Les Sahéliens peuvent nourrir le Sahel



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Afrique Verte 12-20 rue Voltaire 93100 Montreuil - France Tel : 0033 (0) 1.42.87.06.67 caroline.bah@libertysurf.fr www.afriqueverte.org Les Sahéliens peuvent nourrir le Sahel AMASSA - AV Mali BP : E404 - Bamako - Mali. Rue : 232 Porte : 754 Hippodrome. Tel : (223) 20 21 97 60 afriqueverte@afribone.net.ml www.afriqueverte.org Février 2012 STRATEGIE DE PREVENTION DES CRISES : UNE EXPERIENCE DE MISE EN PLACE DES STOCKS DE PROXIMITE DANS LES VILLAGES. Une stratégie développée et expérimentée au Mali par Afrique Verte et son partenaire AMASSA. Au Mali, excepté le riz produit en zone irriguée ou inondée, la production céréalière est essentiellement pluviale. Les régions de Mopti, Gao et Tombouctou connaissent un climat sahélien sec, voire saharien, les récoltes y sont chroniquement déficitaires. Les ménages essayent de faire face à cette situation grâce à différentes stratégies dont l une des plus importantes est la mise en place de stocks communautaires villageois. Mais ce mécanisme a ses limites : les populations ont des difficultés d approvisionnement en aliment de première nécessité (notamment céréales), suite à leur éloignement des zones de production, au manque de ressources financières, au coût élevé du transport et au manque d infrastructures de stockage adéquates. De plus, les capacités de gestion des stocks de céréales par les communautés doivent être renforcées. Pour trouver des solutions à ces problèmes récurrents, Afrique Verte et son partenaire AMASSA au Mali ont initié depuis 2007, une action intitulée «Prévention des crises» qui consiste à définir les meilleures stratégies d approvisionnement, dès les récoltes, avec les OP, en concertation avec les élus, les services décentralisés de gestion des crises et les autres ONG présentes au SAP, en fonction des besoins ; à suivre l évolution des stocks et des prix pour ajuster les stratégies, tout au long de la campagne de commercialisation. Ainsi, sur la base de l estimation des capacités d approvisionnement des OP et en mettant à profit le diagnostic du SAP, l association en concertation avec les élus, les services techniques et les institutions spécialisées, participe à la définition de stratégies d approvisionnement des différentes zones cibles. Les connaissances des techniques opérationnelles d approvisionnement accumulées par les équipes d Afrique Verte et d AMASSA sont utilisés pour faciliter les mises en relation et les appuis logistiques pour ravitailler les zones déficitaires à partir de stocks provenant des zones excédentaires dans lesquelles Afrique Verte est également présente. Les organisations paysannes bénéficiaires du projet peuvent ainsi être plus facilement et plus rapidement approvisionnées, après les récoltes, au moment où les prix sont encore accessibles. Ces stocks de proximité constitués à l échelle communautaire permettent aux populations villageoises de trouver sur place les céréales indispensables à leur alimentation. Cette action a également un impact sur les prix des céréales au niveau local qui devraient ainsi être régulés. 1

1. La démarche de l opération : Pour mener cette action la démarche est la suivante : 1. 1. Identifier les zones à risque alimentaire AMASSA et Afrique Verte participent dans leurs zones d intervention aux activités du dispositif national d alerte et de prévention des crises alimentaires, au sein du dispositif du PRMC et du Commissariat à la Sécurité Alimentaire. Des notes de conjoncture sur la sécurité alimentaire sont mensuellement publiées depuis 2001 par Afrique Verte dans le Point Situation Alimentaire au Sahel (Mali, Burkina, Niger). De plus, les animateurs sont en permanence en contact avec les OP dans les régions d intervention. Les CIAF (Centre d Information, de Formation et d Animation : bureaux d