La nature juridique de la promesse de paiement des établissements émetteurs de cartes de paiement à l égard des fournisseurs de biens et services



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Transcription:

La nature juridique de la promesse de paiement des établissements émetteurs de cartes de paiement à l égard des fournisseurs de biens et services Par Boris Schinkels A. Propos préliminaires Chers auditeurs, avant tout bonjour à tous. Dans le cadre du thème directeur de notre séminaire, «la garantie» j ai été prié de traiter de la promesse de paiement donnée par les émetteurs de cartes de paiement aux fournisseurs. Comme je suppose que mon auditoire n est pas intégralement composé de spécialistes du droit bancaire, je souhaite à titre liminaire expliciter le système général des paiements et décrire les relations juridiques entre les participants à l opération. B. Introduction aux différentes formes de paiement Que doit on entendre par cartes de paiement et qu elle est leur utilité? Chacun a vraisemblablement déjà eu l occasion d effectuer un paiement à l aide de l une ou de l autre de ces cartes de paiement, ainsi je ne vous apprends rien en disant que par la seule présentation d une carte de paiement comme une EC / Maestro ou d une Geldkarte, le propriétaire de la carte peut obtenir d un fournisseur participant à ce système de cartes sans paiement immédiat, la délivrance de biens ou la prestation de différents services. Dans ce cas il convient de distinguer les systèmes à deux participants de ceux en faisant intervenir davantage. I. Systèmes à deux parties Je n aborderai pas aujourd hui ce système à deux parties, qui est à l origine de la carte de clientèle. En effet dans ce cas, la personne de l émetteur de la carte est confondue avec la personne du fournisseur de biens et services. Comme il n existe pas, au sein des simples cartes de clientèles de dissociation entre l émetteur de la carte et les différents fournisseurs, la question de la promesse de paiement qui nous occupe aujourd hui, ne se pose pas. II. Les systèmes pluripartites Les systèmes pluripartites intéressent les relations qu entretient le vendeur ou le prestataire de service appelé «fournisseur» avec son client, c est à dire le débiteur de la somme d argent propriétaire de la carte et celles qui le lient à l émetteur de la carte comme par exemple, un établissement spécialisé dans l offre de paiement sans numéraire. Ces établissements facilitent la réalisation du paiement par le débiteur de la somme d argent par le biais de moyens non numéraires. Les systèmes pluripartites se composent au minimum de trois relations juridiques à savoir, déjà celle intéressant les rapports entre le propriétaire de la carte ou porteur et le fournisseur contractant ; cette relation est appelée la «valeur fournie», celle ensuite entre le porteur et l émetteur de la carte appelée «la provision» et enfin celle liant l émetteur de la carte au commerçant permettant un arrangement d exécution au moyen d un contrat dit contrat «fournisseur». Les systèmes pluripartites concernent les cartes de paiement comme les EC et les cartes Maestro ainsi que les cartes de crédit universelles et les portes monnaie électroniques comme la Geldkarte. 1

III. Dispositif et mise en œuvre de la relation d exécution consacrée par le contrat «fournisseur» Lorsque le fournisseur accepte un paiement non numéraire, cela veut avant tout dire qu il dispose effectivement de la créance du paiement du prix sur le porteur de la carte. Par exemple, la rémunération d un service ou d un ouvrage n est pas réalisée comptant par un paiement immédiat, mais il est clair que le montant correspondant doit être versé par l intermédiaire de la carte au prestataire de service ou à l entrepreneur. C est la raison pour laquelle la relation entre l émetteur de la carte et le fournisseur s appelle la relation «d exécution». L émetteur dispose enfin d un recours contre le propriétaire de la carte. Comment se passe alors le règlement entre l émetteur de la carte et le fournisseur? 1. Les cartes de paiement Les cartes de paiement sont émises par un établissement teneur de comptes permettant l inscription aisée des paiements non numéraires sur le compte bénéficiaire. La principale carte de paiement est la carte EC/ maestro. Ces dernières ont complètement supplanté l émission d euro-chèques. La procédure de paiement à la base de ces dernières est nommée «electronic fund transfer at the point of sale (POS) Le paiement est mis en oeuvre de telle sorte que l émetteur, dès le montant à payer établi, est identifié auprès d un terminal POS se trouvant chez le fournisseur ou chez le prestataire de service. Par l insertion de sa carte et par la composition du code PIN, personal identification number, il est procédé à la lecture des données enregistrées sur la bande magnétique. Le règlement est déclenché par la délivrance de l autorisation de paiement et a pour effet de créditer d autant le compte du fournisseur qu il débite celui du porteur. Le processus d autorisation comprend la vérification de l identité du payeur grâce à l entrée du code par la personne habilitée, l examen de l authenticité de la carte et de la solvabilité du débiteur. Avec la standardisation actuelle au moyen de l autorisation on-line, les données sont codées et transmises à l ordinateur d autorisation de l émetteur d'autorisation lequel est informé au moyen du code de l établissement bancaire stocké sur la bande magnétique. La délivrance de l agrément au règlement de l émetteur emprunte le chemin inverse. En outre, il existe une procédure de sécurisation en vertu de laquelle il est exigé du porteur de la carte d apposer sa signature sur une pièce justificative de charge. Il s agit en l occurrence d une forme d écriture comptable sans que se pose la question de la promesse de paiement qui nous intéresse ici. D ailleurs une telle procédure se nomme également «point of sale sans garantie de paiement.» L adhésion de fournisseurs au «Point of sale systems» est subordonnée à la souscription des conditions de participation à l electronic-cash system du secteur des crédits allemand. 2

