ARTICLE ORIGINAL Apport de la radiographie conventionnelle dans les traumatismes de l extrémité supérieure du fémur et du bassin de l adulte dans un hôpital de district au Togo. (Conventional radiography in the diagnosis and management of the traumatic hip and pelvis in a district hospital in Togo) Agoda-Koussema LK *, Anoukoum T**,Adigo A*, Adjénou K*, Dagbé M*, Sonhaye L*, N timon B*, Walla A***, Amouzou KD*,N Dakena K* * Service de radiologie du CHU Sylvanus Olympio, Campus et Kara- Lomé ** Service de chirurgie du CHU Sylvanus Olympio- Lomé ***Service de traumatologie du CHU Sylvanus Olympio- Lomé RESUME : Objectifs : Etablir le profil épidémiologique des traumatisés, répertorier et décrire les caractéristiques des lésions visibles à la radiologie conventionnelle Matériels et méthodologie : Il s est agi d une étude prospective et analytique de 12 mois (mai 2010 à avril 2011) concernant l analyse radiographique de 302 examens de la hanche ou du bassin traumatique de l adulte, colligés dans un service de radiologie d un centre hospitalier préfectoral. Résultats : Il était noté une prédominance masculine avec sex-ratio 2,6. L âge moyen des patients était de 60 ans avec des extrêmes de 18 à 95.Les accidents de la voie publique (AVP) dans 60,26% constituaient les plus fréquentes circonstances de survenue des lésions dont la fréquence était de 39,40 %.La radiographie du bassin de face en position couchée (100%), le profil urétral (25%),) et le profil chirurgical d Arcelin (2,3%) ont été réalisés. Les lésions répertoriées étaient les fractures trochantériennes (40,33 %), les fractures cervicales (30,25 %), les fractures du cotyle (15,9 %) et les luxations (13,44 %). Au niveau du massif trochantérien, les traits de fractures étaient obliques (33,33%), multi-fragmentaires (25%), spiroïdes(22,91%). Au niveau du cotyle les traits dominants étaient obliques (42, 21%) et transversales (36,84 %). Les fractures du col étaient classées en Garden I (20%), Garden II (,4%), Garden III (48%) et Garden IV (28 %). Les luxations postérieures étaient prédominantes dans 68,75% vs 31,25% de formes antérieures. Conclusion La radiographie conventionnelle reste est un outil de diagnostic indispensable et incontournable dans l exploration de la pathologie traumatique de la hanche dans les situations d urgence surtout en milieu rural où font défaut les moyens d imagerie en coupe et les mains qualifiées. Mots clés : Fémur, bassin, traumatisme, adulte, radiologie conventionnelle, Togo
SUMMARY Objectives: To determine the epidemiological profile of traumatic patients, identify and describe the features of the lesions on conventional radiology. Materials and Methods: It was a prospective and analytical study during a 12 months period (May 2010-April 2011) during which we analyzed 302 X-ray examinations of the hip or pelvis for trauma in adults, in the service of radiology of a district hospital. Results: Sex ratio was 2.6 n favor of male. The mean age of patients was 60 years with extremes of 18 and 95. Road accidents (60.26%) were the most frequent circumstances of occurrence of lesions with a frequency of 39.40%. The x-ray of the pelvis in the supine position (100%), urethral profile (25%)) and the surgical Arcelin profile (2.3%) were performed. The lesions were mainly: fractures of trochanter (40.33%), femoral cervix (25%), fractures of the acetabulum (15.9%) and dislocations (13.44%). At the trochanter, the fracture lines were oblique (33.33%), multi-fragmented (25%), spiral fractures (22.91%). The dominant features of the acetabulum were oblique (42, 21%) and transverse (36.84%). Neck fractures were classified Garden I (20%), Garden II (4%), Garden III (48%) and Garden IV (28%). The later variants were predominant in 68.75% vs. 31.25% of previous forms. Conclusion: Conventional radiography remains a diagnostic tool indispensable and essential in the exploration of traumatic hip pathology in emergency situations especially in rural areas where CT scan and qualified personnel are missing. Keywords: Femur, pelvic, injury, adult, conventional radiology, Togo Correspondance Dr Lama Kegdigoma AGODA-KOUSSEMA Service de Radiologie CHU SylvanusOlympio de Lomé 05 BP 68 Lomé 05 Lomé Togo Tél : 00228-913-2978 E-mail : agoda_koussema@yahoo.fr/kousseamaagoda@gmail.com J Afr Imag Méd 2015; (7), 1: 2-9