AMASSA) sont équipés en téléphone et fax. Ce dispositif opérationnel permet d être à la fois en contact avec les structures techniques et les OP. Le projet peut ainsi produire et diffuser des informations croisées sur la situation alimentaires et les actions conduites par les différents intervenants dans les régions, en se basant sur : - les estimations de récolte réalisées par les services nationaux (CPS/DRA, SAP) et plus particulièrement les balances (besoins/production) - l évolution des prix (bulletins de l OMA et bulletins produits par Afrique Verte et AMASSA) - la situation au niveau des villages par le biais des animateurs. Cette information sera analysée avec les différents acteurs des zones : politiques, techniques, projets et OP, afin d en tirer les enseignements et de définir les actions à conduire et leur localisation. La prévention des crises sera ainsi améliorée, en particulier grâce à l implication des représentants des populations. 1.2. Mise en place un fonds d intervention rapide en vue de constituer des stocks alimentaires au niveau des OP à risque alimentaire Sur la base de l identification des zones à risque alimentaire, le projet facilite leur approvisionnement. Une enveloppe financière disponible (au niveau de l association, sur subvention des partenaires) permet d acheter des céréales locales (mil et sorgho) et de constituer des stocks villageois dont la gestion est confiée aux OP bénéficiaires. Ces stocks de proximité sont utilisés pour faire face aux contrecoups des hausses de prix (signe annonciateur de crise). Il s agit d assurer à l échelle rurale une fonction de régulation de prix au moment opportun. Les expériences et les acquis d Afrique Verte dans la commercialisation entre zones déficitaires et zones excédentaires sont utilisés dans ce dispositif pour faciliter un approvisionnement économiquement favorable ce qui contribue au rééquilibrage des prix au niveau des communautés rurales. Les conditions de commercialisation de ces stocks sont rapidement définies avec les comités de gestion des magasins de céréales, pour assurer la mise en marché correcte au profit directement des populations à un prix accessible et étudié. Les recettes permettent de renouveler une partie du stock. 1.3. Le mécanisme : Le mécanisme proposé concerne les OP situées dans les communes les plus affectées par les hausses de prix. Les OP bénéficiaires doivent être membres de regroupements d OP (fédérations). Cette structuration des OP au niveau régional est un atout important qui permet à Afrique Verte et AMASSA d asseoir une méthodologie cohérente de gestion du stock. La démarche suivante est proposée : un comité de suivi est constitué, comprenant les responsables des faîtières d OP, les élus locaux, le SAP, Afrique Verte et AMASSA, dans chacune des régions déficitaires concernées. Les 3 comités, sur la base des informations étudiées au sein du SAP, établissent une liste d OP bénéficiaires par faîtière. Les volumes sont déterminés d un commun accord (en fonction du déficit et du degré de vulnérabilité). 2

un protocole tripartite de gestion des stocks est signé entre le projet, les faîtières et l OP bénéficiaire elle-même. les stocks de céréales locales sont achetés auprès des OP des zones excédentaires (au prix du marché), dès la récolte (octobre, novembre, décembre), période où les prix sont encore modérés. les stocks sont transportés par Afrique Verte et AMASSA dans les villages ; les OP les gèrent elles-mêmes, en fonction de modalités convenues dans le contrat tripartite. l OP bénéficiaire peut faire des rotations de stock en fonction de la situation alimentaire et en tenant compte du niveau des prix et des besoins. Le prix de vente aux populations est fixé en fonction du coût réel (sans but lucratif). Une vente à prix social n est envisageable que si la situation se dégrade et en concertation avec les partenaires