MYCOLOGIE MEDICALE - GENERALITES. Pr C. GUIGUEN. Laboratoire de parasitologie et zoologie appliquée UFR des sciences médicales Rennes



Documents pareils
Itraconazole Sandoz 100 mg gélules Itraconazole

LES ONYCHOPATHIES. Mohamed Denguezli Service de Dermatologie C.H.U SOUSSE

Les Infections Associées aux Soins

Apport de la biologie moléculaire au diagnostic des parasitoses

Dermatophytoses ou Dermatophyties

Item 288 : Troubles des phanères : Onyxis

Transfusions sanguines, greffes et transplantations

dossier de presse nouvelle activité au CHU de Tours p a r t e n a r i a t T o u r s - P o i t i e r s - O r l é a n s

جامعة أبو بكر بلقا يد كلية الطب د. ب. بن زرجب تلمسان

BIOPSIE PAR ASPIRATION Sous stéréotaxie

L INSUFFISANCE CARDIAQUE

Dr E. CHEVRET UE Aperçu général sur l architecture et les fonctions cellulaires

GRANULOMATOSE SEPTIQUE CHRONIQUE

Identification des champignons d importance médicale Stage de laboratoire

Lymphome non hodgkinien

1 ère manche Questions fermées

La lutte contre la tuberculose est régie par l arrêté royal du 17 octobre 2002.

POURQUOI L HYGIENE HYGIENE = PROPRETE HYGIENE = PREVENTION DES INFECTIONS COMMUNAUTAIRES ET DES INFECTIONS ASSOCIEES AUX SOINS

Cellules procaryotes Service histologie Pr.k.mebarek

SURVEILLANCE DES SALARIES MANIPULANT DES DENREES ALIMENTAIRES

MYCOTOXINES : changements règlementaires et analytiques

Secteur Protégé d Hématologie

DERMATOLOGIE ACNE VERRUES CUTANEES - MYCOSES

Infiltrats pulmonaires chez l immunodéprimé. Stanislas FAGUER DESC Réanimation médicale septembre 2009

Le don de moelle osseuse

Item 127 : Transplantation d'organes

HEPATITES VIRALES 22/09/09. Infectieux. Mme Daumas

Unité d enseignement 4 : Perception/système nerveux/revêtement cutané

Maladie de Hodgkin ou lymphome de Hodgkin

Leucémies de l enfant et de l adolescent

Le VIH et votre foie

Il est bien établi que le réseau d eau hospitalier peut

des banques pour la recherche

Référentiel Officine

QUESTIONS FREQUEMMENT POSEES AUX EXPERTS DU SERVICE TELEPHONE VERT SIDA ( ) ISTITUTO SUPERIORE DI SANITA

Prophylaxie infectieuse après exposition professionnelle

Tableau récapitulatif : composition nutritionnelle de la spiruline

Infection à CMV et allogreffe de cellules souches hématopoïétiques : Expérience du Centre National de Greffe de Moelle Osseuse, Tunis.

DÉFICITS IMMUNITAIRE COMMUN VARIABLE

Le psoriasis est une maladie qui touche environ 2 à 3 % de la population et qui se

Comment se déroule le prélèvement? Il existe 2 modes de prélèvements des cellules souches de la moelle osseuse:

Les Arbres décisionnels

Les parasites externes

gale - Brochure d information -

Nous avons tous un don qui peut sauver une vie. D e v e n i r. donneur de moelle. osseuse

RÉSUMÉ. Mots-clés: blé variété microflore des semences, combat

SOINS DE PRATIQUE COURANTE. Prélèvement aseptique cutané ou de sécrétions muqueuses, prélèvement de selles

INFORMATIONS AUX PATIENTS ATTEINTS DE LEUCEMIE AIGUE MYELOBLASTIQUE

Moisissures: un problème de qualité de l air intérieur (QAI) Laurent Groux, Ph.D. Chimiste Beaupré, le 9 mai 2014

LA PERITONITE INFECTIEUSE FELINE

BIOPSIE de MOELLE OSSEUSE

LIGNES DIRECTRICES CLINIQUES TOUT AU LONG DU CONTINUUM DE SOINS : Objectif de ce chapitre. 6.1 Introduction 86

Sont considérées comme prestations qui requièrent la qualification de médecin spécialiste en dermato-vénéréologie (E) :

