Les opérations militaires européennes Marchés et Concurrences entres Etats souverains



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Informations générales

Transcription:

Université Panthéon Assas (Paris II) Master Professionnel de Défense, géostratégie et dynamique industrielle Année universitaire 2005 Les opérations militaires européennes Marchés et Concurrences entres Etats souverains Mémoire préparé sous la direction de Monsieur le docteur Jean-François Daguzan Le 13/09/2006 Alexandre Papaemmanuel

Je tiens à remercier pour leur coopération et pour l intérêt qu ils ont porté à cette étude le Général Thonier, Commandant de la Force multinationale intérimaire d urgence, le Colonel Pollus, Commandant du Groupement Tactique InterArmes multinationale basée à Bunia, le Lieutenant-colonel de Bordelius officier du CEMA chargé de la communication de l opération Artémis et M. Charles. Je tiens également à remercier ma tutrice de stage, Sylvie Migdal ainsi que toute l équipe de l International Business Development d EADS DCS et de la direction commerciale Défense France pour la confiance qu ils m ont accordée durant ces 10 mois ainsi que pour l expérience et la connaissance partagées. Je tiens enfin à remercier Anne-Charlotte pour ses relectures plus qu attentives et sa patience. 2

Sommaire INTRODUCTION... 4 CHAPITRE I - LES OPERATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX : QUEL MARCHE?... 14 SECTION I - LE MARCHE ONUSIEN... 14 SECTION II - LE MARCHE OTANIEN... 23 CHAPITRE II - LES OPERATIONS MILITAIRES EUROPEENNES : UNE POLITIQUE SANS MOYENS?... 29 SECTIONS I- UN ETAT MAJOR A GEOMETRIE VARIABLE... 29 SECTION II LA PESD COMPLEMENT COERCITIF A UNE DIPLOMATIE PREVENTIVE... 40 SECTION III LA PESD, UNE COOPERATION AU BILAN MITIGE... 49 CHAPITRE III - LES OPERATIONS MILITAIRES EUROPEENNES : QUI DECIDE?... 63 SECTION I- LA PESD AU SERVICE D ORGANISATIONS INTERNATIONALES... 63 SECTION II -LA PESD AU SERVICE D INTERETS NATIONAUX... 84 CONCLUSION... 104 BIBLIOGRAPHIE... 106 ANNEXES... 110 TABLES DES MATIERES... 166 3

Introduction La récente crise du Liban ainsi que la crise qu a traversé la République démocratique du Congo lors de ses premières élections démocratiques, ont toute deux interrogées les récents efforts en matière de politique européenne de sécurité et de défense. Les pays européens arrivent encore difficilement au compromis permettant une position commune, préalable indispensable à une Europe forte et responsable, parlant d une seule et même voie. Cependant, les trois dernières opérations militaires européennes, Concordia, Artémis et Althéa sont les réussites les plus récentes et les plus visible d une PESD qui se veut ambitieuse. L Union Européenne, au processus d intégration dans un premier temps civil, est ainsi devenue militaire, premier pas vers le véritable développement d une Europe politique. Les politiques de l Union Européenne dépassant le cadre du possible, deviennent alors «l art de l impossible, car modifiant les paramètres mêmes de ce qui est considéré comme possible dans la constellation existante» 1. Il y a encore cinq ans, ces opérations militaires ne pouvaient être envisageables. Celles-ci sont le résultat d un long processus composé de nombreuses étapes au cours desquelles la souveraineté des Etats s est souvent révélée comme un frein au processus d intégration. En effet, suite au refus français du projet de Communauté Européenne de Défense au début des années 1950, la coopération étroite en matière politique à travers l intégration militaire, fut écartée de l Agenda de l Union pendant près de quarante ans. La Communauté Politique Européenne crée en 1970, n ayant pas réussi à imposer la Communauté Economique Européenne comme un acteur essentiel en matière de 1 Slovaj Zizek, Plaidoyer en faveur de l intolérance, Castelnau-le-lez, édition Climats, Collection Sisyphe, 2004, p.41. 4

