Le système de santé belge: du mouvement mutualiste aux institutions de la sécurité sociale dans un État pluraliste



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Le système de santé belge: du mouvement mutualiste aux institutions de la sécurité sociale dans un État pluraliste Article original William D'hoore Université catholique de Louvain Sabine Stordeur Université catholique de Louvain Résumé : Dans cet article, nous donnons un aperçu de l'histoire du système de santé belge, en orientant notre propos sur la sécurité sociale et particulièrement sur l'assurance maladie-invalidité. Celle-ci est née bien après la constitution de l'état, en 1831. L'initiative de citoyens, regroupés en mouvements mutualistes et syndicaux, a surtout visé la protection sociale et a dominé son développement, jusqu'à la fin de la seconde Guerre mondiale. Entre 1944 et 1970, l'état a joué un rôle considérable dans l'extension de la protection sociale, dont l'accès aux soins à la majorité de la population, avec l'instauration d'une assurance maladie-invalidité obligatoire. Par la suite, la réforme de l'état (fédéralisation) a entraîné l'éclatement du système de santé et a rendu celui-ci extrêmement complexe. La sécurité sociale se retrouve dans une phase de remise en question: ciment de l'état belge, sans doute, mais aussi objet de critiques relatives à son efficience, elle nécessite de profondes réformes. Mots clés : Histoire, mutuelles, Belgique, système de santé, assurances sociales. Introduction La Belgique, petit État situé au cœur de l'europe occidentale, compte 10 millions d'habitants sur une superficie de 30000 km 2. Elle comprend 60 % de néerlandophones et 40 % de francophones, majoritaires (85 %) à Bruxelles, ainsi qu'une mince proportion de germanophones (moins d'un pour cent). Les tensions entre néerlandophones (les Flamands) et francophones (les Wallons) ont nécessité la transformation d'un État unitaire depuis 1830 en un État fédéral, entre la fin des années 1960 et le début des années 1990. La fédéralisation de l'état rend très ardue une présentation simple du système de santé, où Ruptures, revue transdisciplinaire en santé, vol. 10, n 1, 2004, pp. 71-85.

72 William D'hoore et Sabine Stordeur la sécurité sociale apparaît encore comme un ciment de l'état, mais aussi un enjeu des revendications des Communautés en présence. En Belgique, le système de santé présente trois caractéristiques fondamentales : (1) une conception libérale de la médecine, puisque la plupart des prestataires de soins sont indépendants, payés à l'acte, et jouissent de la liberté diagnostique et thérapeutique ; (2) un régime d'assurance obligatoire pour les soins de santé dont la gestion fait l'objet d'une importante concertation entre les différents acteurs du secteur (organismes assureurs, professionnels de la santé, payeurs, autorités publiques); et, (3) le libre choix des patients, tant en ce qui concerne le prestataire de soins que l'établissement de soins (privé ou public), ce qui implique également le libre accès au médecin spécialiste. Le système de santé belge repose sur le principe de solidarité puisque, d'une manière générale, les cotisations demeurent proportionnelles aux revenus des affiliés tandis que les remboursements sont les mêmes pour tous, sauf pour les groupes sociaux les plus vulnérables, pour lesquels ils sont majorés. Le régime d'assurance-maladie obligatoire fait partie intégrante du système de sécurité sociale belge. 1. Naissance de l'assurance sociale : quelques repères Au cours de la seconde moitié du XIX e siècle, l'europe vit naître les premières assurances sociales. Quatre caractéristiques les distinguent de l'assurance privée : le caractère obligatoire, le mode de financement mixte (assurés, employeurs, avec une intervention plus ou moins grande de l'état), la non-sélection des risques : tous les risques considérés comme sociaux peuvent affecter le capital du travailleur (sa force de travail), l'abandon de la proportionnalité stricte entre cotisations et prestations. À partir des assurances sociales, la sécurité sociale proprement dite se constituera en englobant une partie de plus en plus importante de la population, en couvrant un nombre de plus en plus large de risques sociaux, et en regroupant les différentes institutions jusqu'à introduire le principe d'une cotisation et d'une affiliation uniques (Service public fédéral sécurité sociale, 2003). Le tout reposait et repose encore sur le principe de la solidarité, réalisée par la redistribution d'un revenu collectif, communautaire aux origines, puis national : ceux qui travaillent paient pour ceux qui ne travaillent pas ou plus (pas de constitution d'un capital individuel). Si, en période de prospérité, ce principe ne comportait pas de désavantage, son application paraît plus difficile aujourd'hui pour le maintien d'un équilibre entre recettes et dépenses, en raison du chômage, de la crise économique, du vieillissement de la population et du développement technologique (European Observatory on Health Care Systems, 2000). Les principales étapes de l'instauration du système de sécurité sociale peuvent être groupées en trois périodes : le XIX e siècle, l'entre-deux-guerres et la période contemporaine, depuis la seconde Guerre mondiale. Au cours des années 1844 à 1890, les premières formes d'assurance sociale dignes de ce nom furent créées (marins naviguant sous pavillon belge, ouvriers mineurs, création de la Caisse générale d'épargne et de retraite, sociétés d'assistance mutuelles). Des reliquats de cette période existent encore aujourd'hui:les régimes de sécurité sociale des marins et des mineurs dérogent au régime général. La protection des travailleurs salariés s'est rapidement développée. En 1903, la loi sur les accidents de travail fut votée en introduisant un principe révolutionnaire : la disparition de la notion de faute et donc, des jugements de responsabilité. L'employeur, objectivement responsable des accidents de travail (apparition de la notion de responsabilité sans faute), il ne