. INTRODUCTION : La pathologie traumatique de la hanche a bénéficié dans les dernières années de moyens diagnostiques (scanner, IRM et échographie) très performants permettant une étude anatomique précise des différentes lésions. Les pays en développement, malgré l effort fourni, se trouvent dans les difficultés en ce qui concerne la réalisation de ces examens en situation d urgence. Ceci est d autant plus prononcé dans les milieux ruraux où l accès aux soins médicaux est un réel problème vu le faible revenu de ces populations et la non disponibilité des moyens d imagerie en coupe surtout en situation d urgence. Les cliniciens et les radiologues, pour pouvoir assurer un minimum de prise en charge aux patients traumatisés, se tournent vers la radiologie conventionnelle qui tient une place assez importante. Dans ces conditions et face à l avènement des engins à deux roues (taxis motos) qui fait accroitre les traumatismes de la hanche et la mortalité routière, il nous a paru opportun d évaluer l apport de la radiographie conventionnelle dans cette pathologie. Spécifiquement, nous avons voulu établir le profil épidémiologique des traumatisés, répertorier et décrire les caractéristiques des lésions visibles à la radiologie conventionnelle. METHODOLOGIE : Notre étude s est déroulée dans le service de radiologie au centre hospitalier préfectoral de Lomé (CHP Lomé commune). Il s est agi d une étude de série de cas effectuée sur une période de douze mois (de mai 2010 à avril 2011), des patients adultes qui présentaient un traumatisme de la hanche et/ou du bassin. Ces patients étaient adressés à la radiologie par les services d urgence et de chirurgie. Une radiographie du bassin de face en position couchée était réalisée systématiquement. Une radiographie de profil urétral était réalisée chez les patients présentant des luxations coxo-fémorales, des fractures du toit ou du fond du cotyle et les fractures du col fémoral. Un profil d Arcelin était réalisé lorsque le col fémoral était mal déroulé ou mal vu. RESULTATS : Nous avions enregistré 302 examens radiographiques du bassin et de la hanche traumatique. Cent-dix-neuf (119) examens radiographiques présentaient des lésions soit 39%. L âge de nos patients était J Afr Imag Méd 2015; (7), 1: 2-9
compris entre 18 et 95 ans avec un âge moyen de 60 ans. Les tranches d âge les plus représentées étaient [41-50ans [ dans 25,16% ; [18-30ans [ dans 20,20% et [31-40ans [ dans 14,90%. Le sex-ratio était de 2,6 avec une prédominance masculine. La répartition des patients selon leurs activités socio professionnelles était dominée par ordre décroissant par les taxi-motos (30,13%), les ménagères (26,50%) et les fonctionnaires (24,17%).Les accidents de la voie publique (AVP) dans 60,26% constituaient les plus fréquentes circonstances de survenue des lésions. La clinique était dominée par la douleur (100%) et l impotence fonctionnelle (23%). Sur le plan radiographique, tous les patients ont bénéficié de la radiographie du bassin de face. Le profil urétral a été réalisé chez 76 patients et seulement 07 patients ont bénéficiés du profil d Arcelin. L inventaire des lésions mises en évidence a été fait dans le tableau I. Les fractures de l extrémité supérieure du fémur étaient plus fréquentes que les lésions de la ceinture pelvienne soit respectivement 70,58% et 