sécurité européenne, cette fonction fut alors pendant de nombreuses années, dévolue à l Alliance de l Atlantique Nord. En 1983, la France décida de réactiver l Union de l Europe Occidentale (UEO) pour servir de cadre à l affirmation d une identité européenne de défense, puisque celle-ci était depuis 1955, la seule organisation permettant la rencontre des ministres de la Défense et des Affaires étrangères des Etats membres hors de l enceinte de l OTAN. La France, le Benelux, l Italie, l Allemagne et le Royaume-Uni, réunis au sein de l Union Européenne Occidentale, ayant fait le constat de la nécessité d une Europe plus cohérente en matière de sécurité, devait aboutir suite à la chute du mur de Berlin, aux désaccords entre les Etats pro-atlantistes et les Etats désireux d accorder à l Union Européenne l élaboration de la politique européenne de sécurité et de défense. La question de la défense européenne devait donc à nouveaux diviser les Etats européens. Un retard qui s explique selon Stanley Hoffmann, car l Union Européenne telle Sisyphe 2, voit apparaître à chaque étape de sa construction, de nouveaux problèmes et de nouveaux handicaps, dus notamment au poids des Etats dans la construction européenne. Cependant le 7 février 1992, les Etats membres à travers leurs chefs de gouvernement, signèrent le Traité de Maastricht, élargissant le champs de la coopération aux questions de sécurité, en remplaçant le concept de Coopération politique européenne (CPE) par celui de Politique étrangère de sécurité commune (PESC), à partir de laquelle, les Quinze pourront développer une Politique européenne de sécurité et de défense. Le Traité instituant la Communauté ouvrant la voie à cette union politique, sera confirmé par l article 17 du Traité d Amsterdam, qui prévoit le 7 octobre 1997 que «la politique étrangère et de Sécurité commune inclut l ensemble des questions relatives à la sécurité de l Union, y compris la 2 Stanley Hoffmann, The European Sisyphus. Essays on Europe 1964-1994, Oxford, Westview Press, 1995, p. 6. 5

définition progressive d une politique de défense commune». L Union économique devait enfin aboutir à une totale intégration politique. Une «Communauté de sécurité» au sein de laquelle les différends se gèrent pacifiquement entre Etats membres semble être établie. L Union Européenne apparaît comme le symbole et le porte parole du multilatéralisme incarnant l expression d une certaine «société internationale» c est à dire «un groupe d Etats, conscients de certains intérêts communs et de valeurs communes [ ] qui se considèrent liés par un dispositif commun de règles dans leurs relations mutuelles et qui oeuvrent au sein d institutions communes» 3. Mais ces organisations internationales doivent être comprises dans une conception large, comme le remarque Stanley Hoffmann, puisqu «il s agit de toutes les formes de coopération entre les Etats, tendant à faire régner par leur association, un certain ordre dans le milieu international, crée par la volonté et fonctionnant dans un milieu dont les Etats sont les personnes juridiques majeures» 4. L Europe, cet objet politique non identifié, souhaite jouir des mêmes attributs que les Etats-Nations qui la composent. L Union, disposant d un drapeau, d un hymne, d une monnaie et bientôt d une frontière, comme le révèle le débat autour de l adhésion de la Turquie, souhaite acquérir l attribut ultime de l Etat : la puissance militaire. Car si l Europe apparaît comme pacifiée, les récents conflits en Europe rappellent que le risque de guerre est intrinsèque aux relations internationales et seule la puissance armée, dont les Etats sont l unique dépositaire, permet d assurer leur préservation. L alliance d Etats partageant un but politique commun est alors fragile face aux risques de conflits, 3 Hedley BULL, The Anarchical Society. A Study of Order in World Politics, New York, Columbia University Press, 3 ème édition, 2002, p. 13. 4 Stanley Hoffmann, Organisation Internationales et pouvoir politiques des Etats, Paris, Armand Colin, p. 4. 6