Le système de santé belge:du mouvement mutualiste aux institutions de la sécurité sociale dans un État pluraliste 73 fallait plus prouver une erreur de la part de celui-ci pour pouvoir bénéficier d'indemnités. En 1927, une loi apparentée à l'assurance obligatoire en matière de maladies professionnelles et l'indemnisation forfaitaire des victimes de maladies professionnelles fut votée. Vers la même époque (1930) fut instauré un système légal d'allocations familiales:l'employeur était tenu de s'affilier à une caisse dite «de compensation pour allocations familiales», afin de tenir compte plus équitablement de la diversité des situations des travailleurs. Deux lois, en 1924-25, introduisirent l'assurance vieillesse obligatoire pour tous les salariés (par capitalisation individuelle, système abandonné plus tard, au profit d'un mécanisme de redistribution). Le 28 décembre 1944, un arrêté-loi a instauré le régime général de la sécurité sociale applicable à tous les travailleurs salariés, à l'exception des mineurs, marins et travailleurs du chemin de fer qui bénéficient d'un régime propre. Cet arrêté-loi rendit obligatoire l'assurance maladie-invalidité et l'assurance chômage, en plus de l'assurance vieillesse, de l'assurance contre le décès prématuré, des allocations familiales et des vacances annuelles. C'est donc assez tardivement que l'assurance-maladie est devenue obligatoire, en Belgique. Depuis 1945, l'évolution de la sécurité sociale se caractérise surtout par une extension de la couverture, en particulier dans les années 1960, aux travailleurs indépendants et aux personnes sans travail (chômeurs, étudiants, personnes handicapées, membres de communautés religieuses). Actuellement, l'assurance-maladie couvre la quasi-totalité de la population : les travailleurs salariés et assimilés, les travailleurs indépendants et assimilés, les autres catégories (étudiants, handicapés, personnes non encore protégées), ainsi que les ayants droit des personnes précitées. Il convient d'observer que les travailleurs indépendants ne bénéficient de prestations de l'assurance soins de santé que pour les gros risques (soins hospitaliers et services médicaux spécialisés). 2. Au centre de l'assurance soins de santé :les mutuelles Le régime d'assurance-maladie est administré par une centaine de mutualités regroupées en cinq unions nationales (voir infra) chargées, entre autres, des prestations de l'assurance obligatoire et du remboursement des paiements à l'acte. Les mutualités s'organisent suivant des affiliations confessionnelles ou idéologiques catholique, socialiste et libérale. L'affiliation à une mutualité demeure obligatoire pour les salariés, les travailleurs indépendants et les retraités, mais le choix de la mutualité reste libre. Les mutuelles représentent un intermédiaire dans le système de l'assurance Maladie Invalidité (AMI). Soit elles remboursent les frais des prestations aux bénéficiaires (soins courants), soit elles payent directement les prestataires par un mécanisme de tiers payant (soins spéciaux, p.ex. l'hospitalisation). 3. Naissance du mouvement mutualiste Le XIX e siècle fut marqué par des bouleversements économiques engendrés par la révolution industrielle. Celle-ci entraîna l'apparition d'une classe sociale tirant sa subsistance du louage de sa force de travail, exposée conséquemment aux vicissitudes physiques et économiques qui peuvent affecter la force de travail, si bien décrites par Zola. Dans ce contexte d'insécurité apparut un nouveau principe de cohésion sociale, à savoir la solidarité. Celle-ci se manifesta, d'abord, par la création de sociétés mutualistes qui devinrent les mutuelles et se concrétisa, plus tard, par l'assurance sociale. Les mutuelles trouvent leurs origines dans les initiatives des travailleurs eux-mêmes, à la fois assureurs et assurés (Leblanc et Poucet, 1989). Chacun mettait une petite somme dans la caisse commune ; avec cette caisse, les travailleurs aidaient ceux d'entre eux qui tombaient malades ou victimes d'un accident de travail. Les règles de cotisation et de répartition étaient édictées par les membres

74 William D'hoore et Sabine Stordeur eux-mêmes. Des avantages étaient accordés aux membres en cas de maladie, de retraite ou d'autres circonstances liées au contrat de travail, mais aussi en cas de destruction des récoltes ou de perte du bétail. Les mutuelles ont toujours été constituées comme des associations professionnelles et parfois même comme des syndicats, officiellement interdits, jusqu'en 1866. Vers la fin du XIX e siècle, elles prirent une orientation politique ou confessionnelle, en se liant aux syndicats et aux grands courants idéologiques présents en Belgique. Trois événements ont favorisé leur essor : la reconnaissance légale (1851), assortie d'une tutelle administrative si lourde, que peu de sociétés mutuelles la demandèrent ; la facilité de se fédérer «sans abdiquer leur autonomie» pour assurer en commun certains services, consacrée en 1894 par une loi qui, cent ans plus tard, fut remplacée par la loi de 1990 (Moniteur belge du 28/09/1990), encore en vigueur aujourd'hui (voir infra) ; et le soutien financier, facultatif, accordé par l'état (lois de 1898 et de 1912). De 1900 à 1945, les mutuelles ont développé et structuré leur réseau et, très tôt, ont débattu sur l'opportunité de rendre obligatoire le système de couverture des risques en matière de maladie. Cinq unions nationales de fédérations ont vu le jour, entre 1906 et 1920 : l'alliance (sic) nationale des mutualités chrétiennes, l'union nationale des mutualités neutres, l'union nationale des mutualités socialistes, l'union nationale des mutualités libérales, l'union nationale des mutualités libres et professionnelles. Ces unions nationales ou organismes assureurs (OA) regroupent aujourd'hui une centaine de fédérations de mutuelles qui rassemblent plus d'un millier de mutuelles reconnues. Les mutualités chrétiennes et socialistes demeurent les plus importantes quant au nombre de leurs membres, représentant 75 % de la population belge. Elles sont suivies, dans l'ordre, par les mutualités professionnelles, neutres et libérales. L'assurance-maladie est restée libre jusqu'en 1944. Le principe en vigueur jusqu'à cette date était celui de la liberté subsidiée : tout en n'imposant pas au travailleur l'obligation de s'assurer, le système de l'assurance «libre subsidiée» encourageait le recours à l'assurance par l'octroi de subventions à charge de l'état. Ce principe impliquait un effort de prévoyance et la jouissance de revenus suffisants. Pour surmonter ces obstacles, le pacte social de décembre 1944, sorte de grand accord social entre le patronat et le salariat, a rendu obligatoire l'assurance maladie invalidité (Leblanc et Poucet, 1989). Les termes de ce pacte ont été négociés, durant la période de guerre. Du côté des travailleurs et des employeurs, les socialistes étaient partisans d'une structure unitaire à gestion paritaire, afin de consolider le financement et de rationaliser le fonctionnement du régime. Les catholiques exigeaient le maintien du pluralisme, en gage du respect de la liberté d'association et de conscience. Le gouvernement en exil s'intéressa moins à élaborer des réformes fondées sur une ligne directrice solide qu'à se tenir au fonctionnement du système belge de décision politique : pratique du compromis, institutionnalisation des négociations entre interlocuteurs sociaux et généralisation des dispositions déjà acquises. Les mutuelles ne furent pas véritablement associées au débat. Un consensus se forma cependant autour et au sein des mutuelles qui représentaient une force institutionnelle considérable. En Belgique, contrairement à la France par exemple, les mutuelles furent intégrées dans le système de sécurité sociale (secteur maladie et invalidité) en conservant une certaine autonomie et leur identité. La liberté d'affiliation fut conservée de la manière suivante : l'employeur remet au travailleur un «bon» certifiant que les cotisations sociales ont été versées à l'office national de la sécurité sociale (ONSS, organe central de perception et de redistribution des recettes), et le travailleur doit remettre ce «bon» à la mutuelle de son choix. Pour les personnes qui ne sont pas affiliées à une mutuelle libre, l'état a créé sa propre mutuelle, la Caisse