LES PATIENTS qui consultent pour un

Le Livre des Infections Sexuellement Transmissibles

Développement d un système de monitoring du bien-être des veaux en élevage

Conduite à tenir devant une morsure de chien (213b) Professeur Jacques LEBEAU Novembre 2003 (Mise à jour mars 2005)

STRUCTURE ET FONCTION DES PLURICELLULAIRES

Dracunculose Association Française des Enseignants de Parasitologie et Mycologie (ANOFEL)

PARTIE II : RISQUE INFECTIEUX ET PROTECTION DE L ORGANISME. Chapitre 1 : L Homme confronté aux microbes de son environnement

AMAMI Anaïs 3 C LORDEL Maryne. Les dons de cellules & de tissus.


LES DÉFICITS IMMUNITAIRES COMBINÉS SÉVÈRES

G U I D E P A T I E N T - A F F E C T I O N D E L O N G U E D U R É E. La prise en charge du cancer du foie

L EXPÉRIENCE POUR L AUTONOMIE

Don de moelle osseuse. pour. la vie. Agence relevant du ministère de la santé. Agence relevant du ministère de la santé

Guide de Mobilisation. de cellules souches pour mon. Autogreffe AVEC LE SOUTIEN DE. Carnet d informations et de suivi pour le patient et sa famille

Guide à l intention des patients sur les thérapies à base de cellules souches

Le don de moelle osseuse :

Vadémécum LA GREFFE D ORGANES. en 7 fiches pratiques. Version

Hépatite B. Le virus Structure et caractéristiques 07/02/2013

Parasites externes du chat et du chien

Les Maladies Tropicales, la Société de Pathologie Exotique. et l Institut Pasteur

Unité d onco-hématologie pédiatrique. Procédure de recueil de consentements du donneur. Codification du document : PO Rédacteur : Dr V Gandemer

4. Comment la maladie est-elle transmise à l homme? 2. Les composantes des soins de santé primaires : 1. Qu est-ce que l Initiative de Bamako (IB)?

TRANSFORMEZ VOTRE IMPÔT EN DON

Accrédité par l AABB.

ARRÊTÉ du. Projet d arrêté fixant le programme d'enseignement de santé et social en classe de seconde générale et technologique

Registre de donneurs vivants jumelés par échange de bénéficiaires. Qu est-ce qu une greffe de rein par échange de bénéficiaires?

ÉDUCATION Côtes d Armor. Collèges publics. Charte de la restauration collective DIRECTION JEUNESSE PATRIMOINE IMMOBILIER

Recommandations régionales Prise en charge des carcinomes cutanés

PUIS-JE DONNER UN REIN?

MONOGRAPHIE DE PRODUIT

Fièvre chez un patient immunodéprimé.

Innovations thérapeutiques en transplantation

Le but de la radioprotection est d empêcher ou de réduire les LES PRINCIPES DE LA RADIOPROTECTION

Chapitre 4 : cohabiter avec les micro-organismes. Contrat-élève 3 ème

les deux premières années du Bachelor of Science en sciences pharmaceutiques

ASA-Advanced Solutions Accelerator. Solution pour la gestion des données des laboratoires et des plateformes de service

FICHE D INFORMATION AVANT UNE TRANSFUSION

Principales causes de décès selon le groupe d âge et plus

GUIDE PRATIQUE N 1 HERPES ASSOCIATION HERPES. Agissons contre l herpès

La version électronique fait foi

Infestation par Dipylidium caninum,

Les parasites externes du chien

La Dysplasie Ventriculaire Droite Arythmogène

Tableau pour la conservation et le transport des spécimens à l externe

Dons, prélèvements et greffes

Des déficiences présentes

Végétaux Exemples d individus

Transcription:

MYCOLOGIE MEDICALE - GENERALITES Pr C. GUIGUEN Laboratoire de parasitologie et zoologie appliquée UFR des sciences médicales Rennes

MYCOLOGIE d HIER et d AUJOURD HUI HISTORIQUE (1) - Antiquité : rôle maléfique - Epoque romaine : intérêt culinaire - XVIème siècle : début de la mycologie microscopique - 1730 Micheli : étude des microorganites (spores) - XIXè siècle : début de la mycologie moderne travaux de La Fries, de Corda, Saccardo - 1850 du Barry dénombre 900 espèces