puisque le système international structurellement anarchique, n a pour unique certitude qu un égoïsme réciproque. L école réaliste en déduit que le seul intérêt susceptible d animer le comportement politique des Etats réside dans leur volonté de survivre 5. Dans ce cadre insécurisé, la coopération entre Etats ne peut alors être totale, car selon Kenneth Waltz, les relations internationales sont régies par le «self help system». Pourtant les opérations militaires européennes démontrent que l Union politique, bien qu encadrée par l intergouvernementalité qui régit le deuxième pilier, peut devenir effective lorsque les Etats partagent une volonté commune, rendue nécessaire par des intérêts partagés. En effet, comme le fait remarquer le Conseil de l Europe, «en agissant ensemble nous sommes plus forts» car «il n y a pas de problème que nous puissions résoudre seuls» 6. L intergouvernementalisme de Stanley Hoffmann apparaît comme la théorie la plus adaptée pour étudier l intégration européenne, puisqu elle aborde les mécanisme qui conduisent les Etats à s associer pour répondre de manière efficiente à leurs besoins communs. Cependant, si les Etats ont accepté de concéder au cours de l intégration européenne, la gestion de la «low politic», la «high politic» incarnée par la défense et la diplomatie, demeure plus délicate à communautariser, car touchant à un domaine au cœur de leur souveraineté étatique. Dans ce sens, ces opérations militaires symbolisent l ambition politique de l Union Européenne, désireuse d acquérir une puissance comparable à celle de l hégémonique Amérique. Mais si l Union Européenne affiche ce désir de puissance, 5 John J. Mearsheimer The False Promise of International Institutions, International Security, volume 19, numéro 3, hiver 1994, p. 10. 6 Conseil Européen, Stratégie européenne de Sécurité, in De Copenhague à Bruxelles : les textes fondamentaux de la Défense Européenne, compilé par Antonio Missirolli, Les Cahiers de Chaillot n 67, décembre 2003, p.332. 7

«il est alors sous entendu qu il s agit seulement [ ] de la volonté du nombre d Etats nécessaire pour que l organisation puisse» 7 le formuler. La Stratégie européenne de Sécurité affiche cette ambition : «l Union Européenne et les Etats-Unis peuvent constituer une formidable force au service du bien dans le monde» 8. Cette ambition politique ne peut transiter que par une étude des opérations militaires. Comme le souligne M. Vennesson, «la défense est liée à la construction et à l évolution des Etats, à la sociologie de la citoyenneté, à la politique extérieur, à la puissance internationale et à la guerre, ils intéressent directement l existence et le devenir des communautés politiques» 9. Les opérations Concordia, Artémis et Althéa portent toutes trois les phantasmes d une Union Européenne devenue politique et ont chacune leurs spécificités permettant d interroger la véritable autonomie politique de l Union Européenne face à des instances telles que l OTAN. L opération Concordia fut déployée le 18 mars 2003 en Ancienne République Yougoslave de Macédoine 10. L Union Européenne était préalablement intervenue dans cette aire géographique pour une mission de police. Pour sa première opération militaire, l Union Européenne est intervenue en Ancienne République Yougoslave de Macédoine, suite à la demande du Président Macédonien, pour remplacer le contingent de l OTAN présent dans le cadre de l opération Allied Harmony. Vingt-six pays, dont l ensemble des pays membres de l Union Européenne, exceptés le Danemark et l Irlande ont pris part à cette opération, qui mobilisa un contingent de 350 soldats. Cette 7 Stanley Hoffmann, Organisation Internationales et pouvoir politiques des Etats, Paris, Armand Colin, p. 5. 8 Conseil Européen, «Stratégie européenne de Sécurité», in De Copenhague à Bruxelles : les textes fondamentaux de la Défense Européenne, compilé par Antonio Missirolli, Les Cahiers de Chaillot n 67, décembre 2003, p.332. 9 Pascal Vennesson, «Introduction», Politique de défense : institutions, innovations, européanisation, sous la direction de Pascal Vennesson, Paris, l Harmattan, 2000, p.17. 10 cf. Annexe X 8