Le système de santé belge:du mouvement mutualiste aux institutions de la sécurité sociale dans un État pluraliste 75 auxiliaire d'assurance maladie invalidité (CAxAMI). Celle-ci compte très peu de membres et est régulièrement citée comme un mauvais exemple de mutuelle publique. 4. Depuis 1944, une série de réformes marquantes Depuis 1944, trois dates ont marqué l'évolution de l'histoire des mutuelles. En 1963, le secteur «indemnités» a été séparé du secteur «soins de santé», ce qui a permis d'étendre la seule assurance soins de santé à toutes les couches de la population (indépendants et étudiants). Un système de négociation médicomutualiste (unique au monde) a été introduit, de manière à assurer le remboursement des prestations correspondant à des honoraires effectivement pratiqués. Ce système de négociation réunit des représentants des mutuelles et des médecins, qui s'entendent sur les barèmes et tarifs des actes ainsi que sur le remboursement de ceux-ci au patient (c'est la «nomenclature»). Enfin, l'état a pris à sa charge la presque totalité du financement des maladies sociales (cancer, poliomyélite, tuberculose). L'année 1974, deuxième date importante, concorde avec le début de la crise économique. À partir de cette date, les efforts de développement de l'assurance-maladie ont été freinés. Pour terminer, 1982 est l'année où des accusations de fraudes et de malversations se sont multipliées et ont été portées sur la scène médiatique. Les attaques et les enquêtes ont révélé que les intérêts des sommes placées n'étaient pas comptabilisés dans les recettes. Ces anomalies, non contestées d'ailleurs, provenaient en partie de l'absence d'une réglementation claire mais, à partir de ce moment, les mutuelles ont essuyé une perte partielle de leur légitimité. 5. La situation actuelle Quel est le rôle actuel des mutuelles? Les mutuelles ont trois grandes fonctions : le remboursement des prestations, le paiement des indemnités, la participation à la gestion de l'assurance maladie invalidité, le contrôle médical. En ce qui concerne le remboursement des prestations, chaque Union nationale (organisme assureur ou OA) reçoit de l'institut national d'assurance maladie invalidité (INAMI) les sommes qui lui reviennent en fonction de ses dépenses de l'année précédente. Les sommes reçues par l'inami sont perçues par l'onss sous la forme de cotisations des employeurs, de cotisations des travailleurs et de subventions de l'état. Depuis 1995, le financement des OA s'effectue sur un mode normatif, comparativement aux dépenses des autres OA (actuellement, 25 % de la somme sont attribués sur base «normative», les 75% restants sont attribués sur base des dépenses réelles). En gros, cela signifie que les recettes dépendront de ce que l'oa aurait dû dépenser, en fonction des caractéristiques sociales de ses affiliés (âge, sexe, statut social des affiliés, proportion de chômeurs de longue durée, revenus des affiliés, composition du ménage, urbanisation et mortalité). Chaque Union nationale répartit les sommes entre ses fédérations. Celles-ci les répartissent à leur tour entre leurs sociétés mutualistes qui paient les prestations aux bénéficiaires. Depuis 1993, les mutuelles endossent une responsabilité réelle en ce qui concerne la gestion des ressources qui leur sont attribuées: l'oa dont le bilan affiche un déficit peut être tenu et se doit de prélever une cotisation supplémentaire auprès de ses membres pour constituer une réserve (somme assez modique s'élevant à quelques euros), et l'oa doit puiser dans ses réserves, en cas de pertes. En pratique, cette responsabilité n'est assumée que depuis peu de temps. Si par contre il reste de l'argent, la mutuelle doit constituer une réserve légale puis, si les sommes sont suffisantes, accorder des avantages sociaux supplémentaires à ses membres. Les comptes ne doivent toutefois pas rester en parfait équilibre. Deux tirelires permettent aux mutuelles de conserver les boni. La première, la «caisse des frais d'administration» (recettes = environ 5 % des dépenses de l'ami,