MYCOLOGIE d HIER et d AUJOURD HUI HISTORIQUE (2) - 1900 Sabouraud : milieu de culture - 1910 Villemin : étude des différentes spores fongiques - Milieu XXè siècle Masson et Hugues : classification des champignons sur la base des formes de spores - 1970 Baron, Ellis : Classification sur mode de formation des spores - 1983 Ainswork er Bisby s : dictionnary of the fungi - Dernière décennie : ultrastructure, biologie moléculaire, spectrométrie de masse, contribuent à la taxonomie

Grande variabilité macroscopique et microscopique D. Chabasse 4

Définition Champignons microscopiques: organismes nucléés, eucaryotes, dépourvus de chlorophylle et possédant une paroi rigide, constituée, entre autres, de chitine et de glucane. Ils se développent sous forme filament ou levure et dépendent de la fourniture carbone par le milieu extérieur ou un hôte. Ils se reproduisent de façon sexuée ou asexuée engendrant des millions de spores et donc capacité de dissémination considérable Forme Levure filamenteuse

Position systématique des Champignons Classification de Wittaker Parenté avec les végétaux, les animaux et les protistes. Classification en perpétuelle évolution Pneumocystis jiroveci, microsporidies, autrefois classés dans les parasites appartiennent maintenant aux champignons Environ 150 000 espèces de champignons microscopiques, plus de 3 700 genres (nombreuses espèces découvertes chaque année). Environ 450 espèces éventuellement pathogènes pour l'homme 200 espèces mycoses profondes 70 espèces mycoses sous-cutanées 150 espèces mycoses de la peau, des phanères, des muqueuses De nouvelles espèces pathogènes sont régulièrement identifiées.

FACTEURS FAVORISANTS Avancées médico-chirurgicales : - antibiotiques - corticoïdes - immunosuppresseurs - greffe, Prolongement de la vie Essor du SIDA une multiplication des mycoses

INFECTIONS FONGIQUES NOSOCOMIALES 1980 à 1990 : 2 à 4 % des hospitalisés 1990 à 2000 : 4 à 6 % des hospitalisés 2000 à 2010 : 5 à 7 % des hospitalisés candidoses : 78,3 % de ces infections 59,7 % C. albicans 18,6 % autres espèces de Candida Aspergilloses : 1,3 %

Epidémiologie nationale Epidémiologie locale

CHAMPIGNONS LEVURIFORMES Genres : - Candida - Cryptococcus - Malassezia - Trichosporon - Rhodotorula -Saccharomyces

Pathogénicité Certains champignons, les dermatophytes, sont des pathogènes obligatoires. Le plus souvent, champignons profitent modifications du terrain, locales ou générales, pour s'implanter. On peut également observer des réactions allergiques, asthme (Aspergillus fumigatus), alvéolite allergique extrinsèque (Aspergillus, Penicillium), eczématides à distance d'un foyer fongique (dermatophytes).

FACTEURS FAVORISANTS DES MYCOSES (1) - Locaux : rupture de la barrière cutanéo-muqueuse - Macération - Cathéter-sonde - Traumatisme - Brûlure - Radiothérapie - Toxicomanie par voire IV - Interventions chirurgicales (digestive, cardiaque) - Cavité préformée - Physiologiques : - Nouveau-né et surtout prématuré - Vieillard - Grossesse - Oestroprogestatif - Endocrinien : - Diabète

FACTEURS FAVORISANTS DES MYCOSES (2) - Déficits immunitaires acquis : SIDA - Déficits immunitaires iatrogènes : Chimiothérapie aplasiante, greffes d organes et de moelle osseuse Antibiothérapie Corticothérapie Traitement immunosuppresseur

Classification des mycoses Les mycoses peuvent être classées : -selon leur localisation : dermatomycoses, otomycoses, onychomycoses -selon le champignon en cause (candidose, aspergillose, cryptococcose) qui peut atteindre différents tissus (exemple Aspergillus fumigatus) -Quelques mycoses portent des noms particuliers : teignes, pied de Madura, muguet, pied d athlète,.