locaux (élus et services techniques). Après les opérations de vente au comptant, l OP bénéficiaire reverse le capital dans le compte de sa faîtière qui pourra ainsi, sous la supervision et les recommandations du comité de suivi, attribuer un stock à une autre OP membre répondant aux conditions d accessibilité à ces fonds, l année suivante. Les premières opérations d achats et de ventes sont coordonnées par Afrique Verte et AMASSA. Les animateurs réalisent le suivi sur le terrain (achat, transport, vente et conseil). Les rotations de stocks qui suivront sont directement réalisées par les OP, avec les appuis et conseils des animateurs. 2. Quelques résultats concrets : En 2007, dans l Action «Professionnalisation des OP dans les filières céréales locales, pour améliorer leur contribution à la réduction de la pauvreté et de la faim au Mali» (2007-2009) cofinancé par la commission européenne, Afrique Verte et AMASSA ont développé un système de prévention et de gestion des crises alimentaires, autour d un dispositif souple de collecte et d analyse d information, pour approvisionner rapidement en céréales des zones en difficulté. A partir d une enveloppe disponible de 24.000.000 FCFA, 21 villages en difficulté alimentaire (régions de Gao et Mopti) ont été retenus et dotés de 150 tonnes de céréales. Des stocks communautaires ont été constitués et gérés par les OP qui les ont vendus à prix social. Des rotations ont été réalisées ; les ventes à prix social ont régulé les prix au niveau local. En 2010, Afrique Verte a poursuivi cette action au regard de l intérêt des populations, en consolidant les 21 anciennes OP et en l étendant à de nouveaux villages. Cette nouvelle action a été réalisée à partir d un co financement de la CE/Food Security «Contribution à l atténuation de l impact de la flambée des prix des denrées alimentaires au Mali, par un soutien à la production agricole, au stockage, à la transformation et à la commercialisation des produits locaux afin d améliorer la sécurité alimentaire et nutritionnelle». Les actions ainsi réalisées du 1er Janvier 2010 au 31 octobre 2011 ont consisté à : Consolider les acquis : Pour le suivi des anciens stocks dans les 21 villages, le projet a entrepris des actions en vue de consolider les acquis de la 1 ère opération initiée dans le cadre de l action «Professionnalisation des OP dans les filières céréales locales, pour améliorer leur contribution à la réduction de la pauvreté et de la faim au Mali» de 2007-2009. Ces actions ont été : o le suivi de la reconstitution des stocks par les OP qui, avec les recettes des ventes, peuvent faire des rotations, afin de gérer durablement le fonds ; o l information des gestionnaires sur l évolution des prix d achat ou de vente des céréales ; o l établissement des comptes d exploitation. 3

Etendre l action à de nouvelles OP : Pour cette extension, l action a consisté à l identification de 31 nouveaux villages (sur une prévision de 20 soit 155%) et à la gestion des stocks par les organisations paysannes. Le projet a, en rapport avec toutes les parties prenantes, mis en place 6 comités régionaux (à raison de 2 comités sur 3 régions : Tombouctou, Gao, Mopti) dont 1 comité d identification des Organisations Paysannes bénéficiaires et 1 comité chargé d acheter les céréales lors de la bourse nationale de Ségou dans chacune des 3 régions déficitaires (Mopti, Gao et Tombouctou). La mise en place de ces comités d identification a permis de choisir les nouvelles OP sur la base du pronostic définitif du SAP sur la situation alimentaire dans la région et des informations collectées par les animateurs de terrain qui confirment celles du SAP et des résultats de la campagne agricole 2009/2010 fournis par le secteur d agriculture. Les critères de choix de nouveaux villages étaient les suivants : - être affilié à une faîtière, - avoir une récolte jugée