76 William D'hoore et Sabine Stordeur soit 19 milliards de BEF, en 1989 [475 millions d'euros]), sert à récompenser la bonne gestion administrative. Les boni sont acquis pour la mutuelle. La deuxième constitue la «caisse de l'assurance complémentaire» couvrant l'hospitalisation, la location de matériel médical, les petits risques des indépendants, les frais d'enterrement,... (recettes = environ 12 milliards de BEF, en 1986 [300 millions d'euros]). Elle est un reliquat de la fonction initiale (première) des mutuelles, l'assurance libre, qui a survécu au compromis de 1945 sur l'assurance maladie invalidité obligatoire. Bien que contrôlée par le ministère des Affaires sociales, qui vérifie si l'argent n'est pas utilisé à des fins non sociales, cette caisse offre aux mutuelles le moyen d'accumuler d'énormes capitaux. Les cotisations complémentaires permettent aux mutuelles d'accorder à leurs membres une série d'avantages: transport en ambulance, soins infirmiers à domicile, séjours de convalescence, location d'un lit spécial, d'une voiturette pour handicapés, classes de neige pour enfants, etc. Mais la plus grande partie de l'assurance complémentaire sert au financement des hôpitaux et des polycliniques qui appartiennent aux mutuelles. Les mutuelles ont toujours cherché à être propriétaires d'hôpitaux et de polycliniques pour contrôler le prix des soins, les actes médicaux y compris. Cette volonté de contrôle des prix est d'ailleurs source de conflit entre le corps médical et les mutuelles, chacun reprochant à l'autre de vouloir défendre ses propres intérêts. Une troisième partie des revenus de l'assurance complémentaire est affectée à des dépenses de prestige (avantages sans réelle finalité sociale) et à la création d'associations sans but lucratif de soutien à des mouvements extérieurs à la mutuelle (mouvements d'éducation permanente, Mouvement Ouvrier Chrétien, journaux, aide au Tiers-Monde,...). Outre ce rôle d'organismes payeurs, les mutuelles participent à la gestion administrative et financière de l'inami. En effet, des représentants des mutuelles siègent au Conseil général de l'inami, au Comité de gestion du Service des soins de santé et au Comité de gestion du Service des indemnités. Les mutuelles tiennent également un rôle essentiel dans la détermination du tarif des actes médicaux. Leurs représentants siègent en effet aux négociations des conventions médico-mutualistes. Enfin, les mutuelles remplissent une fonction importante dans la politique de santé, car elles sont impliquées à des niveaux divers à la prise de décision (instances de consultation, comme le Conseil national des établissements de soins ou la Commission de programmation, par exemple). Enfin, les mutuelles jouent un rôle de contrôle : elles veillent à ce que les prestations de soins remboursées par l'ami se conforment réellement aux règles de la «nomenclature». Ce contrôle s'exerce aussi sur le versement d'indemnités d'incapacité de travail. Les mutuelles possèdent trois sources de pouvoir : leur autonomie, leurs liens plus ou moins étroits avec les partis politiques, conséquence de leur assujettissement idéologique ou confessionnel et le volume de leurs ressources. Ce pouvoir s'exerce plus ou moins directement sur la vie politique et sociale de la Belgique, principalement en matière de politique de santé. Il se manifeste aussi dans d'autres secteurs ou institutions dont le point commun demeure l'intérêt politique. La loi de 1990 a révisé le contenu de la loi de 1894. Selon le texte, les mutualités sont des associations sans but lucratif «de personnes qui, dans un esprit de prévoyance, d'assistance mutuelle et de solidarité, ont pour but de promouvoir le bien-être physique, psychique et social». Le rôle des mutuelles s'est donc élargi, mais un organe de contrôle a été créé simultanément pour limiter d'éventuelles dérives. Ces dernières années, de nombreuses initiatives ont émané des mutuelles : contrats avec des établissements hospitaliers (forme allégée de «managed care» à travers, par exemple, des initiatives qui visent à encourager la mise en place de l'assurance qualité en contrepartie d'une réduction du ticket modérateur du patient), publication d'enquêtes comparatives sur les prix pratiqués dans les différents établissements, exportation du modèle dans les pays en développement, etc. Les mutuelles proposent et expérimentent des solutions pour faire face à la croissance des dépenses. Elles effectuent leurs propres analyses coût/efficacité et des analyses de disparités régionales de consommation de soins (Van Den Oever, 1997). Le développement de sites internet, qui décrivent parfois les avantages spécifiques octroyés par une mutualité, donne aussi l'impression au citoyen de se trouver

Le système de santé belge:du mouvement mutualiste aux institutions de la sécurité sociale dans un État pluraliste 77 dans un marché concurrentiel. Parallèlement à la réforme de l'état (voir infra), le rôle des mutuelles dans la politique de santé est devenu moins «visible». Le citoyen belge témoignerait d'un «attachement sans illusion» à ses mutuelles (enquête INUSOP de 1988, citée par Leblanc et Poucet, 1989). 6. Particularité de l'environnement institutionnel belge :l'éclatement de ses instances décisionnelles Alors que la Belgique offrait, depuis 1831, un exemple de stabilité, le paysage politique belge a vécu des bouleversements majeurs, au cours des trente-cinq dernières années. Au terme d'une réforme entamée en 1970 et non encore achevée à l'heure actuelle, le nouvel État fédéral a été instauré en vue de rencontrer, par des révisions de la Constitution, les exigences linguistiques, idéologiques et économiques des Belges. 1968-1971 : Première grande réforme de l'état En 1970, se déroule la première étape du processus de réforme des institutions. De nouvelles structures sont introduites entre l'état central et les provinces. La Constitution est modifiée pour reconnaître l'existence de trois communautés culturelles et de trois régions. L'existence des communautés est basée sur la notion de langue et de culture. Puisque la Belgique connaît trois langues officielles (le néerlandais, le français et l'allemand), le pays est composé de trois Communautés : la Communauté flamande, la Communauté française et la Communauté germanophone. La Communauté française exerce ses compétences dans les provinces wallonnes, déduction faite des communes germanophones, et à Bruxelles ; la Communauté flamande exerce ses compétences dans les provinces flamandes et à Bruxelles; la Communauté germanophone exerce ses compétences dans les communes de la région de langue allemande, toutes situées dans la province de Liège. Les compétences des Communautés sont rattachées aux matières liées aux personnes comme la culture, l'enseignement, l'emploi des langues et les matières dites «personnalisables» qui comprennent, d'une part, la politique de santé (médecine préventive et curative) et, d'autre part, l'aide aux personnes (la protection de la jeunesse, l'aide sociale, l'aide aux familles, l'accueil des immigrés,...). En 1970, trois régions sont également créées, dotées chacune d'un territoire et appelées à agir surtout dans le domaine économique. Du nord au sud, on parle de la Région flamande, de la Région de Bruxelles-Capitale et de la Région wallonne. Les Régions belges sont comparables, jusqu'à un certain point, aux états américains et aux Länder allemands. Les Régions exercent leurs compétences dans les domaines qui touchent à l'occupation du «territoire» tels que l'économie, l'emploi, le logement, ou l'aménagement du territoire. 1980-1983 : Deuxième grande réforme de l'état C'est en 1980 qu'a lieu la deuxième réforme de l'état poursuivant alors le travail entamé en 1970. Les Communautés gèrent de plus des matières qui touchent directement aux personnes telles que la santé et l'aide sociale. Ces Communautés sont dotées chacune d'un Conseil (un parlement) et d'un Exécutif (un gouvernement). 1988-1989 : Troisième grande réforme de l'état En 1988-89, une nouvelle révision de la Constitution et de nouvelles lois de réformes institutionnelles sont adoptées. Les compétences des Communautés et des Régions sont élargies, et les institutions de la Région de Bruxelles- Capitale sont installées. Les Communautés se voient attribuer, notamment, l'enseignement, tandis que les Régions reçoivent, entre autres, les travaux publics et le transport. Cette réforme a cependant été partielle : de nombreuses et très importantes exceptions en faveur de l'autorité fédérale ont été prévues. 1993-1994 : Quatrième grande réforme de l'état Depuis 1993, l'article 1 er de la Constitution indique que «La Belgique est un État fédéral qui se compose des Communautés et des Régions». Cela signifie que le pouvoir se trouve réparti entre