RESERVOIRS DE CHAMPIGNONS - Sol (champignons géophiles) - Animaux (champignons zoophiles) - Homme (champignons anthropophiles)

EPIDEMIOLOGIE DES MYCOSES Homme environnement Sources de contamination - inoculation par écharde (sporotrichose, chromomycose, maduromycose, ) - inhalation des poussières (histoplasmose, coccidioïdomycose, cryptococcose, aspergillose, ) Contact inter-humain - candidose (mère-enfant, MST) - teignes scolaires Homme-animal - dermatophyties

AIR ENVIRONNANT ENVIRONNEMENT Homme Champignons filamenteux Levures ANIMAUX EAU SOL

ROLE DU BIOLOGISTE 1. Prélever ou s assurer de la bonne qualité du prélèvement 2. Identifier avec précision et rapidité l agent fongique en cause 3. Orienter le choix thérapeutique du clinicien 4. Suivre l évolution de l infection ou le contrôle du traitement 5. Rechercher l origine d une épidémie fongique nosocomiale

PRELEVEMENTS : COMMENT? Récipients stériles et acheminement rapide au laboratoire Mycoses superficielles - pityriasis versicolor : cellophane adhésive - lésion suintante : écouvillon - lésion ulcérée ou nécrotique : écouvillon ou biopsie - lésion squameuse sèche : en périphérie de la lésion - ongle : à la limite ongle malade (ongle sain) - cheveux : à la pince à épiler, au centre de la lésion Mycoses profondes - liquides : LCR, sang, urines, ascites, - biopsies d organes

ARGUMENTS EN FAVEUR DE LA RESPONSABILITE D UN CHAMPIGNON OPPORTUNISTE DANS UNE LESION Facteurs favorisants - locaux - généraux Examen direct positif (ou histologie positive) Une seule espèce de champignon est isolée (sur plusieurs points d ensemencement) La répétition des prélèvements montre toujours le même champignon à l isolement.

OUTILS USUELS DE DIAGNOSTIC - Mise en évidence du champignon dans les lésions examen direct histologie - Isolement du champignon culture inoculation à l animal - Identification du champignon critères macroscopiques critères microscopiques critères physiologiques - Réactions sérologiques anticorps circulants antigènes circulants

OUTILS DE DIAGNOSTIC - Techniques phénotypiques (Sérotypage, Biotypage, Morphotypage, Résistotypage, Antifongigramme) - Marqueurs moléculaires et génétiques Immuno empreinte Electrophorèse en gel de polyacrylamide (PAGE) Electrophorèse en gel des isoenzymes Caryotypage électrophorétique (champ pulsé) Analyse de l ADN génomique (RFLP, RAPD, )

L AVENIR. Identification par spectrométrie de masse Quelques minutes pour l identification des levures Plus complexe pour les champignons filamenteux

ANTIFONGIQUES (1) 1903 : iodure de potassium 1950 : polyène 1950 : nystatine 1955 : amphotéricine B 1958 : griséofulvine 1963 : 5-fluorocytosine 1969 : imidazolés 1969 : clotrimazole 1969 : miconazole 1969 : éconazole 1977 : kétoconazole

ANTIFONGIQUES (2) 1985 : triazolés 1987 : fluconazole 1990 : allylamine : terbinafine 1990 : morpholine : amorolfine 1990 : vecteurs lipidiques et ampho B 1993 : itraconazole 2000 : Voriconazole 2003 : Pozaconasole 2005 : Caspofungine 2009 : Micafongine

ANTIFONGIQUES A L ETUDE Triazolés Saperconazole Altéconazole Ravuconazole BMS 207 147 Peptides et lipopeptides Nikkomycines Echinocandines Ly 303 366 MK 0991 Sordarines Vecteurs lipidiques et polyènes Cochléate d amphotéricine B Nystatine lipidique

CONCLUSION (1) Protocole thérapeutique Guérison ou prolongement de la vie Augmentation des infections opportunistes Extension du spectre clinique Emergence de nouvelles espèces

Espoirs CONCLUSION (2) Diagnostic plus précoce Sérologie (Ag circulants) Biologie moléculaire Spectrométrie de masse Adaptation des thérapeutiques antifongiques guidée par antifongigramme, CMI, dosage sérique Nouveaux antifongiques Triazolés Allylamine Vecteur lipidique

Mesures préventives CONCLUSION (3) - Locaux Utilisation d un flux laminaire Maintenance des circuits de climatisation Traitement antifongique des peintures, faux plafonds - Malades Décontamination fongique digestive systématique Surveillance de la nourriture (épices, fruits, ) Ablation des cathéters le plus vite possible Education sanitaire (fleurs, plantes, )

Une excellente coopération entre cliniciens et biologistes est le meilleur atout pour prévenir, diagnostiquer et traiter une affection fongique. CONCLUSION