opération s est appuyée en plus des moyens des pays membres, sur les capacités de planification et logistique de l OTAN, dans le cadre des accords dits de «Berlin plus». La seconde opération militaire européenne, l opération Artémis, a été mise en place de façon autonome par l Union c'est-à-dire sans l assistance de l Alliance. Elle a été déclenchée au printemps 2003, afin de répondre à la situation d urgence dans laquelle se trouvait la ville de Bunia. Cette ville située dans la région Ituri au Nord Est de la République Démocratique du Congo 11 connaît depuis quatre ans de nombreuses violences interethniques entre milices armées Lendues et Hemas. Ces affrontements ont causé plus de 50000 morts et ont provoqué le déplacement de plus de 500000 personnes. L opération Artémis, ayant acquis officiellement un statut européen le 6 juin 2003 12 et ayant pris fin le 1 er septembre 2003, fut mandatée par la résolution 1484 13 du Conseil de Sécurité des Nations-Unies, pour rétablir la sécurité en région Ituri et permettre ainsi la consolidation de la Force onusienne, la MONUC étant déjà présente sur le théâtre. A travers la «Force multinationale intérimaire d urgence» déployée à Bunia, l opération Artémis est la première opération européenne prenant place hors du continent européen. La troisième opération militaire de l Union se déroule sur le continent européen et renoue avec le partenariat européano-atlantiste. En effet, l opération Althéa est l opération européenne la plus ambitieuse tant du point de vue du nombre de soldats européens mobilisés, 7000 hommes, que du budget qu elle sollicite, 71,7 millions d euros, que sur le plan politique, puisqu elle souhaite pacifier la Bosnie Herzégovine 14. L European Union Force de l opération Althéa a relevé le 2 décembre 2004, la Stabilisation Force (SFOR) de l OTAN présente depuis décembre 1995, date de la fin 11 cf. Annexe XI 12 cf. Annexe VIII 13 cf. Annexe V 14 cf. Annexe XII 9

de la guerre civile en Bosnie Herzégovine. Cette opération a, comme les opérations lui ayant précédé, pour base légale une résolution de l Organisation des Nations-Unies. Ces trois opérations militaires sont donc le fruit de la collaboration entre une multitude d acteurs qu ils soient supranationaux comme l Organisation des Nations Unies, l Alliance Atlantique Nord et l Union européenne ou qu ils soient nationaux comme la France, le Royaume Unis et les autres pays contributeurs. De ce fait, l analyse des interactions que les multiples acteurs de l opération ont eu au sein d une même organisation permettra de savoir si la volonté voire l autorité d un des acteurs ne s est pas imposée aux autres. Ces opérations, présentées comme un modèle réussi de coopération européenne dans le cadre onusien, n ont-elles pas été le cadre de rapports de force non avoués entre les différents acteurs et ce à tous les niveaux organisationnels? L étude de ces opérations militaires permettra également de révéler les différentes motivations des acteurs y ayant pris part. Elle s attachera à appréhender la coopération entre ceux-ci, rendue nécessaire par la convergence commune des actions vers un but unique. Il semble enfin essentiel d analyser la marge de manœuvre dont ont disposé les acteurs sur le terrain par rapport à une organisation militaire souvent perçue comme lourde et pesante. Un des enjeux, pour aborder les différentes interrogations que suscitent ces opérations, était de rencontrer les principaux acteurs de ces opérations, et notamment ceux de l unique opération militaire européenne autonome, le Général Neveux, commandant de l opération ainsi que le Général Thonier, commandant de la «Force multinationale intérimaire d urgence» déployée sur le terrain. Cela est apparu indispensable pour appréhender leurs vécus et leurs perceptions personnelles de l organisation mise en place pour la réalisation de l opération. Cependant, la prise de contact avec ces acteurs s est révélée très délicate. En effet, il convenait de recevoir tout 10