Le contrat «fournisseur» conclu entre l émetteur de la carte et le commerçant est conclu à durée indéterminée et comporte en particulier l obligation contractuelle pour le commerçant encore appelé fournisseur, d honorer toutes les cartes qui lui seront présentées au paiement. De ce point de vue il s agit d une stipulation pour autrui au sens du paragraphe 328 BGB, à savoir dans l intérêt du porteur. En contrepartie, l émetteur s engage à régler le chiffre d affaire généré par les paiements par carte. La promesse de paiement de l émetteur est donnée auprès des terminaux électroniques et est subordonnée à la régularité formelle de l opération de paiement ainsi qu à l autorisation on-line des versements par l intermédiaire des cartes de paiement. Le numéro 4 des conditions de la participation à l electronic-cash-system du secteur allemand des crédits prévoit : Que l établissement de crédit en plus de la délivrance de l autorisation du paiement, déclare qu il s acquitte du règlement des créances pour un montant n excédant pas le chiffre d affaire autorisé par l «electronic-cash-terminal». Le libellé de la clause ne donne aucune indication à son utilisateur concernant la qualification juridique de la promesse de paiement. 2. Les cartes de crédit universelles Qu elles sont les particularités des cartes de crédit universelles? Il s agit déjà de différences d ordre techniques. Ce qui est marquant dans le cadre de la mise en œuvre du paiement, c est la procédure de preuve qui se réalise au moyen de l apposition de la signature. Les données de la carte (nom du porteur, numéro de carte, date d expiration) ainsi que les créances sont reportés sur une preuve de charge, sont transmises au fournisseur et signées du porteur. L original demeure chez le fournisseur et le porteur en reçoit une copie. Aujourd hui il est devenu habituel d utiliser une transaction on-line c'est-à-dire en insérant la carte dans le terminal électronique du fournisseur, lequel transmet les données de la facture à l émetteur. Du reste, chaque paiement, de la même façon que pour les cartes de paiement EC et Maestro, doit être autorisé. Les paiements sans preuve peuvent également être effectués sans présentation de la carte, comme c est le cas pour le télé-shopping ou le mail order. Le porteur est dans ce cas appelé à délivrer oralement par téléphone ou via Internet, le numéro de sa carte. La promesse de paiement au niveau du contrat cadre entre l émetteur ou son démarcheur et le fournisseur, afin de constituer une transaction régulière, est subordonnée en principe à l obtention de l autorisation. Les conditions posées par la SARL Concardis à l acceptation et au débit des EUROCARD, Mastercard et carte Visa (état janvier 2005) disposent au numéro 4.1, de façon très semblable aux conditions de la participation à l electronic cash system, qu en ce qui concerne la compensation de créance: Concardis, conformément à cette convention, s acquitte auprès de son partenaire contractuel du règlement des créances exigibles qu il détient sur les clients qui, sur présentation d une carte Eurocard, mastercard ou visa, ont été acceptés par le fournisseur et autorisés par Concardis. 3