78 William D'hoore et Sabine Stordeur des collectivités qui se situent au même niveau que l'autorité fédérale. Les six entités fédérées, à l'instar de l'autorité fédérale, sont toutes dotées d'un parlement et d'un gouvernement qui adoptent des normes de même valeur : les normes législatives des Régions (appelées «décrets» en Flandre et en Wallonie ou «ordonnances» à Bruxelles) et des Communautés (appelées «décrets») sont équipollentes aux lois adoptées par le législateur fédéral (Lagasse, 2003). 2001 :Accords du Lambermont et de la Saint-Polycarpe Une nouvelle réforme institutionnelle a élargi les compétences des Régions en matière d'agriculture, de pouvoirs locaux et de commerce extérieur et réformé le financement des Communautés. 7. Répartition des compétences en matière de santé entre l'état fédéral, les Communautés et les Régions Si, en 1960, la politique de la santé était entièrement élaborée et appliquée par les autorités nationales d'un pays encore unitaire, la fédéralisation progressive de la Belgique a conduit à un morcellement des compétences entre les nombreuses autorités publiques chargées d'établir et de gérer la politique de santé. Le processus de fédéralisation du pays n'a pas d'incidence très sensible sur le système d'assurance-maladie obligatoire:comme celui-ci fait partie du système de sécurité sociale, il est resté sous la responsabilité du gouvernement fédéral. En revanche, la responsabilité de certains autres aspects des soins de santé a été transférée aux Communautés et aux Régions. Il s'agit en particulier des soins préventifs, de l'éducation sanitaire et de la mise en œuvre de différentes décisions prises au niveau fédéral, comme les initiatives concernant le nombre et la capacité des hôpitaux (OCDE, 1999). a. L'autorité fédérale L'autorité fédérale est compétente principalement dans des matières touchant à l'intérêt général de toute la population, comme la sécurité sociale et une partie importante de la santé publique. En matière de santé, la compétence de l'autorité fédérale est exercée par le ministre de la Santé publique, le ministre des Affaires sociales et par l'entité administrative que constitue le ministère des Affaires sociales, de la Santé publique et de l'environnement (MASSPE, 2003). L'autorité fédérale exerce sa compétence quant aux politiques pour dispenser les soins dans les institutions de soins et en dehors de celles-ci, dans les domaines suivants : la législation organique (exemple : loi sur les hôpitaux,...), y compris le financement ; l'assurance obligatoire soins de santé ; la fixation des règles de base relatives à la programmation et à l'agrément des infrastructures et des équipements médicaux lourds ; la détermination des conditions et de la désignation comme hôpital universitaire conformément à la législation sur les hôpitaux ; des matières relatives aux médicaments, à l'exercice de la médecine et à l'aide médicale urgente. b. Les Communautés et les Régions Les Communautés française, flamande et germanophone ainsi que la commission communautaire commune à l'égard des institutions bilingues situées sur le territoire de la Région de Bruxelles-capitale restent compétentes pour les «matières personnalisables», tant dans le domaine de la politique de la santé (à l'exception de ce qui relève des compétences de l'autorité fédérale) que dans celui de l'aide aux personnes. En ce qui concerne la politique de santé, elles demeurent compétentes : en matière de politique pour dispenser les soins dans et en dehors des institutions

Le système de santé belge:du mouvement mutualiste aux institutions de la sécurité sociale dans un État pluraliste 79 de soins, à l'exception de ce qui relève des compétences de l'autorité fédérale ; en matière de promotion de la santé, d'activités et services de médecine préventive, à l'exception des mesures prophylactiques nationales. Les Communautés et Régions peuvent aussi : fixer les conditions d'agrément des maisons de repos pour personnes âgées, des centres de coordination de soins et services à domicile, des maisons médicales (associations de santé intégrée), des services de santé mentale ; agréer les hôpitaux généraux et psychiatriques dans le respect des normes d'agrément fédérales ; agréer les maisons de repos et de soins (MRS : centres d'hébergement de long séjour pour personnes âgées en perte d'autonomie), les maisons de soins psychiatriques (MSP) et les habitations protégées pour patients psychiatriques (HP) dans le respect des normes d'agrément fédérales ; appliquer les règles de base relatives à la programmation des hôpitaux, MRS, MSP et HP. Il existe, dans les Régions wallonne et flamande, des départements des Affaires sociales et de Santé publique responsables de la prévention, de l'éducation sanitaire, de l'application des normes d'agrément pour les hôpitaux, de la planification et des soins à domicile aux personnes âgées. La Région de Bruxelles est divisée en trois entités : la Commission de la Communauté française (COCOF), la Commission de la Communauté flamande (COCON) et la Commission de la Communauté bilingue (COCOM). 8. Implication de la répartition des compétences entre l'autorité fédérale et les entités fédérées La gestion de la politique de santé est, dispersée, entre diverses autorités ministérielles, ce qui ne facilite pas l'instauration d'une politique de santé cohérente, d'autant que les tensions politiques persistantes ne concourent pas à assurer la stabilisation des structures fédérales (Duriez et Lequet-Slama, 1998; Leclercq, 1998). Quelques exemples permettront de mesurer l'ampleur de cette difficulté de gestion : a. dans la Région bruxelloise, six entités autonomes sont habilitées à intervenir en matière de politique de santé et d'enseignement : l'état, les Communautés française et flamande, la commission communautaire commune et les commissions communautaires française et flamande. En pratique, les Bruxellois se voient appliquer les décrets de l'une ou de l'autre Communauté, en fonction de l'appartenance communautaire de l'institution à laquelle ils ont eu recours. En matière d'enseignement, par exemple, les parents devront se conformer aux décrets de la Communauté flamande, s'ils ont décidé d'inscrire leur enfant dans une école flamande. Si un autre de leurs enfants suit les cours dans l'enseignement francophone, ils seront tenus, en ce qui concerne ce second enfant, de respecter les décrets de la Communauté française. b. la fixation des règles de base relatives à la programmation et au financement des infrastructures et des équipements ainsi que les dépenses de fonctionnement des hôpitaux relèvent de la compétence de l'état fédéral. Par contre, les décisions individuelles d'accorder tel ou tel équipement, d'agréer une extension de la capacité d'un hôpital ainsi que le financement des investissements hospitaliers relèvent d'une compétence communautaire. c. au plan de l'enseignement infirmier, pas moins de huit niveaux de compétence cohabitent: le ministre francophone de l'enseignement