d abord, une première approbation du Chef d états-majors des Armées françaises pour pouvoir ensuite adresser directement une demande d entretien aux intéressés. Le Général Thonier a montré un vif intérêt à cette étude, tout comme le cabinet du Général Neveux qui s est finalement rétracté après avoir initialement annoncé la possibilité d un entretien. Le matériau principal, à partir duquel est fondée cette étude, est donc un entretien avec le Général Thonier, réalisé à Nantes le 23 avril 2004. Le caractère récent de cette opération, achevée le 1 er septembre 2003 15, a rendu difficile la collecte d autres matériaux. Des difficultés qui ont pu être tempérées grâce à la rencontre des différents acteurs de cette construction européenne mais également otanienne rendue possible par mes fonction d adjoint au Business Development en charge des affaires Otan, Européennes et Onu puis en tant qu assistant commercial au sein de la direction commerciale d EADS Défense et Communisation Systèmes. Outre le caractère récent de ces opérations en prise avec l actualité et les enjeux européens et mondiaux, comme la question de l élaboration d une défense européenne, ces opérations portent en elles d autres intérêts. Quels enjeux représente ce nouveau marché des opérations de maintien de la paix? Quelles concurrences industrielles et politiques se livrent les différents Etats au sein des différentes institutions internationales collégiales telles que l Otan et l Onu? Quels rapports de force cristallise la PESD au sein d une organisation supranationale telle que l Union Européenne? De même, scientifiquement elle permet d aborder également la constitution d une chaîne de commandement originale partant d instances européennes pour se voir appliquer aux théâtres d opération. Dans le domaine plus sociologique, elle permet de comprendre la réorganisation du rôle des armées nationales lors d interventions européennes et d interpréter la réaction des acteurs, issus de ces mêmes armées, face à cette évolution. 15 cf. Annexe II 11

En effet les nations contributives, demandent à leurs armées, lorsque ces dernières agissent dans le cadre européen, de voir ainsi leur rôle, leur responsabilité, leur champ d action, leur prestige et leur contrôle partagés entre les différents pays contributeurs. Les possibles divergences de perception au sein d une chaîne de commandement complexe ont sans doute motivé le choix de cet objet d étude. De plus, le caractère audacieux de ces opérations, dans un contexte international où l unilatéralisme est de plus en plus décrié par l Union Européenne, donne tout son sens à l étude des opérations Concordia, Artémis et Althéa. Car l Union Européenne, comme le Concert Européen n est peut être qu un «syndicat intermittent.conciliant les intérêts des Grands quand les Grands jugent la conciliation utile» 16 comme le remarque Charles Dupuis. Les opérations militaires Européennes portent-elles une réelle ambition politique partagée par les Vingt-cinq ou n est elle qu une politique «d ex-puissances mondiales de second rang [ ] craignant de se voir réduits, une fois complètement intégrés dans le nouvel Empire global émergeant, au même niveau que le Luxembourg» 17? Cette étude portant sur les opérations militaires de l Union, aborde les défis de l intégration et de la multinationalisation induites par le caractère européen de cette mission, première étape vers l effectivité d une politique européenne de sécurité et de défense commune. La PESD étant dans son volet militaire, une politique encore récente n ayant permis la réalisation que de trois opérations, son examen théorique sera complété par une approche plus empirico-descriptive. 16 Stanley Hoffmann, Organisation Internationales et pouvoir politiques des Etats, Paris, Armand Colin, p. 16. 17 Slovaj Zizek, Que veut l Europe?,édition Climats, Collection Sisyphe, Castelnau-le-lez,2005, p.195. 12

Dès lors, il conviendra dans un premier chapitre, d étudier les tensions et concurrences économiques induites par l expansion du marché des opérations de la paix pour étudier dans un second chapitre, de quelles manières les opérations Concordia, Artémis et Althéa permettent le développement tangible d une culture militaire européenne afin, de déterminer dans un dernier chapitre qu elles institutions sont au centre de l élaboration de la politique européenne de sécurité et de défense. 13