Il est frappant à la lecture de cette clause de constater combien la technicité juridique est soigneusement éludée. Que veut dire juridiquement, s acquitter du règlement d une créance? La question se pose avec d autant plus d acuité que l on compare cette clause avec une des clauses la précédant, à savoir avec le numéro 4 des conditions de participation au service des acceptations eurocardvisa (état janvier 1999) qui stipule que le partenaire contractuel cède exclusivement au système de carte EURO toutes les créances qu il détient sur ses clients dans la mesure où ces créances, en vertu de l utilisation de la carte, relèvent des directives relatives à l acceptation. Les émetteurs de cartes ont ainsi consciemment éludé l idée de cession de créance, c'est-à-dire en droit allemand, le transfert par contrat à titre onéreux de la créance par le créancier à un tiers. Or cette question est ici abordée au moyen d une approche conceptuelle peu claire. Qu est-ce donc que la promesse de paiement? La confusion est d autant plus grande, que l on peut encore trouver d autres clauses, comme celles figurant dans les conditions de participation au Service Visa des clients privés de Citibank ( état 10 /1997) et qui elles aussi traitent de façon purement déclaratoire, de la garantie de paiement. Diners club garantit le règlement de toutes les créances exigibles que le fournisseur détient sur le porteur de la carte du fait de livraisons de biens ou de la prestations de services et qui ont fait l objet d une utilisation de la carte Diners club constatée sur une preuve de charge (numéro 2) et le porteur est identifié grâce à sa signature. S agit il alors, en matière de promesse de paiement d une garantie ou d une cession de créance à titre onéreux? Le dernier espoir de trouver une indication sur la nature juridique de la promesse de paiement réside dans le régime du porte- monnaie électronique. 3. Porte monnaie électronique type Geldkarte La plupart d entre vous connaît une forme de porte monnaie électronique : les participants allemands à notre séminaire ont pour beaucoup d entre eux, une puce sur leur carte EC/Maestro. L instrument du porte-monnaie électronique type Geldkarte se base sur l'accord conclu entre les principales organisations du secteur des crédits allemand sur le «système geldkarte» entré en vigueur au 1 er octobre 1996. Ce système est dans une large mesure proche des cartes EC/Maestro. La particularité des Geldkarte par rapport aux autres cartes de régime multipartite, réside dans la nécessité de rapporter la preuve de la légitimité du porteur. Les valeurs monétaires sont stockées à l avance dans la puce électronique (pre-paid). Le porteur, pour réaliser un paiement non numéraire, insère sa carte exclusivement off-line, dans les terminaux du commerçant. En pressant la touche «valider», le client confirme l opération et la valeur stockée dans la puce magnétique est diminuée du montant figurant sur la facture par le simple fait de la communication entre la puce inscrite sur la carte du fournisseur, appelée «carte du commerçant» se trouvant dans le terminal du commerçant et celle figurant sur la carte du porteur. 4

Le commerçant reçoit en différé le paiement de l établissement émetteur de la carte pour le montant correspondant aux données enregistrées par sa carte de commerçant. Que nous enseignent à présent les conditions posées à la participation au système «Geldkarte» qui sont pertinentes dans les relations qu entretiennent les établissements émetteurs de cartes avec les fournisseurs? Selon le numéro 4 des conditions de participation au système «geldkarte», le fournisseur acquiert par la conclusion d'une opération de paiement en bonne et due forme, une garantie contre l établissement de crédit émetteur pour le montant du chiffre d affaire généré. Ainsi formulées, les conditions de la participation au réseau electronic-cash s inspirent du système electronic-cash, à ceci près que ce dernier ne fait pas référence à la garantie. Nous trouvons enfin à ce stade de l analyse un terme clair de technique juridique. Aussi pouvons-nous déterminer au vue de l ensemble des stipulations les plus usuelles aujourd hui, que ces dernières, font soit allusion à la garantie soit évitent de s appuyer sur une quelconque notion juridique. IV. De la qualification juridique de la promesse de paiement 1. Propos préliminaire : le but de la sécurisation de la promesse de paiement J en viens ainsi à mes considérations au sujet de la nature juridique de la promesse de paiement. On peut éliminer d emblée l hypothèse de sa qualification en tant que «contrat de cautionnement».en effet, la promesse n est pas donnée pour le cas où le porteur de la carte ne paierait point, mais davantage pour avoir l assurance que l établissement émetteur paie de façon régulière et suivie. En outre, la promesse de paiement à l égard du fournisseur constitue en un sens la compensation de sa renonciation à la sécurité d un paiement comptant immédiat. Le fournisseur bénéficie de la promesse pour chaque transaction de paiement en bonne et due forme, et ce également lorsque c est un tiers, par exemple un voleur de carte qui utilise cette dernière de façon, d un point de vue purement formel, parfaitement régulière. Dans ce cas le fournisseur ne dispose d aucune créance à l encontre du véritable porteur de la carte. Ce serait sans compter la fonction de «sécurisation» de la promesse de paiement délivrée par l émetteur au fournisseur pour les paiements réguliers en la forme. Celle ci est précisément indépendante de la créance détenue contre le porteur de la carte. Il s ensuit que la qualification de la promesse ne peut être envisagée que sous l angle d une obligation non accessoire. Ainsi se pose la question de savoir si la qualification de promesse de paiement doit s analyser comme une garantie ou comme une promesse de dette abstraite c'est-à-dire en droit allemand le contrat par lequel une prestation est promise. Une telle promesse rédigée par écrit fonde alors en elle-même l obligation. 2. Des limites de la qualification comme garantie et promesse de dette abstraite La notion de garantie est certes visée au paragraphe 276 alinéa 1 du BGB mais son régime n est toutefois pas réglé par la loi. Selon la jurisprudence, la garantie 5