mauvaise, - être crédible, - accepter les différentes conditions, - accepter de verser les produits de la vente de céréales à la faîtière et de se soumettre aux contrôles et vérifications par rapport au stock, - ne pas avoir d autres partenaires d appui en matière de sécurité alimentaire. Le comité chargé d acheter les céréales comprend les animateurs d AMASSA - Afrique Verte de Mopti, Gao et Tombouctou et les représentants des producteurs des 3 zones. Sa mise en place a permis d impliquer les producteurs dans le processus d achat et d obtenir les céréales à un bon prix lors de la bourse nationale de Ségou. Aussi, la mise en place par Afrique Verte des fonds a facilité l achat des céréales et a permis aux bénéficiaires de faire plusieurs rotations pour une plus grande couverture des besoins des populations concernées. L implication des faîtières des Organisations Paysannes dans le choix des nouvelles OP et dans l achat des céréales, la fixation des prix de cession aux bénéficiaires par les OP elles mêmes et la signature de protocoles tripartites de gestion des stocks entre Afrique Verte, la faitière et les OP ont permis de donner plus de confiance aux populations et d asseoir les bases d une pérennisation de l opération. Les missions de suivi des animateurs d AMASSA - Afrique Verte qui ont porté sur : (i) les techniques de stockage et les stratégies de rotation, (ii) la gestion des documents, (iii) l information des gestionnaires sur l évolution des prix d achat et de vente des céréales, (iv) l établissement des comptes d exploitation prévisionnels. Toutes ces actions ont permis de renforcer les capacités des Organisations Paysannes dans la gestion des stocks. Il est cependant important de signaler que les OP bénéficiaires avaient formulé des inquiétudes quant à la gestion des fonds issus des ventes. En effet, pour ce programme Facilité Alimentaire, le projet a basé sa stratégie sur une rétrocession du capital issu des ventes à la faîtière de l OP qui pourra ainsi, sous la supervision et les recommandations du comité de suivi, attribuer le stock l année suivante à une autre OP membre répondant aux conditions d accessibilité à ces fonds. Cette approche a pour objectif d assurer la pérennité de l action. Malgré le bien fondé de cette stratégie, les OP bénéficiaires souhaitaient garder les stocks à la fin du projet compte tenu de la fragilité et de la vulnérabilité de leur zone. Les investigations menées par une équipe d évaluation sur le terrain en novembre 2011 au sujet de l appréciation de cette stratégie par les OP ont permis de comprendre qu il s agit bien d un souhait de garder le stock et non d un refus des OP de se soumettre aux conditions de gestion des stocks préalablement établies à savoir la rétrocession du capital issu des ventes à la faîtière de l OP. Cependant la situation critique de la campagne en cours (2011-2012) préoccupe beaucoup les OP bénéficiaires qui souhaitent au contraire une augmentation des quantités à mettre à leur disposition : 4

- L OP de Kentabada demande par exemple un quota de 6 tonnes au lieu de 4 tonnes attribuées par le comité de suivi. - L OP de Kabara demande une augmentation des quantités afin de tenir compte de l arrivée des maliens venus de la Libye (plus de bouches à nourrir). Malgré ces préoccupations, l équipe a pu constater sur le terrain, la satisfaction des bénéficiaires. 