Chapitre I - Les opérations de maintien de la paix : Quel Marché? «Les opérations de maintiens de la paix, plus qu un marché, un véritable positionnement» Hervé Guillou, CEO d EADS DCS Derrières les louables déclarations d intentions en faveur de la multiplication des opérations internationales de maintien de la paix, au profit d un ordre mondial multilatéral, se cachent également des intérêts plus tangibles et moins avouables. En effet les opérations de maintien de la paix représentent désormais un marché pour lequel les états et les industriels s affrontent férocement, via leurs représentants nationaux respectif, présents dans les différentes organisations internationales. Ainsi les Nations Unies (I), comme l OTAN (II) représentent des marchés cibles que les industriels ne peuvent plus se permettre d ignorer. Section I - Le Marché Onusien Les Nations Unies gèrent actuellement 16 missions de maintien de la paix, alors qu elles n étaient qu une poignée au début des années 90. Le marché des opérations de maintiens de la paix, géré tantôt de façon centralisé par le service central des achats de l ONU (C) tantôt de façon décentralisée directement par les opérations (D), est en pleine expansion (A). Pourtant les entreprises françaises ne sont pas encore totalement sensibilisées à ces nouvelles opportunités commerciales et doivent donc faire face à une virulente concurrence internationale (B). 14

A. Les besoins croissants des missions de maintien de la paix Le centre de gravité des conflits et des opérations de maintien de la paix s est déplacé vers le continent africain qui accueille neufs de ces missions ; trois nouvelles opérations ont été déployées en Afrique depuis 2004, l ONUCI en Côte d Ivoire, l ONUB au Burundi et la MINUS au Soudan, tandis que la MONUC en République Démocratique du Congo, et la MINUL présente au Libéria, montaient en puissance. La BINUSIL a quant à elle été déployée en 2006 en Sierra Leone. 1. Besoins croissants des opérations de maintien de la paix La multiplication du nombre d opérations de maintien de la paix et leur complexité croissante, ont conduit à un renforcement des ressources destinées aux opérations de maintien de la paix, aussi bien en termes humains que matériels. En effet, le coût des opérations de maintien de la paix a augmenté depuis la fin des années 90 pour atteindre actuellement 5 milliards USD 18, en comptant les dernières rallonges budgétaires d 1,1 milliard USD débloquées pour la République démocratique du Congo, de 970 millions USD pour le Soudan, Haïti et la Côte d Ivoire. Les déploiements de personnels ont suivi une évolution parallèle. Les effectifs militaires et de police civile atteignent ainsi 70 000 personnes (soit 14 000 casques bleus de plus qu en juin 2004) et le record historique de 73 000 personnes pourrait être dépassé prochainement, en raison du possible redéploiement de la FINUL au Liban. En comptant les personnels civils, l effectif total en opérations de maintien de la paix sur le terrain atteint 85 000 personnes. Enfin, les dépenses d approvisionnement pour de telles opérations ont atteint un record historique en 2004 en dépassant un milliard de dollars (1,117 milliard USD). 18 crédits ouverts pour la période 1er juillet 2005 30 juin 2006 15

2. L approvisionnement des missions sur le terrain Afin de pouvoir être fournisseurs des opérations de maintien de la paix, les sociétés doivent non seulement approcher le siège des Nations Unies à New York, mais également se faire enregistrer auprès des missions sur le terrain, qui disposent de leur propre budget. En effet, les opérations de maintien de la paix disposent d une large autonomie en termes d approvisionnement, non seulement en raison des ressources humaines limitées du Service des achats 19 de New York où une soixantaine de personnes seulement gèrent un budget d approvisionnement de près de 1,4 milliard USD, mais également car l échelon local peut être parfois plus rentable notamment quant aux économies de coûts de transport. Le siège des Nations Unies est chargé de l approvisionnement des opérations de maintien de la paix au moment de leur déploiement en fournissant du matériel standardisé. L UNPS est alors responsable du lancement des appels d offres et de la contractualisation avec les fournisseurs, pour le compte du Département des opérations de maintien de la paix, ce dernier agissant comme prescripteur. En revanche, le processus d achats est décentralisé une fois les missions devenues opérationnelles, chaque opération de maintien de la paix étant habilitée à s approvisionner elle-même, directement sur place ou à l étranger, en lançant des appels d offres au niveau local. Le niveau d autonomie des opérations en matière d approvisionnement se situe généralement dans une limite de 200 000 USD par type de produit et par an. Chaque mission peut par ailleurs, utiliser les contrats à long terme négociés par UNPS pour la fournitures informatique, de climatiseurs, ou de rations alimentaire, selon son bon vouloir, si bien que des missions préfèrent utiliser leur budget pour se procurer du matériel qu elles auront elles-mêmes choisie. 19 UNPS : United Nation Procurement Service 16