est le contrat par lequel une personne se porte garante de la réalisation d un résultat déterminé. La garantie n intervient donc qu au cas où le résultat n est pas atteint. A la lecture du paragraphe 780du BGB, nous apprenons que la promesse de dette abstraite est le contrat par lequel, une prestation est promise de sorte que le fondement de la promesse crée une obligation autonome. Cette promesse ne se rattache par conséquent pas, comme c est le cas de la garantie, à un élément extérieur à ses circonstances propres, mais à l inverse fonde une obligation primaire et autonome. Grâce à ces connaissances de base, nous pouvons à présent apporter un meilleur éclairage sur les différentes catégories de paiement. 3. Les différentes catégories de paiement a) Les cartes de paiement EC / maestro Comme il a été dit plus en amont de mon exposé, le numéro 4 des conditions de la participation au système electronic-cash de l établissement de crédit émetteur des cartes donne une précision sur la déclaration de règlement suivant d autorisation à savoir que la créance est réglée à hauteur du montant autorisé par l electronic-cash nommé le «chiffre d affaire maximum autorisé par electonic-cash».en l espèce les deux interprétation, à savoir qualification de garantie, aussi bien que qualification en tant que promesse de dette abstraite, peuvent être soutenues. En faveur de la promesse de dette abstraite, milite l argument selon lequel l émetteur s engage à l égard du fournisseur à l exécution d une obligation de faire primaire, c'est-à-dire dans l hypothèse normale de l absence de défaut de paiement, alors que le garant n est tenu de l obligation d atteindre un résultat déterminé que dans le cas exceptionnel où le débiteur principal a failli à ses obligations. La seule condition que doit remplir le fournisseur pour bénéficier de la promesse, est d avoir exécuté son obligation de veiller à la régularité formelle de la transaction de paiement, mais son droit, ne peut, en aucun cas être subordonné à la non réalisation d un résultat du fait de la défaillance d un tiers, telle celle du propriétaire de la carte. En faveur de la qualification de promesse de dette milite encore l argument selon lequel le paiement par carte met en place une prestation immédiate assimilable en substance à une assignation telle que prévue au paragraphe 783 du BGB. L assignation en droit allemand est le titre par lequel une personne en assigne une autre d effectuer auprès d un tiers une prestation. La promesse de dette a effectivement une fonction qui s apparente à l acceptation de l assignation civile telle que prévue au 784 du BGB, laquelle comporte en son sein tous les éléments d une promesse de dette abstraite justifiée par le contrat. L acceptation d une assignation en droit allemand crée alors l obligation pour l assigné de réaliser la prestation à l égard de l assignataire. Par conséquent, la promesse de paiement, dans le cadre des paiement par carte EC/ maestro est à proprement parler une promesse abstraite de dette. b) Le porte-monnaie électronique type Geldkarte Se pose à présent la question de savoir s il est possible de transposer ce résultat à la Geldkarte. Comme il l a déjà été énoncé, le numéro 4 des conditions de 6