80 William D'hoore et Sabine Stordeur supérieur pour les études d'infirmière graduée en Communauté française; le ministre francophone de l'éducation pour les études d'infirmière brevetée en soins hospitaliers ; les ministres germanophones et néerlandophones pour les études d'infirmière graduée et brevetée de ces deux régimes linguistiques ; et, le ministre fédéral de la santé. L'enseignement étant aujourd'hui communautarisé, on forme actuellement, en Communautés française et germanophone, une infirmière graduée en trois ans et une infirmière spécialisée en quatre ans, alors qu'en Communauté flamande, une infirmière graduée «spécialisée» (sur base d'option) est formée en trois ans (ou en quatre ans, si les établissements scolaires eux-mêmes financent la quatrième année), leur ministre de l'enseignement refusant de financer une quatrième année de spécialisation en enseignement de plein exercice. d. tout prestataire de soins souhaitant exercer son activité en Belgique doit être agréé par l'autorité fédérale. En 1996, le gouvernement fédéral a décidé de freiner la croissance de l'offre de soins (médecins, kinésithérapeutes, dentistes...) décrite comme abondante et considérée comme responsable de la croissance des dépenses de santé. La limitation du nombre de candidats ayant accès à la profession et à la pratique médicale dans le cadre de l'assurance obligatoire soins de santé s'est imposée comme solution afin d'équilibrer l'offre et la demande. Les ministres de la Santé publique et des Affaires sociales prennent les décisions alors que la Communauté fixe les quotas. La fixation des différents critères et des modalités de sélection des candidats au niveau des facultés est laissée à l'appréciation des Communautés (il s'agit actuellement d'un examen d'entrée dans les universités flamandes et, dans les universités francophones, d'un visa délivré après la troisième année d'études calculé sur la base du mérite académique et de la motivation du candidat). Le numerus clausus fixé par le gouvernement fédéral entraîne une réduction du nombre de médecins admis à la formation spécialisée plus marquée en Communauté française (environ 50% par rapport au nombre moyen de diplômés au cours des années antérieures) qu'en Communauté flamande (environ 35 %), alors que les besoins de santé sont plus importants en Wallonie et que le nombre de médecins à remplacer y est plus élevé (Deliège et Boniver, 2000). Cette répartition «partagée» de compétences exclusives conduit naturellement les responsables des différents niveaux de pouvoir à tenter d'harmoniser leurs politiques, que ce soit au sein du comité de concertation véritable forum de discussion intergouvernemental ou des différents comités interministériels qui relèvent de ce dernier. Des accords de collaboration ont été conclus dans de multiples domaines, tels que la politique vis-à-vis des drogues, la vaccination ou le dépistage du cancer du sein. En dépit de la réforme des institutions, qui a transféré certaines compétences en matière sociale aux Communautés et aux Régions, la sécurité sociale reste une matière nationale (ou fédérale), relevant de la compétence du ministère des Affaires sociales. Cette structure paraétatique à caractère unitaire constitue aujourd'hui le dernier ciment de la Belgique fédéraliste et la principale cible des exigences confédéralistes, voire séparatistes. Or, des considérations économiques liées à la santé pourraient jouer un rôle déterminant dans l'évolution de ce schéma institutionnel, remettant en cause la solidarité sociale nationale. Les disparités entre consommations de soins de santé au nord et au sud du pays (bien que les rapports d'experts n'offrent pas de base objective pour valider un gradient de consommation...), le déséquilibre entre les ressources et les dépenses de santé en Région wallonne et les transferts entre Régions qui en résultent amènent les partisans d'une fédéralisation accrue de la politique de la santé et de sécurité sociale à s'exprimer (la «fédéralisation de la sécurité sociale» signifie transférer aux entités fédérées les compétences fédérales en la matière, il s'agit d'une dé-fédéralisation ou séparation). En Flandre, des voix s'élèvent pour revendiquer la régionalisation de certains pans de la sécurité sociale, alors que ces perspectives réformatrices ne sont pas nécessairement partagées du côté francophone, où l'accent est mis davantage sur le souci de préserver les solidarités interpersonnelles et interrégionales. Notez qu'il existe en Wallonie des «rattachistes», très minoritaires et peu pris au sérieux, qui verraient fort bien la partie francophone de la Belgique constituer quelques départements additionnels au Nord de la France...