En 2004, les missions se sont approvisionnées directement depuis le terrain pour un total de 462 millions USD, soit 42% des achats globaux relatifs aux opérations de maintien de la paix. Les sociétés qui souhaitent vendre aux opérations de maintien de la paix sur place doivent se manifester auprès du Chief Administrative Officer, responsable des achats dans chaque mission. B. Les concurrents de la France sur les marchés de l ONU La France s est située en troisième position des pays fournisseurs de l ONU en 2004, avec une part de marché de 4,8% (ventes de 310,1 millions USD dont 89% de biens). Les principaux concurrents de la France sur les marchés de l ONU ont été en 2004, dans l ordre décroissant, les Etats-Unis, la Belgique et l Italie (1), un classement qui peut trouver son origine dans la localisation géographiques des Agences de l ONU (2). 1. Les principaux concurrents de la France sur les marchés de l ONU Les Etats-Unis restent leader dans l approvisionnement aux Nations Unies, car même si le volume de contrat passé avec l ONU a décrû entre 2000 et 2003, leurs ventes ont connu une hausse de 10% en 2004 (8% en 2003 pour 408,7 millions USD). La Belgique, qui avait doublé ses ventes entre 2002 et 2003, conserve sa seconde position avec une part de 4,9% de l approvisionnement (314,9 millions). Cependant, dans un contexte de forte hausse des achats des Nations Unies (+26,4%), les ventes belges ont très peu progressé (+2%). Ces ventes sont principalement constituées par la vente de biens à hauteur de 93%, contrairement aux ventes américaines qui sont constituées quant à elle, à 41,8% de biens et à 58,2% de services. L Italie est passée du second rang à la quatrième place des principaux fournisseurs de l ONU entre 2002 et 2004. L Italie est suivie par le Royaume-Uni, cinquième partenaire commercial des 17

Nations Unies avec 3,2% de part de marché (209,1 millions USD, dont la moitié de services). En 2004, l Inde et l Afghanistan étaient respectivement les sixième et septième fournisseurs de l ONU avec des ventes respectives de 199,4 et 196,6 millions USD en 2004. Quant à la Suisse, elle a été en 2004 le huitième partenaire commercial des Nations Unies (2,7% des achats), juste devant la Russie (2,7%) et le Danemark (2,6%). 2. Facteurs explicatifs et rôle de la localisation des agences de l ONU Les principaux pays fournisseurs des Nations Unies sont traditionnellement les pays développés, qui disposent d une part de marché correspondante à celle occupée dans le commerce mondial. Toutefois, l Allemagne est un contre-exemple car ses ventes à l ONU ne reflètent en rien son potentiel commercial. En effet, bien que premier exportateur mondial en valeur, c est à dire 10% du commerce mondial, l Allemagne n est pourtant que le seizième fournisseur des Nations Unies avec 1,5% de part de marché. Au-delà du critère de la puissance commerciale, la localisation géographique des agences Onusiennes aux Etats-Unis, en Italie ou en Suisse, offre à certains pays fournisseurs un accès privilégié aux marchés des Nations Unies. Ainsi, le Service des achats des Nations Unies (UNPS), basé à New York, est responsable à lui seul de près de 60% des ventes américaines à l Onu. Les deux principaux organismes basés à Rome le Food and Agriculture Organisation et le Programme Alimentaire Mondial, ainsi que la Base Logistique de Brindisi, totalisent le tiers des ventes de l Italie aux Nations Unies en 2004, tandis que les deux tiers des ventes helvétiques sont concentrées sur quatre agences établies à Genève (OMPI, ONUG, OMS, HCR). Le Danemark profite également de la localisation à Copenhague de bureaux d approvisionnement décentralisés et d entrepôts de plusieurs organismes des Nations Unies (UNICEF, UNOPS, FNUAP, IAPSO ). 18