participation au système «Geldkarte» reprend les règles édictées par l electroniccash-system. Toutefois, par la conclusion d une transaction de paiement régulière en la forme, le fournisseur acquiert, comme il l est expressément énoncé dans le texte, une «garantie» contre l établissement de crédit émetteur à hauteur du chiffre d affaire généré. Du fait de cette référence spécifique à la garantie, la promesse de paiement sera également, en partie considérée comme telle. Il faut pourtant constater que la promesse de paiement dans le cadre des paiements par porte-monnaie électronique a exactement la même fonction que dans le cadre des paiements par cartes EC/ Maestro. Le fournisseur doit, sans être soumis à davantage d obligations que celle de veiller à la régularité formelle de l opération de paiement, et sans qu il soit exigé de constater préalablement la défaillance de paiement du débiteur principal en la personne du porteur de la carte, bénéficier d un droit primaire au paiement. La promesse de paiement, a également au sein des Geldkarten, une fonction comparable à l acceptation d une assignation civile. Qu est-ce qui doit alors l emporter? La fonction de la promesse ou les termes de l accord intervenu entre les parties? La réponse est claire : le principe de l autonomie de la volonté permet de fixer librement les droits et obligations du contrat. Mais il est désormais établi que la façon dont les parties qualifient les droits et obligations naissant du contrat n est ici pas pertinente car une promesse de dettes ne saurait devenir une garantie au prétexte que les parties l ont ainsi désignée. Seule la fonction des stipulations des parties doit gouverner la détermination de la qualification juridique. Il est nécessaire de poser des limites à l application du principe d autonomie de la volonté, en particulier pour permettre l intervention de règles impératives déterminées. De la même façon qu un consommateur ne perd pas ses droits en ayant convenu avec le professionnel que ce dernier agissait comme personne privée et parfaitement profane, la promesse de paiement en matière de porte monnaie électronicque demeure nonobstant toute stipulation contraire, une promesse de dette abstraite. c) La carte de crédit universelle J en arrive pour finir, à la carte de crédit universelle. Nous nous souvenons que l ensemble des stipulations convenues par l émetteur de la carte pour les cartes de crédit universelles, ne parlait pas à l origine de promesse de paiement mais de cession de créance à titre onéreux mais que cette formulation a depuis lors, disparu. Le Bundesgerichtshof, c'est-à-dire la Cour fédérale de Justice allemande après avoir approuvé en 1990 la qualification de cession de créance à titre onéreux, a opéré un revirement de jurisprudence en 2001 en rejetant cette qualification. Et ce du fait que la qualification en tant que cession de créance aboutissait à un résultat inéquitable. En effet, les conditions générales de l émetteur ne comprenaient que les créances nées des opérations de paiement réalisées par le propriétaire effectif de la carte et non pas celles dues à l usage abusif de la carte par un tiers. Par conséquent l émetteur disposait d un recours en vue du remboursement de la créance réglée au fournisseur en invoquant que le porteur n étant pas le porteur légitime, la créance était inexistante et que par conséquent, les conditions de son paiement n étaient pas réunies. C est la raison 7

pour laquelle la Cour fédérale de Justice allemande a depuis lors établi que la relation contractuelle entre l émetteur et le fournisseur ne devait pas s analyser comme une cession de créance, celle-ci étant inexistante, mais que cet usage contractuel devait être qualifié de promesse de dettes conformément au paragraphe 780 du BGB. Pour les cartes de crédit universelles, il est donc de jurisprudence constante que la promesse de paiement est une promesse de dette abstraite. Cette requalification vise naturellement les conditions générales de ventes qui font référence expressément à des «cessions de créance». Mais là encore, ce qui a été dit au sujet des porte-monnaie électroniques est ici également parfaitement valable, on peut donc rappeler que la véritable qualification juridique des stipulations du contrat n est pas liée par la qualification que les parties en ont donnée. V. Synthèse Me voilà déjà au terme de mon étude sur la nature juridique de la promesse de paiement donnée par les émetteurs de carte aux fournisseurs de biens et services. Aussi bien en matière de carte EC/ maestro que de porte-monnaie électronique que de carte de crédit universelles, il s agit d une promesse abstraite de dette au sens du paragraphe 780 du BGB. Ceci résulte du fait que la promesse de paiement remplit au sein de ces structures parallèles les mêmes fonctions et que seule la fonction d une stipulation contractuelle peut gouverner à la détermination de sa qualification juridique. Merci de votre attention. 8