Le système de santé belge:du mouvement mutualiste aux institutions de la sécurité sociale dans un État pluraliste 81 9. Les positions en présence D'une manière générale, les partis flamands affichent la volonté de poursuivre le processus de régionalisation et de communautarisation en cours depuis 1970. Les revendications initiales d'ordre linguistique et culturel font place à de nouvelles demandes d'autonomie en Flandre, dans le domaine économique. Les partis politiques francophones fustigent ces revendications qui préconisent la gestion séparée des retombées économiques à l'heure où la Région flamande jouit d'un contexte socio-économique plus favorable que celui des deux autres Régions. Ils s'opposent également à la fin progressive des logiques de solidarité dont la Flandre a largement bénéficié par le passé. Les principales revendications concernent la «dé-fédéralisation» partielle ou totale, selon les matières et les intervenants, de la sécurité sociale (essentiellement les allocations familiales et l'assurance maladieinvalidité) et de la fiscalité relative aux revenus des personnes physiques et des sociétés. D'autres revendications existent également en matière de justice et de police. Toutes ces matières participent actuellement au champ de compétence fédéral (Lagasse, 2003). Les partis flamands les plus revendicatifs en matière de nouveaux transferts de compétences défendent l'émergence d'un modèle institutionnel qu'ils présentent comme «confédéral»:un système fédéral réservant, dans les faits, une autonomie très large aux Régions et aux Communautés et vidant l'autorité fédérale de l'essentiel de ses compétences actuelles. Du côté francophone, nous constatons un certain attachement à la structure fédérale actuelle. Celui-ci s'explique par la prédominance de l'identité belge sur l'appartenance communautaire, des motivations économiques et le souci de conserver un lien institutionnel avec la minorité francophone de Flandre. Au fil des réformes et des accords entre les différents niveaux de pouvoir, la sphère de compétences de l'autorité fédérale s'amenuise au profit des Régions et des Communautés. Cependant, ce phénomène n'est pas uniquement le fait des acteurs politiques. La Cour d'arbitrage et la section de législation du Conseil d'état ont également eu tendance à favoriser ce mouvement. La Cour d'arbitrage a reconnu une certaine forme de compétence concurrente en matière de sécurité sociale. Au motif que les Communautés peuvent mener des politiques sociales en complément ou en supplément de celles menées par l'autorité fédérale, la Cour a jugé qu'elles pourraient également intervenir dans le secteur de la sécurité sociale, dans les domaines qui auraient été délaissés par l'autorité fédérale. Dans un climat politique très tendu sur la question du monopole de l'autorité fédérale en matière de sécurité sociale, cette jurisprudence risque d'ouvrir la porte à des formes larvées de communautarisation de la matière. D'ores et déjà, la Flandre organise un mécanisme d'assurancedépendance à l'attention des personnes âgées (financement de services d'aides et de soins permettant aux personnes âgées de conserver un certain degré d'autonomie dans leur quotidien). La Communauté française ne dispose pas des moyens financiers suffisants pour mettre sur pied des politiques comparables et c'est en vain qu'elle a sollicité de l'autorité fédérale la mise en œuvre d'un programme analogue, de manière à éviter un régime de soins et d'assistance à deux vitesses dans le même pays (Lagasse, 2003). Conclusion La sécurité sociale a rapidement évolué en Belgique d'un système d'assurances volontaires, sur le principe fondateur de solidarité entre assurés, vers un modèle bismarckien (Veraghtert et Widdershoven, 2003, qui fournissent également une explication historique des divergences de fonctionnement et de structure des caisses maladie belges, néerlandaises et allemandes). L'histoire montre que l'état belge est longtemps apparu comme «suiveur» dans le mouvement initié par les acteurs sociaux, dont les mutuelles ont été et demeurent encore des membres très actifs. Cette politique atténue les conflits, voire les anéantit. La concertation a cependant pour désavantage une lenteur dans les réformes et une complexité croissante du fonctionnement des institutions en raison d'améliorations, pas toujours très efficaces (Marchand, 1997, 2003), qui s'effectuent à petits pas au sein d'un système dont l'essentiel semble immuable.

82 William D'hoore et Sabine Stordeur L'évolution récente de la sécurité sociale montre un métissage entre le modèle bismarckien et le modèle beveridgien (surtout en ce qui regarde le financement 1, mais également en ce qui concerne le rôle des pouvoirs publics). La réforme de l'état qui consiste à répartir les compétences entre l'état, les Communautés et les Régions rend la situation plus complexe encore. Des formules comme les soins intégrés (modèle du SIPA québécois ou du PACE américain), restent très difficiles à mettre en œuvre en Belgique actuellement, en raison d'obstacles culturels et structurels, du morcellement des compétences, du financement à l'acte des soins de santé, de la concurrence entre fournisseurs de soins de santé et de la très faible coordination entre soins de santé et services sociaux (nous émettons cet avis, conscients que l'étude de Lamarche et al. [2001] ait montré la prépondérance de facteurs humains et cliniques pour la constitution des réseaux). En cette fin d'année 2004, le débat sur la fédéralisation de la sécurité sociale demeure ouvert, sans qu'aucun plan précis ne soit présenté par les protagonistes. À nos yeux, le débat semble tourner en rond autour d'une question fondamentale mais aussi très «politicienne» : la solidarité entre des Communautés qui ne se reconnaissent plus comme faisant partie d'une même nation, d'un même peuple, a-t-elle toujours sa raison d'être? Or, d'après les sondages, les citoyens seraient encore en majorité attachés à l'état belge. De plus, les mutuelles ainsi que les syndicats chrétiens et socialistes se disent explicitement en faveur du maintien d'un système fédéral de sécurité sociale. Ils voient par exemple d'un très mauvais œil des projets émanant du patronat flamand qui viseraient à réduire la protection sociale et à faciliter la flexibilité de l'emploi. Le système de santé, où le partage des compétences est le plus fragmenté, est actuellement le lieu d'un débat plus ouvert (Poirier & Vansteenkiste, 2000) : les Flamands ont proposé un plan de fédéralisation des soins de santé (Sociale zekerheid, 2002) mais non des autres branches de la sécurité sociale, plan que certains considèrent comme opportuniste. En effet, comme l'évolution démographique le prévoit, en ne touchant pas aux pensions de retraite, les Flamands pourraient bénéficier de pensions plus élevées et certains transferts financiers pourraient s'inverser à l'horizon 2010-2020. Plus pragmatique, plus technicien, le rapport Peers (1999) propose, à l'échelon fédéral, des réformes visant une rationalisation du fonctionnement du système de santé qui concernent : la disponibilité d'une information sociosanitaire de qualité ; une vision globale et cohérente en matière de santé qui doit servir de cadre de référence pour des politiques de santé elles aussi globales et cohérentes, visant l'équité, l'efficience et la qualité ; un choix des priorités et une prise de décision plus transparents. La Belgique fait partie de l'union européenne dont l'un des objectifs avoués correspond à la promotion d'un niveau élevé de protection sociale. Nous sommes bien loin d'une harmonisation des régimes de sécurité sociale, voire d'un modèle unifié.