15,96%. Les fractures du massif trochantérien étaient per-trochantériennes dans 6,67% (figure 1), intertrochantériennes (25%) et trochantéro diaphysaires dans 8,33% (figure 2). Les caractéristiques des traits de fractures du massif trochantérien sont résumées dans le tableau II. Les fractures du col fémoral étaient les deuxièmes lésions observées. Elles étaient dans 58,33% des cas transcervicales, 22,22% basi-cervicales (figure 3) et 19,45% des cas sous- capitales. Les déplacements de ces fractures cervicales ont été classés selon Garden (tableau III). La répartition selon le type et le siège des fractures du cotyle (figure 4)ont été reportées dans les tableaux II et IV. En dehors des lésions de fractures, nous avons observé des luxations de hanche. Les variantes postérieures (figure5) étaient prédominantes dans 68,75% vs 31,25% de formes antérieures (figure 6). Le tableau V relate ces différents types de luxation de hanche observés. J Afr Imag Méd 2015; (7), 1: 2-9
Tableau I : Répartition des patients selon les lésions répertoriées Effectif % Fractures trochantériennes 48 40,33 Fractures cervicales 36 30,25 Fractures du cotyle 19 15,96 Luxations 16 13,46 Tableau II: Caractéristiques des traits de fracture du massif trochantérien ou du cotyle Massif trochantérien Cotyle Total Effectif % Effectif % Effectif % Obliques 16 33,33 08 42,21 24 35,82 Transversales 09 18,75 07 36,84 16 23,88 Spiroïdes 11 22,92 03 15,78 14 20,89 Comminutives 12 25,00 01 5,27 13 19,40 Total 48 100 19 100 67 100 Tableau III: Répartition des fractures du col fémoral selon la classification de GARDEN Effectif % Garden III 17 48,00 Garden IV 10 28,00 Garden I 07 20,00 Garden II 02 04,00 Tableau IV : Répartition selon le siège des fractures du cotyle Effectif % Fracture du toit du cotyle 09 47,36 Fracture du fond du cotyle 07 36,84 Fracture de la colonne antérieure 02 10,52 Fracture de la colonne postérieure 01 5,27 J Afr Imag Méd 2015; (7), 1: 2-9
Tableau V : Caractéristiques des luxations Effectif % Luxation iliaque 07 43,75 Luxation ischiatique 04 25,00 Luxation pubienne 02 12,50 Luxation obturatrice 03 18,75 Haut Gauche Fig 1: Fracture per trochantérienne droite Fig 2: Fracture sous trochantérienne gauche I Haut Gauche Fig 3: Fracture basi-cervicale droite (Garden IV) Fig4: Luxation postérieure associée à une fracture du rebord postérieur du cotyle J Afr Imag Méd 2015; (7), 1: 2-9)
1-. Fig 5 : Luxation postérieure des hanches Fig6 : Luxation antérieure pure de la hanche droite DISCUSSION : Les limites de notre étude se situent à deux niveaux. Au plan clinique, la douleur a été un handicap majeur et une cause de refus de certains patients pour l adoption de certaines postures lors de la réalisation des incidences radiographiques. Au plan para-clinique, l absence d un appareil radiographique à tube mobile a rendu difficile la réalisation du profil d Arcelin. Les 183 examens radiographiques supposés normaux ne le seraient qu apparemment car ces patients pouvaient présenter des lésions non visibles à la radiographie conventionnelle (lésions ligamentaires, lésions méniscales, fractures occultes) et qui exigent d autres explorations comme l échographie, la TDM et l IRM.L absence d échographe de haute résolution, l absence d échographiste qualifié dans les milieux ruraux où la majorité des praticiens en échographie ne sont pas des radiologues ni même des médecins constituent des facteurs aggravants. En effet une échographie réalisée dans de bonne condition aurait pu permettre de mettre en évidence certaines lésions musculo-ligamentaires. L âge de nos patients a varié de 18 à 95 ans avec un âge moyen de 60 ans. La tranche d âge la plus touchée était de 41 à 50 ans avec un pourcentage de 25,21 %. Bénétos et coll. avaient trouvé un âge moyen de 81 ans pour les femmes et 78 ans pour les hommes [1]. Ceci peut