L apparition de l Afghanistan dans le classement des 10 premiers partenaires de l ONU en 2004, ventes de 196,6 millions USD, est due à la présence de nombreux programmes des Nations Unies dans le pays depuis 2002. Quant à la Belgique, sa performance remarquable sur les marchés des Nations Unies peut s expliquer par sa spécialisation dans la filière pharmaceutique, ses principaux clients étant les agences qui achètent essentiellement des médicaments, des vaccins et des seringues : PAHO, FNUAP et UNICEF. C. L UNPS et l approvisionnement pour le maintien de la paix Le volume des achats destinés aux opérations de maintien de la paix a doublé en deux ans, passant à plus de 1,4 milliard de dollars en 2005. L approvisionnement des missions dépend du Service des achats de l ONU à New York qui passe les commandes (2) pour le compte du Département des opérations de maintien de la paix (1). 1. Le Département des opérations de maintien de la paix définit les besoins Directement rattaché au Secrétariat général de l ONU, le Département des opérations de maintien de la paix gère aujourd hui, dix huit opérations de maintien de la paix, dont cinq lancées entre 2003 et 2005. Le Département dirige les opérations des missions et est responsable de leur appui logistique et administratif. La Division du soutien logistique est chargée de définir les ressources nécessaires à la bonne exécution des opérations de maintien de la paix : type de matériel requis, quantités et spécifications techniques des équipements. Cette division prescrit les achats pour les opérations sur le terrain, tandis que les contrats sont effectivement attribués par le Service des achats, pour l essentiel depuis New York. 19

2. et le Service des achats des Nations Unies (UNPS) passe commande C est en effet UNPS qui est habilité à émettre des appels d offres et passer commande pour le compte du Département des opérations de maintien de la paix, qui définit les besoins logistiques. Lorsque UNPS lance un appel d offres pour ce Département, ce dernier étudie le volet technique des soumissions, tandis que le Service des achats évalue la partie commerciale et financière. Une fois que le Département a fait ses recommandations concernant les offres qui remplissent les critères techniques, seules les propositions ayant passé ce premier filtre technique sont transmises au Service des achats, qui attribue le marché selon le critère de Best Value (pour les RFP) ou au moins-disant (pour les ITB) et s occupe de la contractualisation avec le fournisseur. Environ 90% des achats de UNPS sont destinés aux opérations de maintien de la paix, le solde allant à l approvisionnement du siège des Nations Unies à New York et d autres organes de l ONU (Commissions régionales, Tribunaux internationaux, bureaux de Genève, Vienne, Nairobi et missions spéciales). La majorité de l approvisionnement de UNPS pour le maintien de la paix est effectué depuis New York et une partie est réalisée directement sur le terrain, notamment par les procurement officers de UNPS déployés en mission (l autonomie d achats y est limitée à 200 000 USD par type de produit par an). 3. Devenir fournisseur du Service des achats de l ONU Les sociétés non encore enregistrées auprès du Service des achats doivent demander leur référencement au registre (Roster) des fournisseurs potentiels de UNPS. En effet, ses appels d offres sont fermés car UNPS ne consulte que les sociétés préalablement présente dans son fichier, à la différence des demandes d Expression d Intérêt, ouvertes, destinées à identifier de nouveaux fournisseurs potentiels. Ainsi, 20