3. Quel bilan : Il ressort de l évaluation de ce projet, réalisée récemment par le bureau FORANIM CONSULT du Mali, les conclusions suivantes : Résultats et effets des actions réalisées, Bénéfices directs Le système de «stocks de prévention» dans les zones vulnérables des régions nord du projet (Mopti, Gao et Tombouctou) est apprécié par toutes les parties (populations locales, OP et leurs faîtières, collectivités locales, administrations publiques, partenaires techniques). Ce système a permis en année 1, à 38 OP (21 anciennes OP et 17 nouvelles OP) de 17 communes de Mopti, Gao et Tombouctou de mobiliser 256 tonnes de céréales (156 tonnes pour les 21 anciennes OP et 100 tonnes pour les 17 nouvelles OP). Les céréales ont été vendues aux populations locales à des prix inférieurs à ceux du marché. Les résultats de l opération à Mopti en année 1 du projet ont été les suivants : * Prix d achat rendu village : 17 500 FCFA/sac * Prix de vente : 15 000 FCFA/sac * Prix du marché : 17 000 FCFA/sac L enclavement des OP a fortement contribué à l augmentation des frais de transport et a eu un impact sur le prix de revient. Les stocks ont été vendus, à perte, à un prix inférieur à celui du marché le plus proche. Cette stratégie a été adoptée par la faîtière pour permettre aux couches les plus défavorisées d accéder aux céréales. Résultats : Gao * Prix d achat rendu village : 19 000 FCFA/sac * Prix de vente : 16 000 FCFA/sac * Prix du marché : 16 500 FCFA/sac Compte tenu de la crise alimentaire que la zone a connue et au regard de la chute du prix du mil à cause des distributions gratuites effectuées par les partenaires au développement et l'etat, les faîtières ont décidé de vendre le mil à perte, à un prix inférieur à celui du marché le plus proche. Résultats : Tombouctou * Prix d achat rendu village : 21 700 FCFA/sac * Prix de vente : 16 500 FCFA/sac * Prix du marché : 19 000 FCFA/sac Les stocks dans les 3 zones ont été vendus à perte. Mais il faut noter que les sacs de céréales sur le marché local étaient bon marché mais de mauvaise qualité : le sac de 100 kg pèse souvent moins de 90 kg et il contient des impuretés. Les pertes peuvent s élever à 25%. Compte tenu de ce constat, le prix d un sac de qualité n est pas plus cher. Le récapitulatif des distributions de céréales a été le suivant : - Mopti Année 1 : 33 tonnes distribuées à 5 OP Année 2 : 17 tonnes distribués à 4 OP Total 50 tonnes de céréales distribuées à 9 OP - Gao : Année 1 : 34 tonnes de céréales ont été distribuées à 6 OP Année 2 : 16 tonnes de céréales ont été distribués à 5 OP Total : 50 tonnes de céréales ont été distribuées à 11 OP 5

- Tombouctou Année 1 : 33 tonnes de céréales ont été distribuées à 6 OP Année 2 : 27 tonnes de céréales ont été distribués à 5 OP Total 60 tonnes de céréales ont été distribuées à 11 OP Total des 3 régions : 160 tonnes de céréales ont été distribuées à 31 OP Au total, 52 OP (21 anciennes et 31 nouvelles) des régions de Gao, Tombouctou et Mopti ont pu bénéficier de 316 tonnes de stocks de prévention dans le cadre du programme antérieur de la CE (156 tonnes soit 49%) et le projet Facilité alimentaire (160 tonnes soit 51%) Il faut rappeler que si dans les exemples cités en année 1, toutes les OP avaient vendu à perte, la situation est différente dans les OP visitées par l équipe d évaluation, présentée comme suit : - Pour la Coopérative agricole NAFAGOUMO des femmes de Kabara, le compte d exploitation pour la période du 12 avril au 14 octobre 2011 est le suivant : - Achat de 53 sacs de 100 kg (5,3 t) à 14 000/sac soit 742 000 FCFA - Transport de Mopti à Koriomé par pinasse 1250 F/sac soit 66 250 FCFA, - Transport de Koriomé à Kabara pour 16 750 FCFA au total - Frais de manutention à 15 050 FCFA - Rémunération magasinière à 26 500 FCFA - Total charges 866 550 FCFA soit 16 349 FCFA/sac - Total produits 927 500 FCFA soit 17 500 FCFA/sac - Résultat 927 500-866 550 = 60 950 FCFA - Montant reversé à la BIM dans le compte de l union = 885 950 FCFA - Pour la Coopérative multifonctionnelle de Tassakane pour la période du 18 mai au 8 juillet 2011, pour un achat de 5,3 tonnes, le résultat a été bénéficaire de 34 450 FCFA avec le versement de 842 700 FCFA au compte de l union. - Dans l OP de Kentabada dans le cercle de Bandiagara, sur 4 tonnes achetées, en avril 2011, le résultat a été de 10 000 FCFA. La hausse des prix des céréales