Le système de santé belge:du mouvement mutualiste aux institutions de la sécurité sociale dans un État pluraliste 83 Note 1 Au mois d'août 2004, par exemple, l'actuel ministre des Affaires sociales, le ministre Rudy Demotte, a proposé un plan de refinancement de la sécurité sociale, comprenant une cotisation générale de solidarité.

84 William D'hoore et Sabine Stordeur Références Deliège, D., & Boniver, J. (2000). Le numerus clausus. Il est temps d'informer. Louvain Médical, 119, S165-S171. Duriez, M., & Lequet-Slama, D. (1998). Les systèmes de santé en Europe. Paris : PUF. European Observatory on Health Care Systems. (2000). Health Care Systems in Transition Belgium. Copenhagen : Secretariat of the European Observatory on Health Care Systems. Lagasse, N. (2003). Le fédéralisme belge : un exemple de fédéralisme par dissociation Analyse pratique de l'évolution institutionnelle de l'état belge. Conférence sur le statut constitutionnel des régions dans la Fédération de Russie et dans d'autres pays européens. Kazan (Russie), les 11 et 12 juillet 2003. Lamarche, P.A., Lamothe, L., Bégin, C., Léger, M., & Vallières-Joly, M. (2001). L'intégration des services: enjeux structurels et organisationnels ou humains et cliniques? Ruptures, revue transdisciplinaire en santé, 8, 71-92. Leblanc, S.,&Poucet, T. (1989). Les mutualités. Bruxelles: Centre de Recherche et d'information socio-politiques. Leclercq P. (1998). Système de soins de santé. In Institut Belge de l'économie de la Santé (Éds), Aspects socioéconomiques des soins de santé en Belgique (chapitre 1.C). Bruxelles : I.B.E.S. Loi relative aux mutualités et aux unions nationales de mutualités du 6 août 1990, parue au Moniteur belge du 28 septembre 1990. Marchand, M. (1997). Les bases économiques de la situation médico-sociale actuelle. Bulletin et Mémoires de l'académie Royale de Médecine de Belgique, 152 (2), 133-135. Marchand, M. (2003). Notre système de santé est à la croisée des chemins. Regards économiques, 9, 1-12. Ministère des Affaires Sociales, de la Santé Publique et de l'environnement Administration des Soins de Santé (2003). Organisation des soins de santé en Belgique. www.healthfgov.be/vesalius/factory/organisation/ healthcarestructure/ggbossb/ossbf.htm. OCDE (1999). Le système de soins de santé Belgique / Luxembourg. Paris : les Éditions de l'ocde. Peers, J. (1999). Les soins de santé en Belgique Défis et opportunités. Mémoire non publié intitulé aussi «Rapport Peers». Poirier, J., & Vansteenkiste, S. (2000). Le débat sur la fédéralisation de la sécurité sociale en Belgique : le miroir du vouloir-vivre ensemble? In Service public fédéral Sécurité sociale (Éds), Revue belge de sécurité sociale (pp. 331-379). Bruxelles. (http://socialsecurity. fgov.be/bib/index.htm) Service Public Fédéral Sécurité Sociale (2003). Aperçu de la sécurité sociale en Belgique. Bruxelles: Administration de l'information et des Études, Service Public Fédéral Sécurité Sociale. Van den Oever R. (1997). Le rôle des mutuelles dans la modernisation de la sécurité sociale. Bulletin et Mémoires de l'académie Royale de Médecine de Belgique, 152 (2), 137-140. Veraghtert, K., & Widdershoven, B. (2003). Pourquoi les caisses de maladie/ mutualités et l'assurance-soins de santé belges, allemandes et néerlandaises sont-elles si différentes? Une comparaison historique. In Service public fédéral Sécurité sociale (Éds), Revue belge de sécurité sociale (pp. 33-60). Bruxelles. (http://socialsecurity. fgov.be/bib/index.htm)

Le système de santé belge:du mouvement mutualiste aux institutions de la sécurité sociale dans un État pluraliste 85 Abstract In this paper, we provide an historical picture of the Belgian health system, focussing on social security and health insurance. The Belgian social security was born late after Belgium was recognized as an independent state, in 1831. Initiatives of citizens, together within mutualities and trade unions, targeted social protection and ruled its development until the end of second World War. Between 1944 and 1970, the State played a major role in the extension of social protection, including access to care, to most of the population, with a mandatory health insurance. After that, federalization of Belgium resulted in a split and complicated health system. Social security is presently questioned :cement of Belgium, it is also criticized for its inefficiency, and needs deep reforms. Biographies William D'hoore est médecin et docteur en santé publique de l'université catholique de Louvain. Il est actuellement professeur à l'ecole de santé publique de l'université catholique de Louvain. Ses intérêts de recherche incluent le relations entre la gestion des services de santé et la qualité des soins, ainsi que les modèles d'intégration des soins et services de santé. Sabine Stordeur est infirmière, licenciée en administration de la santé et docteur en sciences de la santé publique (Université catholique de Louvain). Elle a mené une recherche doctorale sur le thème des compétences de leadership des infirmières en chef, et fut ensuite co-promoteur du projet «Clinical Leadership Development» mené en collaboration avec la Katholieke Universiteit Leuven, le Ministère de la Santé Publique, des Affaires Sociales et de l'environnement et le Royal College of Nursing (Londres). En 2001, elle a participé à l'étude Manpower Planning «Offre et demande de travail dans le champ de la santé et de l'aide sociale 2000-2010-2020». Elle exerce actuellement la fonction de chargée de recherche à l'ecole de santé publique de l'université catholique de Louvain. A ce titre, elle est engagée dans la réalisation du volet belge d'une recherche européenne portant sur la brièveté de la carrière infirmière en Europe (Recherche NEXT [Nurses early exit study]). Ces recherches sont exemplaires de son intérêt pour les problématiques liées à la planification de la profession infirmière, à l'organisation de sa structure de formation mais également à ses conditions d'exercice et à sa pérennité dans le système de soins.