être expliqué par la non consommation des aliments riches en calcium et en vitamine D, et la fragilité osseuse par vieillissement (ostéoporose). Une prédominance masculine avec un sex-ratio de 2,6 s est dégagée de notre étude. Ceci est classique dans les traumatismes et est favorisé dans nos milieux en voie de développement par l exercice, de manière exclusive par les hommes, de la profession de conducteur de taxis-moto. La cause principale des traumatismes de la hanche et du bassin était les AVP (60,26%), ceci est comparable aux résultats des auteurs [2-4]. Ce taux élevé était dû à l augmentation du parc automobile (engins à deux roues) avec des J Afr Imag Méd 2015; (7), 1: 2-9)
conducteurs de taxis-moto, sans permis de conduite, ne respectant pas le code de la route. La douleur traumatique et l impotence fonctionnelle étaient les signes cliniques dominants. Ces résultats sont similaires à ceux trouvés par Kirby et coll. [5]. Les fractures de l extrémité supérieure du fémur étaient environ quatre (4) fois plus fréquentes que celles du cotyle. Ce résultat corrobore les données de Melton qui trouve un rapport égal à trois (3) [6]. Au sein du sousgroupe de fractures de l extrémité supérieure du fémur, les atteintes cervicales étaient les moins représentées, résultat similaire aux données de la littérature [7]. Les facteurs de risque des fractures de l extrémité supérieure du fémur seraient, d après Bénetos : l âge avancé avec comme conséquence l ostéoporose, le sexe féminin, l ethnie asiatique ou africaine, les populations urbaines, moins favorisées et peu éduquées [1]. Au cours de notre étude, nous avons noté 48% + 28 % soit 76% de patients classés respectivement en types III et IV de Garden. Ces patients seraient donc à risque de rupture capsulaire avec atteinte de l artère polaire supérieure, ce qui les expose aux risques d ischémie et de nécrose céphalique [8].Nous avions enregistré 11 cas de luxations postérieures dont 07 étaient iliaques (43,75%) et 04 étaient ischiatiques (25%). Parmi les 05 cas de luxations antérieures 02 étaient pubiennes (12,5 %) et 03 étaient obturatrices (18,75 %).Nos résultats sont comparables à ceux trouvés par Goddard [9]. CONCLUSION La radiologie conventionnelle demeure un outil de diagnostic indispensable et incontournable dans l exploration des traumatismes de l extrémité supérieure du fémur et du bassin surtout en milieu rural où les moyens d imagerie en coupe et les mains qualifiées font défaut encore en situation d urgence. Les principales limites sont les lésions des parties et les fractures occultes qui sont graves car il existe des complications liées au déplacement secondaire. J Afr Imag Méd 2015; (7), 1: 2-9)
REFERENCES : 1- BenetosIS,Babis GC, Zoubos AB, Benetou V, Soucacos PN. Factors affecting the risk of hip fractures. Injury2007;38(7):735-44. 2- Brau AE. Traumatic dislocation of the hip. J Bone Joint Surg (Am) 1962;44:1115-34. 3- De Lee JC, Evans JA, Thomas J. Anterior dislocation of the hip with femoral head fractures. J Bone Joint Surg (Am) 1980;62:960-4. 4- Epstein HC, Wiss DA. Traumatic anterior dislocation of the hip. Orthopedics 1985;8:132-4. 5- Kirby Mw, Spritzer C. Radiographic detection of hip and pelvic fractures in the emergency department AJR Am j Roentgenol 2010, 194 (4)1050-60. 6- Melton 3rd LJ, Sampson JM, Morrey BF, Ilstrup DM. Epidemiologic features of pelvic fractures. Clin OrthopRelatRes 1981;155:43-7. 7- Ramisetty NM, Pynsent PB, Abudu A. Fracture of the femoral neck, the risk of serious underlying pathology. Injury 2005; 36(5):622-6. 8- Larbi A, Blin D, Cyteval C. Traumatismes de l extrémité supérieure du fémur et du bassin chez le sujet âgé. Journal de radiologie 2011; 92 : 567-580. 9- Goddard NJ. Classification of traumatic hip dislocation. Clin Orthop 2000;377:11-4. J Afr Imag Méd 2015; (7), 1: 2-9)