sur le marché n a pas permis à Kentabada de réaliser une deuxième rotation, initialement prévue en juillet. L OP a reversé à MOLIBEMO la somme de 640 000 FCFA. - Pour MOLIBEMO Bandiagara, la bonne gestion des fonds versés par les bénéficiaires est l une des conditions préalables à la poursuite des activités du projet. La faîtière se propose d ouvrir un compte spécial dans une banque de la place en vue de loger uniquement les fonds issus de la vente des stocks de prévention. Elle a encaissé la somme de 6 598 250 FCFA provenant des 9 villages ayant bénéficié des stocks de prévention: Pèlèni 620 000 FCFA, Kentabada (visité par les évaluateurs) 640 000 FCFA, Andjim Bolé 580 000 FCFA, Tènnè 1 612 000 FCFA, Bolmo 800 000 FCFA Tounolna 640 000 FCFA, Amba 472 500 FCFA, Dièyè 533 750 FCFA, Wétéguélé 700 000 FCFA. MOLIBEMO et les Organisations Paysannes qu elle encadre sont très satisfaites de l activité, car disent ils «le projet a permis à certains villages, reculés et difficiles d accès, d avoir des céréales à un prix raisonnable et au bon moment. Parmi ces villages le cas de Bolmo dont l accès est très difficile avec les véhicules de transport à partir du mois de juin en est une parfaite illustration». A Kentabada, la vente du produit se fait tous les lundis pour les cas normaux, ou à tout moment pour les cas urgents. La population affirme aussi sa satisfaction par rapport au produit. La représentante des femmes à l entretien a déclaré que «Ce sont les femmes qui souffrent le plus des crises alimentaires et que le fait d avoir les céréales à sa portée pendant les périodes de crise est un motif de satisfaction. Même si les céréales coûtent le même prix à Kentabada qu à Bandiagara, la disponibilité, l économie des frais de déplacement et les difficultés d acheminement du produit font la différence». A Kabara, l implication des Coopératives féminines dans la gestion des stocks de prévention a été jugée très satisfaisante, car les femmes ne se préoccupent plus de la disponibilité des céréales et prennent plus de temps à s occuper de leurs enfants. 6

Résultats et effets des actions réalisées, Bénéfices indirects L utilisation du produit ne s est pas limitée aux seuls villages choisis par le comité d identification des OP bénéficiaires de stocks de prévention. Les villages bénéficiaires ont tenu à manifester leur solidarité envers leurs voisins se trouvant dans les mêmes difficultés alimentaires qu eux. - Ainsi, le village de Bolmo (cercle de Bandiagara) a servi Salé et Irli Bolo dans un rayon de 4 km. - Sur le stock de Tènnè, 4 autres quartiers ont été servis : Diamou, Oyé, Guaniaga, Outolo. - Le village de Diyè a approvisionné Dani. - Kentabada a servi ses voisins : les villages de Ogobo et Ogobo Hameau, car disent ils «on ne pouvait pas refuser des céréales à nos voisins». La disponibilité de 316 tonnes de céréales (dont 156 T pour 21 anciennes OP et 160 T pour 31 OP nouvelles), permettra de couvrir les besoins alimentaires de près de 1 476 personnes pour une année sur la base de 214 kg par personne et par an (Norme DRA Mopti). Il ressort des investigations faites par les animateurs de Mopti que ces stocks de prévention des crises alimentaires ont permis de limiter le départ à l exode des bras valides. Ils ont permis de créer une quiétude dans les villages dont la production céréalière ne dépassait pas 2 mois de consommation. La mise en place des stocks de prévention, avec comme objectif, la satisfaction des besoins céréaliers des populations les plus pauvres a permis une diminution notoire du taux de maladie chez les enfants et même les adultes selon les femmes de Kabara. Elle a permis par ailleurs aux paysans de se consacrer aux travaux champêtres en période d hivernage au lieu de passer du temps à la recherche du grain. Ce gain de temps leur a permis d exploiter plus de surfaces selon les producteurs de Kentabada. 7