qui nous entourent, la Suisse est un petit pays pour qui les ventes de carburants dans les zones frontières sont essentielles. Il convient de rappeler également que plus de 85mio de véhicules entrent chaque année dans notre pays. 4 En cas d'augmentation des prix du carburant en Suisse aboutissant à une inversion du tourisme d'essence, on risquerait d'entrer dans un cercle vicieux, car une nouvelle hausse des taxes serait nécessaire pour compenser les pertes dues à la baisse de la consommation au profit des pays voisins. Finalement, ce sont les consommateurs suisses les plus éloignés des frontières qui financeront les infrastructures de transport, alors que les habitants des régions frontalières et les automobilistes étrangers, eux, feront systématiquement le plein à l'étranger. Ils ne paieront ainsi pas un centime à la Confédération, ni pour financer les infrastructures de transport, ni pour les émissions de CO 2. 2. Sans effet pour le climat a. Effet incitatif nul A court terme, l'élasticité-prix de la demande de carburant est pratiquement nulle. 5 Même si à long terme il est possible que l'augmentation des prix de l'énergie ait un impact sur la demande, les consommateurs resteront tributaires de leurs lieux de résidence et de travail, ainsi que du véhicule qu'ils ont acheté. Une grande partie de la population, notamment les résidents des régions périphériques, ne dispose pas de bonnes connexions au réseau des transports publics et est donc clairement dépendante de l'utilisation d'un véhicule privé. Etant donné l'actuelle structure de l'économie et du travail, le manque de logements dans les centres et les pressions démographiques toujours plus fortes, les consommateurs n'ont pas de solution alternative afin de modifier leur comportement. Les hausses de prix antérieures, de 20 à 30 centimes par litre, ont montré que les ventes de carburant ne diminuaient pas. Le principal risque, à long terme, consiste en une recul des ventes en Suisse et à une augmentation derrière nos frontières (inversion du tourisme à la pompe). b. Pas de gains "réels" pour l'environnement Etant donné qu'une hausse des taxes n'a aucun impact sur la consommation de carburants (hormis le fait que de nombreux consommateurs iront faire le plein à l'étranger plutôt qu'en Suisse), la seule source d'efficacité environnementale passe par l'utilisation des recettes fiscales en faveur de projets concrets de réduction des émissions. Or, étant donné qu'il est difficile d'imaginer qu'une hausse des impôts sur les carburants puisse s'ajouter aux augmentations importantes déjà prévues pour financer 3 Message du DETEC relatif à l'élimination des goulets d'étranglement du 11 novembre 2009. 4 Selon les statistiques de l'ofs (2007). 5 On a pu l'observer à maintes reprises, comme par exemple dans les années 1998-2000, lorsque la consommation a augmenté malgré une hausse de prix de 20 à 30 centimes par litre, ou durant la période 2007-2009, alors que le prix variait très fortement, aucune variation de la consommation de carburant n'a été observée. 2/5
l'infrastructure et vu la nature redistributive d'une taxe d'incitation, il ne reste pratiquement aucune marge de manœuvre pour financer des projets environnementaux. c. Compensation des émissions à l'étranger La compensation des émissions uniquement en Suisse renchérit inutilement le coût de réduction, rendant les mesures moins efficaces et faisant subir au consommateur suisse des coûts excessifs. La compensation en Suisse uniquement de 20% des émissions dues aux carburants serait équivalente à un supplément d'environ 7 centimes par litre, alors qu'une hausse de seulement 6 centimes par litre permettrait de compenser 100% des émissions dues aux carburants si on le fait à l'étranger. D'autre part, dans les dix prochaines années, les émissions de CO 2 exploseront dans les pays émergents. C'est pourquoi une lutte efficace contre le réchauffement climatique consiste à intervenir directement où le problème est le plus important. Il convient également de noter qu'à ce jour, il n'existe aucun Etat qui mène une politique climatique fondée uniquement sur des mesures à l'interne. Au terme de la période 2008-2012, la Fondation Centime Climatique aura permis de réaliser 75% des engagements pris par la Suisse dans le cadre de Kyoto. Environ 80% de ces réductions sont réalisés à l'étranger et représentent 35% du budget total, alors que les 20% réalisés en Suisse représentent plus de 65% des dépenses. 6 Au regard de l'efficacité de la Fondation Centime Climatique, tant au niveau environnemental qu'économique, il est nécessaire de poursuivre avec un système similaire pour la période 2012-2020. 3. Socialement inacceptable a. Coup dur pour les actifs et les habitants des communes rurales Les personnes les plus dépendantes de leur véhicule privé sont les habitants des régions périphériques et des ceintures d'agglomérations. Ce sont ces groupes-cibles qui seront les plus durement touchés par une hausse de la charge fiscale sur les carburants, contrairement aux habitants des centres urbains qui disposent de bonnes connexions au réseau des transports publics. Les coûts supplémentaires liés à une hausse du prix des carburants sont deux fois plus élevés pour les habitants des communes rurales que pour ceux des centres villes, et trois fois plus élevés pour les personnes actives que pour les personnes non-actives. 7 b. Redistribution inappropriée La redistribution du produit de la taxe élimine tout espoir de réduire efficacement les émissions de CO 2. Les mesures climatiques ne doivent pas être détournées et constituer un remède à d'autres problèmes, tels que les coûts de la santé. En effet, le but premier de la politique climatique doit demeurer la réduction des émissions de CO 2 ; il ne s'agit pas subventionner les primes d'assurance maladie au détriment de l'économie et en réduisant à néant l'efficacité environnementale de l'instrument. 6 Chiffres tirés du rapport annuel de la Fondation Centime Climatique 2010. 7 Evaluation basée sur les distances parcourues selon le Microrecensement 2005 (OFS). 3/5
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Annexes: a. Tableau de comparaison des prix du carburant dans les pays limitrophes de la Suisse Taux de change (07.08.2011) : 1CHF = 1,10 EUR Carburant Suisse Allemagne France Italie Autriche Sans Pb. 1.73 CHF 1.75 CHF 1.66 CHF 1.75 CHF 1.52 CHF 95 Diesel 1.83 CHF 1.62 CHF 1.46 CHF 1.61 CHF 1.46 CHF Source: FIA (25.07.11) 5/5